National Legislation on Labour and Social Rights
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La commission prend note du rapport du gouvernement pour la période finissant le 30 juin 2008. Elle prend également note des observations formulées par la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT), datée du 31 août 2007, et de la réponse du gouvernement à ces commentaires datée du 21 février 2008. La commission relève que la CUT a par ailleurs communiqué, le 28 janvier 2008, des commentaires sous forme d’un rapport intitulé «Les droits des travailleurs et la liberté syndicale en Colombie – Evaluation et propositions pour la mise en œuvre de l’accord tripartite», formulés en son nom propre ainsi qu’au nom de la Confédération générale des travailleurs démocratiques (CGTD), de la Confédération des travailleurs de Colombie (CTC) et de la Confédération des retraités de Colombie (CPC). La commission note que le gouvernement a fait parvenir au BIT, le 9 juin 2008, des réponses aux questions soulevées dans ce rapport, et que des commentaires communiqués par la Confédération générale du travail (CGT) portant essentiellement sur l’insuffisance des effectifs de l’inspection du travail ont été transmis au gouvernement le 19 septembre 2008.
Article 6, paragraphe 3, de la convention. Coopératives de travail associé (CTA), sous-traitance, précarisation des conditions de travail et vide juridique. Se référant à ses commentaires sous la convention no 81 au sujet du recours généralisé à la relation de travail dans le cadre des CTA, la commission relève que les syndicats appellent en particulier l’attention sur cette pratique dans le secteur de la canne à sucre et de la floriculture. Ils soulignent que le sucre est devenu l’un des produits agricoles d’exportation le plus important du pays et que la Colombie figure parmi les dix plus grands pays exportateurs de sucre du monde. Environ 16 000 travailleurs du secteur sont des coupeurs de canne à sucre, métier considéré comme le plus exigeant physiquement et le plus mal payé dans le processus de production de sucre. Quatre-vingt-dix pour cent de ces travailleurs sont recrutés à travers les CTA et ne bénéficient même pas d’un salaire minimum. Les syndicats observent que l’utilisation massive de main-d’œuvre dans les conditions imposées par les CTA génère des profits plus élevés pour les raffineries de sucre tout en déniant aux travailleurs le droit à un salaire décent et à la représentation syndicale. La floriculture, autre activité destinée principalement à l’exportation de fleurs fraîches (la Colombie est le premier fournisseur en fleurs des Etats-Unis), utilise une main-d’œuvre nombreuse, constituée majoritairement de femmes chefs de famille, d’un niveau d’éducation peu élevé, pour lesquelles les opportunités d’emploi dans d’autres secteurs sont quasiment nulles. Selon le rapport des organisations syndicales, un pourcentage important des travailleurs des plantations de canne à sucre et des exploitations floricoles est recruté par l’intermédiaire d’agences temporaires d’emploi, de CTA ou d’autres sous-traitants.
Des informations disponibles au BIT font état d’une grève déclenchée en septembre 2008 par quelque 18 000 coupeurs de canne à sucre du département du Valle del Cauca, recrutés par l’intermédiaire de CTA. Les grévistes revendiquaient la cessation des «pseudo-coopératives de travail associé», le recrutement direct, la stabilité dans l’emploi, des améliorations salariales, l’affiliation à la sécurité sociale, le droit à des prestations sociales, des aides à l’éducation et au logement, le contrôle effectif du pesage de canne coupée, etc. Ils protestaient contre un système qui les oblige à supporter non seulement les frais de leurs cotisations à la sécurité sociale, mais également le coût de leur sécurité au travail, de l’acquisition de leurs outils de travail (machettes) et des équipements de protection, tels que les gants, les protections pour les chevilles, les chaussures en cuir, ainsi que les vêtements de travail. Faute de services efficaces de santé et de programmes de prévention des risques professionnels, les cas de paralysie partielle ou totale, de lésions des membres ou de la colonne vertébrale, ainsi que d’arthrose, d’hernies discales, et d’autres infections dues aux eaux contaminées et à l’utilisation de pesticides prolifèrent au sein de cette main-d’œuvre, dont la durée du travail peut atteindre soixante-dix heures par semaine, pour un salaire mensuel équivalant à environ 230 dollars des Etats-Unis.
Se référant à ses commentaires sous la convention no 81, la commission appelle tout particulièrement l’attention du gouvernement sur le paragraphe 133 de son étude d’ensemble sur l’inspection du travail de 2006, dans lequel elle souligne le sens et la portée du paragraphe 1 c) de l’article 6 de la convention, aux termes duquel les inspecteurs du travail doivent porter à la connaissance de l’autorité compétente les déficiences ou les abus qui ne sont pas spécifiquement couverts par les dispositions légales existantes. La commission estime que la détérioration des conditions de travail d’un grand nombre de travailleurs, dont une grande partie est constituée de femmes, justifierait amplement que les inspecteurs du travail soient chargés d’une mission d’enquête sur la réalité des relations de travail existant entre les donneurs d’ordre ou les destinataires des biens et services produits par les CTA et les travailleurs des CTA. Les éventuels abus et déficiences préjudiciables à ces travailleurs pourraient ainsi être identifiés, ce qui pourrait permettre d’améliorer la législation existante sur les conditions de travail et la protection des travailleurs dans l’exercice de leur profession. La commission encourage vivement le gouvernement à veiller à ce qu’une telle mission soit rapidement confiée aux inspecteurs du travail dans l’agriculture, afin de permettre une avancée du droit adaptée aux nouvelles réalités du monde du travail que sont les rapports de subordination des CTA à l’égard des entreprises pour lesquelles elles produisent des biens et services en dehors de tout contrat de travail. Le gouvernement est prié de communiquer des informations pertinentes, accompagnées d’une copie de tout texte donnant effet à l’article 6, paragraphe 1 c).
Insuffisance des structures, des moyens et de la logistique du système d’inspection dans l’agriculture. Dans ses commentaires de 2007, la CUT signalait que, bien que le système d’inspection soit le même pour toutes les branches de l’économie, certains bureaux, en raison de leur situation géographique, s’occupent essentiellement du secteur agricole, leur compétence s’étendant jusqu’à dix communes, dont d’immenses territoires aux voies de communication difficiles. L’inspection du travail dans ces vastes zones à vocation agricole et/ou d’élevage ne serait en fait d’aucune efficacité. Selon l’organisation, l’absence d’un système spécifique d’inspection pour le secteur agricole, aggravée par l’insuffisance des moyens, empêche les inspecteurs de visiter les entreprises agricoles aussi souvent et aussi soigneusement que nécessaire pour assurer l’application effective des dispositions légales visées par la convention.
Selon les informations communiquées par le gouvernement dans son rapport ainsi que celles publiées sur le site Internet du ministère de la Protection sociale, plusieurs mesures visant au renforcement du système d’inspection du travail sont prévues, d’une part, avec l’assistance du BIT et, d’autre part, dans le cadre du programme USAID-Midas («Plus d’investissements pour le développement alternatif durable»). La commission invite le gouvernement à s’en rapporter à ses commentaires sous la convention no 81 pour ce qui est des questions suivantes: renforcement des effectifs et des qualifications du personnel d’inspection et statut des agents d’inspection (articles 14 et 9, paragraphe 3, de la présente convention); conditions matérielles de travail et facilités de transport des inspecteurs du travail (articles 15 et 16, paragraphe 1 c) iii)); fonctions accessoires confiées aux inspecteurs du travail (article 6, paragraphe 3); sanctions appropriées et effectivement appliquées (article 24); principe de confidentialité de la source des plaintes (article 20 c)) et rapport annuel d’inspection (articles 26 et 27).
Article 9, paragraphe 3. Formation spécifique des inspecteurs du travail exerçant dans l’agriculture. En ce qui concerne l’application de la présente convention, les syndicats déplorent l’absence d’inspecteurs du travail spécialisés dans l’agriculture. Notant la conviction du gouvernement quant à la nécessité de renforcer le système d’inspection du travail par la fourniture de formations spécifiques aux inspecteurs, la commission le prie d’indiquer les mesures prises afin d’assurer aux inspecteurs du travail exerçant leurs fonctions dans les entreprises agricoles une formation initiale, ainsi qu’un perfectionnement en cours d’emploi qui soient adéquats et tiennent compte de l’évolution de la technologie et des méthodes de travail (risques d’accidents et de pathologies spécifiques, inhérents notamment aux machines et outils utilisés, ainsi qu’à la manipulation de produits et de substances chimiques).
Article 17. Association des services d’inspection du travail au contrôle préventif dans les entreprises agricoles. En réponse aux commentaires antérieurs de la commission au sujet des mesures prises pour associer l’inspection du travail au contrôle préventif des nouvelles installations, des nouvelles substances et des nouveaux procédés de manipulation ou de transformation des produits qui seraient susceptibles de constituer une menace à la santé ou à la sécurité, le gouvernement indique que cette question relève de la compétence conjointe des institutions chargées de la santé au travail, des comités départementaux et locaux, des comités paritaires d’entreprise de santé au travail, des vigies et des compagnies d’assurances autorisées à exercer dans le domaine de l’assurance contre les risques professionnels, ces organes tenant dûment compte du niveau élevé de risques dans les activités agricoles. La commission relève que l’inspection du travail ne paraît pas être associée d’une quelconque manière à un tel contrôle. Elle saurait gré au gouvernement d’indiquer les dispositions légales relatives à cette matière et de donner des exemples pratiques de leur application dans les entreprises agricoles.
En outre, la commission adresse directement au gouvernement une demande sur d’autres points.