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- 140. Le présent cas a déjà été examiné par le Comité à sa 33ème session, tenue au mois de février 1963, et a fait l'objet d'un rapport intérimaire qui figure aux paragraphes 110 à 124 du soixante-neuvième rapport du Comité; ce rapport a été adopté par le Conseil d'administration lors de sa 154ème session (mars 1963). A la suite de l'examen auquel le Comité avait alors procédé, il avait abouti à des conclusions définitives sur l'ensemble du cas, à l'exception d'un point particulier sur lequel il avait estimé nécessaire de solliciter du gouvernement des informations complémentaires. Saisi à nouveau du cas à sa 35ème session, en novembre 1963, le Comité a soumis au Conseil d'administration un deuxième rapport intérimaire, contenu aux paragraphes 145 à 157 du soixante-douzième rapport du Comité. Tel qu'il a été approuvé par le Conseil d'administration à sa 157ème session (novembre 1963), ce rapport contenait les conclusions définitives du Comité sur l'un des aspects de l'allégation restée en suspens, alors que, sur certains autres points, il demandait une fois encore au gouvernement des précisions supplémentaires.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 141. Les plaignants alléguaient notamment que le 1er septembre 1962, l'administration du K.T.E.L. (Caisse commune des recettes des autobus) - organisme de droit public qui groupe à la fois, dans les transports urbains, les employeurs et le personnel des autobus - aurait obtenu de la commission de recrutement, chargée, en vertu de l'article 17 du décret législatif ne 3990, de 1959, de l'embauche, du maintien en fonctions et de la révocation des chauffeurs et des receveurs d'autobus, la révocation de quarante-sept receveurs, pour la plupart dirigeants ou cadres de l'Association des receveurs d'autobus du Pirée, sous le prétexte d'« activités antinationales » et en application de la loi obligatoire no 516, de 1948.
- 142. Les plaignants précisaient que ces licenciements seraient intervenus à la suite de quatre arrêts du travail de deux heures chacun réalisés sous la direction de l'Association des receveurs d'autobus du Pirée les 17 et 27 août 1962 pour protester contre la réduction des suppléments de salaire accordés pour les enfants à charge et contre le non-paiement des salaires dus aux travailleurs par l'administration du K.T.E.L.
- 143. Lorsqu'il avait examiné cet aspect du cas à sa session de février 1963, le Comité avait constaté, d'une part, que sur les quarante-sept personnes qui auraient été licenciées, vingt-huit étaient nommément désignées par les plaignants; d'autre part, que parmi ces vingt-huit personnes, dix-neuf, dont le titre et la fonction étaient précisés, se trouvaient être des dirigeants syndicaux.
- 144. Dans ces conditions, le Comité, notant que, dans sa réponse, le gouvernement s'abstenait de présenter aucune observation au sujet des cas précis de licenciement mentionnés par les plaignants, avait recommandé au Conseil d'administration de demander au gouvernement de bien vouloir indiquer si les personnes citées dans la plainte avaient bien été révoquées et, dans l'affirmative, de préciser les motifs exacts de la mesure ainsi prise contre elles.
- 145. Saisi à nouveau du cas à sa session du mois de novembre 1963, le Comité, à la lumière des explications fournies par le gouvernement, a cru pouvoir disposer du cas de l'une des dix-neuf personnes mentionnées par les plaignants, ces explications ayant établi que le non-reclassement de l'intéressé au sein du K.T.E.L était motivé par des raisons étrangères aux activités syndicales qui auraient pu être déployées par lui.
- 146. En ce qui concerne par contre les dix-huit autres dirigeants syndicaux dont il était question dans la plainte, le Comité a constaté que le gouvernement, dans les observations présentées par lui le 24 août 1963, se bornait à déclarer que leur reclassement « n'a pas eu lieu vu que ceux-ci n'ont pas rempli les qualités prévues par le décret législatif » (honnêteté, discipline, diligence, attitude envers la clientèle).
- 147. Le Comité a rappelé que, dans plusieurs cas antérieurs, il avait souligné qu'un des principes fondamentaux de la liberté syndicale veut que les travailleurs bénéficient d'une protection adéquate contre tous les actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi - licenciement, transfert et autres actes préjudiciables - et que cette protection est particulièrement souhaitable en ce qui concerne les délégués syndicaux, étant donné que, pour pouvoir remplir leurs fonctions syndicales en pleine indépendante, ils doivent avoir la garantie qu'ils ne subiront pas de préjudice en raison du mandat syndical qu'ils détiennent . Le Comité précisait qu'une des manières d'assurer cette protection était de prévoir que ces délégués ne pourraient pas être licenciés ni dans l'exercice de leurs fonctions ni pendant un laps de temps suivant la fin de leur mandat, sauf évidemment en cas de faute grave . Le Comité avait en outre estimé que la garantie de semblable protection dans le cas des dirigeants syndicaux est en outre nécessaire pour assurer le respect du principe fondamental selon lequel les organisations de travailleurs ont le droit d'élire librement leurs représentants.
- 148. Etant donné, d'une part, l'importance qu'il convient d'attacher aux principes rappelés ci-dessus, et, d'autre part, tenant compte du fait que les licenciements (ou non-reclassements) incriminés paraissaient être intervenus après qu'eurent eu lieu des arrêts du travail et avoir visé les dirigeants de l'organisation qui les avait déclenchés, le Comité, constatant que les observations du gouvernement ne répondaient pas à la question qui lui avait été posée par le Conseil d'administration, laquelle visait à obtenir « les motifs exacts » des mesures prises contre les intéressés, a recommandé au Conseil d'administration d'insister une fois encore auprès du gouvernement pour que celui-ci veuille bien fournir, avec toute la précision nécessaire, les informations sollicitées de lui.
- 149. Cette recommandation ayant été approuvée par le Conseil d'administration, la demande d'information complémentaire ci-dessus a été portée à la connaissance du gouvernement par une lettre du Directeur général en date du 19 novembre 1963. Le gouvernement a répondu par une communication en date du 20 juillet 1964.
- 150. Il ressort tout d'abord de la réponse du gouvernement qu'au moment où a été prise la mesure incriminée, seules trois des dix-huit personnes mises en cause occupaient des fonctions de direction au sein de l'Association des receveurs d'autobus du Pirée, les autres ayant cessé d'avoir cette qualité avant ladite mesure ou l'ayant acquise après.
- 151. Le gouvernement déclare ensuite que l'enquête à laquelle il a procédé révèle qu'aucune des personnes ayant fait l'objet d'un non-reclassement n'a été frappée en raison de son appartenance à un syndicat ou de ses activités syndicales. Les motifs qui sont à la base de la décision prise sont, selon les cas, les suivants: malhonnêteté, manque d'assiduité au travail, fautes disciplinaires; dans un cas, un niveau insuffisant d'éducation a été invoqué. Tous ces motifs sont prévus par l'article 17, paragraphe 3, du décret législatif no 3990, de 1959, ou par l'article 3, paragraphe 5, du décret législatif no 25/6/1956 portant règlement du personnel du K.T.E.L.
- 152. Le gouvernement poursuit en indiquant qu'aucun des intéressés n'a, comme il aurait pu le faire s'il se jugeait lésé, invoqué devant les tribunaux la garantie prévue par la loi no 1803, de 1951, dont l'article 1er dispose que le contrat de travail des salariés ayant la qualité de dirigeant syndical ne peut être dénoncé pendant la durée de leurs fonctions et au cours de l'année qui suit la cessation de celles-ci, sauf pour une raison grave et conformément à une procédure prévue par la loi. Il déclare par contre que cinq des personnes en cause ont fait un recours devant le Conseil d'Etat visant à faire annuler la décision de non-reclassement prise à leur encontre et que l'affaire se trouve toujours en instance.
- 153. Il ressort de la réponse du gouvernement que treize des dix-huit personnes dont il est question n'ont pas fait usage des voies de recours qui leur étaient ouvertes. Lorsque, dans le passé, le Comité s'est trouvé en présence d'une telle situation, il a estimé qu'étant donné la nature même de ses responsabilités, il ne saurait se considérer comme lié par les règles qui s'appliquent par exemple aux tribunaux internationaux d'arbitrage et selon lesquelles les procédures nationales de recours doivent être épuisées. Toutefois, il a considéré également, lorsqu'il examine un cas selon ses mérites, devoir tenir compte du fait que les possibilités offertes par la procédure nationale de recours devant un tribunal indépendant offrant toutes les garanties nécessaires n'ont pas été pleinement utilisées.
- 154. Dans le cas d'espèce, notant que les treize personnes intéressées n'ont pas invoqué la loi no 1803, de 1951, sur la protection des cadres syndicaux devant les tribunaux et que, contrairement à cinq personnes se trouvant dans la même situation, elles se sont également abstenues de former un recours devant le Conseil d'Etat, le Comité estime que ces treize personnes n'ont pas vraiment tenté d'obtenir réparation du tort qu'elles estiment avoir subi et recommande en conséquence au Conseil d'administration de décider que leur cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
- 155. Reste le cas des cinq personnes qui ont formé un recours devant le Conseil d'Etat et qui sont MM. Evangelatos, Rovatsos, Kalogerinis, Coukios et Vangelakos, dont l'affaire se trouve toujours en instance devant cette juridiction.
- 156. Dans tous les cas où une affaire faisait l'objet d'une action devant une instance judiciaire nationale, pourvu que la procédure suivie soit assortie des garanties d'une procédure judiciaire régulière, le Comité, estimant que la décision à intervenir était susceptible de lui fournir d'utiles éléments d'information dans son appréciation des allégations formulées, a décidé d'ajourner l'examen du cas en attendant d'être en possession du résultat des procédures engagées.
- 157. En l'espèce, le Comité juge opportun de suivre la même pratique en recommandant au Conseil d'administration de prier le gouvernement de bien vouloir lui communiquer le résultat de la procédure engagée devant le Conseil d'Etat par les personnes mentionnées au paragraphe 155 ci-dessus, et, en particulier, le texte de la décision rendue ainsi que celui de ses considérants, en ajournant en attendant l'examen de cet aspect du cas.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 158. En ce qui concerne l'affaire dans son ensemble, le Comité recommande au Conseil d'administration:
- a) de décider, pour les raisons indiquées aux paragraphes 153 et 154 ci-dessus, que le cas des treize personnes dont il est question dans lesdits paragraphes n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi;
- b) de prier le gouvernement de bien vouloir lui communiquer le résultat de la procédure engagée devant le Conseil d'Etat par les cinq personnes mentionnées au paragraphe 155 ci-dessus et, en particulier, le texte de la décision rendue ainsi que celui de ses considérants;
- c) de prendre note du présent rapport intérimaire, étant entendu que le Comité fera à nouveau rapport lorsqu'il sera en possession des informations sollicitées à l'alinéa b) ci-dessus.