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- 156. La plainte figure dans une communication du Conseil national de coordination syndicale du 7 mai 1984. Le gouvernement a répondu par communication du 24 janvier 1985.
- 157. Le Chili n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 1. Agression contre un dirigeant syndical
- a) Allégation du plaignant
- 158. Les plaignants allèguent qu'en mai 1983 M. Clotario Blest, fondateur de l'Association nationale des employés des employés publics (ANEF) et de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), aurait été victime d'une agression commise le lendemain du jour où il avait assisté à la réunion de formation de la Direction nationale des travailleurs, qui rassemble les principales organisations syndicales nationales du pays.
- b) Réponse du gouvernement
- 159. Le gouvernement déclare qu'il avait, à l'époque, profondément regretté l'agression commise contre M. Clotario Blest, fondateur de l'ANEF, et que l'aide de camp du Président de la République s'était rendu chez M. Blest pour lui exprimer les sentiments personnels du Président et son intérêt pour l'état de la victime.
- 160. Le comité observe que ni le plaignant ni le gouvernement n'ont indiqué qui pouvait être responsable de l'agression, ni en quoi elle avait consisté. Dans ces conditions, le comité estime qu'il ne dispose pas d'éléments d'information suffisants pour pouvoir se prononcer sur cet aspect du cas.
- 2. Allégations relatives à des arrestations
- a) Allégations du plaignant
- 161. L'organisation plaignante formule les allégations suivantes:
- - Le 9 juin 1983, M. Roberto Arredondo, dirigeant national de la Fédération des employés de Bahía et président du conseil régional de l'UDT, a été retenu plusieurs heures à Concepción par les carabiniers pour avoir détenu des appels à la manifestation lancés par la Direction nationale des travailleurs.
- - Le 10 juin 1983, des agents de la police judiciaire ont arrêté à Rancagua M. Marcos Molina, premier directeur du syndicat de la zone minière d'El Teniente et trésorier du syndicat industriel de Caletones, ainsi que M. Arturo Vera, premier directeur du syndicat de Sewell et Minas.
- - A Talca, Eduardo Sepúlveda, dirigeant national de la Confédération nationale des travailleurs agricoles "El Triunfo Campesino", et José Morales, président de la Fédération provinciale de Talca de cette organisation, ont été arrêtés le 11 juin 1983.
- - En juillet 1983, M. Diego Lebitum, secrétaire du syndicat des établissements Savory no 2, et M. Guillermo Saavedra Pinto, membre de ce syndicat, ont été arrêtés alors qu'ils participaient à une manifestation pacifique au cours d'une grève légale de leur syndicat.
- - En octobre 1983, Rodolfo Seguel, Eugenio López, Manuel Rodríguez, Eduardo Díaz, Juan Meneses et Enés Zepeda, dirigeants syndicaux de la mine de cuivre El Teniente, ont été retenus plusieurs heures pour avoir participé à une manifestation pacifique.
- - En octobre 1983, trois travailleurs ont été arrêtés pour avoir porté des écriteaux lors d'une manifestation pacifique de 40 personnes qui protestaient contre leur licenciement collectif par le Club de la Unión.
- - En décembre 1983, Hernol Flores, président de l'ANEF, a été arrêté pour avoir distribué des tracts sur la voie publique.
- - En décembre 1983, trois dirigeants de la section de jeunesse du Conseil national de coordination syndicale ont été arrêtés dans la capitale pour avoir lu un hommage à M. Raúl Alfonsín, Président de la République argentine, devant l'ambassade de ce pays.
- - En mars 1984, Manuel Bustos, président du Conseil national de coordination syndicale, et Sergio Troncoso, président adjoint de la Confédération des travailleurs de la construction, ainsi que d'autres personnes, ont été arrêtés pour avoir dirigé une manifestation pacifique de protestation pour réclamer la libération de José Ruiz Di Giorgio.
- b) Réponse du gouvernement
- 162. En ce qui concerne l'allégation relative à l'arrestation du dirigeant syndical Roberto Arredondo, le gouvernement déclare ne pas être au courant de l'affaire; il ressort de la plainte que M. Arredondo aurait été interpellé parce qu'il portait des tracts appelant à une protestation prétendue pacifique lancée par les milieux hostiles au gouvernement, mais, selon les plaignants eux-mêmes, l'intéressé aurait été remis en liberté. Le gouvernement insiste sur la nécessité pour les plaignants de fournir des renseignements suffisants pour permettre d'y répondre, faute de quoi la plainte manque de sérieux.
- 163. En ce qui concerne l'allégation relative à l'arrestation de MM. Marcos Molina Catalán et Arturo Vera Mauro, le gouvernement déclare que, le 11 juin 1983, vers 14 h 20, ces personnes ont été interpellées et conduites au poste de police par des agents de la police judiciaire de Rancagua alors qu'elles s'approchaient d'un taxi chargé de tracts appelant à participer à des actes antigouvernementaux. Après interrogatoire au poste de police, où ils sont restés six heures, les intéressés ont été remis en liberté. Ils ne font l'objet d'aucune poursuite judiciaire et ils se trouvent en liberté.
- 164. En ce qui concerne les allégations relatives à l'arrestation d'Eduardo Sepúlveda et de José Morales, le gouvernement déclare que "les faits allégués sont trop anciens pour en permettre la vérification".
- 165. En ce qui concerne l'arrestation de MM. Diego Lebitum et Guillermo Saavedra Pinto, le gouvernement déclare que les faits sont trop anciens pour pour en permettre la vérification, mais que, s'ils sont réels, il s'agit d'une affaire de simple police dans laquelle, comme l'a expliqué le gouvernement pour d'autres cas, les intéressés sont évidemment laissés en liberté après vérification de leur identité et de leur domicile.
- 166. En ce qui concerne les arrestations qui se seraient produites en octobre 1983, le gouvernement déclare que, quand l'ordre public est menacé, la police, dans l'exercice de ses responsabilités de maintien de l'ordre et de la paix publics, interpelle les fauteurs de troubles pour vérification d'identité et de domicile et que, si le cas le justifie, elle les fait citer à comparaître devant le tribunal de police local, compétent pour ce genre de délit. Les cas mentionnés par le plaignant ne sont pas parvenus devant le tribunal de police du lieu en question.
- 167. En ce qui concerne l'arrestation de M. Hernol Flores, le gouvernement déclare que cette arrestation n'est pas prouvée et que, dès lors que le plaignant n'a indiqué ni la date ni le lieu de l'arrestation, ni l'autorité qui l'aurait ordonnée, il ne dispose pas de renseignements suffisants pour vérifier le bien-fondé de cette plainte. Quant à l'allégation relative à l'arrestation de trois dirigeants de la section jeunesse du Conseil national de coordination syndicale, le gouvernement déclare qu'elle a pour origine une affaire de simple police: un attroupement empêchait le libre passage des piétons et l'accès à l'ambassade de la République argentine. La police, chargée de l'ordre public, a dispersé cette réunion publique non autorisée, dont les responsables ont été laissés en liberté après vérification d'identité et de domicile. Cette plainte n'a donc, ajoute le gouvernement, aucun rapport avec la liberté syndicale.
- 168. Le gouvernement déclare d'autre part que MM. Manuel Bustos et Sergio Troncoso ont été arrêtés, avec cinq autres personnes, le 22 mars 1984, par des carabiniers qui se trouvaient de service sur la voie publique, et qui les ont conduits au premier commissariat de carabiniers. Le motif de l'arrestation était d'avoir participé à une marche d'une cinquantaine de personnes dans les rues du centre pour se rendre au palais de justice. Ce cortège, qui se déroulait sans autorisation, ralentissait la circulation des piétons et des voitures. Les personnes interpellées ont été remises en liberté après vérification d'identité et de domicile et après avoir été citées à comparaître devant le tribunal de police local, sous l'inculpation de participation à une manifestation non autorisée.
- 169. Le comité relève, à propos de certaines des arrestations alléguées, que le gouvernement déclare que l'insuffisance des renseignements et l'ancienneté des faits ont rendu leur vérification impossible; et, à propos d'autres arrestations, qu'il s'agit de faits sans rapport avec la liberté syndicale, ou encore de détention de quelques heures pour interrogatoire et vérification d'identité et de domicile et, éventuellement, pour citation à comparaître devant les tribunaux de police locaux.
- 170. Le comité estime qu'il ne dispose pas d'éléments suffisants pour se prononcer séparément sur chacune des arrestations alléguées. Il tient toutefois à relever que le nombre d'arrestations et d'interpellations de dirigeants et militants syndicaux s'élèverait à une vingtaine. Dans ces conditions, tout en observant que les faits allégués remontent pour la plupart à 1983 et que les intéressés se trouvent en liberté, le comité rappelle que les mesures privatives de liberté prises contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités syndicales, même s'il ne s'agit que de simples interpellations de courte durée, constituent un obstacle à l'exercice des droits syndicaux.
- 3. Allégations relatives à des manifestations
- a) Allégations du plaignant
- 171. L'organisation plaignante formule les allégations suivantes:
- - En octobre 1983, une manifestation publique de 70 organisations syndicales qui se tenait à Valparaiso, sur la place du 11 septembre, a été réprimée par la force, se soldant par plusieurs blessés et 42 arrestations.
- - En novembre 1983, les autorités de Rancagua ont refusé d'autoriser des marches, qui devaient précéder une réunion organisée par la Direction provinciale des travailleurs de Cachapoal, et la réunion que cette organisation voulait tenir en un lieu de son choix.
- - Le 14 décembre 1983, dans le centre de Santiago, 300 travailleurs indépendants (marchands ambulants) ont été brutalement dispersés et ont dû se réfugier dans la cathédrale. Outre cette répression, ces travailleurs, qui sont membres du Syndicat des marchands ambulants, ont dû subir la confiscation illégale de leurs marchandises, et un dispositif de sécurité composé de forces spéciales et de policiers en civil, avec des chiens spécialement dressés à attaquer l'homme, a été mis en place pour les empêcher d'exercer leur commerce dans les rues de Santiago.
- - En janvier 1984, une manifestation convoquée par le Conseil national de coordination syndicale a été violemment réprimée. Les carabiniers ont arrêté 27 personnes et en ont blessé une dizaine.
- b) Réponse du gouvernement
- 172. En ce qui concerne les allégations relatives à la manifestation sur la place du 11 septembre à Valparaiso, le gouvernement déclare que cette accusation est trop imprécise et trop ancienne pour en permettre la vérification. De façon générale, le gouvernement rappelle que les forces de police ont le devoir absolu de maintenir l'ordre, de veiller à la tranquillité publique, et qu'évidemment, s'il y a eu tentative de désordres publics, la police devait intervenir. Les personnes interpellées, dont les noms n'ont pas été indiqués dans le cas présent, sont, en général, remises en liberté après vérification d'identité, à moins qu'elles ne soient citées à comparaître devant le tribunal de police local.
- 173. Le gouvernement déclare, d'autre part, que les autorités régionales de Rancagua n'avaient pas autorisé les marches en question à cause de la gêne qu'elles auraient causée à la circulation des personnes et des voitures, et il ajoute que la Direction provinciale des travailleurs de Cachapoal n'est pas une organisation syndicale, qu'elle ne possède pas la personnalité juridique et qu'elle n'a ni existence légale ni domicile connu: ses prétendus dirigeants ne sont pas enregistrés, et on ignore qui les a élus et pour combien de temps. Il s'agirait d'une organisation de fait, sans existence légale.
- 174. En ce qui concerne la dispersion des marchands ambulants, le gouvernement déclare qu'il n'a pas été possible de vérifier le bien-fondé de cette allégation. Le gouvernement explique que la police déloge et expulse périodiquement des artères du centre de Santiago un groupe de marchands ambulants qui s'installent sur les trottoirs et entravent le passage des piétons; ces marchands n'ont pas d'autorisation ni de permis municipal, ils ne paient pas l'impôt, et les marchandises qu'ils offrent sont défectueuses et nuisibles à l'hygiène et à la santé publiques; c'est pourquoi la police les chasse du centre de la ville.
- 175. En ce qui concerne la répression violente alléguée à propos de la manifestation convoquée par le Conseil national de coordination syndicale, le gouvernement indique qu'il n'est pas possible de répondre à une plainte qui n'indique ni la date ni le lieu des incidents, ni les noms des personnes interpellées. Quant aux arrestations, le gouvernement déclare, de manière générale, que les autorités de tout pays ont le devoir de maintenir l'ordre et d'interpeller les individus qui, au mépris des lois et des règlements, se livrent sur la voie publique à des actes qui peuvent constituer des délits ou une conduite répréhensible.
- 176. Le comité relève que le gouvernement déclare, en ce qui concerne deux des allégations, que les plaignants n'ont pas fourni d'informations suffisantes. Il prend également note de ce que, selon le gouvernement, les autorités de Rancagua n'ont pas autorisé les marches qui devaient précéder une réunion prévue par la Direction provinciale des travailleurs de Cachapoal invoquant pour ce refus les difficultés de circulation qui en résulteraient pour les piétons et les voitures. Le comité observe enfin que le gouvernement n'a pas été à même de vérifier la réalité de la dispersion des marchands ambulants du centre de Santiago, mais qu'il déclare que la police expulse souvent ces vendeurs des quartiers centraux pour infraction aux dispositions relatives à l'hygiène, à la sécurité et aux impôts, etc. Dans ces conditions, le comité rappelle de manière générale que les droits syndicaux comprennent le droit de tenir des manifestations publiques. Si, pour éviter des désordres, les autorités décident d'interdire une manifestation dans les quartiers les plus fréquentés d'une ville, une telle interdiction ne constitue pas une infraction à l'exercice des droits syndicaux, mais les autorités devraient s'efforcer de s'entendre avec les organisateurs de la manifestation afin de permettre sa tenue en un autre lieu où des désordres ne seraient pas à craindre.
- 4. Allégations relatives aux violations de l'autonomie interne des organisations syndicales
- a) Allégations du plaignant 177. L'organisation plaignante présente les allégations suivantes:
- - En juin 1983, l'inspection provinciale du travail de Santiago a destitué Ricardo Lecaros, vice-président de la Confédération métallurgique (CONSTRAMET) , du fait qu'il était poursuivi en vertu de la loi sur la sécurité intérieure de l'Etat.
- - En octobre 1983, la direction provinciale du travail de Rancagua a empêché de se présenter aux élections du syndicat industriel de Caletones les dirigeants en exercice Rodemil Aranda et Marcos Molina, dont le licenciement était en appel devant les tribunaux. La même direction provinciale a aussi annulé les élections du syndicat industriel de Caletones.
- - En octobre 1983, le directeur provincial du travail de Rancagua a confisqué les registres des syndicats industriel et professionnel de Caletones et de Sewell et Minas, pour les mettre à la disposition de l'entreprise afin qu'elle puisse étayer ses arguments dans son procès contre Rodolfo Seguel.
- b) Réponse du gouvernement
- 178. Le gouvernement déclare que M. Lecaros a été condamné pour incitation illégale à paralyser les activités nationales, délit caractérisé par la loi sur la sécurité de l'Etat; en effet, M. Lecaros ne satisferait pas aux conditions voulues pour être dirigeant syndical, car l'article 21 du décret-loi no 2756 sur l'organisation syndicale dispose que pour être dirigeant d'un syndicat il faut, entre autres conditions, "ne pas avoir été condamné ou poursuivi pour un crime ou pour un délit entraînant une peine afflictive, ou pour un délit touchant à l'administration du patrimoine syndical". Dans ces conditions, M. Lecaros était légalement inapte à l'exercice de fonctions syndicales.
- 179. Le gouvernement ajoute qu'en vertu du texte juridique précité, la personne frappée par la décision d'incapacité par la résolution de la direction du travail peut faire appel devant les tribunaux dans les cinq jours. Selon le gouvernement, les allégations sont insuffisantes et il faudrait savoir, pour donner une réponse plus certaine, devant quel tribunal et à quelle date l'intéressé a fait appel de la résolution d'incapacité qui l'aurait frappé.
- 180. En ce qui concerne les allégations relatives à MM. Rodemil Aranda et Marcos Molina, le gouvernement déclare que ces travailleurs ne pouvaient pas se porter candidats à des fonctions syndicales, car ils n'étaient plus employés de ladite entreprise, et qu'ils avaient demandé au deuxième tribunal de Rancagua de prononcer la nullité de leur résiliation de contrat décidée par la division minière El Teniente de la société Codelco-Chili.
- 181. En ce qui concerne la suspension des élections du syndicat industriel de Caletones, le gouvernement déclare que les inspecteurs du travail se trouvaient dans les locaux du syndicat en qualité de vérificateurs du scrutin quand ils furent saisis d'une résolution de la Cour d'appel de Rancagua qui ordonnait la suspension des élections tant que le procès de trois de ses dirigeants ne serait pas terminé. L'élection a finalement eu lieu le 20 janvier 1984, après que la Cour d'appel de Rancagua l'eut autorisée.
- 182. D'autre part, le gouvernement nie que les registres des syndicats industriel et professionnel de Caletones et de Sewell et Minas aient été confisqués; en réalité, l'inspecteur du travail avait mis à la disposition du tribunal une copie des registres comme pièce à conviction pour lui permettre de former son jugement. C) Conclusions du comité
- 183. Le comité relève que, selon le gouvernement, les registres des syndicats industriel et professionnel de Caletones et de Sewell et Minas n'ont pas été confisqués mais que l'inspecteur du travail a mis à la disposition du tribunal une copie desdits registres comme pièce à conviction pour lui permettre de mieux former son jugement dans le procès du dirigeant Rodolfo Seguel.
- 184. Le comité note que les autres faits allégués résultent de ce que les conditions voulues par la loi pour être dirigeant syndical n'étaient pas réunies. En l'occurrence, dans un cas, il s'agit d'incapacité juridique d'un dirigeant syndical qui avait été condamné pour avoir illégalement paralysé les activités nationales; dans le second cas, deux dirigeants ne pouvaient pas faire acte de candidature du fait qu'ils n'étaient plus employés par l'entreprise, et, dans un troisième cas, l'autorité judiciaire a ordonné la suspension des élections syndicales tant que le procès de trois dirigeants n'était pas terminé. Le comité tient à signaler à cet égard que, lorsque la législation nationale prévoit que tous les dirigeants syndicaux doivent appartenir à la profession dans laquelle l'organisation exerce son activité, les principes de la liberté syndicale risquent d'être mis en cause. En effet, dans de tels cas, le licenciement d'un travailleur dirigeant syndical peut, en lui faisant perdre sa qualité de responsable syndical, porter atteinte à la liberté d'action de l'organisation et à son droit d'élire librement ses représentants et même favoriser des actes d'ingérence de la part de l'employeur. (Voir Etude d'ensemble de la commission d'experts, Liberté syndicale et négociation collective, rapport III (partie 4B), CIT, 69e session, 1983, paragr. 158.) De même, une loi interdisant d'une manière générale l'accès aux fonctions syndicales pour toute condamnation est incompatible avec les principes de la liberté syndicale, dès lors que l'activité condamnée ne met pas en cause l'aptitude et l'intégrité nécessaires pour exercer de telles fonctions.
- 5. Allégations relatives à la violation de locaux syndicaux
- a) Allégations du plaignant 185. L'organisation plaignante présente les allégations suivantes:
- - M. Arturo Martínez, président de la Confédération nationale des arts graphiques, a introduit un recours préventif le 13 juin 1983 contre la perquisition des carabiniers au siège de la confédération, sans mandat de perquisition, pour l'y interroger sur ses activités de dirigeant syndical.
- - En juin 1983, à Santiago, le siège de la Fédération nationale des syndicats du pétrole a été perquisitionné.
- - En novembre 1983, à Maipú, les carabiniers ont pénétré illégalement et de force au siège du syndicat no 2 des travailleurs indépendants de la construction, alors que s'y tenait une fête des membres et de leurs familles. Lors de cette intrusion, Gerardo Rodríguez, membre du syndicat, a été arrêté puis remis en liberté, sans qu'aucune charge n'ait été portée contre lui. Les carabiniers ont menacé d'interrompre, de la même manière, toute autre activité du syndicat.
- - En mars 1984, un groupe de cinq personnes armées de matraques et de chaînes a attaqué de nuit le siège de l'Assocation nationale des employés du fisc (ANEF). C'est le troisième attentat commis contre le siège de ce syndicat.
- b) Réponse du gouvernement
- 186. Le gouvernement déclare qu'il ne saisit pas le rapport que les faits allégués à propos de la Confédération nationale des arts graphiques peuvent avoir avec la liberté syndicale. Selon lui, le fait que l'intéressé - qui n'a jamais été arrêté - ait introduit un recours préventif devant les tribunaux montre que ses droits étaient effectivement garantis.
- 187. En ce qui concerne la prétendue occupation du siège de la Fédération nationale des syndicats du pétrole, le gouvernement déclare n'avoir aucune preuve que l'incident se soit produit, et fait remarquer que la plainte n'indique ni les auteurs ni le motif.
- 188. En ce qui concerne l'allégation d'occupation du siège du syndicat des travailleurs indépendants no 2 de la construction à Maipú, le gouvernement déclare que ce syndicat a présenté un recours devant la Cour d'appel de Santiago qui, le 9 décembre 1983, a rendu une ordonnance de non-lieu. Les intéressés se sont pourvus devant la Cour suprême qui, elle aussi, a rejeté le recours et décidé le classement de l'affaire.
- 189. En ce qui concerne l'attaque de nuit contre le siège de l'ANEF, le gouvernement déclare "qu'il s'agit d'une affaire de simple police qui échappe à son contrôle". Pour donner de plus amples informations, il lui faudrait connaître la date et, éventuellement, le tribunal saisi de la plainte.
- 190. Le comité a pris connaissance de la réponse du gouvernement selon laquelle il ne dispose pas d'informations sur l'allégation relative à l'occupation du siège de la Fédération nationale des syndicats du pétrole et de ce que la Cour suprême a rejeté le recours présenté à propos de l'allégation relative à l'occupation du siège du syndicat des travailleurs indépendants no 2 de la construction à Maipú.
- 191. Le comité observe, d'autre part, que le gouvernement n'a pas expressément nié la perquisition des carabiniers au siège de la Confédération nationale des arts graphiques sans mandat de perquisition et qu'il confirme qu'il y a eu plainte devant les tribunaux.
- 192. Dans ces conditions, tout en relevant que ni le plaignant ni le gouvernement n'ont donné d'informations suffisamment détaillées sur ces affaires, le comité rappelle que le principe de l'inviolabilité des locaux syndicaux a comme corollaire indispensable que les autorités publiques ne peuvent pas exiger de pénétrer, à défaut d'autorisation préalable des occupants, dans ces locaux sans être en possession d'un mandat les y autorisant. (Voir, par exemple, 230e rapport, cas no 1200 (Chili), paragr. 610, et 238e rapport, cas no 1169 (Nicaragua), paragr. 227.)
- 6. Allégations relatives à des actes de discrimination antisyndicale
- a) Allégations du plaignant 193. L'organisation plaignante présente les allégations suivantes:
- - En juillet 1983, l'entreprise Vercovich a usé de représailles contre les travailleurs qui avaient légalement déclenché une grève; ils n'ont pas pu obtenir de l'autorité compétente qu'elle redresse la situation. Vingt-cinq pour cent des travailleurs couverts par la négociation collective ont été licenciés, et les salaires des autres ont été arbitrairement réduits.
- - En août 1983, l'entreprise industrielle Hucke, de Valparaiso, a licencié huit dirigeants syndicaux en invoquant l'alinéa f) de l'article 13 du décret-loi no 2200, qui permet de licencier du personnel selon les besoins de l'entreprise. Les dirigeants licenciés étaient Luis Palma Romero, José Márquez, Carlos Carreño Castro, Oscar Bonilla, Manuel Cárdenas, Pedro Cortés Fredes, José Villalón Tapia et Santiago Rubio Sepúlveda.
- - En septembre 1983, l'entreprise City Hotel a menacé de licenciement les travailleurs qui ne démissionneraient pas du syndicat, et elle a prononcé deux de ces licenciements sans que l'autorité compétente intervienne pour y remédier.
- - L'entreprise Hotel Carrera a licencié Juana Santos, téléphoniste surveillante, pour le rôle notable qu'elle avait joué pendant une grève légale.
- - Abraham Santángel a été licencié 48 heures après avoir été élu président du syndicat no 1 de l'industrie Hucke.
- - En novembre 1983, l'entreprise nationale du charbon (ENACAR) a licencié les dirigeants suivants du syndicat no 5 de la mine Schwager: Luis Badilla, Véctor Jaramillo et Juan Flores. De plus, le syndicat a été dissous par arrêt de justice.
- - En décembre 1983, l'entreprise Hotel Galerías a licencié 12 personnes en invoquant la nécessité de réduire l'effectif, tout en offrant des augmentations à ceux qui quitteraient le syndicat.
- - En janvier 1984, l'entreprise Parro, Alvariño et Cie a licencié deux dirigeants syndicaux pour avoir présenté des projets de convention collective.
- - L'entreprise Goodyear a licencié Juan Carlos Martínez, dirigeant du syndicat no 2 en janvier 1984.
- b) Réponse du gouvernement
- 194. En ce qui concerne les allégations relatives à l'entreprise Vercovich, le gouvernement déclare qu'il ne peut y répondre faute d'éléments suffisants (date, noms, etc.). Le gouvernement signale aussi qu'il n'est pas établi que les intéressés aient usé des recours prévus par la loi.
- 195. En ce qui concerne le licenciement de huit dirigeants syndicaux de l'industrie Hucke de Valparaiso, le gouvernement déclare que le 10 août 1983 les contrats des dirigeants syndicaux du syndicat no 1 de l'entreprise Hucke de Valparaiso (MM. Carlos Carreño Castro, Oscar Bonilla, Luis Palma Romero, José Márquez et Manuel Cárdenas) ont été résiliés par accord mutuel; ces personnes ont signé devant l'inspection du travail des décharges attestant que l'employeur ne leur devait rien et qu'ils n'avaient aucune réclamation à formuler. Les dirigeants du syndicat no 2 (MM. Pedro Cortés Fredes, Santiago Rubio Sepúlveda et José Villalón Tapia) ont été licenciés et ont porté plainte contre l'entreprise devant les tribunaux. L'inspection du travail de Valparaiso a frappé l'entreprise d'une amende administrative en espèces, égale à 20 unités de subvention, le 12 août 1983.
- 196. En ce qui concerne les allégations relatives à l'entreprise City Hotel, le gouvernement déclare que cette entreprise l'a informé que le syndicat exerce pleinement ses activités et que son comité directeur est en fonctions.
- 197. En ce qui concerne le licenciement de la syndicaliste Juana Santos, le gouvernement explique que, pendant la grève légale menée à l'hôtel Carrera par le syndicat des travailleurs, l'entreprise a engagé temporairement certaines personnes pour les tâches indispensables à la bonne marche d'un hôtel. Juana Santos, qui n'exerce aucune responsabilité syndicale et qui travaillait comme téléphoniste, avait saboté le standard pour gêner le travail de sa remplaçante temporaire, et c'est pourquoi l'entreprise l'avait licenciée. L'intéressée a attaqué l'entreprise devant les tribunaux, qui ont condamné l'employeur à lui verser des indemnités.
- 198. En ce qui concerne les allégations relatives à l'entreprise ENACAR, le gouvernement déclare que, par arrêt de justice du 2 novembre 1983, le syndicat no 5 a été dissous, faute de membres. L'entreprise ENACAR a offert des emplois à MM. Luis Badilla, Víctor Jaramillo et Juan Flores qui, tant qu'ils étaient dirigeants du syndicat, n'exécutaient aucun travail. N'ayant pas accepté les emplois offerts, leurs contrats ont été résiliés le 25 novembre 1983.
- 199. En ce qui concerne le licenciement de travailleurs de l'hôtel Galerías, le gouvernement déclare qu'il s'agit de renvois faisant suite à des erreurs de gestion économique. Il n'est pas vrai que des travailleurs aient été licenciés pour n'avoir pas voulu quitter le syndicat: en réalité, l'entreprise avait alors licencié par économie quatre personnes dont le départ n'affectait en rien l'existence du syndicat.
- 200. En ce qui concerne les allégations relatives à l'entreprise Parro, le gouvernement déclare que les deux personnes dont parle la plainte avaient été licenciées avant la négociation collective, de sorte que, quand le projet de convention collective a été présenté, ces personnes n'étaient déjà plus salariées de l'entreprise. Elles avaient signé une décharge en présence de l'inspection du travail et avaient touché tout leur dû. Quant à la négociation collective, elle a abouti à la signature d'une convention collective de deux ans, qui expirera en janvier 1986.
- 201. En ce qui concerne l'entreprise Goodyear, le gouvernement déclare que M. Juan Carlos Martínez avait été président du syndicat no 1 des travailleurs, mais qu'au moment de son licenciement il n'était pas dirigeant syndical. En 1982, il avait été l'objet de poursuites pour avoir indûment perçu des sommes destinées à l'ambulance et qu'il détournait à son usage personnel; le tribunal l'a destitué et la Cour d'appel a confirmé la sentence.
- 202. Le comité prend note de ce que le gouvernement déclare ne pas pouvoir répondre aux allégations concernant les licenciements prononcés à l'entreprise Vercovich à cause du peu d'éléments communiqués par le plaignant. Le comité note aussi que, selon le gouvernement, les trois dirigeants de l'entreprise ENACAR dont parle le plaignant n'ont pas accepté le travail offert par l'entreprise, et que cinq dirigeants syndicaux de l'entreprise Hucke de Valparaiso ont résilié leur contrat en accord avec l'entreprise. Le comité relève encore que, selon le gouvernement, les licenciements survenus à l'hôtel Galerías n'ont porté que sur quatre personnes, n'ont en rien affecté l'existence du syndicat, et étaient motivés par la mauvaise gestion économique de l'entreprise. Enfin, le comité prend note de ce que, selon le gouvernement, les personnes renvoyées de l'entreprise Parro l'ont été avant que le projet de convention collective ait été présenté, et de ce que Carlos Martínez (à l'entreprise Goodyear) n'était déjà plus dirigeant syndical quand il a été licencié, ayant été destitué par la justice pour perception abusive de fonds.
- 203. Le comité relève, d'autre part, que le gouvernement n'a pas établi la légitimité des autres cas de licenciements allégués par le plaignant: à savoir le renvoi d'Abraham Santángel (qui se serait produit 48 heures après son élection à la présidence du syndicat no 1 de l'industrie Hucke), et les deux licenciements survenus à l'entreprise City Hotel. Le gouvernement reconnaît, d'autre part, que l'inspection du travail de Valparaiso a infligé à l'entreprise Hucke une amende administrative pour le licenciement de trois dirigeants du syndicat no 2, et que, dans le cas du licenciement de la syndicaliste Juana Santos, les tribunaux ont condamné l'hôtel Carrera à payer des indemnités.
- 204. Dans ces conditions, le comité attire l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel nul travailleur ne doit faire l'objet de discrimination à l'embauchage en raison de son affiliation ou de son activité syndicales, qu'elles soient présentes ou passées. (Voir, par exemple, 235e rapport, cas nos 997, 999 et 1029 (Turquie), paragr. 38.) Dans le même sens le comité a indiqué dans des cas précédents que l'une des manières d'assurer la protection des syndicalistes est de prévoir qu'ils ne peuvent être licenciés ni dans l'exercice de leurs fonctions ni pendant un certain laps de temps après la fin de leur mandat sans faute grave. (Voir, par exemple, 217e rapport, cas no 1063 (Costa Rica), paragr. 151.)
- 7. Autres allégations
- a) Allégations du plaignant
- 205. L'organisation plaignante présente les allégations suivantes:
- - En août 1983, Rodolfo Seguel a été empêché de sortir du pays pour assister au congrès de la CISL (Confédération internationale des syndicats libres). L'interdiction a été prononcée par le ministre Hernán Cereceda.
- - En octobre 1983, la Junte militaire a approuvé une loi qui rend les instigateurs de protestations ou manifestations publiques automatiquement responsables de tout acte de violence survenu à l'occasion de telles manifestations; la loi prévoit des peines de prison, de relégation ou d'exil. Il est évident que cette loi est spécifiquement dirigée contre la Direction nationale des travailleurs et contre toute autre organisation dissidente qui inciterait à manifester son opposition au régime.
- - En janvier 1984, la division minière de Chuquicamata a interdit l'entrée de la mine à Rodolfo Seguel, président de la Confédération des travailleurs du cuivre.
- - Les travailleurs du Programme d'emploi minimum (PEM) et du Programme d'emploi pour les chefs de famille (PECH) ne jouissent pas du droit de se syndiquer et de présenter des cahiers de revendications.
- b) Réponse du gouvernement
- 206. Le gouvernement déclare que le Code de procédure pénale permet au magistrat qui juge une personne accusée de délit de l'assigner à résidence pour l'empêcher d'échapper à la justice en quittant le pays. Les tribunaux et les magistrats rendent la justice en toute indépendance et, en interdisant à M. Rodolfo Seguel de sortir du territoire, M. Hernán Cereceda Bravo, président de la Cour d'appel de Santiago, n'a fait qu'exercer ses prérogatives en la matière.
- 207. Le gouvernement déclare de même que l'allégation selon laquelle le dirigeant syndical Rodolfo Seguel se serait vu interdire l'accès à la division minière de Chuquicamata n'a pu être vérifiée, faute de renseignements précis. En effet, la plainte n'indique ni la date, ni le lieu, ni l'autorité qui aurait prononcé l'interdiction, etc., tous éléments nécessaires pour répondre pleinement.
- 208. D'autre part, le gouvernement déclare que la loi citée par le plaignant est la loi no 18256, publiée au Journal officiel du 27 octobre 1983, qui modifie la loi no 12927 de 1958 sur la sûreté de l'Etat. La loi en question vise à sanctionner les promoteurs et les instigateurs de manifestations tendant à troubler l'ordre public, à renverser le gouvernement établi ou à paralyser le pays, et les fauteurs de troubles de l'ordre et de la tranquillité publics. La loi ne réprime pas la protestation ou la manifestation publique d'opinions contraires à la politique économique ou budgétaire ou à la politique de logement du gouvernement. Les délits caractérisés par cette loi ne consistent pas à protester mais à promouvoir des actes ou à inciter à des actes nuisibles à la tranquillité publique. La loi vise expressément "i) ceux qui provoquent des manifestations publiques collectives dans les rues, places et autres lieux publiquement fréquentés, ou toute autre manifestation propre à permettre ou faciliter les troubles à la tranquillité publique, et ceux qui incitent ou invitent à de telles manifestations". Ces délits seront punis de peines de forteresse, de relégation ou d'interdiction de séjour, selon une échelle allant de 61 jours à cinq années de privation de liberté. Sans préjudice de ce qui précède, les auteurs de tels délits seront solidairement responsables des dommages causés en conséquence ou à l'occasion des faits considérés, indépendamment de la responsabilité imputable aux auteurs matériels desdits dommages.
- 209. Le gouvernement se dit persuadé qu'il y a rapport de cause à effet entre un appel à la protestation du genre visé par la loi et les conséquences qui peuvent en résulter. Depuis mai 1983, où ont commencé les protestations, celles-ci n'ont cessé de croître en violence, jusqu'à faire de nombreux morts et blessés. Ceux qui appellent à la protestation ne peuvent pas ignorer les conséquences de leurs initiatives. Le magistrat chargé d'enquêter sur les faits appréciera et jugera en son âme et conscience, comme le dispose l'article 27 de la loi sur la sûreté de l'Etat.
- 210. Le gouvernement déclare enfin que le Programme d'emploi minimum et le Programme d'emploi pour les chefs de famille sont une aide aux chômeurs, de sorte que les bénéficiaires ne peuvent pas s'organiser en syndicats. La législation chilienne, comme celle de tous les autres pays, réserve le droit de syndicalisation aux seuls travailleurs ayant une relation d'emploi avec un employeur.
- 211. Le comité prend note de ce que, selon le gouvernement, l'interdiction de sortir du pays, prononcée contre le dirigeant syndical Rodolfo Seguel, a été décrétée par un magistrat de la Cour d'appel, en vertu du Code de procédure pénale qui permet d'interdire la sortie du pays aux personnes inculpées de délit. Le comité prend aussi note de ce que le gouvernement déclare que, faute de renseignements précis de la part du plaignant, il n'a pas pu vérifier l'allégation selon laquelle le dirigeant syndical Rodolfo Seguel aurait été empêché d'entrer dans la division minière de Chuquicamata.
- 212. En ce qui concerne la loi no 12256, publiée au Journal officiel le 27 octobre 1983, qui sanctionne "ceux qui provoquent des manifestations publiques collectives dans les rues, places et autres lieux publiquement fréquentés, ou toute autre manifestation propre à permettre ou faciliter les troubles à la tranquillité publique", le comité tient à signaler que l'autorisation administrative de tenir des réunions et manifestations publiques n'est pas en soi une exigence abusive du point de vue des principes de la liberté syndicale. Le maintien de l'ordre public n'est pas incompatible avec le droit de manifestation dès lors que les autorités qui l'exercent peuvent s'entendre avec les organisateurs de la manifestation sur les lieux et les conditions de celle-ci.
- 213. Enfin, en ce qui concerne l'exclusion du droit d'organisation et de revendication des travailleurs du PEM et du PECH, le comité note que, selon le gouvernement, le PEM et le PECH constituent des programmes d'aide aux chômeurs, de sorte que leurs bénéficiaires ne peuvent pas s'organiser en syndicats, puisqu'au Chili le droit de syndicalisation est réservé aux travailleurs ayant une relation d'emploi avec un employeur. A cet égard, le comité attire l'attention du gouvernement sur le fait qu'en vertu des principes de la liberté syndicale tous les travailleurs - à la seule exception des membres des forces armées et de la police - devraient avoir le droit de constituer les organisations de leur choix et de s'y affilier. Le critère à retenir pour définir les personnes couvertes n'est donc pas la relation d'emploi avec un employeur; cette relation est en effet souvent absente, comme pour les travailleurs de l'agriculture, les travailleurs indépendants en général ou les membres des professions libérales, qui doivent pourtant tous jouir du droit syndical. Le comité demande donc au gouvernement de prendre des mesures tendant à accorder le droit d'organisation syndicale aux travailleurs du PEM et du PECH.
- 214. Enfin, l'organisation plaignante présente une série d'allégations que le comité a examinées à propros d'autres cas ou qui ne concernent pas des violations spécifiques de la liberté syndicale.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 215. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:
- Considérant la gravité des allégations contenues dans le présent cas, le comité regrette vivement que le gouvernement n'ait pas fourni de réponses suffisamment précises à toutes les allégations formulées. Il rappelle donc au gouvernement l'importance qu'il attache aux principes suivants:
- a) Les mesures privatives de liberté prises contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités syndicales, même s'il ne s'agit que de simples interpellations de courte durée, constituent un obstacle à l'exercice des droits syndicaux.
- b) Les droits syndicaux comprennent le droit de tenir des manifestations publiques. Le maintien de l'ordre public n'est pas incompatible avec le droit de manifestation dès lors que les autorités qui l'exercent peuvent s'entendre avec les organisateurs de la manifestation sur les lieux et les conditions de celle-ci.
- c) Selon la dernière étude d'ensemble de la commission d'experts, une législation nationale qui prévoit que tous les dirigeants syndicaux doivent appartenir à la profession dans laquelle l'organisation exerce son activité risque de mettre en cause les principes de la liberté syndicale. Dans ce cas, le licenciement d'un travailleur dirigeant syndical lui fait perdre sa qualité de responsable syndical, et nuit à la liberté d'action de l'organisation ainsi qu'à son droit d'élire librement ses représentants. En plaçant un dirigeant syndical dans cette situation, l'employeur s'ingère dans les activités du syndicat.
- d) De même, une loi interdisant d'une manière générale l'accès aux fonctions syndicales pour toute condamnation est incompatible avec les principes de liberté syndicale, dès lors que l'activité condamnée ne met pas en cause l'aptitude et l'intégrité nécessaires pour exercer de telles fonctions.
- e) L'inviolabilité des locaux syndicaux implique que les autorités publiques, à défaut d'autorisation préalable des occupants, n'y pénètrent pas sans mandat judiciaire les y autorisant.
- f) Nul ne peut faire l'objet de discrimination à l'embauchage en raison de son affiliation ou de son activité syndicales, qu'elles soient présentes ou passées. Le comité a indiqué, dans des cas précédents, que la protection des dirigeants syndicaux était correctement assurée lorsqu'ils ne peuvent être licenciés ni dans l'exercice de leurs fonctions ni pendant un certain laps de temps après la fin de leur mandat, sans faute grave.
- g) Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures tendant à reconnaître le droit syndical aux travailleurs du Programme d'emploi minimum et du Programme d'emploi pour les chefs de famille.