ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Interim Report - Report No 401, March 2023

Case No 3185 (Philippines) - Complaint date: 05-FEB-16 - Active

Display in: English - Spanish

Allégations: Les organisations plaignantes font état d’une détérioration de la situation des droits du travail dans le pays, caractérisée par de nombreux cas d’exécutions extrajudiciaires de dirigeants et de membres syndicaux, de tentatives d’assassinat, d’arrestations et de détentions illégales, d’inscription sur liste rouge, de harcèlement, d’intimidation et de menaces à l’encontre de syndicalistes, ainsi que de répression et d’ingérence dans les affaires syndicales. Les organisations plaignantes dénoncent l’incapacité du gouvernement à enquêter de manière appropriée sur ces cas et à traduire les auteurs en justice, ce qui renforce le climat d’impunité, de violence et d’insécurité et nuit par conséquent à l’exercice des droits syndicaux

  1. 639. Le comité a examiné ce cas (soumis en février 2016) pour la dernière fois à sa réunion de novembre 2021, et à cette occasion, il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 396e rapport, paragr. 508-528 approuvé par le Conseil d’administration à sa 343e session  .]
  2. 640. Dans une communication datée du 1er septembre 2021, le Kilusang Mayo Uno (KMU) s’est joint au cas et a fourni des informations supplémentaires.
  3. 641. Le gouvernement a fourni ses observations dans une communication en date du 30 septembre 2022.
  4. 642. Les Philippines ont ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 643. Lors de sa réunion de novembre 2021, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 396e rapport, paragr. 528]:
    • a) Rappelant que les assassinats d’Antonio «Dodong» Petalcorin, d’Emilio Rivera et de Kagi Alimudin Lucman ont eu lieu en 2013 et que le gouvernement a indiqué qu’ils étaient en cours d’instruction conformément à la procédure ordinaire d’enquête et de poursuite pénale, le comité exprime une nouvelle fois le ferme espoir que les auteurs seront traduits en justice et condamnés sans délai. Le comité veut croire que le gouvernement continuera de faire tout son possible à cet égard et le prie instamment de le tenir informé de tout progrès en la matière.
    • b) Le comité prie instamment le gouvernement de fournir une réponse détaillée aux graves allégations de l’ITF, de l’UMA et de la NFSW FGT faisant état d’exécutions extrajudiciaires, d’arrestations illégales, de mises en détention, de menaces, d’intimidation, de harcèlement et d’inscription sur liste rouge concernant des syndicalistes et s’attend à ce que le gouvernement veille à ce que toutes les allégations susmentionnées fassent rapidement l’objet d’une enquête et que les auteurs de violences contre des syndicalistes soient identifiés et traduits en justice, qu’il s’agisse de particuliers ou d’agents de l’État, afin de lutter contre l’impunité et d’empêcher la répétition de tels actes. Le comité veut croire que le gouvernement donnera la priorité aux enquêtes sur ces cas graves et le prie de le tenir informé des progrès accomplis à cet égard, y compris de l’état d’avancement de toute poursuite qui aurait été engagée.
    • c) Le comité prie instamment le gouvernement de garantir la libération immédiate de tout syndicaliste détenu si son arrestation ou sa détention est liée à l’exercice légitime de ses droits syndicaux.
    • d) Enfin, soulignant la responsabilité du gouvernement en ce qui concerne les enquêtes sur les allégations de violence contre des travailleurs qui s’organisent ou défendent de toute autre manière les intérêts des travailleurs, le comité s’attend à ce que le gouvernement fasse tout ce qui est en son pouvoir pour que toute allégation passée ou future d’assassinat lié à l’activité syndicale et d’autre forme de violence contre des syndicalistes fasse rapidement l’objet d’une enquête en bonne et due forme afin d’en clarifier les circonstances, y compris l’existence de toute relation directe ou indirecte avec l’activité syndicale, de déterminer les responsabilités et de punir les auteurs en vue de prévenir la répétition de tels actes. Le comité prie également instamment le gouvernement d’intensifier la lutte contre les violences faites aux syndicalistes en concevant et en mettant en œuvre toutes les mesures nécessaires à cet effet, y compris des orientations et des instructions claires à l’intention de tous les agents de l’État et de rendre opérationnels les mécanismes nationaux de surveillance et d’enquête, de manière à prévenir la répétition d’actes violents contre des syndicalistes et des dirigeants syndicaux et à faire en sorte que ceux-ci ne soient pas systématiquement soupçonnés d’appartenir à des groupes insurrectionnels ou autres groupes paramilitaires, compte tenu de l’effet stigmatisant que cela peut avoir sur l’exercice d’activités syndicales légitimes.
    • e) Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le caractère grave et urgent des questions traitées dans le présent cas.

B. Allégations des organisations plaignantes

B. Allégations des organisations plaignantes
  1. 644. Le 1er septembre 2021, le KMU a soumis des informations supplémentaires alléguant que le gouvernement a ouvertement déclaré les syndicats affiliés au KMU, ainsi que d’autres organisations - la Confédération pour l’unité, la reconnaissance et l’avancement des fonctionnaires (COURAGE) et l’Alliance des enseignants concernés (ACT) – comme organisations terroristes communistes, ce qui a conduit à des violations flagrantes des droits des travailleurs en toute impunité. Les organisations plaignantes soulignent une augmentation drastique des cas de répression syndicale et de privation du droit des travailleurs de s’organiser depuis la déclaration et l’application de la loi martiale dans la région de Mindanao en 2017, ainsi qu’une détérioration de la situation des droits du travail dans la région du Southern Tagalog. Elles allèguent en particulier de nombreux cas d’exécutions extrajudiciaires, de tentatives d’assassinat, d’arrestations illégales, de détentions, de menaces, de harcèlement et d’intimidation de dirigeants syndicaux, ainsi que diverses formes de répression et d’ingérence dans les affaires syndicales entre 2017 et 2021. Elles dénoncent également le fait que le gouvernement n’a pas conduit d’enquête en bonne et due forme sur ces affaires ni traduit les auteurs en justice, ce qui renforce le climat d’impunité, de violence et d’insécurité et nuit par conséquent à l’exercice des droits syndicaux.
  2. 645. Les organisations plaignantes allèguent que, parallèlement à la «guerre contre la drogue», des syndicalistes et des travailleurs sont également pris pour cibles et tués lors de raids des forces de l’État, qui visent à empêcher les syndicalistes d’exercer leur rôle et à mettre fin au syndicalisme tout court. Elles allèguent que le climat d’impunité permet l’assassinat de dirigeants syndicaux et dénoncent les cas concrets de meurtres et de tentative de meurtres suivants:
    • Le 31 octobre 2018, Danny Boy Bautista, membre actif du syndicat agricole Nagkahiusang Mamumuo sa Suyapa (NAMASUFA NAFLU KMU) a été abattu sur le marché public de Compostela. La police n’a pas encore communiqué le nom du suspect mais a indiqué que sa mort était fortement liée à son engagement syndical.
    • En novembre 2018, Jerry Alicante, un autre syndicaliste actif du NAMASUFA a été abattu mais a survécu à la tentative d’assassinat, de même qu’un autre syndicaliste, Victor Ageas, en septembre 2018.
    • En novembre 2018, des individus non identifiés ont mis le feu à la maison familiale du président du NAMASUFA, Paul John Dizon, mais l’incendie a été circonscrit; le lendemain, ils sont revenus et ont tiré huit coups de feu avant de prendre la fuite. En décembre 2018, les incendiaires ont brûlé la maison du président du NAMASUFA, ainsi que le bureau du syndicat adjacent à la maison du président et la maison de l’ancien président Vicente Barrios.
    • En novembre 2019, Reynaldo Malaborbor, l’un des pionniers du Pagkakaisa ng Manggagawa sa Timog Katagalugan (PAMANTIK KMU), ancien membre du Syndicat des Philippines - Mouvement du Six Février et dirigeant de la Fédération des syndicats des Philippines et des services connexes (TUPAS), a été abattu de quatre balles par un assaillant inconnu, alors qu’il revenait de la mairie de Cabuyao où il négociait la libération de grévistes détenus. Il a été tué sur le coup avant que l’assaillant ne prenne la fuite avec un autre complice. Plus tard dans la journée, des habitants ont indiqué que des hommes inconnus avaient rôdé autour de la résidence de Malaborbor.
    • Le 7 mars 2021, neuf militants ont été tués et six arrêtés lors des «tueries sanglantes», ou «dimanche sanglant», des raids de la police et de l’armée. Emmanuel «Manny» Asuncion, coordinateur provincial du Bagong Alyansang Makabayan dans la province de Cavite et dirigeant ouvrier de plusieurs organisations, a été brutalement assassiné au Centre d’assistance aux travailleurs (WAC) de Dasmamas, Cavite, par des éléments de la police. Les unités sont entrées de force dans les locaux où M. Asuncion, sa femme et un autre bénévole dormaient. Sous la menace d’une arme, ils ont forcé le bénévole à se coucher par terre et l’ont ensuite amené, ainsi que la femme de M. Asuncion, à l’extérieur pour leur dire qu’ils allaient procéder à une fouille, mais qu’ils ne pouvaient pas présenter le mandat de perquisition. Ils ont alors entendu des cris et plusieurs coups de feu provenant de l’immeuble et ont vu le corps de M. Asuncion chargé dans un véhicule de police; il avait subi six blessures par balle. La police a procédé à une fouille de l’immeuble et un enquêteur a dit plus tard à la femme de M. Asuncion qu’ils n’avaient pas trouvé d’armes à feu ou d’explosifs. Le même jour, Melvin Dasigao et Mark Lee «MakMak» Bacasno, membres de la San Isidro Kasiglahan Fraternity and Cooperation for Livelihood, Justice and Peace, ont été assassinés. Des hommes non identifiés se sont présentés à la résidence de M. Dasigao dans le village de Kasiglahan, à Rodriguez, Rizal, ont crié sur les habitants et ont fait sortir sa femme et ses deux enfants lorsqu’ils ont entendu trois coups de feu et ont vu le corps de M. Dasigao amené à l’extérieur. Dans le même village, des hommes armés ont pénétré de force dans la résidence de M. Bacasno. On a entendu la police crier qu’elle avait trouvé des armes et de la drogue à l’intérieur et les voisins ont entendu un coup de feu et une explosion. Le lendemain, les familles des deux hommes se sont vu refuser l’accès à leurs corps au funérarium d’Antipolo où la police les a amenés, ainsi que les corps de quatre autres personnes qui auraient été tuées par la police. Les organisations plaignantes affirment que les auteurs de ces crimes étaient les unités du Groupe des enquêtes pénales et de lutte contre la criminalité (CIDG) de la police, la Force d’action spéciale et une brigade de l’armée.
    • Le 28 mars 2021, Dandy Miguel, dirigeant syndical national et vice-président du PAMANTIK KMU (une section régionale du KMU), membre du conseil national du KMU et président du Power of United Workers of Fuji Electric Philippines, a été assassiné alors qu’il rentrait chez lui en moto après une consultation avec des dirigeants syndicaux à Calambra, Laguna. M. Miguel a été acculé par deux motocyclettes, a reçu plusieurs balles et a subi huit blessures par balle qui ont entraîné sa mort. Au moment de sa mort, M. Miguel travaillait sur les affaires du «dimanche sanglant», aidant les familles à déposer des plaintes devant la Commission des droits de l’homme (CDH) et les dirigeants syndicaux à déposer des plaintes pour menaces, harcèlement et intimidation.
    • Les organisations plaignantes soulignent également que, selon les rapports du Centre pour les droits syndicaux et de la personne (CTUHR), en août 2021, il y eu 56 cas d’exécutions extrajudiciaires parmi les travailleurs dans le pays sous l’administration Duterte, dont 17 provenaient de syndicats agricoles et ont été précédemment soumis au comité dans ce cas par la Fédération des travailleurs agricoles des Philippines (UMA) et la Fédération nationale des travailleurs du sucre - alimentation et commerce général (NFSW-FGT).
  3. 646. Les organisations plaignantes affirment en outre que le gouvernement utilise la loi comme arme pour emprisonner les syndicalistes - ils sont ciblés, surveillés, menacés et soumis à des arrestations et détentions arbitraires fondées sur de fausses accusations criminelles, de fausses preuves et des mandats de perquisition et d’arrêt non fondés ou fabriqués. Selon les organisations plaignantes, les syndicalistes sont poursuivis au pénal pour leurs activités syndicales, ce qui conduit à des années de détention sur de simples allégations d’actes criminels qu’ils n’ont pas commis, un coup dur pour le mouvement syndical dans le pays. Souvent, ils sont soumis à des heures d’interrogatoire, ainsi qu’à des abus physiques, verbaux et psychologiques et à la torture. Les organisations plaignantes signalent les cas concrets suivants d’arrestation et de détention arbitraires de syndicalistes sur la base de fausses accusations:
    • En février 2018, Marklen Maojo Maga, un militant syndical impliqué dans l’organisation d’une grève des conducteurs de jeepney assurant des services d’utilité publique et organisateur de syndicats au sein du KMU dans la région métropolitaine de Manille et les provinces voisines, a été arrêté pour possession illégale d’une arme à feu. Sa compagne, Eleanor de Guzman, une dirigeante du KMU, et leur fils ont été contraints de quitter leur domicile pour des raisons de sécurité. M. Maga a été condamné en juin 2019 et son cas est en appel.
    • Entre juin et octobre 2018, de fausses accusations criminelles ont conduit à l’arrestation et à la détention illégales de Juan Alexander Reyes, Rowena et Oliver Rosales et Ireneo Atadero, tous membres d’organisations de travailleurs (KMU, Association des travailleurs de Quezon City et COURAGE). Les arrestations ont été menées conjointement par le CIDG de la région de la capitale nationale de la Police nationale des Philippines (CIDG NCR) et le Service de renseignements des forces armées des Philippines (ISAFP). Une arme de poing et un engin explosif ont été dissimulés chez des syndicalistes qui ont été accusés soit de meurtre, soit d’incendie criminel commis à Agusan del Norte, une province où ils ne se sont jamais rendus. Ils n’ont pas droit à une procédure régulière, de faux témoignages sont utilisés dans les accusations portées contre eux et ils sont empêchés d’exercer leur rôle d’organisateurs syndicaux durant leur détention.
    • En mars 2019, Eugene Garcia, président du syndicat des travailleurs de Pioneer Float Glass Manufacturing Inc, a été arrêté pour possession d’une arme à feu sur la base d’éléments de preuve fabriqués après la mise en œuvre d’un mandat de perquisition dans sa résidence. L’arrestation illégale de Garcia a eu lieu au moment où le syndicat faisait valoir sa convention collective par une série de dialogues avec la nouvelle direction, qui a refusé de reconnaître la convention et le syndicat. L’intéressé n’a pas encore été jugé devant le tribunal régional.
    • En mars 2019, une cinquantaine de membres de la police à bord de dix véhicules sont arrivés à la résidence de Ricky Chavez, membre du conseil exécutif de l’Association des travailleurs de Toyota Motors Philippines Corporation, pour signifier un mandat de perquisition, mais ils ne l’ont pas trouvé. Avant la perquisition, M. Chavez avait rejoint une manifestation que le syndicat avait organisée pour commémorer les 18 ans du licenciement de 233 syndicalistes en 2001.
    • En octobre 2019, à la suite de descentes de police simultanées dans les bureaux d’organisations populaires à Bacolod City, Negros Occidental, 55 personnes ont été arrêtées, dont 21 chauffeurs de bus et le secrétaire général du KMU Negros Island, Noli Rosales, qui a été détenu sur de fausses accusations de possession illégale d’armes à feu et d’explosifs, mais un non-lieu a été prononcé en 2021. Anne Krueger, journaliste et organisatrice communautaire, a également été arrêtée par le CIDG lors d’un raid dans le bureau de GABRIELA (A National Alliance of Women) à Bacolod City et bien qu’elle ait été libérée sous caution par la suite, elle fait toujours face à de fausses accusations de possession illégale d’armes à feu et de munitions.
    • Le 7 septembre 2020, Ramon Rescovilla, vice-président de PISTON, une fédération nationale de conducteurs de jeepney affiliée au KMU, a été arrêté à Daraga City, Albay, par 20 policiers et menotté; un sac contenant une grenade et une arme de poing lui a été remis, puis il a été conduit au poste de police de Daraga où il a été interrogé et frappé à cinq reprises par des hommes qu’il soupçonne être des agents des services de renseignement de l’État. On lui a refusé des soins médicaux et il fait maintenant face à de fausses accusations de possession illégale d’armes à feu, d’explosifs et de meurtre.
    • Le 4 décembre 2020, Jose A. Bernardino, un organisateur syndical de travailleurs du transport opérant dans les enclaves industrielles et dans la province de Pampanga, a été arrêté de force par des agents de l’État et menotté alors qu’il se rendait à Angeles City, Pampanga. M. Bernardino est accusé de rébellion et de possession illégale d’armes à feu, de munitions et d’explosifs, alors qu’il ne portait rien de tout cela lors de son arrestation par la police.
    • Le 10 décembre 2020, des hommes armés ont effectué une perquisition dans l’appartement de Romina Astudillo à Quezon City, où elle, Mark Ryan Cruz et Jaymie Gregorio se trouvaient. Ils ont trouvé un sac à dos contenant une grenade et ont amené les trois syndicalistes au CIDG NCR de Camp Crame où ils ont été interrogés sans avocat. Tous trois sont membres du KMU – Mme Astudillo a été élue au poste de secrétaire générale adjointe et M. Cruz au poste de conseiller général, tandis que M. Gregorio était chargé de l’organisation des travailleurs des zones portuaires et des communautés voisines de Smokey Mountain à Manille.
    • Le 10 décembre 2020, 40 fonctionnaires du CIDG NCR ont effectué une perquisition mise en scène dans l’appartement de la fille de Joel Demate et ont trouvé une grenade, un fusil, un pistolet et des munitions. M. Demate, qui est un organisateur syndical travaillant au sein de l’organisation Solidarity of Labor for Rights and Welfare, a été conduit au poste de police et fait l’objet de multiples poursuites pour possession illégale d’armes à feu et d’explosifs.
    • Le 10 décembre 2020, une trentaine de membres armés du groupe d’intervention (SWAT) du district de police de Quezon City et du CIDG de Quezon City, certains portant des uniformes et d’autres en civil, ont fait irruption dans la résidence de Dennise Velasco, organisateur de Defend Jobs Philippines, de sa femme et du frère de celle-ci. Les fonctionnaires en uniforme noir ont demandé aux hommes de s’allonger, les mains attachées dans le dos, tandis que la police et les fonctionnaires du barangay (conseil de village) procédaient à une fouille, au cours de laquelle ils auraient trouvé des armes à feu, des munitions et une grenade.
    • Le 4 mars 2021, la police a emmené Arnedo «Nedo» Lagunias, ancien secrétaire du Syndicat des travailleurs de Honda Cars-OLALIA-KMU à Biñan City, Laguna, et d’autres résidents de sa maison, a effectué une fouille et a prétendument trouvé une arme de poing et une grenade, ce que M. Lagunias a nié avec véhémence; il est maintenant accusé de possession illégale d’armes à feu et d’explosifs.
    • Le 4 mars 2021, une cinquantaine d’agents du CIDG ont encerclé et enfoncé la porte de la maison de Ramir Corcolon à San Pablo City, Laguna, et ont procédé à une perquisition qui aurait abouti à la découverte d’une arme à feu, d’une grenade et d’un engin explosif improvisé. M. Corcolon est le président de l’organisme City Water District Employees’ Association de San Pablo City et le secrétaire général de l’organisme Water System Employees’ Response.
    • Le 7 mars 2021 (arrestations du «dimanche sanglant»), Steve Mendoza, vice-président exécutif de la fédération syndicale OLALIA-KMU et ancien président du syndicat des travailleurs de Philsteel-OLALIA-KMU, et sa compagne Rafaela Barquilla ont été réveillés par des hommes armés en tenue de camouflage qui ont détruit leur portail en acier. Bien que M. Mendoza ait insisté pour voir le mandat de perquisition et ait demandé aux hommes de s’identifier, ceux-ci ont fait irruption dans la maison, ont forcé M. Mendoza à se coucher au sol sous la menace d’une arme, ont envoyé sa femme et son fils à l’extérieur, puis ont mis la maison à sac. Ils ont ensuite déclaré avoir trouvé une arme de poing à l’intérieur et M. Mendoza a été accusé de possession illégale d’armes à feu, de munitions et d’explosifs.
    • Le 7 mars 2021 (arrestations du «dimanche sanglant»), au moins 20 hommes armés en tenue de camouflage sont entrés de force dans le bureau de l’organisation Defend Yulo Farmers à Cabuyao, Laguna, où se trouvaient Elizabeth «Mags» Camoral et quatre autres personnes, ont pointé une arme sur son compagnon, ont crié et ont mis le bureau à sac. Ils ont trouvé une arme de poing appartenant supposément à Mme Camoral, qui a été libérée sous caution mais qui fait toujours l’objet d’accusations mensongères de possession illégale d’armes à feu. Mme Camoral est l’ancienne présidente du Syndicat des travailleurs de F Tech et la coordinatrice provinciale de BAYAN Laguna.
    • Le 7 mars 2021 (arrestations du «dimanche sanglant»), des hommes armés ont pénétré de force au domicile d’Eugene Eugenio, membre du Syndicat des travailleurs de F Tech au niveau de la province et président de l’organisation Advancement of Rights and Responsibilities of Organized Workers. Les hommes ont indiqué qu’ils étaient à la recherche d’un pistolet, qu’ils auraient trouvé.
    • Le 30 mars 2021, une quarantaine de membres du CIDG ont encerclé la résidence de Florentino «Pol» Viuya, président de l’Alliance des travailleurs de la région III et du Bagong Alyansang Makabayan dans la région centrale de Luzon. M. Viuya a insisté pour que ses collègues et les fonctionnaires du barangay soient présents lors de la fouille, mais les fonctionnaires du CIDG ont fait le tour de la maison et ont trouvé une fenêtre ouverte à l’arrière. Après la fouille, la police a trouvé une grenade à main en évidence sur le rebord de la fenêtre ouverte et a arrêté M. Viuya. Le même jour, Joseph Canlas, dirigeant syndical paysan de l’AMGL Alliance of Peasants dans la région centrale de Luzon, a été arrêté et détenu sur la base des mêmes accusations mensongères, une grenade étant utilisée comme fausse preuve. M. Canlas s’est vu refuser les recours préalables au procès alors qu’il était malade, a contracté le COVID 19 en détention et est mort à l’hôpital.
  4. 647. En outre, les organisations plaignantes signalent plusieurs cas de dispersion violente de grèves de travailleurs:
    • En juin 2017, une centaine d’éléments combinés pleinement armés des forces armées et de la police, ainsi que des briseurs de grève de l’entreprise fruitière, ont violemment dispersé des travailleurs en grève du Syndicat des travailleurs de Shin Sun (SSWU), affilié au Syndicat du travail de la Fédération nationale (NAFLU KMU), les ont battus et ont utilisé du formol pour empêcher les travailleurs de défendre le piquet de grève. Après la dispersion de la grève, 12 travailleurs et leurs sympathisants ont été arrêtés: Vicente «Boy» Barrios; Eric Noble; Pio Salar; Elisar Lague; Angelito Atamosa; Crispo Atamosa; Gerry Atamosa; Ernesto Calinawan; Carmin Atamosa; Francisco Milallos; Ritiza Milallos et Lanie Rose Millalos.
    • En avril 2018, suite à la création par les travailleurs de l’organisation United Workers of Nutriasia, l’entreprise de production de condiments de Marilao, Bulacan a tenté de bloquer son enregistrement et a licencié les dirigeants syndicaux, dont Jessie Gemola, le président du syndicat. À la suite d’actes de discrimination antisyndicale, de licenciements illégaux et d’autres formes de pratiques de travail déloyales, le syndicat a mené une grève en juin 2018, au cours de laquelle des policiers armés ont tenté de pénétrer dans le voisinage des travailleurs en grève. Après que les tribunaux ordinaires ont ordonné aux grévistes de s’abstenir d’entraver l’entrée de l’entreprise, la police provinciale de Bulacan et le service de sécurité privée de l’entreprise ont violemment dispersé les travailleurs protestataires et arrêté 23 d’entre eux et leurs sympathisants pour agression physique: Mercy Macatabas Taborada; Elena Francisco Latoza; Mylene Arellano Baysa; Princess Punzalan Pineda; Ronello Hingpit Espejon; Jaymark M. Bautista; Jhon Paul L. Gonzales; Lloyd M. Salonga; Carmina R. Ileto; Romnick P. Agarpao; Ulysis Uy; Dinnis Datuin; Fernando Miguel B. Collantes; Christian S. Maniquiz; Rudy S. Magalang; Dinalyn V. Beringuel; Emerson C. Batarina; Reychelle Sta. Rosa; Jovilou Angcon; Lueuile Bangcat; Ronald Gillego; Francis Estrella et Jessie Villacastin. Fin juillet 2018, des violences se sont à nouveau produites lorsque le service de sécurité privée de l’entreprise et la police ont dispersé le piquet de grève des travailleurs, situé à plus de 100 mètres de la porte principale de l’entreprise, à l’aide de cannes, de matraques et de pierres, entraînant des blessures pour plus de 40 travailleurs et leurs sympathisants et l’arrestation de 19 travailleurs, dont 8 grévistes: Daisy Jane Heda; Robert Sequino; Sedney Villamor; Jerald Verano; Mark Ponce; Dannyboy Conel; Marylle Jons Peligro et Jeovelyn Bornales.
    • En juillet 2018, une grève des bras croisés de travailleurs de Unified Power of Workers de Middleby Philippines Inc, une association de travailleurs contractuels dans une usine de Biñan City, à Laguna, a été violemment dispersée, causant des blessures à cinq travailleurs et sept travailleurs ont été amenés au poste de police.
    • En octobre 2018, la police, l’armée et l’unité gouvernementale locale ont fait intervenir des briseurs de grève et des travailleurs non-grévistes pour disperser la grève des travailleurs affiliés au NAMASUFA chez Sumifru, une entreprise d’exportation de bananes à Compostela. Quelques jours plus tard, sept membres du NAMASUFA ont été interpellés par des hommes non identifiés, supposés être des hommes de main de l’entreprise, et battus. Plus tard, des briseurs de grève (des hommes de main et des travailleurs non-grévistes), escortés par des représentants des forces armées et de la police, ont attaqué les camps de grève, arrachant les accessoires et agressant les grévistes, ce qui a entraîné des blessures pour 27 travailleurs et des dommages aux biens syndicaux.
    • En juin 2019, des centaines d’hommes vêtus de noir ont attaqué les 200 travailleurs du syndicat des travailleurs de Pepmaco qui dormaient lors de leur piquet de grève, blessant grièvement plusieurs d’entre eux et détruisant le piquet de grève. En août 2019, après que les travailleurs en grève ont organisé une manifestation à l’entrée du parc industriel, la police a arrêté arbitrairement 25 travailleurs, les a forcés à monter dans un véhicule de police et a placé 18 d’entre eux en détention. Les travailleurs ont été libérés le lendemain après qu’une ordonnance du tribunal a transmis au ministère de la Justice des notes circulaires enjoignant aux procureurs d’obtenir d’abord l’autorisation du ministère du Travail et de l’Emploi (DOLE) avant de prendre connaissance des plaintes et d’entamer une procédure découlant d’un conflit du travail ou liée à celui-ci.
    • En juillet 2019, la police et des agents de sécurité privée d’une entreprise de production de condiments à Cabuyao, Laguna, ont jeté des pierres sur les 400 travailleurs en grève, les intimidant avec des armes à feu à canon long, et ont utilisé des barres métalliques et des matraques pour les attaquer. Au total, 19 travailleurs ont été gravement blessés et 17 ont été arrêtés, dont trois dirigeants syndicaux, et accusés de dégradation volontaire, de coercition aggravée et d’agression directe. Ils se sont vu refuser des recours, ce qui a conduit à leur détention prolongée, et n’ont été libérés qu’en décembre 2019 après avoir payé une caution, tandis que les poursuites à leur encontre sont maintenues.
  5. 648. Enfin, les organisations plaignantes soutiennent que l’administration peut, par le biais du conseil antiterroriste et sur la base de la loi antiterroriste, exclure arbitrairement des individus et des organisations en tant qu’éléments terroristes, ou simplement utiliser la loi comme mesure d’ensemble pour qualifier de terroristes des organisations légitimes et leurs dirigeants. L’étiquetage du KMU comme organisation terroriste est, selon les organisations plaignantes, une déclaration de politique générale et un ordre visant à éradiquer les syndicats et à empêcher les travailleurs de s’organiser. Des documents affichés dans des lieux publics et publiés sur les médias sociaux (données officielles de la police ou faux comptes financés par l’État) qualifient la KMU et ses dirigeants de partisans de la Nouvelle armée populaire (NPA) ou de sa branche légale, de «terroristes» ou de membres d’ «organisations communistes-terroristes», dans le but d’amener les travailleurs à se désaffilier ou de les dissuader de se syndiquer. Les organisations plaignantes affirment que cette campagne de diffamation à l’encontre des syndicalistes vise à créer un prétexte pour de nouveaux abus et violations des droits de l’homme et s’inscrit dans le cadre de l’approche de la sécurité nationale axée sur «l’ensemble de la nation», dans laquelle chaque segment du gouvernement est chargé d’aider à identifier les insurgés et les opposants probables au régime, ce qui conduit les instances gouvernementales à recenser les membres des organisations progressistes et à soumettre ces informations à l’armée pour soutenir les efforts de contre-insurrection. Dans la pratique, cela se traduit par de graves menaces à l’encontre des dirigeants et des membres des syndicats, des campagnes de diffamation, une propagande antisyndicale menée par l’armée, de fausses redditions, une intervention directe de l’armée dans les affaires syndicales, y compris les élections syndicales et la désaffiliation forcée des syndicats et des fédérations.
  6. 649. Les organisations plaignantes allèguent à cet égard que les auteurs de certains de ces incidents dans la région de Tagalog Sud sont des unités des forces armées de Luzon Sud, dirigées par le lieutenant général Antonio Parlade Jr, aujourd’hui à la retraite, entre 2019 et mi 2021, et que tant le Groupe de travail national pour mettre fin au conflit armé communiste local (NTF ELCAC) que le Bureau de coordination conjoint pour la paix sociale (désormais appelé le Bureau de l’alliance pour le programme en faveur de la paix sociale (AIPPO)) se sont livrés à une propagande et à un harcèlement et des menaces persistants contre les dirigeants syndicaux. Des agents de l’État se sont souvent rendus à domicile par vagues successives pour menacer les dirigeants syndicaux de se rendre en tant que rebelles de la NPA ou de se désaffilier de leur syndicat en échange du retrait de toute menace d’arrestation ou d’enlèvement. Ils se sont également ingérés dans les affaires syndicales, ont délogé des responsables syndicaux et démantelé des organisations de travailleurs. Les organisations plaignantes soulignent les cas spécifiques suivants:
    • Depuis février 2018, les militaires ont mené des campagnes et des assemblées de porte à porte chez les travailleurs du NAMASUFA et leurs proches dans la ville de Compostela, dans le but de convaincre les membres du KMU de se livrer aux militaires pour effacer leurs noms de la liste des partisans et sympathisants de la NPA ou de se désaffilier des syndicats du KMU. Le gouvernement local de la ville de Compostela a même déclaré le KMU persona non grata.
    • En février 2019, trois dirigeants syndicaux du Musahamat Workers’ Labour Union (MWLU), un organisme local affilié à la NAFLU KMU à Pantukan, dans la vallée de Compostela, à savoir Esperidion Cabaltera, président du syndicat, Richard Genabe, vice-président, et Ronald Rosales, secrétaire, ont été enlevés à leur domicile, emmenés dans un camp militaire, détenus toute la nuit sans raison, interrogés et contraints d’admettre qu’ils étaient membres de la NPA, de démissionner du KMU et de demander aux autres de faire de même. Les trois syndicalistes ont nié les allégations mais ont signé les documents et bien qu’ils aient été libérés le lendemain, les soldats les surveillent de près. Après leur libération, 153 syndicalistes ont été contraints de signer un formulaire indiquant qu’ils démissionneraient du KMU pour que leur nom soit blanchi. Avant leur enlèvement en février 2019, MM. Cabaltera et Genabe avaient déjà été harcelés par des hommes armés non identifiés soupçonnés d’être des membres des forces armées. Les organisations plaignantes indiquent que les incidents concernant MM. Cabaltera et Genabe avaient déjà été signalés au comité dans le cas no 3119 concernant les Philippines, où le comité a prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer l’instruction et le règlement complets et rapides des actes allégués de harcèlement de dirigeants et membres de syndicats affiliés au KMU, y compris les membres et militants du syndicat Musahamat. [Voir cas no 3119, 387e rapport, octobre 2018, paragr. 626.]
    • En juillet 2019, le président du Syndicat des travailleurs des plantations d’huile de palme des Philippines a soumis à la direction de la NAFLU KMU une lettre déclarant sa désaffiliation de la fédération, citant l’inscription sur liste rouge et le harcèlement de ses membres par les militaires comme principale raison de sa désaffiliation.
    • En septembre 2019, pendant la période des élections syndicales, des membres de l’United Workers of Mindanao Agriculture Inc. ont repéré des affiches et des prospectus autour de la plantation vilipendant le syndicat et sa fédération affiliée, la NAFLU, en utilisant le logo de la NPA.
    • Entre février et mai 2020, la PAMANTIK KMU a recensé au moins 10 membres du syndicat des employés de l’usine Coca-Cola à Santa Rosa qui ont été victimes de harcèlement, d’intimidation et de menaces de la part d’agents du NTF ELCAC, ce qui a également conduit à l’enlèvement de certains membres du syndicat en avril 2020 qui ont ensuite été présentés comme des rebelles se rendant.
    • En février 2020, la police a commencé à intimider des membres du syndicat Nagkakaisang Manggagawa ng Supreme (NMS NAFLU KMU), un syndicat d’une entreprise de production d’acier à Bulacan, par des visites répétées de l’usine, des inscriptions sur liste rouge et des actes d’ingérence dans les activités syndicales (réunions et élections locales), ce qui a abouti à l’élection d’un syndicat de la direction lors des dernières élections.
    • Depuis avril 2020, le président d’OLALIA KMU Hermenigildo «Hermie» Marasigan se cache en raison des menaces pesant sur sa sécurité. En juillet 2021, sa femme a indiqué qu’environ cinq hommes en uniforme se sont rendus chez eux pour aider M. Marasigan à blanchir son nom et ont averti que l’unité de renseignement finirait par le retrouver. En août 2021, quatre militaires se sont à nouveau rendus à leur domicile avec le même objectif.
    • Entre mai et novembre 2020, des policiers se présentant comme faisant partie de l’AIPPO sont venus s’ingérer dans les activités syndicales du syndicat Alcophil Workers’ Union-Alliance of Genuine Labor Organizations KMU. Le président du syndicat, Eliseo Taping, a été vilipendé et inscrit sur liste rouge avec une prolifération d’affiches placées à proximité de l’usine de l’entreprise à Valenzuela à Manille.
    • Entre décembre 2020 et mars 2021, au moins deux responsables syndicaux du Syndicat des travailleurs d’Optodev NAFLU KMU ont fait l’objet de surveillance, de menaces et de harcèlement dans leurs résidences à Laguna.
    • Entre novembre 2020 et septembre 2021, le NXP Workers’ Union-NAFLU KMU a recensé 35 responsables et membres syndicaux qui ont reçu au moins une fois la visite d’agents de l’État se présentant comme des membres du NTF ELCAC à l’usine ou à leurs résidences de Cabuyao et de Canlubang, à Laguna, et qui ont été interrogés sur leurs fonctions, leurs activités syndicales et leurs cotisations syndicales.
    • Entre février et août 2021, au moins 15 dirigeants et membres du Wyeth Philippines Progressive Workers’ Union Drug and Food Alliance KMU ont au moins reçu une fois des visites d’agents de l’État se présentant comme des membres du NTF ELCAC. Le responsable syndical Rico Dimaano et le président du syndicat ont été menacés pour qu’ils signent une résolution du conseil exécutif déclarant la désaffiliation du syndicat du KMU.
    • En mars 2021, un ancien membre du KMU (nom non communiqué) travaillant à la rénovation de la maison d’Eleanor de Guzman, directrice des droits de l’homme du KMU, a été interrogé par deux hommes du CIDG qui ont indiqué que l’unité surveillait régulièrement la résidence de Mme de Guzman et qu’elle allait déployer une équipe pour enlever Mme de Guzman et d’autres personnes.
    • En juin 2021, des affiches qualifiant de terroristes le KMU et son président Elmer Labog ont été vues à proximité du siège du KMU à Barangay Claro, à Quezon City, Laguna et Davao City. Les pages des médias sociaux du gouvernement et les faux comptes financés par l’État qualifient également le KMU et ses dirigeants de terroristes. En outre, les bureaux des centres syndicaux sont surveillés et les biens sont souvent détruits, notamment en ce qui concerne le siège du KMU à Barangay Claro à Quezon City, le bureau de Defend Jobs à Quezon City et le bureau d’OLALIA KMU à Laguna.
    • Les organisations plaignantes font également état du dénigrement de Leon Porquia, un bénévole du KMU, accusé de recruter des rebelles, ainsi que, plus largement, d’actes d’intimidation à l’encontre de dirigeants et de membres des syndicats de travailleurs de TMA Group Phils, F Tech, PIGLAS Middleby Phils Corp LIGA, Daiwa Seiko Phils, Sun logistics Corp, Aichi Forge Phils et de travailleurs d’OLALIA KMU.
  7. 650. En relation avec les allégations ci-dessus, les organisations plaignantes indiquent qu’elles ont signalé les récents cas de meurtre et d’autres violations des droits de l’homme parmi les syndicats affiliés au KMU à la CDH, au DOLE et au pouvoir judiciaire, mais que la progression des procédures est très lente afin d’évaluer de manière juste l’apparent plan commandité par l’État visant à réduire au silence les formations organisées qui critiquent les politiques anti-travailleurs de l’administration. À l’heure de la soumission de ces allégations, les organisations plaignantes indiquent qu’aucun membre des forces militaires ou de police n’a été sanctionné ni pénalisé pour des violations des droits de l’homme; au contraire, beaucoup ont été promus ou ont pris leur retraite. Le KMU, PAMANTIK et les familles des victimes ont également fait appel au mécanisme de l’ordonnance administrative no 35 du ministère de la Justice pour demander une enquête sur les incidents du «dimanche sanglant» et l’assassinat de Dandy Miguel. Ils font valoir que ces assassinats ne devraient pas être écartés sur la seule base de la présomption de régularité de l’action de la police ou des arguments selon lesquels les personnes arrêtées se sont défendues ou que les assassinats n’étaient pas liés au travail. Ils demandent au contraire une enquête équitable et approfondie sur toutes les actions de la police et la mise en cause de leurs auteurs. Les organisations plaignantes affirment que, pour les syndicalistes arrêtés et détenus, leur défense juridique est un défi, que des juristes spécialisés dans les droits de l’homme sont tués, que la loi est militarisée et que le système judiciaire est compromis avec des juges soumis à la coercition militaire et menacés d’être tués pour leur indépendance. Le KMU a fait part de ces préoccupations à l’administrateur de la Cour suprême et a recommandé des réformes concernant les règles des tribunaux et les directives relatives à l’émission de mandats d’arrêt et de perquisition. La Cour suprême a publié la circulaire administrative no 13 en juillet 2021, qui exige l’utilisation de caméras corporelles lors des arrestations et des perquisitions et limite le pouvoir des juges du Grand Manille de délivrer des mandats de perquisition dans des lieux situés en dehors de leur juridiction. Le KMU a également déposé une pétition remettant en cause la constitutionnalité de la loi antiterroriste de 2020 et une plainte auprès du Bureau national des enquêtes pour qu’il examine les publications de l’État qui qualifient les dirigeants du KMU de terroristes.
  8. 651. Sur la base de ce qui précède, les organisations plaignantes allèguent que les forces de sécurité de l’État continuent de porter atteinte aux droits à la liberté syndicale et de violer de manière flagrante la loi, les procédures régulières, les droits civils et les droits humains fondamentaux des travailleurs philippins, notamment en assimilant les activités syndicales légitimes à des combats. Même si le DOLE a fait valoir que les meurtres de travailleurs ne sont pas liés au travail et que des recours sont disponibles pour les groupes de travailleurs en cas de violations (tels que le mécanisme de l’ordonnance administrative no 35, les directives sur la conduite des fonctionnaires), le problème réside dans l’absence d’état de droit, la mise en œuvre des directives et la question de savoir si les mécanismes disponibles s’avéreraient impartiaux lorsque les agences impliquées dans les enquêtes appartiennent au NTF ELCAC. Les organisations plaignantes affirment que, alors que la Constitution, les lois, les tribunaux et les directives sont en place, les forces de sécurité de l’État ne respectent manifestement pas ces institutions et que le NTF ELCAC, lourdement financé, est devenu le principal instrument des violations des droits de l’homme dans le pays, ne persécutant pas les communistes armés mais les civils non armés et les organisations légitimes. Les organisations plaignantes affirment donc que le gouvernement n’a pas garanti, défendu et protégé les droits fondamentaux des travailleurs à la vie, à la liberté, aux autres droits de l’homme fondamentaux et à la liberté syndicale. Le fait que les meurtres et autres violations des droits de l’homme aient persisté et se soient aggravés depuis la Conférence internationale du Travail de 2019 signifie que le gouvernement n’a pas pris de mesures significatives pour endiguer ces abus; au contraire, il met en œuvre des politiques et des organes qui ouvrent la voie aux violations des droits syndicaux et des droits humains. Les organisations plaignantes appellent le gouvernement à mettre fin à la répression et aux violations des droits humains à l’encontre des syndicalistes et de leurs familles.

C. Réponse du gouvernement

C. Réponse du gouvernement
  1. 652. Dans sa communication datée du 30 septembre 2022, le gouvernement indique que, à la suite des élections présidentielles de mai 2022, les départements et organismes gouvernementaux chargés d’étudier les recommandations du comité ont été profondément restructurés. Le gouvernement affirme respecter pleinement les normes du travail de l’OIT. Il reconnaît les problèmes de longue date qui ont été portés à la connaissance des mécanismes de contrôle de l’Organisation et rappelle qu’il a l’intention de traiter ces problèmes avec objectivité. Il ajoute qu’il a récemment adopté une politique visant à instaurer un dialogue ouvert avec diverses organisations syndicales, notamment celles qui sont affiliées aux organisations plaignantes impliquées dans le présent cas, afin d’obtenir des informations plus précises au sujet des nombreuses plaintes dénonçant des actes de harcèlement, des inscriptions sur liste rouge et des violences dirigés contre des syndicalistes. Par la voie de la communication et du dialogue, le gouvernement se propose de collaborer avec les organisations syndicales afin de créer des conditions plus propices à l’exercice des droits syndicaux. Ces démarches viennent compléter des modifications introduites au sein du système judiciaire, la Cour suprême ayant notamment émis une ordonnance administrative qui circonscrit expressément la validité des mandats judiciaires à l’intérieur de la juridiction territoriale du juge émetteur du mandat, l’objectif étant de remédier à la pratique, vivement critiquée, des juges de Manille et de Quezon City consistant à émettre des mandats susceptibles d’être exécutés dans des zones ne relevant pas de leur juridiction.
  2. 653. En ce qui concerne les cas relatifs aux assassinats d’Antonio Petalcorin, d’Emilio Rivera et de Kagi Alimudin qui sont à l’origine du présent cas, le gouvernement indique que le système de mandats électroniques récemment mis en place aide à surveiller étroitement les suspects qui n’ont pas encore été appréhendés et que la police met désormais en œuvre simultanément diverses mesures d’application de la loi sur la répression de la criminalité, loi qui prévoit l’exécution, tous les deux mois, des mandats qui n’ont pas encore été appliqués. En conséquence, le commissariat de police de Palomo à Davao City, qui est compétent pour les cas concernant Petalcorin et Rivera, coordonne en permanence son action avec celle d’autres unités chargées de faire respecter la loi afin de localiser et d’appréhender les suspects. Le cas concernant Alimudin, bien qu’il ne soit pas classé comme un cas d’exécution extrajudiciaire sur la base des directives opérationnelles de l’ordonnance administrative no 35, continue de faire l’objet d’une enquête, conformément aux procédures classiques d’enquêtes pénales, enquête qui reste toutefois entravée par l’absence de témoins directs.
  3. 654. En ce qui concerne les allégations supplémentaires soumises par les organisations plaignantes en mars et juin 2021, le gouvernement affirme qu’elles renvoient à des incidents distincts de ceux initialement soumis au titre du présent cas et ne devraient pas être examinées dans le cadre de ce dernier. Il affirme également que nombre des incidents allégués passent actuellement par les diverses étapes des procédures d’enquête, des procédures de poursuite et des procédures judiciaires mises en œuvre par des institutions nationales pleinement opérationnelles. Il indique en particulier que des allégations faisant état d’exécutions extrajudiciaires ont été soulevées par le Centre pour les syndicats et les droits de l’homme et sont examinées par des organes de surveillance tripartites régionaux. Cinq des cas en question font l’objet d’une enquête de police – ceux concernant Leonardo Escala, Alexander Ceballos, Flora Gemola, Ronald Manlanat et Felipe Dacal-Dacal –, trois sont en instance devant les tribunaux ou en cours de jugement – les cas signalés des meurtres d’Ariel Diaz, de Julius Broce Barellano et des neuf agriculteurs dits «les 9 de Sagay». S’agissant du cas d’Ariel Diaz, le gouvernement, se fondant sur un rapport du bureau de police de la province d’Isabela établi en août 2021, indique que des poursuites pénales pour meurtre ont été engagées devant le tribunal à l’encontre d’un suspect dûment identifié et de plusieurs autres encore non identifiés. Selon la police, le motif du crime était un litige foncier; les accusés, contre lesquels un mandat d’arrêt a été lancé, sont actuellement recherchés. En ce qui concerne le cas de Julius Broce Barellano, un acte d’accusation pour meurtre dirigé contre les suspects – lesquels ont été arrêtés et placés en détention – a été déposé devant le tribunal local de San Carlos City (Negros Occidental). En ce qui concerne les agriculteurs de Sagay, une procédure pénale pour meurtres multiples (actuellement en instance devant la section 73 du tribunal régional de Sagay City (Negros Occidental)) a été lancée contre deux personnes identifiées et plusieurs autres non identifiées.
  4. 655. En ce qui concerne les autres cas présumés d’exécutions extrajudiciaires, de détention illégale et d’inscriptions sur liste rouge mentionnés par les organisations plaignantes en mars et juin 2021, le gouvernement déclare qu’il s’engage à suivre attentivement ces cas mais que, en raison du grand nombre d’incidents allégués et du temps écoulé depuis leur survenue, il devra disposer d’un délai raisonnable pour obtenir des informations précises et fiables à leur sujet.
  5. 656. En ce qui concerne les allégations supplémentaires formulées par les organisations plaignantes en septembre 2021, le gouvernement indique qu’elles renvoient à deux autres cas de meurtres, à savoir celui de Dandy Miguel et ceux commis lors des raids effectués dans le sud de Luzon pendant la journée connue sous le nom de «dimanche sanglant». Le gouvernement fait savoir que Dandy Miguel a été abattu le 28 mars 2021 et que son cas a été soumis au Comité interinstitutions (IAC) du ministère de la Justice en vertu de l’ordonnance administrative no 35 immédiatement après les faits, à la suite de quoi le secrétaire du ministère a ordonné la création immédiate d’une équipe d’enquête spéciale, afin de faciliter l’enquête et la constitution du dossier. En avril 2022, l’IAC a organisé des conférences ad hoc au cours desquelles le cas de Dandy Miguel a été longuement examiné. Dans des rapports publiés en avril et septembre 2022, le procureur général adjoint et chef du secrétariat de l’IAC a indiqué que l’enquête sur ce cas était en cours.
  6. 657. En ce qui concerne les faits survenus lors du «dimanche sanglant», le gouvernement indique qu’ils se sont produits dans le cadre des raids effectués simultanément par la police et les forces armées dans le sud de Luzon. Selon le porte-parole de la police de la région IVA, ces raids ont été menés aux fins de l’exécution de mandats de perquisition devant permettre la saisie d’armes à feu et d’explosifs détenus de manière illégale. L’opération a entraîné la mort de neuf personnes: Emmanuel «Manny» Asuncion, Chai Evangelista, Ariel Evangelista, Melvin Dasigao, Mark Bacasno, Abner Esto, Edward Esto, Dumagat Puroy et Randy «Pulong» Dela Cruz. Le secrétariat de l’IAC a indiqué en septembre 2022 que le cas faisait l’objet d’un suivi permanent. Le gouvernement indique notamment les éléments suivants:
    • En janvier 2022, le ministère de la Justice a publié un communiqué de presse indiquant que le Bureau national des enquêtes a déposé une plainte pour meurtre contre 17 fonctionnaires et membres du personnel associés à la Police nationale des Philippines - Groupe d’enquête et de détection criminelle (PNP-CIDG) dans la région IVA et ayant participé à l’exécution des mandats de perquisition à Nasugbu, Bantangas, qui ont entraîné la mort d’Ariel et de Chai Evangelista.
    • En ce qui concerne la mort d’Emmanuel «Manny» Asuncion, l’équipe d’enquête spéciale a recommandé le dépôt d’un acte d’accusation de meurtre contre certains agents des forces de l’ordre impliqués dans l’incident. Une plainte contre 17 policiers identifiés a par la suite été déposée auprès du procureur de Dasmariñas City, la requérante étant en l’instance l’épouse d’Asuncion.
    • En septembre 2022, le ministère de la Justice a confirmé que 30 policiers au minimum seront inculpés pour les meurtres des dirigeants syndicaux Emmanuel «Manny» Asuncion et Ariel et Chai Evangelista. Quant aux autres victimes, l’équipe d’enquête spéciale poursuit ses investigations.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 658. Le comité rappelle que le présent cas concerne des allégations de détérioration de la situation des droits du travail dans le pays, caractérisée par de nombreux cas d’exécutions extrajudiciaires de dirigeants et de membres syndicaux, de tentatives d’assassinat, d’arrestations et de détentions illégales, d’inscription sur liste rouge, de harcèlement, d’intimidation et de menaces à l’encontre de syndicalistes, ainsi que des allégations de répression syndicale et d’ingérence dans les affaires syndicales, et l’incapacité du gouvernement à enquêter de manière appropriée sur ces cas et à traduire les auteurs en justice, ce qui renforce le climat d’impunité, de violence et d’insécurité et nuit par conséquent à l’exercice des droits syndicaux.
  2. 659. Le comité note qu’une mission tripartite de haut niveau a eu lieu dans le pays entre le 23 et le 26 janvier 2023, tel que demandé par la Commission de d’application des normes de la Conférence dans ses recommandations de juin 2019 concernant l’application de la convention nº 87.
  3. 660. En ce qui concerne les allégations initiales et l’état d’avancement des cas concernant les assassinats d’Antonio «Dodong» Petalcorin, d’Emilio Rivera et de Kagi Alimudin Lucman (recommandation a)), le comité rappelle que les meurtres ont eu lieu en 2013 et que le gouvernement a indiqué à plusieurs reprises qu’ils faisaient, ou continuaient de faire, l’objet d’une enquête conformément à la procédure ordinaire d’enquête et de poursuite pénale. Tout en prenant bonne note de l’indication du gouvernement selon laquelle les trois cas font toujours l’objet d’une enquête et qu’un certain nombre de mesures ont été mises en place pour faciliter la recherche des suspects qui n’ont pas encore été appréhendés, notamment l’instauration d’une coordination entre les services de répression compétents, le comité constate avec regret que, pour les trois cas, aucune avancée réelle ne semble avoir été accomplie qui permette de traduire les coupables en justice. Tout en reconnaissant une fois encore la difficulté qu’il y a à poursuivre des enquêtes et à soumettre à la justice des agissements criminels perpétrés il y a presque dix ans et dont les auteurs n’ont pas encore été appréhendés, le comité doit exprimer une nouvelle fois le ferme espoir que les coupables seront traduits en justice et condamnés sans délai, afin d’éviter que des crimes aussi graves ne restent impunis. Le comité prie instamment le gouvernement de continuer de faire tout son possible à cet égard et de le tenir informé de tout progrès accompli.
  4. 661. En ce qui concerne les allégations supplémentaires communiquées par l’ITF, l’UMA et la NFSW FGT en mars et juin 2021 (recommandations b) et c)), le comité rappelle qu’elles font référence à une politique de répression et de criminalisation des syndicats qui s’est traduite dans la pratique par de graves violations des droits humains et syndicaux, dont 18 cas d’exécution extrajudiciaire de syndicalistes et de dirigeants syndicaux depuis 2016, des arrestations illégales, des mises en détention et de fausses accusations criminelles concernant plus de 100 travailleurs, militants des droits de l’homme et syndicalistes, ainsi que de nombreux cas d’intimidation, de harcèlement, d’inscription sur liste rouge et de menaces contre des syndicalistes et des dirigeants syndicaux, dont la plupart se caractérisent par un certain degré d’implication d’agents de l’État, en particulier des membres de la police, des forces armées ou d’autres organisations sous leur contrôle. Le comité prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle un grand nombre des incidents allégués passent actuellement par les diverses étapes des multiples procédures (conduite des enquêtes, engagement des poursuites et processus judiciaires) mises en œuvre par des institutions nationales pleinement opérationnelles, notamment les organes régionaux tripartites de contrôle. Le gouvernement signale en particulier que cinq cas présumés de meurtre font l’objet d’une enquête de police – ceux de Leonardo Escala, d’Alexander Ceballos, de Flora Gemola, de Ronald Manlanat et de Felipe Dacal-Dacal – et que trois sont en instance devant les tribunaux ou en cours de jugement – ceux d’Ariel Diaz, de Julius Broce Barellano et des neuf agriculteurs de Sagay. Le comité relève que le gouvernement ne fournit aucune information concrète sur les autres allégations formulées par les organisations plaignantes, en particulier sur deux autres cas d’exécutions extrajudiciaires et de nombreux cas de détention illégale et d’inscriptions sur liste rouge [voir 396e rapport, octobre 2021, paragr. 515-517], mais indique qu’il a la ferme intention de suivre ces cas, tout en soulignant les difficultés auxquelles il est confronté à cet égard (notamment le nombre élevé d’incidents, et la longue période de temps écoulée depuis leur survenue).
  5. 662. Prenant dûment note des développements susmentionnés rapportés par le gouvernement, le comité rappelle qu’il a déjà exprimé sa profonde préoccupation face à la gravité des allégations formulées, ainsi qu’à leur caractère répété et prolongé, qui crée un climat de violence et d’impunité extrêmement préjudiciable à l’exercice légitime des droits syndicaux dans le pays. Dans ce contexte, et rappelant en outre que la simple absence de conflit du travail ou de campagne syndicale ne signifie pas nécessairement qu’il n’existe aucun lien entre le crime et l’exercice d’activités, une affiliation ou des responsabilités syndicales [voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 92], le comité s’attend fermement à ce que les enquêtes et les procédures judiciaires en cours prennent pleinement en considération tout lien direct ou indirect susceptible d’être établi entre ces agissements violents et les activités syndicales des victimes. Le comité s’attend fermement à ce que le gouvernement donne la priorité aux enquêtes menées sur tous les graves incidents susmentionnés et que les auteurs de violences contre des syndicalistes soient identifiés et traduits en justice, qu’il s’agisse de personnes privées ou d’agents de l’État, afin de lutter contre l’impunité et de prévenir la répétition de tels agissements. Le comité prie instamment le gouvernement de lui communiquer des informations à jour sur tout progrès accompli, notamment en ce qui concerne l’allégation faisant état de l’exécution extrajudiciaire de Jose Jerry Catalogo et d’Antonio «Cano» Arellano, au sujet de laquelle le gouvernement n’a encore fourni aucune information précise. Le comité prie également instamment le gouvernement d’assurer immédiatement la libération de tous les syndicalistes placés en détention s’il devait s’avérer que leur arrestation ou leur détention était liée à l’exercice légitime de leurs droits syndicaux.
  6. 663. S’agissant des informations supplémentaires fournies par les organisations plaignantes en septembre 2021, le comité observe qu’elles concernent des allégations relatives à une augmentation de la répression syndicale et de la privation du droit d’organisation des travailleurs depuis 2017, avec un impact sérieux sur le mouvement syndical dans le pays. En particulier, le comité observe que les organisations plaignantes dénoncent l’assassinat de six syndicalistes – Danny Boy Bautista, Reynaldo Malaborbor, Emmanuel «Manny» Asuncion, Melvin Dasigao, Mark Lee Bacasno et Dandy Miguel – et de six autres militants, ainsi que la tentative d’assassinat de quatre autres dirigeants et membres syndicaux, lors de raids menés par l’armée et la police entre octobre 2018 et mars 2021, qui, selon les organisations plaignantes, font partie d’une politique d’État visant à empêcher les travailleurs de s’organiser et à entraver le véritable syndicalisme dans le pays. Pour sa part, le gouvernement n’examine pas les allégations plus générales faisant état d’une politique étatique de répression syndicale mais fournit des informations actualisées au sujet des allégations de meurtres de syndicalistes et de militants. À cet égard, le comité note l’indication du gouvernement selon laquelle l’instruction du meurtre de Dandy Miguel, commis le 28 mars 2021, a été confiée au Comité interinstitutions du ministère de la Justice en application de l’ordonnance administrative no 35 immédiatement après les faits, qu’une équipe d’enquête spéciale a été créée pour faciliter l’enquête et que la constitution du dossier et l’enquête sont en cours. Le comité note en outre que le gouvernement fournit des précisions sur les faits survenus lors du «dimanche sanglant», à savoir les raids effectués simultanément par la police et les forces armées dans le sud de Luzon, raids qui, selon la police, ont été menés aux fins de l’exécution de mandats de perquisition devant permettre la saisie d’armes à feu et d’explosifs détenus de manière illégale et au cours desquels neuf personnes – Emmanuel «Manny» Asuncion, Chai Evangelista, Ariel Evangelista, Melvin Dasigao, Mark Bacasno, Abner Esto, Edward Esto, Dumagat Puroy et Randy «Pulong» Dela Cruz – ont trouvé la mort. À cet égard, le comité relève l’indication du gouvernement selon laquelle, suite à une plainte émanant du Bureau national des enquêtes, 30 policiers au moins seront inculpés pour les meurtres des dirigeants syndicaux Emmanuel «Manny» Asuncion et Ariel et Chai Evangelista, et que les autres incidents sont soumis aux investigations de l’équipe d’enquête spéciale.
  7. 664. À la lumière des dernières allégations, le comité doit une fois de plus exprimer sa profonde préoccupation face aux allégations répétées et graves d’assassinats ou de tentatives d’assassinats de syndicalistes et rappeler que le droit à la vie est une condition indispensable à l’exercice des droits consacrés dans la convention no 87. [Voir Compilation, paragr. 81.] Tout en prenant bonne note des enquêtes en cours et des poursuites qui doivent être engagées contre plusieurs fonctionnaires, le comité relève également les préoccupations des organisations plaignantes, lesquelles estiment que, bien qu’elles aient notifié les incidents susmentionnés à la CDH, au DOLE et à l’appareil judiciaire, le traitement de ces allégations ne progresse que très lentement. Dans ces circonstances, le comité rappelle que l’assassinat, la disparition ou des blessures graves de dirigeants syndicaux et de syndicalistes nécessitent l’ouverture d’enquêtes judiciaires indépendantes afin de faire toute la lumière, dans les meilleurs délais, sur les faits et les circonstances dans lesquelles ces actes se sont produits pour déterminer, dans la mesure du possible, les responsabilités, punir les coupables et empêcher la répétition de tels événements. [Voir Compilation, paragr. 94.] En outre, la simple ouverture d’une enquête ne met pas fin à la mission du gouvernement; celui-ci est tenu de donner tous les moyens nécessaires aux instances chargées de ces enquêtes pour que celles-ci aboutissent à l’identification et à la condamnation des auteurs. Compte tenu de ce qui précède, le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que tous les cas présumés de meurtres et de tentatives de meurtre signalés par les organisations plaignantes en septembre 2021 fassent l’objet d’une enquête approfondie par un mécanisme indépendant, afin d’identifier et de punir les auteurs, et de rendre compte des progrès accomplis à cet égard. Constatant qu’aucune information n’a été fournie au sujet des faits relatifs à l’assassinat de Danny Boy Bautista et de Reynaldo Malaborbor, le comité prie instamment le gouvernement de lui fournir des précisions sur toute mesure prise pour traiter ces cas et effectuer les enquêtes requises.
  8. 665. À la lumière des informations supplémentaires qui lui ont été communiquées, le comité observe que les organisations plaignantes allèguent également une criminalisation institutionnelle des activités syndicales, traduite dans la pratique par une surveillance, des menaces et des arrestations et détentions arbitraires de syndicalistes sur la base de fausses accusations criminelles et de fausses preuves, et dénoncent une politique continue de dénigrement et une propagande antisyndicale menée par l’armée, ainsi que l’inscription sur liste rouge du KMU et d’autres syndicats comme organisations terroristes, ce qui se traduit par des menaces généralisées et un harcèlement persistant, des perquisitions de domiciles et de bureaux, de fausses redditions en tant que sympathisants de la NPA, des désaffiliations forcées et d’autres formes d’ingérence dans les affaires syndicales, qui empêchent les travailleurs d’exercer pleinement leur droit d’organisation. À cet égard, les organisations plaignantes fournissent des détails sur les circonstances qui ont conduit à l’arrestation et à la détention, sur la base de poursuites pénales abusives, d’environ 76 syndicalistes entre février 2018 et mars 2021, dont certains ont ensuite été libérés sous caution mais continuent de faire l’objet de poursuites devant les tribunaux, et donnent des précisions sur au moins 14 autres situations dans lesquelles de nombreux syndicalistes de diverses organisations affiliées au KMU actives dans plusieurs entreprises ont été soumis à différentes formes de harcèlement, d’ingérence dans les affaires syndicales et de désaffiliation forcée à la suite d’accusations d’être associés à une organisation terroriste ou de la soutenir. Enfin, le comité note que les organisations plaignantes dénoncent la répression violente des grèves des travailleurs et font état de plusieurs cas, entre 2017 et 2019, dans lesquels les forces armées, la police et le personnel de sécurité privée ont eu recours à l’usage de la force (agressions, passages à tabac avec des cannes, des barres métalliques et des matraques, jets de pierres et utilisation de formol) pour disperser les travailleurs en grève dans différents secteurs, ce qui a entraîné des blessures pour de nombreux travailleurs et l’arrestation et la détention de plus de 100 travailleurs et membres de syndicats, dont certains ont toujours des poursuites à leur encontre.
  9. 666. Observant que le gouvernement n’a communiqué aucune information à ce sujet, le comité se doit d’exprimer sa profonde préoccupation tant devant la gravité des allégations supplémentaires formulées que devant leur caractère répété et prolongé, qui semblent avoir des effets extrêmement préjudiciables à l’exercice légitime des droits syndicaux dans le pays, tels que décrits en détail par les organisations plaignantes. Le comité observe également avec une profonde préoccupation que, selon les organisations plaignantes, les auteurs directs de la plupart des cas susmentionnés sont des agents de l’État, souvent en collaboration avec le personnel de sécurité privée des entreprises concernées, et que la violence et le ciblage délibéré des syndicalistes seraient menés dans le cadre d’un plan commandité par l’État visant à réduire au silence les organisations légitimes, y compris les syndicats. Dans ces circonstances et compte tenu de la multitude d’allégations graves formulées, le comité doit rappeler que le climat de peur qui résulte des menaces de mort proférées contre des syndicalistes ne peut manquer d’avoir une incidence défavorable sur l’exercice des activités syndicales, et celui-ci n’est possible que dans le cadre du respect des droits fondamentaux de l’homme et dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces en tout genre. [Voir Compilation, paragr. 116.] Concernant les préoccupations des organisations plaignantes quant à la criminalisation alléguée des activités syndicales et à l’assimilation de syndicats légitimes à des organisations terroristes, le comité rappelle que le fait d’assimiler purement et simplement les syndicats à un mouvement d’insurrection a pour effet de les stigmatiser et de mettre souvent les dirigeants syndicaux et les syndicalistes dans une situation d’extrême insécurité. Des allégations de comportement criminel ne doivent pas être utilisées pour harceler des syndicalistes à cause de leur affiliation ou de leurs activités syndicales. Il n’y a aucune chance qu’un système de relations professionnelles stables fonctionne harmonieusement dans un pays tant que des syndicalistes y seront soumis à des mesures d’arrestation et de détention. Le fait d’intenter des poursuites pénales et de condamner à l’emprisonnement des dirigeants syndicaux en raison de leurs activités syndicales n’est pas propice à l’établissement d’un climat de relations professionnelles harmonieux et stable. [Voir Compilation, paragr. 93, 80, 127 et 155.] En outre, le respect des principes de la liberté syndicale suppose que les autorités publiques fassent preuve d’une grande retenue en ce qui concerne toute intervention dans les affaires internes des syndicats et toute pression ayant pour but que des travailleurs ou des dirigeants syndicaux renoncent à leur affiliation syndicale serait contraire à ces principes. Enfin, en ce qui concerne les allégations de dispersion violente des grèves, le comité souhaite rappeler que si les travailleurs et leurs organisations ont l’obligation de respecter les lois du pays, l’intervention des forces de sécurité dans une grève doit se borner strictement au maintien de l’ordre public. L’emploi de la police pour briser une grève constitue une atteinte aux droits syndicaux. [Voir Compilation, paragr. 933 et 931.]
  10. 667. Compte tenu de ce qui précède, le comité prie instamment le gouvernement de fournir des observations détaillées et concrètes sur les graves allégations supplémentaires de répression syndicale et de criminalisation des activités syndicales signalées par le KMU en septembre 2021. Le comité prie instamment le gouvernement de veiller à ce que tous les cas présumés de violence physique, d’arrestations, de détention, de menaces et d’intimidation fassent l’objet d’enquêtes rapides et approfondies et que les auteurs de violences contre des syndicalistes soient identifiés et traduits en justice, y compris lorsqu’il s’agit d’agents de l’État, afin de lutter contre l’impunité et de prévenir la répétition de tels actes. Le comité prie instamment le gouvernement de veiller à ce que toute poursuite pénale en instance soit abandonnée et que tout syndicaliste détenu soit immédiatement libéré, si son arrestation ou sa détention est liée à l’exercice légitime de ses droits syndicaux. Le comité prie également instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour répondre aux allégations de coercition exercée sur des syndicalistes pour qu’ils renoncent à leur affiliation syndicale, afin d’empêcher la répétition de tels cas, et de veiller à ce que les grèves des travailleurs, tant qu’elles restent pacifiques, ne donnent pas lieu à un usage disproportionné de la force par la police ou l’armée.
  11. 668. Enfin, en ce qui concerne le climat de violence et d’insécurité précédemment allégué dans ce cas (recommandation d)) et encore dénoncé dans les dernières informations des organisations plaignantes, le comité note que le gouvernement reconnaît les problèmes dont le comité a été saisi depuis très longtemps et affirme son attention de traiter les problèmes en question avec objectivité. Le comité relève en particulier que le gouvernement a signalé avoir adopté une politique visant à engager le dialogue avec les organisations syndicales, notamment avec celles qui sont affiliées aux organisations plaignantes impliquées dans le présent cas, dans le but d’obtenir des informations plus précises sur les nombreuses plaintes faisant état d’actes de harcèlement, d’inscriptions sur liste rouge et de violences dirigées contre des syndicalistes; selon le gouvernement, l’adoption de cette politique a pour but d’améliorer le cadre de l’exercice des droits syndicaux dans le pays. Le gouvernement indique également que, pour remédier à la pratique vivement critiquée de certains juges consistant à émettre des mandats susceptibles d’être exécutés en dehors de leur juridiction, la Cour suprême a émis une ordonnance administrative qui circonscrit expressément la validité des mandats judiciaires à l’intérieur de la juridiction territoriale du juge émetteur du mandat. Le comité relève également les informations communiquées par le gouvernement à la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, indiquant que, dans son arrêt de décembre 2021, la Cour suprême a déclaré que la loi antiterroriste n’était pas inconstitutionnelle dans sa totalité, mais a toutefois invalidé deux de ses dispositions, dont l’une qui autorisait une interprétation trop imprécise des éléments constitutifs du terrorisme, afin qu’elle cesse de viser indistinctement le militantisme, les expressions de désaccord et de dissensions, les arrêts du travail, les actions revendicatives ou collectives, et autres modalités de l’exercice des droits civils et politiques.
  12. 669. Prenant bonne note de ces diverses mesures et initiatives, le comité souhaite rappeler qu’un mouvement syndical libre et indépendant ne peut se développer que dans un climat exempt de violence, de menaces et de pressions et qu’il incombe au gouvernement de garantir que les droits syndicaux peuvent se développer normalement. [Voir Compilation, paragr. 87.] Compte tenu de ce qui précède, le comité prie instamment le gouvernement de faire tout ce qui est en son pouvoir, en instaurant notamment une collaboration directe, franche et constructive avec les organisations de travailleurs, pour traiter de manière adéquate et remédier aux allégations extrêmement graves selon lesquelles la violence et la répression à l’encontre des syndicats sont menées dans le cadre d’un programme commandité par l’État visant à réduire au silence les syndicats légitimes, allégations qui, si elles étaient avérées, entraveraient sérieusement le développement d’un véritable mouvement syndical dans le pays. À cet égard, le comité prie instamment le gouvernement d’intensifier la lutte contre les violences faites aux syndicalistes en concevant et en mettant en œuvre toutes les mesures nécessaires à cet effet, y compris des orientations et des instructions claires à l’intention de tous les agents de l’État et de rendre opérationnels les mécanismes nationaux de surveillance et d’enquête, de manière à prévenir la répétition d’actes violents contre des syndicalistes et des dirigeants syndicaux et à faire en sorte que ceux-ci ne soient pas systématiquement soupçonnés d’appartenir à des groupes insurrectionnels ou autres groupes paramilitaires, compte tenu de l’effet stigmatisant que cela peut avoir sur l’exercice d’activités syndicales légitimes.
  13. 670. Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 671. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Rappelant que les assassinats d’Antonio «Dodong» Petalcorin, d’Emilio Rivera et de Kagi Alimudin Lucman ont eu lieu en 2013 et que le gouvernement a indiqué qu’ils étaient, ou continuent d’être, en cours d’instruction conformément à la procédure ordinaire d’enquête et de poursuite pénale, le comité doit exprimer une nouvelle fois le ferme espoir que les auteurs seront traduits en justice et condamnés sans délai, afin d’éviter que ces crimes restent impunis. Le comité prie instamment le gouvernement de faire tout son possible à cet égard et de le tenir informé de tout progrès en la matière.
    • b) S’agissant des allégations formulées par l’ITF, l’UMA et la NFSW-FGT en mars et juin 2021 (allégations faisant état d’exécutions extrajudiciaires, d’arrestations illégales, de mises en détention, d’accusations mensongères, d’intimidations, de harcèlement, d’inscriptions sur liste rouge et de menaces visant des membres et dirigeants syndicaux), le comité s’attend fermement à ce que les enquêtes et les procédures judiciaires en cours prennent pleinement en considération tout lien direct ou indirect susceptible d’être établi entre ces agissements violents et les activités syndicales des victimes. Le comité s’attend fermement à ce que le gouvernement donne la priorité aux enquêtes effectuées pour faire la lumière sur ces graves incidents et que les auteurs des violences contre les syndicalistes soient identifiés et traduits en justice, qu’il s’agisse de particuliers ou d’agents de l’État, afin de lutter contre l’impunité et d’empêcher la répétition de tels agissements. Le comité prie instamment le gouvernement de lui communiquer des informations à jour sur les progrès accomplis, s’agissant notamment de l’allégation dénonçant l’exécution extrajudiciaire de Jose Jerry Catalogo et d’Antonio «Cano» Arellano, au sujet de laquelle le gouvernement n’a encore fourni aucune information précise.
    • c) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que toutes les allégations faisant état d’assassinats et de tentatives d’assassinat formulées par les organisations plaignantes en septembre 2021 fassent l’objet d’une enquête approfondie, menée par un mécanisme indépendant, afin d’identifier et de punir les coupables, et de rendre compte des avancées réalisées à cet égard. Constatant qu’aucune information n’a été communiquée au sujet des incidents ayant trait à l’assassinat de Danny Boy Bautista et de Reynaldo Malaborbor, le comité prie instamment le gouvernement de lui fournir des précisions sur les démarches entreprises et les enquêtes effectuées pour faire la lumière sur ces affaires.
    • d) Le comité prie instamment le gouvernement de lui communiquer des observations détaillées et concrètes au sujet des graves allégations supplémentaires formulées par le KMU en septembre 2021, dénonçant une répression antisyndicale et une criminalisation des activités syndicales. Le comité prie instamment le gouvernement de veiller à ce que tous les cas présumés de violences physiques, d’arrestations, de détentions, de menaces et d’intimidations fassent rapidement l’objet d’enquêtes approfondies et que les auteurs de violences contre des syndicalistes soient identifiés et traduits en justice, y compris lorsqu’il s’agit d’agents de l’État, afin de lutter contre l’impunité et de prévenir la répétition de tels agissements.
    • e) Le comité prie instamment le gouvernement de veiller à ce que toutes les poursuites pénales en instance soient abandonnées et que tous les syndicalistes placés en détention soient immédiatement libérés, s’il devait s’avérer que leur arrestation ou leur détention était liée à l’exercice légitime de leurs droits syndicaux.
    • f) Le comité prie également instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour répondre aux allégations dénonçant des pressions exercées sur des syndicalistes pour les contraindre à renoncer à leur affiliation syndicale, afin d’empêcher la répétition de tels incidents, et de veiller à ce que les grèves menées par les travailleurs, pour autant qu’elles restent pacifiques, ne donnent pas lieu à un usage disproportionné de la force par la police ou l’armée.
    • g) Enfin, soulignant la responsabilité du gouvernement en ce qui concerne les enquêtes sur les allégations dénonçant des violences commises contre des travailleurs ayant entrepris de s’organiser ou de défendre par tout autre moyen leurs intérêts, le comité prie instamment le gouvernement de faire tout ce qui est en son pouvoir, notamment dans le cadre d’une collaboration directe, franche et constructive avec les organisations de travailleurs, pour traiter de manière satisfaisante les allégations extrêmement graves selon lesquelles la violence et la répression à l’encontre des syndicats sont menées dans le cadre d’un programme commandité par l’État visant à réduire au silence des syndicats légitimes, allégations qui, si elles se révélaient fondées, entraveraient sérieusement le développement d’un véritable mouvement syndical dans le pays. À cet égard, le comité prie instamment le gouvernement d’intensifier la lutte contre les violences faites aux syndicalistes en concevant et en mettant en œuvre toutes les mesures nécessaires à cet effet, y compris des orientations et des instructions claires à l’intention de tous les agents de l’État et de rendre opérationnels les mécanismes nationaux de surveillance et d’enquête, de manière à prévenir la répétition d’actes violents contre des syndicalistes et des dirigeants syndicaux et à faire en sorte que ceux-ci ne soient pas systématiquement soupçonnés d’appartenir à des groupes insurrectionnels ou autres groupes paramilitaires, compte tenu de l’effet stigmatisant que cela peut avoir sur l’exercice d’activités syndicales légitimes.
    • h) Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer