Allégations: Les organisations plaignantes allèguent des actes de violence
(homicides, tentatives d’homicide et menaces de mort) contre des dirigeants syndicaux
et des syndicalistes
- 106. Le comité a examiné le cas no 2761 quant au fond à sept reprises
[voir 363e, 367e, 380e, 383e, 389e, 393e et 401e rapports], le plus récemment lors de sa
session de mars 2023. À cette occasion, il a examiné le cas no 2761 conjointement avec
le cas no 3074, et présenté un rapport intérimaire concernant ces deux cas au Conseil
d’administration. [Voir 401e rapport, adopté par le Conseil d’administration à sa
347e session, paragr. 323-362.]
- 107. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications de
septembre 2023 et d’avril 2024.
- 108. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale
et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit
d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (no 151) sur les
relations de travail dans la fonction publique, 1978, et la convention (no 154) sur la
négociation collective, 1981.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 109. Lors de sa réunion de mars 2023, le comité a formulé les
recommandations provisoires suivantes concernant les allégations présentées par les
organisations plaignantes [voir 401e rapport, paragr. 362]:
- a) Le comité salue
les mesures importantes que les autorités compétentes ont adoptées pour garantir que
la lutte contre la violence antisyndicale constitue une priorité de l’État grâce à
une large coordination interinstitutionnelle et prend note des progrès signalés dans
les enquêtes sur les actes de violence antisyndicale. Le comité prie instamment le
gouvernement de continuer d’intensifier ses efforts pour élucider tous les actes de
violence antisyndicale, homicides, menaces et autres rapportés dans le pays, et pour
condamner tant les auteurs que les instigateurs de tels actes. Il espère, en
particulier, que toutes les mesures supplémentaires seront prises et toutes les
ressources nécessaires mobilisées afin que les enquêtes et les procédures pénales
menées en relation avec les actes de violence antisyndicale dénoncés dans le présent
cas augmentent considérablement leur efficacité en ce qui concerne l’identification
et la sanction des instigateurs de ces actes. Le comité prie le gouvernement de
fournir des informations détaillées à cet égard.
- b) Le comité salue les
mesures importantes prises par les autorités compétentes pour la protection des
membres du mouvement syndical en danger et, en particulier, l’augmentation
significative du budget de l’UNP, ainsi que les consultations régulières tenues avec
les partenaires sociaux au sein de la Commission interinstitutionnelle pour la
promotion et la protection des droits de l’homme des travailleurs. Le comité prie
instamment le gouvernement de continuer d’intensifier ses efforts pour offrir une
protection adéquate à tous les membres du mouvement syndical en danger. Afin que les
politiques de prévention de la violence antisyndicale aient une plus grande
efficacité, le comité prie le gouvernement notamment: i) dans le cadre des
initiatives et dispositifs institutionnels de protection des défenseurs des droits
de l’homme et des dirigeants sociaux, de continuer à accorder toute l’attention
nécessaire à la situation spécifique des membres du mouvement syndical en danger; et
ii) de communiquer des informations actualisées sur les mesures prises pour prévenir
les actes de violence antisyndicale dans les principaux foyers de risque aux niveaux
régional et sectoriel que le gouvernement avait portés à l’attention du comité lors
de son précédent examen du cas. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à
cet égard.
- c) Le comité prie instamment le gouvernement de continuer à tout
mettre en œuvre pour élucider tous les homicides et la tentative d’homicide de
dirigeants et de membres de l’Association syndicale unitaire des fonctionnaires du
système pénitentiaire et carcéral colombien dénoncés dans le présent cas, et pour
condamner leurs auteurs et leurs instigateurs. En ce qui concerne les cas dénoncés
dans le présent cas, le comité prie à nouveau le gouvernement de fournir des
informations détaillées sur l’état d’avancement des enquêtes en cours, ainsi que sur
le contenu des décisions rendues.
- d) Le comité prie le gouvernement de le
tenir informé de tout nouvel élément qui permettrait la réouverture des enquêtes sur
les actes de violence antisyndicale perpétrés contre des dirigeants du SINTRAELECOL,
du SINTRAEMCALI et du SINTRASERPUVAL dénoncés dans le présent cas et de veiller à ce
que toute nouvelle situation de risque à laquelle pourraient être confrontés les
membres et dirigeants de ces organisations donne lieu à une réponse immédiate des
autorités compétentes.
- e) Le comité attire spécialement l’attention du
Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent
cas.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 110. Dans ses communications en date de septembre 2023 et d’avril 2024,
le gouvernement indique que la loi 2272 du 4 novembre 2022, qui modifie et proroge la
loi 418 de 1997 dite «de la paix totale», ainsi que la loi 2294 de 2023, qui prévoit la
mise en œuvre du plan national de développement 2022-2026 intitulé «Colombie, puissance
nationale de la vie», ont été adoptées. Le gouvernement déclare que, dans un contexte où
persiste le conflit armé, le plan national de développement vise à instaurer une paix
totale et à garantir les droits des victimes. Il ajoute que les principaux éléments de
la loi de paix totale sont en cours de mise en œuvre, et que ceux-ci permettront de
nouer le dialogue avec toutes les structures armées organisées impliquées dans la
criminalité à fort impact qui souhaitent se soumettre à la justice en vue d’être
démantelées, et contribuer ainsi à la réduction des niveaux de violence, afin que soient
garantis les droits fondamentaux de tous les citoyens.
- 111. Le gouvernement évoque ensuite les mesures de réparation collective
en faveur du mouvement syndical adoptées en vertu de la loi 1448 de 2011 (dite «loi sur
les victimes et la restitution de terres»). Il déclare que la réparation implique la
reconnaissance des atteintes subies par le mouvement syndical et ses membres dans le
cadre du conflit armé, et que l’État a l’obligation implicite de réparer intégralement
le préjudice subi et d’éviter que ne se reproduisent les faits à l’origine du dommage.
Le gouvernement indique que la résolution no 2023-31247 du 24 mars 2023 reconnaît que le
mouvement syndical a subi des dommages collectifs. Le 14 août 2023, la procédure de
réparation collective a officiellement commencé, et le 14 septembre, le Président de la
République et la ministre du Travail ont organisé une cérémonie publique pour la
reconnaissance des victimes en hommage aux 3 323 syndicalistes assassinés entre 1971 et
2023, aux 449 victimes d’une tentative d’homicide, aux 254 travailleurs syndiqués
victimes de disparitions forcées, aux 7 884 personnes ayant reçu des menaces de mort et
aux 1 987 travailleurs et dirigeants syndicaux déplacés. Le gouvernement affirme que le
chemin de la réparation passera par des actions à la fois symboliques (telles que la
mise en avant des luttes collectives visant à défendre les intérêts des travailleurs) et
concrètes (telles que des mesures de soutien visant à mettre fin à la stigmatisation, à
accroître la syndicalisation, à en finir avec la culture antisyndicale dans le secteur
privé, et à éliminer la violence).
- 112. Dans ses deux communications, le gouvernement transmet les
informations fournies par le ministère public concernant les progrès accomplis dans le
cadre des enquêtes sur les homicides et d’autres actes de violence antisyndicale. Dans
la communication de septembre 2023, il est indiqué que, entre le 1er janvier 2020 et le
moment où la communication a été envoyée, le ministère public a reçu 45 signalements
pour homicide. Le ministère indique en outre que les stratégies d’investigation qu’il a
mises en place ont contribué à élucider 53,33 pour cent des cas d’homicide (24 cas) qui
sont instruits par un tribunal ordinaire, d’où il ressort que: i) 4 cas sont en cours
d’exécution des peines; ii) 6 cas sont en cours de jugement; iii) 7 cas ont donné lieu à
des inculpations; iv) 6 cas font l’objet d’un mandat d’arrêt décerné par un juge; et
v) 1 cas a été clôturé à la suite du décès de la personne suspectée.
- 113. Dans sa communication d’avril 2024, le gouvernement communique des
informations du ministère public concernant les homicides de membres du mouvement
syndical dénoncés entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2023. Il ressort tout
d’abord de celles-ci que, dans 52,36 pour cent des cas, les auteurs ont été identifiés,
et que les procédures pénales menées à leur encontre progressent. Il est dit ensuite
que, en 2023, le ministère public a eu connaissance de huit cas d’homicide de
syndicalistes instruits par un tribunal ordinaire et que, à ce jour, les auteurs ont été
identifiés dans 50 pour cent des cas – l’un des cas est en cours de jugement, trois ont
donné lieu à des inculpations et un autre cas fait l’objet d’un mandat d’arrêt décerné
par un juge. Enfin, le gouvernement ajoute qu’il a demandé au ministère public de lui
fournir davantage d’informations au sujet des progrès accomplis dans l’identification
des instigateurs des homicides de membres du mouvement syndical, et qu’il attend que
l’organisme public lui envoie de nouveaux éléments.
- 114. Le gouvernement poursuit en rappelant que les enquêtes et les
procédures judiciaires relatives aux crimes commis contre des syndicalistes sont une
priorité pour le ministère public, et que, comme il l’a déjà signalé par le passé [voir
notamment le dernier examen du cas; 401e rapport, paragr. 330], cet organisme dispose
depuis 2016 d’une stratégie spécifique et différenciée en la matière, pilotée par les
bureaux du procureur général et du procureur général adjoint. Le gouvernement rappelle
que cette stratégie, qui tient dûment compte des principaux foyers de risque aux niveaux
régional et sectoriel, s’articule autour des quatre volets suivants: i) analyse des
crimes affectant le plus la situation des syndicalistes dans leur travail – homicides,
violation des droits de réunion et d’association et menaces; ii) définition d’un
ensemble de cas et situations prioritaires; iii) coordination entre institutions et avec
le ministère du Travail; et iv) formation pour renforcer les enquêtes sur les crimes
prioritaires. Le gouvernement ajoute que le ministère public, par l’intermédiaire de la
Direction des études avancées, propose des programmes de formation spécifiques afin que
les procureurs et les enquêteurs chargés de ces affaires puissent mettre au point des
outils qui leur permettent de comprendre certains aspects liés au droit pénal, et
d’autres relatifs à la liberté d’association et de réunion.
- 115. En ce qui concerne les menaces proférées contre des membres du
mouvement syndical, le gouvernement décrit une nouvelle fois les principaux éléments de
la stratégie susmentionnée. [Voir les deux derniers examens du présent cas: 393e rapport
du comité, paragr. 91 à 93, et 401e rapport, paragr. 332.] Le gouvernement rappelle
qu’afin d’enquêter sur les menaces contre des syndicalistes, un procureur a été détaché
du Groupe de travail national chargé d’enquêter sur les menaces contre des défenseurs
des droits humains et certaines catégories de population, créé au sein de la Direction
spécialisée dans la lutte contre les violations des droits humains en 2021. Le
gouvernement ajoute ce qui suit: i) pour ce qui concerne, en particulier, les menaces
proférées contre la Fédération colombienne des éducateurs (FECODE), le bureau spécialisé
du groupe de travail national chargé d’enquêter sur les menaces a mis en œuvre une
stratégie globale prévoyant la participation active de la police judiciaire et de
l’Unité nationale de protection (UNP); ii) la directive no 0008 de 2023, qui actualise
les lignes directrices sur les enquêtes et les procédures judiciaires relatives aux
crimes commis contre des défenseurs des droits humains, a été publiée; et iii) en
janvier 2024, le manuel consacré aux enquêtes sur les menaces contre les défenseurs des
droits humains et certaines catégories de population a été publié.
- 116. Le gouvernement présente en outre des informations sur les mesures
de protection accordées à des membres du mouvement syndical par l’UNP moyennant le
programme de prévention et de protection. Il indique que, entre le 1er septembre 2020 et
le 14 mai 2023, l’UNP a traité au total 3 515 demandes de protection: 1 100 en 2020, 726
en 2021, 1 196 en 2022 et 493 en 2023. L’UNP a procédé à 1 823 évaluations des risques
qui ont permis de recenser des situations présentant un risque exceptionnel (935), un
risque extrême (7) et un risque ordinaire (881).
- 117. Le gouvernement communique ensuite les informations fournies par le
ministère public au sujet des actes de violence antisyndicale contre les dirigeants et
les membres de l’Association syndicale unitaire des fonctionnaires du système
pénitentiaire et carcéral colombien (UTP) signalés dans le cas no 3074. Le ministère
public indique tout d’abord que le taux d’élucidation des 43 enquêtes sur les cas
d’homicide et de tentative d’homicide de membres de l’UTP s’élève à 51,16 pour cent
(22 cas). Sur ces 22 cas, le ministère public précise que 11 cas sont en cours
d’exécution des peines, 3 sont en cours de jugement, 4 en sont au stade de l’instruction
et de l’enquête et 4 ont été clôturés à la suite du décès de la personne suspectée. Pour
ce qui concerne les allégations de menaces contre des membres de l’UTP, le ministère
public déclare que: i) 23 enquêtes ont été réalisées; l’un de ces dossiers fait
actuellement l’objet d’une enquête par la police judiciaire; et ii) le bureau du
procureur adjoint maintient une communication régulière avec la présidence nationale de
l’UTP afin de pouvoir continuer de suivre les faits dénoncés par les membres de
l’organisation syndicale et de veiller à ce que soient utilisés, dans les cas en
question, tous les outils disponibles au niveau de l’administration de la justice,
conformément au principe de diligence raisonnable.
- 118. En ce qui concerne la suspension des mesures de protection accordées
à M. Gustavo Adolfo Aguilar Gutiérrez, président du Syndicat des fonctionnaires et
agents publics du gouvernement et des municipalités de Colombie (SINTRASERPUVAL), le
gouvernement indique qu’il ressort des informations fournies par l’UNP que M. Aguilar
Gutiérrez était réticent à l’idée que l’UNP réévalue la situation de risque dans
laquelle il se trouvait; or, sans cette réévaluation, l’UNP ne peut pas établir le
risque réel auquel une personne est exposée. Le gouvernement ajoute que l’État a pour
priorité d’apporter, sans délai, une réponse aux situations de danger imminent
auxquelles les dirigeants syndicaux peuvent être confrontés. Enfin, le gouvernement
signale que l’enquête relative aux faits survenus le 22 mars 2018 et dénoncés par
M. Aguilar Gutiérrez a été fermée suite à la décision de classer l’affaire en raison de
l’impossibilité de trouver ou d’identifier l’auteur des faits. Il rappelle que, lorsque
la plainte est classée pour ce motif, le procureur en charge de l’affaire peut décider
de rouvrir la procédure s’il obtient de nouvelles informations ou preuves permettant la
poursuite de l’enquête.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 119. Le comité rappelle que les cas nos 2761 et 3074 concernent des
allégations faisant état de nombreux homicides de dirigeants syndicaux et de membres du
mouvement syndical, ainsi que de nombreux autres actes de violence antisyndicale. Il
rappelle en outre que, lors de son précédent examen du cas, il avait salué les mesures
importantes que les autorités compétentes avaient adoptées pour garantir que la lutte
contre la violence antisyndicale constitue une priorité de l’État grâce à une large
coordination interinstitutionnelle, et pris note des progrès signalés dans les enquêtes
sur les actes de violence antisyndicale.
- 120. Tout en renvoyant à l’examen de la stratégie de l’État en matière de
lutte contre la violence antisyndicale [voir 401e rapport, paragr. 330] qu’il a mené
antérieurement, le comité prend note des informations fournies par le gouvernement
concernant la poursuite et l’approfondissement des efforts déployés et l’actualisation
des mesures prises à cet égard. En ce qui concerne les mesures spécifiques visant à
continuer d’améliorer l’efficacité des enquêtes sur les actes de violence antisyndicale,
le comité note que le gouvernement fait référence à: i) la publication de la directive
no 0008 de 2023, qui actualise les lignes directrices sur les enquêtes et les procédures
judiciaires relatives aux crimes commis contre des défenseurs des droits humains; ii) la
publication, en janvier 2024, du manuel consacré aux enquêtes sur les menaces contre les
défenseurs des droits humains et certaines catégories de population; et iii) pour ce qui
concerne, en particulier, les menaces proférées contre la Fédération colombienne des
éducateurs (FECODE), le bureau spécialisé du Groupe de travail national chargé
d’enquêter sur les menaces a mis en œuvre une stratégie globale prévoyant la
participation active de la police judiciaire et de l’Unité nationale de protection
(UNP).
- 121. Le comité prend également note des informations fournies par le
gouvernement sur les résultats obtenus concernant les enquêtes, l’élucidation des
homicides de syndicalistes ainsi que la sanction de leurs auteurs, à savoir: i) les
auteurs ont été identifiés dans 52,33 pour cent des cas d’homicide de membres du
mouvement syndical dénoncés entre 2011 et 2023, et les procédures pénales menées à leur
encontre progressent; ii) en ce qui concerne les 45 cas d’homicide de syndicalistes
rapportés entre 2020 et 2023 qui sont instruits par un tribunal ordinaire, le taux
d’élucidation est de 53,33 pour cent (24 cas) – 4 cas sont en cours d’exécution des
peines; 6, en cours de jugement; 7 ont donné lieu à des inculpations; 6 font l’objet
d’un mandat d’arrêt décerné par un juge; 1 dernier cas a été clôturé à la suite du décès
de la personne suspectée; et iii) sur les huit cas d’homicide de syndicalistes dont le
ministère public a eu connaissance en 2023, qui sont instruits par un tribunal
ordinaire, l’auteur a, à ce jour, été identifié dans 50 pour cent des cas – l’un est en
cours de jugement, deux ont donné lieu à des inculpations et un fait l’objet d’un mandat
d’arrêt décerné par un juge.
- 122. Outre la réponse pénale aux actes de violence antisyndicale, le
comité prend également note des informations fournies par le gouvernement concernant la
politique générale en faveur de la paix totale, qu’il met en œuvre en vue de mettre fin
aux violences dans le pays, ainsi que les mesures prises dans le cadre de la
reconnaissance du mouvement syndical comme victime, dans son ensemble, de la violence
qui a frappé le pays, et les mesures de réparation collective adoptées à cet égard.
- 123. Le comité prend bonne note de ces différents éléments, et salue les
efforts déployés ainsi que les résultats obtenus dans le cadre de la réponse pénale
apportée aux homicides de membres du mouvement syndical. Le comité note que, – sur la
base des informations fournies par le gouvernement depuis le dernier examen du cas, le
taux d’homicides de membres du mouvement syndical dénoncés depuis le 1er janvier 2011
pour lesquels les auteurs ont été identifiés est passé de 44,69 pour cent à 52,36 pour
cent. Par ailleurs, le comité prend également bonne note des travaux essentiels que
continue de mener l’UNP afin de fournir une protection appropriée aux membres du
mouvement syndical en danger. À cet égard, le comité prend note des informations
communiquées en 2023 par le gouvernement à la Commission d’experts pour l’application
des conventions et recommandations, selon lesquelles environ 300 syndicalistes par mois
bénéficient des mesures de protection de l’UNP, parmi lesquelles figure la mise à
disposition de moyens de communication, de gilets pare-balles, de balises d’alerte, de
gardes du corps, de véhicules conventionnels et de véhicules blindés.
- 124. Dans le même temps, le comité note avec une profonde préoccupation
que le phénomène de la violence antisyndicale persiste dans le pays, huit nouveaux cas
d’homicide ayant été transmis à la justice en 2023. Le comité constate également que,
malgré les efforts déployés et les résultats obtenus par la justice pénale, bon nombre
des homicides de membres du mouvement syndical commis depuis 2011 n’ont toujours pas été
élucidés, ni leurs auteurs condamnés. Tout en notant les indications du gouvernement
selon lesquelles ce dernier transmettra les informations fournies par le ministère
public à ce sujet, le comité constate aussi, une fois de plus, l’absence d’informations
concernant l’identification et la condamnation des instigateurs des actes de violence
antisyndicale. À cet égard, le comité souligne une nouvelle fois que les enquêtes
doivent porter non seulement sur les auteurs des crimes, mais aussi sur leurs
instigateurs, afin de rendre pleinement justice et de prévenir de façon significative de
futurs actes de violence contre des membres du mouvement syndical.
- 125. Compte tenu de ce qui précède, tout en saluant les mesures
importantes adoptées à cet égard, le comité prie le gouvernement, en accord avec la
politique de reconnaissance et de réparation collective des atteintes subies par le
mouvement syndical et ses membres, de continuer d’intensifier les efforts déployés au
niveau interinstitutionnel pour, d’une part, élucider tous les actes de violence
antisyndicale et sanctionner les coupables et, d’autre part, protéger efficacement les
membres du mouvement syndical en danger. Le comité prie en particulier le gouvernement:
i) de communiquer des informations détaillées concernant l’identification et les
sanctions des instigateurs des actes de violence antisyndicale, et les efforts déployés
à cet égard; et ii) de communiquer des informations actualisées sur les mesures prises
pour prévenir les actes de violence antisyndicale dans les principaux foyers de risque
aux niveaux régional et sectoriel que le gouvernement avait portés à l’attention du
comité lors de ses précédents examens du cas. [Voir 393e rapport, paragr. 93.]
- 126. En ce qui concerne les actes de violence antisyndicale contre les
dirigeants et les membres de l’Association syndicale unitaire des fonctionnaires du
système pénitentiaire et carcéral colombien (UTP) signalés dans le cas no 3074, le
comité prend note des informations du ministère public, selon lesquelles: i) le taux
d’élucidation des 43 enquêtes sur les cas d’homicide et de tentative d’homicide de
membres de l’UTP s’élève à 51,16 pour cent (22 cas) – 11 cas en cours d’exécution des
peines, 3 cas en cours de jugement, 4 cas au stade de l’instruction et de l’enquête et
4 cas clôturés à la suite du décès de la personne suspectée; ii) 23 enquêtes ont été
réalisées sur les allégations de menaces contre des membres de l’UTP; l’un de ces
dossiers fait actuellement l’objet d’une enquête par la police judiciaire; et iii) le
bureau du procureur adjoint maintient une communication régulière avec la présidence
nationale de l’UTP afin de pouvoir continuer de suivre les faits dénoncés par les
membres de l’organisation syndicale.
- 127. Le comité prend bonne note de ces informations, notamment du fait
que deux condamnations supplémentaires ont été prononcées depuis le dernier examen du
cas relatif aux homicides de membres de l’UTP examinés dans le présent cas. Tout en
notant que le gouvernement a indiqué qu’il enverrait le texte des décisions rendues, le
comité constate, une nouvelle fois, qu’il ne dispose toujours pas des informations
demandées sur les motifs des homicides qui ont débouché sur des condamnations, ainsi que
sur la question de savoir si les personnes condamnées sont à la fois les auteurs et les
instigateurs des actes et si ces condamnations ont révélé des liens entre les différents
assassinats en question. Tout en saluant les résultats obtenus à ce jour, le comité prie
le gouvernement de continuer de tout mettre en œuvre pour élucider tous les homicides et
la tentative d’homicide de dirigeants et de membres de l’UTP dénoncés dans le présent
cas, et condamner leurs auteurs et leurs instigateurs. Il le prie également de fournir
des informations détaillées sur l’état d’avancement des enquêtes en cours, ainsi que sur
le contenu des décisions rendues.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 128. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite
le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Saluant
les mesures importantes adoptées à cet égard, et conformément à la politique de
reconnaissance et de réparation des atteintes subies par le mouvement syndical et
ses membres, le comité prie le gouvernement de continuer d’intensifier les efforts
déployés au niveau interinstitutionnel pour, d’une part, élucider tous les actes de
violence antisyndicale et sanctionner les coupables et, d’autre part, protéger
efficacement les membres du mouvement syndical en danger. Le comité prie en
particulier le gouvernement:
- i) de communiquer des informations détaillées
concernant l’identification et les sanctions des instigateurs des actes de
violence antisyndicale, les motifs de ces actes et les efforts déployés à cet
égard;
- ii) de communiquer des informations actualisées sur les mesures
prises pour prévenir les actes de violence antisyndicale dans les principaux
foyers de risque aux niveaux régional et sectoriel que le gouvernement avait
portés à l’attention du comité lors de ses précédents examens du
cas.
- b) Tout en saluant les résultats obtenus à ce jour, le comité
prie le gouvernement de continuer à tout mettre en œuvre pour élucider tous les
homicides et la tentative d’homicide de dirigeants et de membres de l’Association
syndicale unitaire des fonctionnaires publics du système pénitentiaire et carcéral
colombien (UTP) dénoncés dans le présent cas, et condamner leurs auteurs et leurs
instigateurs; le comité prie également le gouvernement de fournir des informations
détaillées sur l’état d’avancement des enquêtes en cours, ainsi que sur le contenu
des décisions rendues.
- c) Le comité attire spécialement l’attention du
Conseil d’administration sur le caractère grave et urgent du présent
cas.