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Observación (CEACR) - Adopción: 2018, Publicación: 108ª reunión CIT (2019)

Convenio sobre la discriminación (empleo y ocupación), 1958 (núm. 111) - Bahrein (Ratificación : 2000)

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La commission prend note du rapport de la mission de contacts directs, ainsi que des observations formulées par la Fédération générale des syndicats de Bahreïn (GFBTU) et la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues respectivement les 30 août et 1er septembre 2018.

Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 107e session, mai-juin 2018)

La commission prend note de la discussion qui a eu lieu au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail à sa 107e session (juin 2018) de la Conférence sur l’application de la convention par Bahreïn, et des conclusions adoptées, dans lesquelles le gouvernement est prié: i) de fournir des informations sur les mesures prises pour mettre en œuvre les engagements contenus dans les Accords tripartites de 2012 et 2014 conclus sous les auspices du BIT – concernant le règlement des cas de suspension, de licenciement et d’autres sanctions infligées à des membres et des dirigeants syndicaux suite aux événements de 2011, et de veiller à ce que tous les cas de réintégration et d’indemnisation en suspens qui relèvent des accords tripartites soient résolus; ii) de veiller à ce que le cadre légal national soit en conformité avec les prescriptions de la convention, notamment en ce qui concerne la définition et l’interdiction formelle de la discrimination directe et indirecte fondée sur les sept motifs énumérés dans la convention et du harcèlement sexuel; iii) de veiller à ce que les travailleurs migrants ainsi que les travailleurs domestiques soient couverts par la protection de la législation antidiscrimination; et iv) d’abroger toutes les dispositions qui font obstacle au recrutement et à l’emploi des femmes. La commission note que, au cours de la discussion tenue en juin 2018, le gouvernement a accepté la demande de la Commission de l’application des normes (en juin 2017) de mettre en place une mission de contacts directs. Celle-ci s’est rendue dans le pays du 15 au 19 septembre 2018. La commission note enfin que, à la suite de cette visite, le gouvernement a adressé une communication au BIT fournissant des informations actualisées sur la mise en œuvre des Accords tripartites de 2012 et 2014, dans laquelle étaient jointes des copies des projets d’amendements et de règlements soumis au Conseil des ministres, conformément à la demande de la mission de contacts directs.

I. Mesures prises pour concrétiser les engagements énoncés dans les Accords tripartites de 2012 et 2014

Article 1 de la convention. Discrimination fondée sur l’opinion politique. La commission rappelle que, à la 100e session (juin 2011) de la Conférence internationale du Travail, une plainte en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT a été déposée par plusieurs délégués des travailleurs à la Conférence, alléguant le non-respect par le gouvernement de Bahreïn de la convention. Selon la plainte, en février 2011, des mesures de suspension et plusieurs autres sanctions, y compris des licenciements, avaient été infligées à des membres de syndicats et à des dirigeants syndicaux, suite à des manifestations pacifiques organisées pour exiger des changements économiques et sociaux et exprimer un soutien au processus de démocratisation et de réforme en cours. Les plaignants alléguaient que ces licenciements (environ 4 600) avaient été motivés par les opinions politiques, les croyances et l’affiliation syndicale des travailleurs. A sa 319e session (octobre 2013), le Conseil d’administration a accueilli favorablement l’Accord tripartite conclu en mars 2012 par le gouvernement, la GFBTU et la Chambre de commerce et d’industrie de Bahreïn (BCCI). A sa 320e session (mars 2014), le Conseil d’administration a salué l’adoption de l’Accord tripartite complémentaire, en mars 2014, portant sur le règlement définitif de l’affaire des travailleurs licenciés. En conséquence, la plainte au titre de l’article 26 de la Constitution de l’OIT a été classée, et le Conseil d’administration a invité la présente commission à suivre la mise en œuvre des accords tripartites, en particulier en ce qui concerne les 165 cas de licenciement en instance (selon la liste annexée à l’Accord tripartite complémentaire de 2014) et à examiner l’application de la convention par le gouvernement.
Dans son rapport de 2017 présenté en vertu de l’article 22 de la Constitution de l’OIT, le gouvernement a expliqué que tous les cas de travailleurs licenciés pour des raisons liées aux événements de février 2011 avaient été résolus grâce à la coopération au niveau national entre les partenaires sociaux. Toutefois, la commission a noté que, selon les observations de la CSI, 64 cas de licenciement liés aux événements de février 2011 étaient toujours en instance. Notant que la GFBTU, qui est partie aux accords tripartites, n’a pas envoyé d’observations confirmant la mise en œuvre intégrale des accords susmentionnés, la commission avait demandé au gouvernement de communiquer des preuves attestant que la situation des 165 travailleurs licenciés dont les noms sont inscrits dans l’annexe à l’Accord tripartite de mars 2014 a été réglée à la satisfaction de toutes les parties intéressées.
Dans son dernier rapport, le gouvernement souligne les efforts déployés par le comité tripartite mis en place pour résoudre les cas des travailleurs qui ont été licenciés à la suite des événements de 2011. Le gouvernement indique qu’il ne reste que 9 cas (sur les 4 600 cas initiaux) en suspens, mais qu’ils sont sur le point d’être réglés. Il fournit un compte rendu détaillé des mesures prises à cet égard en coopération avec la GFBTU. La commission note que ces informations ont également été communiquées à la mission de contacts directs lors de sa réunion avec des fonctionnaires du ministère du Travail et du Développement social (MLSD). Quant au «certificat de réhabilitation», mentionné dans le commentaire précédent de la commission, le gouvernement indique qu’il ne s’agit pas d’une condition préalable à l’emploi ni que cela est nécessaire pour bénéficier des services gouvernementaux de formation et de placement mais d’un document délivré par les tribunaux, sur demande, aux travailleurs condamnés par les tribunaux, qui ont accompli leur peine et exprimé le souhait de se présenter à nouveau à un emploi dans le secteur public.
La commission note que, dans leurs observations, la GFBTU et la CSI affirment qu’il y a plus que 9 cas en suspens, contrairement à ce qu’avance le gouvernement. Elles font valoir que, sur les 64 affaires encore en suspens en 2017, à la date de soumission de leurs observations et de leur rencontre avec la mission de contacts directs (septembre 2018), 55 restaient en instance. Les deux organisations attirent l’attention sur le fait que, outre les 55 cas supposés être en instance, il reste un certain nombre d’autres questions concernant l’application des accords tripartites, qui concernent: i) le fait que, bien que, selon ces accords, les travailleurs licenciés avaient le droit d’être réintégrés dans des secteurs et des postes similaires à ceux dans lesquels ils travaillaient avant leur licenciement, cet engagement n’est pas toujours respecté dans la pratique. La GFBTU et la CSI donnent des exemples concrets, comme le cas d’un chauffeur d’entreprise qui a été réintégré comme opérateur de chariot élévateur et d’un dirigeant syndical qui travaillait auparavant comme ingénieur et qui a été réintégré dans le service de maintenance; ii) des cas qui ne peuvent être considérés comme une application adéquate des accords tripartites: par exemple, certains travailleurs ont subi des pressions pour accepter une retraite anticipée ou devenir indépendants et d’autres ont été arbitrairement renvoyés peu après leur réintégration; iii) des cas où des travailleurs ont été licenciés parce qu’ils faisaient l’objet de poursuites pénales (contrairement au droit bahreïnien, où seul un verdict de culpabilité à la suite d’un procès pénal peut justifier un licenciement) et attendaient toujours leur réintégration après avoir été déclarés non coupables; et iv) l’absence d’indemnisation appropriée pour la perte de revenus subie depuis le licenciement et le traitement des cotisations de sécurité sociale pour la période comprise entre le licenciement et la réintégration ou l’acceptation d’une enveloppe financière en place et lieu de la réintégration (sauf dans les cas de la BCCI et de l’Université de Bahreïn, pour lesquels les salariés licenciés ont été intégralement indemnisés). Enfin, les deux organisations indiquent que, à la suite de la conclusion de l’Accord tripartite de 2014, 17 nouveaux cas de licenciement motivés par les mêmes charges que celles de 2011 ont eu lieu (opinion politique, conviction et affiliation syndicale).
La commission note que, lors de sa dernière réunion avec la mission de contacts directs, la GFBTU a bien voulu reconnaître que certains des 55 cas étaient en passe d’être résolus. Toutefois, la GFBTU a souligné qu’elle ne pourrait procéder à une évaluation appropriée de certains de ces cas qu’une fois qu’une période de trois mois se serait écoulée après la réintégration et que les travailleurs seraient en mesure de confirmer qu’ils étaient satisfaits des arrangements conclus. En ce qui concerne les neuf cas mentionnés par le MLSD comme étant les seuls cas restants, la commission a pris note des renseignements sur les mesures les plus récentes prises par le MLSD en vue du règlement de cinq de ces cas. Elle prend note en outre que la GFBTU a indiqué qu’elle était disposée à examiner plus avant avec le MLSD la liste des 55 cas – si des efforts réels étaient faits pour régler les quatre autres cas, sur les neuf que le MLSD considère comme étant en instance, sachant que ces quatre cas se rapportaient à des fonctionnaires de ministères n’ayant été condamnés pour aucune infraction. Par ailleurs, la GFBTU a souligné que, pour les travailleurs dont les cas n’ont pas été résolus, les conséquences pour eux et leurs familles étaient graves (aucun revenu régulier depuis 2011 et, parfois, aucune possibilité de trouver un nouvel emploi car ils figurent sur une «liste noire»). La GFBTU a exprimé l’espoir que les questions en suspens pourront être effectivement réglées d’ici à janvier 2019. D’après les informations contenues dans le rapport de la mission de contacts directs, la commission note que les mandants tripartites de Bahreïn ont déployé des efforts considérables pour résoudre les cas restants énumérés dans les Accords tripartites de 2012 et 2014 et que très peu de cas restent donc en suspens. Toutefois, elle note que le nombre de cas en suspens fait toujours l’objet d’un désaccord entre le gouvernement (9) et la GFBTU (55) et que la mission de contacts directs a reconnu que chaque cas en suspens est important en raison des répercussions sur les travailleurs touchés et sur leurs familles. La commission note par ailleurs que le gouvernement et la GFBTU ont tous deux exprimé leur volonté de parvenir à un accord sur le nombre de cas en suspens et de les régler. Accueillant favorablement cet engagement, la commission demande aux deux parties de redoubler d’efforts pour s’entendre sur le nombre de cas en suspens et les résoudre conformément aux accords tripartites – notamment en ce qui concerne l’indemnisation financière et la couverture sociale pour la période de service interrompu. Elle prie instamment le gouvernement et la GFBTU d’examiner sans délai les cas en suspens dans un esprit constructif, pragmatique et ouvert afin d’aller de l’avant et de pouvoir traiter d’autres questions urgentes pour les mandants tripartites. Notant que les Accords tripartites de 2012 et 2014 contiennent un engagement des mandants tripartites à «promouvoir le dialogue social et institutionnel grâce à un renforcement des mécanismes tripartites conformément aux lois et règlements nationaux ainsi qu’aux principes et normes internationaux en vigueur» afin de «renforcer les relations fructueuses et de faire progresser le dialogue social», la commission tient à faire observer que les accords tripartites sont l’occasion non seulement de résoudre les cas individuels, mais également de développer un dialogue social constructif, lequel dialogue est au ralenti depuis 2011.
Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé au gouvernement de faire part de ses commentaires au sujet des allégations de l’Internationale de l’éducation (IE) et de l’Association des enseignants de Bahreïn (BTA) selon lesquelles, suite au licenciement d’un certain nombre d’enseignants ayant été associés aux manifestations pacifiques à l’occasion des événements de 2011, le ministère de l’Education a engagé quelque 9 000 expatriés venant d’autres Etats arabes, mettant ainsi en place un corps enseignant à deux vitesses, dans lequel les enseignants expatriés bénéficient de meilleures conditions que les nationaux. La commission note que, selon le gouvernement, ces informations sont erronées, car le ministère de l’Education a réintégré le petit nombre de travailleurs licenciés. Par ailleurs, le gouvernement indique que le ministère de l’Education continue de publier ses offres d’emploi, de procéder aux examens et aux entretiens nécessaires et d’employer en priorité des nationaux, conformément à la politique nationale d’«indigénisation» du secteur public en général et des emplois du secteur éducatif en particulier (Vision économique de Bahreïn à l’horizon 2030). L’emploi des expatriés se limite aux spécialisations pour lesquelles les diplômés nationaux font défaut et, chaque année, le gouvernement consacre une grande partie de son budget à la formation des nationaux pour remplacer progressivement les expatriés occupant des postes d’enseignant. De ce fait, ces dernières années, tous les enseignants qui ont bénéficié de promotions et d’augmentations de grade sont des nationaux; par conséquent, 100 pour cent des cadres supérieurs et moyens, des directeurs et hauts fonctionnaires du ministère de l’Education sont des ressortissants de Bahreïn. Sur ce point, le gouvernement attire également l’attention de la commission sur le fait que la BTA a été dissoute en 2011, et il met en doute la crédibilité de toute information fournie par l’association. En outre, la commission prend note des informations fournies à la mission de contacts directs au cours de sa réunion avec les responsables du ministère de l’Education, selon lesquelles, sur un total de 25 000 employés (dans le secteur public), 70 enseignants seulement ont été licenciés et, à ce jour, tous ces enseignants ont été réintégrés à leur poste et intégralement indemnisés (rétroactivité et couverture sociale depuis la date de leur licenciement). Il n’y a pas eu de réintégration dans quatre cas, parce que les personnes concernées avaient un casier judiciaire et que la responsabilité de tels cas incombe au Bureau de la fonction publique (CSB). Au cours de sa réunion avec la mission de contacts directs, le CSB a confirmé que les 180 enseignants qui avaient été licenciés en 2011 avaient tous été réintégrés dans leurs fonctions et avaient recouvré la totalité de leurs droits – les quatre cas de licenciement en instance n’étaient pas liés aux événements de 2011 mais à d’autres motifs (principalement des fautes professionnelles) –, et il a renvoyé la mission de contacts directs au paragraphe 25.1(g) de la loi sur la fonction publique (motifs de licenciement) qui prévoit que: «il sera mis fin au contrat d’un employé pour les raisons suivantes: [...] Licenciement pour mesure disciplinaire ou conformément à une décision de justice». La commission note que, au cours de cette réunion avec la GFBTU, la mission de contacts directs a été informée que 15 enseignants qui étaient membres de la BTA ont été licenciés suite aux événements de 2011, et cinq d’entre eux – notamment le vice-président – n’avaient toujours pas été réintégrés et n’avaient reçu aucune information sur l’état d’avancement de leur cas et ne pouvaient pas, de ce fait, se faire engager dans des écoles privées faute d’approbation du ministère de l’Education. Par ailleurs, la mission de contacts directs a été informée que les enseignants licenciés étaient fréquemment remplacés par des enseignants récemment naturalisés en tant que citoyens bahreïniens. La commission demande donc au gouvernement de faire part de ses commentaires au sujet de ces allégations, et notamment d’indiquer si les difficultés rencontrées par les travailleurs licenciés sont liées à la non-délivrance d’un «certificat de réhabilitation».
En ce qui concerne la discrimination fondée sur l’opinion politique, la commission prend note des observations finales du Comité des droits de l’homme des Nations Unies sur le rapport initial de Bahreïn sur l’application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Dans ses conclusions finales, le Comité des droit de l’homme reconnaît la nécessité pour l’Etat partie d’adopter des mesures pour combattre les actes terroristes, mais s’inquiète de ce que la loi no 58 sur la protection de la société contre les actes terroristes (loi no 58/2006) donne une définition trop vaste du terrorisme, susceptible d’être interprétée au sens large, ce qui peut entraîner des violations du droit à la liberté d’expression et de réunion. Elle note que le Comité des droits de l’homme des Nations Unies est préoccupé par des informations faisant état d’un large recours à la loi en dehors du cadre du terrorisme, notamment contre les défenseurs des droits de l’homme et les militants politiques (CCPR/C/BHR/CO/1, 26 juillet 2018, paragr. 28). Faisant observer que les mêmes préoccupations ont été exprimées par la GFBTU au cours de ses réunions avec la mission de contacts directs, et que la CSI indique dans ses observations que le CSB a récemment publié une circulaire qui prévoit des mesures disciplinaires, notamment le licenciement, à l’encontre des travailleurs «faisant un usage abusif des médias sociaux», la commission rappelle que, aux termes de la convention, la protection contre la discrimination fondée sur l’opinion politique suppose une protection à l’égard d’activités consistant à exprimer ou manifester une opposition aux principes et aux opinions politiques établis. Elle englobe également la discrimination fondée sur l’affiliation à un parti politique. La protection des opinions politiques s’applique aux opinions qui sont soit exprimées, soit manifestées, sauf lorsque des méthodes violentes sont employées (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 805). La commission demande au gouvernement de faire en sorte que l’application dans la pratique de la loi no 58/2006 n’enfreigne pas le droit des personnes à être protégées contre la discrimination fondée sur l’opinion politique et de la tenir informée de tout fait nouveau à cet égard. Elle lui demande en outre de préciser la nature du délit d’«usage abusif des médias sociaux» mentionné par la CSI, pour être sûre que l’opinion politique n’entre pas dans le champ d’application de la nouvelle circulaire.

II. Mesures visant à s’assurer que le cadre législatif de Bahreïn est en conformité avec les prescriptions de la convention

La commission rappelle que, depuis la ratification de la convention en 2000, elle a demandé au gouvernement de mettre en œuvre des réformes législatives.
La commission note en outre qu’à la suite de la mission de contacts directs le gouvernement a transmis au responsable de la mission et au BIT le texte de projets de modification de la législation aux fins de la conformité à la convention. Ceux-ci seront examinés ci-après, au titre des articles correspondants de la convention.
Article 1, paragraphes 1 a) et 3. Motifs de discrimination et aspects de l’emploi et de la profession. Législation du travail dans le secteur privé. La commission rappelle que, dans ses précédents commentaires, elle avait noté que la loi de 2012 sur le travail dans le secteur privé (loi no 36/2012) ne s’applique pas aux «travailleurs domestiques et personnes considérées comme tels, y compris les travailleurs agricoles et les gardes de sécurité, les gouvernantes, les chauffeurs et les cuisiniers» travaillant pour leur employeur ou des membres de sa famille (art. 2(b)). Elle avait souligné que les articles 39 (discrimination salariale) et 104 (licenciement considéré comme étant discriminatoire) de la loi sur le travail dans le secteur privé n’incluent pas la race, la couleur (uniquement mentionnée à l’article 39), l’opinion politique, l’ascendance nationale et l’origine sociale dans la liste des motifs de discrimination interdits. Elle avait donc réitéré sa demande, priant le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour inclure dans la loi de 2012 sur le travail dans le secteur privé une définition de la discrimination et une interdiction de toute discrimination, directe ou indirecte, qui s’étende à tous les travailleurs, sans distinction quelle qu’elle soit, et par rapport à tous les motifs de discrimination envisagés dans la convention, dont celui de la couleur, dans tous les aspects de l’emploi, dont l’accès à la formation professionnelle, l’accès à l’emploi et à des professions spécifiques et les conditions d’emploi, et de donner des informations sur tout nouveau développement à cet égard. La commission note également les conclusions de la Commission de l’application des normes mentionnées ci-dessus.
La commission note que le gouvernement réaffirme qu’aucune plainte pour discrimination en matière d’emploi ou de profession contre des nationaux ou des expatriés fondée sur leur religion, leur appartenance ethnique, leur couleur, leurs convictions ou leur affiliation n’a été déposée et que le cadre juridique en place (Constitution, loi sur le travail dans le secteur privé, loi sur la fonction publique et Code pénal) prévoit des garanties constitutionnelles aux fins de la justice, de l’égalité et de la non-discrimination. Néanmoins, en 2017, le gouvernement a décidé de donner suite aux recommandations de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations (CEACR) et de la Commission de l’application des normes et a commencé à revoir la législation du travail et a rédigé des propositions d’amendements à présenter à l’Assemblée nationale. La commission note que, en vertu des amendements proposés, s’ils sont adoptés, un nouvel article – l’article 2 bis – sera incorporé dans la loi sur le travail dans le secteur privé, comme suit: «La discrimination fondée sur le sexe, l’origine, la langue, la religion ou les convictions des travailleurs couverts par les dispositions de la présente loi est interdite»; et l’article 185 actuel sera légèrement modifié pour renvoyer à l’article 2 bis comme suit: «Une amende minimale de 200 dinars [environ 530 dollars des Etats-Unis (dollars E.-U.)] et maximale de 500 dinars [1 326 dollars E.-U.] sera infligée à tout employeur ou à son représentant qui enfreint les dispositions de l’article 2 bis.» La commission note que ces deux nouvelles dispositions vont introduire une protection contre toute discrimination dans l’emploi des travailleurs domestiques et assimilés. Toutefois, elle note également que ces modifications ne répondent pas tout à fait aux réformes législatives attendues. Telle que modifiée, la loi sur le travail dans le secteur privé est lacunaire sur les points suivants: i) une définition complète de la discrimination; ii) l’interdiction de la discrimination directe et indirecte; iii) une protection contre la discrimination en matière d’emploi et de profession fondée sur les sept motifs énumérés dans la convention (notamment la race, la couleur, l’opinion politique, l’ascendance nationale et l’origine sociale); et iv) une protection couvrant tous les aspects de l’emploi et des professions particulières (notamment l’accès à la formation professionnelle, à l’emploi et à certaines professions et les conditions de travail). Elle note que le nouveau projet d’article 185 précise que des sanctions sont prévues lorsqu’un employeur ou son représentant a traité un travailleur de manière discriminatoire, mais pas lorsqu’un travailleur est victime de discrimination de la part d’un collègue et que le projet d’article est muet sur les recours dont dispose la victime.
Fonction publique. La commission rappelle son commentaire précédent, dans lequel elle avait noté que les travailleurs du secteur public sont couverts par l’instruction de la fonction publique no 16/2016 qui interdit uniquement la discrimination fondée sur le sexe, l’appartenance ethnique, l’âge ou la religion et qu’elle avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les fonctionnaires bénéficient dans la pratique d’une protection adéquate contre toute discrimination directe et indirecte dans l’emploi et la profession, pour tous les motifs prévus par la convention. La commission note avec préoccupation que le rapport du gouvernement est muet sur ce point et que les propositions de modifications communiquées au BIT le 11 octobre 2018 se limitent à la loi sur le travail dans le secteur privé et ne concernent pas l’instruction de la fonction publique no 16/2016, laquelle n’est pas conforme non plus à la convention. La commission tient à réaffirmer une fois de plus qu’une définition claire et complète de la discrimination dans l’emploi et la profession est essentielle afin d’identifier les nombreuses situations dans lesquelles des discriminations peuvent se produire (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 743). Elle tient également à souligner que l’absence de plainte ne signifie pas qu’il n’y a pas de discrimination dans la pratique. Cela reflète plutôt l’absence de bases légales appropriées, l’ignorance de leurs droits de la part des intéressés, le manque de confiance dans les procédures existantes ou le défaut d’accès pratique à ces procédures, ou encore la crainte de représailles. A cet égard, la commission note que la mission de contacts directs a constaté que la procédure d’application des interdictions de discrimination et les recours disponibles étaient peu connus. En outre, elle note que, dans ses observations finales sur le rapport initial de Bahreïn en date du 26 juillet 2018, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies a regretté l’absence d’une législation antidiscrimination complète couvrant tous les motifs interdits par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et s’est dit préoccupé par le manque d’informations au sujet des voies de recours effectives dont disposent les victimes de discrimination (CCPR/C/BHR/CO/1, paragr. 14). En conséquence, la commission prie instamment le gouvernement de modifier tant la loi sur le travail que la loi sur la fonction publique (instruction de la fonction publique no 16/2016 et décret législatif no 48 de 2010) afin d’y inclure une définition complète de toutes les formes de discrimination conformément à la convention et d’accepter les recommandations de la mission de contacts directs selon lesquelles les réformes législatives en cours devraient faire en sorte que tant la loi sur le travail dans le secteur privé que celle sur la fonction publique: i) contiennent une définition complète de la discrimination, qui devrait comprendre la discrimination directe et indirecte et englober les sept motifs énumérés dans la convention; ii) couvrent toutes les catégories de travailleurs, y compris les travailleurs migrants, étant donné que le champ d’application de la convention n’est pas limité en ce qui concerne les individus ou les branches d’activité; iii) protègent contre la discrimination dans toutes les formes d’emploi et de profession, y compris dans l’accès à la formation professionnelle, à l’emploi et à certaines professions, et dans les conditions d’emploi; et iv) précisent les recours dont disposent les victimes de discrimination.
Discrimination fondée sur le sexe. Harcèlement sexuel. La commission rappelle qu’elle a mentionné la nécessité de définir et d’interdire, de manière expresse, le harcèlement sexuel dans l’emploi et la profession sous ses deux formes: i) le harcèlement s’apparentant à un chantage (quid pro quo): tout comportement non désiré à connotation sexuelle s’exprimant physiquement, verbalement ou non verbalement, ou tout autre comportement fondé sur le sexe, ayant pour effet de porter atteinte à la dignité de femmes et d’hommes, qui n’est pas bienvenu, déraisonnable et offense la personne; et le rejet d’une telle conduite par une personne, ou sa soumission à cette conduite, est utilisé de manière explicite ou implicite comme base d’une décision qui affecte son travail; et ii) le harcèlement dû à un environnement de travail hostile: une conduite qui a pour effet de créer un environnement de travail intimidant, hostile ou humiliant pour une personne. Elle note que, dans ses conclusions de 2018, la Commission de l’application des normes a exhorté le gouvernement à veiller à ce que le droit civil ou la législation du travail interdisent expressément le harcèlement sexuel et à ce que les mesures nécessaires soient prises pour introduire des mesures préventives. La commission note que, dans un effort en vue de se conformer pleinement à la convention dans ce domaine, le gouvernement a sollicité l’assistance technique du BIT le 23 juillet 2018 et que le Bureau a fourni cette assistance au MLSD le 13 août 2018. La commission note que l’un des amendements soumis au BIT après la visite de la mission de contacts directs traite du harcèlement sexuel au travail. L’article 192 bis prévoit qu’«[u]ne peine d’emprisonnement d’un an au maximum ou une amende maximale de 100 dinars [environ 265 dollars E.-U.] sera infligée à tout travailleur qui, dans le cadre du travail ou pour des raisons professionnelles, harcèle sexuellement un collègue par un geste, un comportement verbal ou physique, ou par tout autre moyen. Une peine d’emprisonnement d’une durée minimale de six mois ou une amende de 500 dinars [1 326 dollars E. U.] au minimum et de 1 000 dinars [2 653 dollars E. U.] au maximum sera infligée, chaque fois qu’un tel délit est commis par l’employeur ou par son représentant.» La commission note que, bien que cette nouvelle disposition interdise formellement le harcèlement sexuel dans la législation du travail (en plus du Code pénal) et prescrive les sanctions prévues, en cas de comportement inacceptable, elle ne contient pas de définition claire du harcèlement sexuel et ne traite que des cas où un travailleur est victime du harcèlement sexuel d’un collègue et non lorsque l’auteur du harcèlement est un représentant de son employeur ou un client. A nouveau, la commission souligne que, sans une définition précise du harcèlement sexuel, il est permis de se demander si la législation couvre bien toutes les formes de harcèlement sexuel, aussi bien le harcèlement sexuel quid pro quo que le harcèlement sexuel dû à un environnement hostile (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 791). Rappelant de nouveau que le harcèlement sexuel est une manifestation grave de discrimination fondée sur le sexe et une violation des droits de l’homme, la commission prie de nouveau instamment le gouvernement de prendre des mesures pour inclure une définition complète du harcèlement sexuel, tant dans la loi sur le travail dans le secteur privé que dans la loi sur la fonction publique, et de prévoir des voies de recours efficaces. Dans le but d’évaluer le caractère dissuasif des sanctions en pratique, la commission demande au gouvernement de fournir des informations sur le rapport entre le montant des amendes et le salaire moyen. Elle demande également au gouvernement de prendre des mesures concrètes pour prévenir et combattre le harcèlement sexuel dans l’emploi et la profession, par exemple en organisant des campagnes de sensibilisation sur le sujet, en encourageant la formation des cadres à la prévention du harcèlement sexuel ou en invitant les employeurs à établir des politiques et procédures officielles pour combattre le harcèlement sexuel, et de fournir des informations détaillées à cet égard.
Article 2. Egalité de chances et de traitement entre hommes et femmes. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note des informations détaillées fournies par le gouvernement sur les mesures prises pour promouvoir le principe de l’égalité de chances entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession, et elle avait demandé au gouvernement de communiquer des informations sur l’impact de chacune de ces mesures sur l’augmentation du nombre de femmes occupant des postes de direction et de leur situation sur le marché du travail, en particulier dans les domaines où, traditionnellement, les hommes sont les plus nombreux, ainsi que des informations statistiques sur le taux d’activité des hommes et des femmes, ventilées par secteur, catégorie professionnelle et poste, dans les secteurs privé et public, et sur le nombre de femmes et d’hommes bénéficiant respectivement de la formation professionnelle. La commission note à cet égard que le gouvernement fournit des informations qui ne répondent pas à sa demande d’informations sur l’impact des mesures qu’il a prises, mais qu’il se borne à réitérer les informations et les statistiques fournies dans son précédent rapport. A cet égard, la commission prend note des informations recueillies par la mission de contacts directs au cours de ses réunions, en particulier avec le ministère de l’Education et le Conseil suprême aux affaires féminines qui ont souligné le classement mondial du système éducatif de Bahreïn, le fait que l’Etat a le taux d’alphabétisation féminin le plus élevé de la péninsule arabique (97 pour cent des filles sont inscrites dans le primaire et 91 pour cent dans le secondaire) et un taux de parité universitaire qui figure au premier rang dans cette région. La commission prend note des données du rapport mondial sur l’écart entre les sexes (The Global Gender Gap Report) du Forum économique mondial de 2017 (qui mesure les disparités relatives entre les femmes et les hommes dans quatre domaines clés: santé, éducation, économie et politique), qui indique qu’en 2015 Bahreïn était le pays de la région du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord qui s’était le plus amélioré en ce qui concerne l’indice de la participation économique (des femmes) et le sous-indice «Opportunités». Elle note également que, dans son rapport de 2017, le Forum économique mondial a classé Bahreïn comme étant le pays le plus performant de la région (avec la Tunisie et les Emirats arabes unis). La commission prend note en outre du quatrième Rapport périodique du gouvernement (CEDAW/C/BHR/4) présenté par Bahreïn en mars 2018 au Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) et du compte rendu détaillé des mesures prises par le pays pour assurer l’égalité de chances et de traitement des femmes dans l’emploi. La commission note que, malgré l’évolution importante de la situation des bahreïniennes et le fait que celles-ci soient bien qualifiées, il ne leur est toujours pas facile d’accéder aux postes de responsabilité dans le secteur privé. Les femmes ne représentent que 39 pour cent de la main-d’œuvre et sont principalement concentrées dans les postes de cadres débutants et intermédiaires. A cet égard, la commission prend également note des préoccupations exprimées par le Comité des droits de l’homme des Nations Unies au sujet de la persistance des stéréotypes patriarcaux concernant le rôle des femmes et des hommes dans la famille et dans la société et du fait que les femmes sont sous-représentées dans la vie politique et publique, en particulier dans les processus décisionnels, malgré les mesures prises pour promouvoir l’égalité de genre (paragr. 20). La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur les mesures volontaristes prises ou envisagées pour lutter contre les causes sous-jacentes et les inégalités de fait résultant de la discrimination profondément ancrée dans les valeurs traditionnelles et sociétales. L’information fournie devrait porter, par exemple, sur des programmes de formation et d’encadrement spécialement conçus pour les travailleuses et visant à développer les aptitudes nécessaires pour accéder aux postes de responsabilité, des mesures permettant de concilier responsabilités professionnelles et familiales, et pour faire en sorte de ne pas alimenter les stéréotypes sur le rôle des femmes et des hommes dans la société et dans la famille, en étendant aux hommes des mesures qui ne sont actuellement disponibles qu’aux femmes (par exemple, le travail à temps partiel, le congé non rémunéré pour élever un enfant ou prendre soin d’un parent à charge, le congé rémunéré en cas de décès du mari d’une travailleuse). Rappelant que l’application effective de la convention est un processus continu qui requiert continuellement des évaluations, actions, mesures de suivi, nouvelles évaluations et ajustements, notamment pour régler les nouvelles questions qui peuvent se poser et surmonter de nouvelles difficultés, la commission prie de nouveau le gouvernement de communiquer des informations sur l’impact de toutes les mesures et initiatives prises afin d’accroître le nombre de femmes à des postes de direction et leur situation sur le marché du travail, en particulier dans les domaines où, traditionnellement, les hommes sont plus nombreux.
Article 3 c). Travailleurs migrants. La commission rappelle qu’elle avait demandé au gouvernement de communiquer ses commentaires sur les éléments allégués par la CSI à propos du nouveau système de «permis Flexi» et du système de parrainage (kafala). Elle avait de nouveau prié le gouvernement de donner des informations sur les mesures spécifiques prises pour assurer une protection effective à tous les travailleurs migrants, y compris aux travailleurs migrants domestiques, contre la discrimination fondée sur l’ensemble des motifs envisagés dans la convention. En outre, elle avait demandé au gouvernement de veiller à ce que toute règle adoptée afin de réglementer le droit des travailleurs migrants de changer d’employeur n’impose pas de conditions ou de limites susceptibles d’accroître la dépendance de ces travailleurs migrants à l’égard de leur employeur et d’aggraver par là même leur vulnérabilité face aux abus et aux pratiques discriminatoires. La commission avait également demandé au gouvernement de donner des informations sur la nature et le nombre, ventilés par sexe, profession et pays d’origine, des cas dans lesquels l’employeur ou l’Autorité régulatrice du marché du travail (LMRA) n’avait pas approuvé le transfert d’un travailleur chez un autre employeur, et pour quel motif.
La commission note que la réponse du gouvernement selon laquelle le cadre légal offre une protection juridique aux travailleurs migrants en ce qui concerne la réglementation des relations de travail et garantit les droits de toutes les parties, y compris la protection contre la discrimination dans l’emploi et les différentes professions. Le gouvernement indique que les organes compétents font des efforts importants pour contrôler l’application effective de la loi et pour fournir des services d’appui spécialement conçus pour protéger les travailleurs migrants, tels que: i) des mécanismes de dépôt de plaintes individuelles auprès du MLSD afin de parvenir à un règlement amiable; ii) des mesures pour permettre un contact direct des travailleurs migrants avec la LMRA, et ceci en plusieurs langues; iii) la publication de matériels de sensibilisation dans 14 langues différentes, en coopération avec les ambassades; iv) l’octroi aux travailleurs migrants du droit de changer d’employeur sans le consentement de celui pour lequel ils travaillent à ce moment là (25 000 autorisations en 2017); v) l’adoption d’un système flexible de permis de travail (Flexi) depuis la mi-juillet 2017; vi) l’accès au régime d’assurance-chômage; vii) le droit de représentation dans les syndicats et les fédérations; viii) la distribution gratuite de cartes SIM pour tenir les travailleurs informés dans leur langue maternelle de tout développement concernant leur permis de travail et leur statut juridique; ix) l’adoption d’un «système national d’orientation pour les victimes de la traite des personnes»; x) la création d’un foyer d’accueil pour soutenir et protéger les travailleurs migrants en situation difficile; et xi) des réunions périodiques avec des ambassades des pays d’origine des travailleurs migrants; etc. En ce qui concerne l’amélioration du niveau de sensibilisation des travailleurs migrants à leurs droits, le gouvernement rappelle que cela n’est pas de sa seule responsabilité, mais également de celle des ambassades des pays d’origine, des syndicats et des organisations de la société civile liées aux communautés étrangères telles que les clubs culturels et sociaux. En ce qui concerne la déclaration de la CSI selon laquelle la LMRA continue de permettre aux employeurs d’inclure dans le contrat de travail des travailleurs une limitation du droit de changer d’employeur pendant une période déterminée, le gouvernement affirme que la liberté du travailleur de rejoindre un autre employeur est devenue un droit et que la LMRA ne tient pas compte des conditions fixées dans un contrat de travail qui limitent le droit du travailleur à rejoindre un autre employeur. En ce qui concerne les cas où un travailleur migrant a fait l’objet de pratiques abusives de la part de son employeur, ce travailleur peut demander son transfert sans avoir à respecter les conditions fixées et les délais légaux. En outre, le gouvernement souligne qu’aucun cas de ce type n’a été signalé à ce jour à l’Autorité régulatrice du marché du travail. En réponse à la référence faite par la CSI au système de la kafala ou de parrainage ou à la nature de la relation contractuelle entre un travailleur migrant et un employeur, le gouvernement souligne que la question du lien entre le permis de travail et un employeur spécifique est une question réglementaire et une pratique courante dans de nombreux pays du monde. Le gouvernement considère qu’elle n’est pas liée à la discrimination et qu’elle n’est pas contraire aux principes consacrés par la convention. En outre, demander aux travailleurs migrants de fournir des documents attestant de leur identité, tels qu’un passeport ou tout autre document, est une étape nécessaire de la procédure. Un travailleur migrant qui n’a pas de passeport pour quelque raison que ce soit peut y remédier en contactant l’ambassade de son pays d’origine. Le gouvernement indique que les travailleurs migrants sont également autorisés à suivre une formation théorique et pratique en fonction des besoins des employeurs. En ce qui concerne la demande de la commission tendant à ce que le gouvernement fournisse des informations sur la nature et le nombre de cas de refus de transfert d’un travailleur à un autre employeur et sur les motifs de ce refus, le gouvernement indique que le système électronique, qui enregistre les demandes de transfert, n’accepte pas l’enregistrement des demandes qui ne répondent pas aux conditions et règles fixées par la loi. Le gouvernement rappelle qu’en plus des mécanismes formels de dépôt de plaintes (inspection du travail ou tribunaux) les travailleurs migrants peuvent s’adresser à leur ambassade, aux syndicats et aux organisations de la société civile telles que, par exemple, le Comité national des droits de l’homme. Le gouvernement déclare également que le MLSD accorde une grande attention à la formation des inspecteurs du travail et examine actuellement la possibilité de créer une unité spécialisée dans le domaine de la discrimination à l’égard des travailleurs. En ce qui concerne l’adoption d’un système expérimental de permis de travail dit «Flexi» permettant aux travailleurs migrants de travailler sans parrainage (moyennant des frais), la commission prend note de la justification détaillée fournie à la mission de contacts directs par le directeur de l’Autorité régulatrice du marché du travail, selon laquelle le permis Flexi vise à répondre aux changements économiques du pays (et du monde) et à la demande croissante de travailleurs temporaires, à temps partiel et saisonniers. Ce projet pilote est une tentative de s’éloigner du système de parrainage et des amnisties périodiques qui n’ont pas résolu le problème des travailleurs migrants en situation irrégulière. En adoptant le permis Flexi, l’Autorité régulatrice du marché du travail s’efforce d’aborder le problème des travailleurs sans papiers sous un angle différent. Selon la LMRA, les travailleurs sans papiers travaillent souvent pour leur propre compte ou comme travailleurs indépendants et sont donc en concurrence avec des travailleurs dont le statut est régulier et avec les petites entreprises, car ils constituent une main-d’œuvre bon marché et flexible. Le gouvernement indique que, dans le cadre de ce nouveau système, un travailleur migrant titulaire d’un permis de travail Flexi est un travailleur qui est employé sur le marché du travail et qui est soumis à toutes les lois régissant les relations entre un employeur et un travailleur, telles que la loi sur le travail dans le secteur privé. Ce nouveau système permet à un migrant travaillant dans des conditions inéquitables de faire une demande indépendante de permis personnel grâce auquel il pourra travailler sans être lié à un employeur particulier, tout en respectant les règles, et d’éviter ainsi l’exploitation. Les travailleurs migrants sont libres de s’inscrire au système de permis de travail Flexi ou au permis de travail normal, tout en bénéficiant de la liberté de changer d’employeur.
La commission prend note des observations de la GFBTU et de la CSI concernant la situation des travailleurs migrants à Bahreïn, ainsi que des informations fournies par la Société de protection des travailleurs migrants (MWPS) à la mission de contacts directs. La CSI rappelle que les travailleurs migrants représentent environ 77 pour cent de la main-d’œuvre à Bahreïn et qu’ils occupent principalement des emplois peu qualifiés et mal rémunérés dans la construction, le commerce, l’industrie manufacturière et le travail domestique. Ils sont exclus d’un certain nombre de dispositions des lois sur le travail et la protection sociale et, par conséquent, la GFBTU et la CSI allèguent que les travailleurs migrants: i) ne bénéficient pas de conditions de travail décentes; ii) travaillent dans des environnements dangereux; iii) ont des horaires de travail excessivement longs (jusqu’à 19 heures par jour avec des pauses minimales et aucun jour de congé); iv) reçoivent des salaires extrêmement bas (certains employeurs paient en moyenne 70 dinars (186 dollars E.-U.) par mois et fréquemment aussi peu que 50 dinars (92 dollars E.-U.), qui, souvent, ne sont pas payés pendant des mois); et v) sont exclus des prestations sociales et ne peuvent bénéficier que de l’assurance contre les accidents du travail. La situation des travailleurs domestiques, et en particulier des travailleuses migrantes, est aggravée du fait que les ménages privés ne relèvent pas de l’inspection du travail. Selon la CSI, d’avril à juillet 2018, le nombre de travailleurs étrangers à Bahreïn qui se sont suicidés a considérablement augmenté. En ce qui concerne le système de permis Flexi, les informations fournies par la GFBTU, la CSI et la MWPS indiquent que, bien que le système ait été initialement mis en place pour aider les travailleurs migrants à régulariser leur statut de résident, dans la pratique, la plupart d’entre eux en sont exclus car: i) les travailleurs qualifiés, les travailleurs qui ont fui des employeurs abusifs, les travailleurs domestiques et les travailleurs agricoles ne sont pas éligibles; ii) son coût est prohibitif (le coût total pour deux ans est de 1 169 dinars ou 3 125 dollars E.-U., alors que la plupart des travailleurs migrants gagnent moins de 200 dinars ou 535 dollars E.-U. par mois); et iii) une des conditions est de posséder un passeport valide, condition que la plupart des travailleurs migrants en situation irrégulière ne peuvent remplir puisque leur passeport aura été confisqué par leur employeur. A la lumière de ce qui précède, la CSI affirme que le véritable objectif du système de permis de travail Flexi est de réduire le coût de l’embauche de travailleurs migrants et de détourner l’argent du marché noir des visas gratuits au profit du gouvernement plutôt que de régulariser les travailleurs migrants en situation irrégulière. La CSI souligne également que, bien que le gouvernement affirme qu’un migrant travaillant dans le cadre de ce système continuera à bénéficier de tous les avantages et droits prévus par la loi sur le travail dans le secteur privé, on ne sait toujours pas clairement quelle loi couvre les contrats de travail des travailleurs bénéficiant d’un permis Flexi et comment cela affecte les protections dont ils jouissent en tant que travailleurs. La GFBTU ajoute que le «système de protection de l’amélioration des salaires» (en vertu duquel les employeurs sont tenus de transférer le salaire de leurs employés sur un compte bancaire) lancé par le gouvernement pour protéger les travailleurs du secteur privé peut éventuellement profiter aux travailleurs du secteur de la construction ou à d’autres travailleurs du secteur privé, mais il ne solutionnera pas le problème de la vulnérabilité dont souffre les travailleurs domestiques, notamment les femmes de ménage qui ne savent pas comment fonctionne le système bancaire ni les virements électroniques, ce que la MWPS a confirmé. En ce qui concerne l’adoption du «contrat tripartite des travailleurs domestiques», qui régit la relation entre l’agence de placement, l’employeur (le foyer) et le travailleur domestique migrant et dont l’objectif est de prévenir l’exploitation des travailleurs domestiques, il devrait permettre de garantir les droits de ces travailleurs. Les employeurs sont désormais tenus de consigner précisément par écrit, notamment la nature du travail, les horaires de travail et le jour de congé hebdomadaire ainsi que d’autres conditions de travail (logement proposé, salaire, nombre et âge des membres du foyer, etc.). Toutefois, la MWPS a expliqué à la mission de contacts directs que, dans la pratique, ce contrat est bipartite, entre l’agence de placement et l’employeur, puisque que la majorité des travailleurs migrants (en particulier les travailleurs domestiques) sont analphabètes. En ce qui concerne le système de la kafala ou de parrainage, tant la CSI que la GFBTU soulignent que, bien que le gouvernement ait affirmé à maintes reprises que les travailleurs migrants à Bahreïn ne sont pas soumis au système de la kafala et peuvent changer d’emploi sans le consentement de leur parrain, dans la pratique, la LMRA continue de permettre aux employeurs d’inclure dans leurs contrats de travail une disposition limitant les conditions dans lesquelles l’approbation du transfert à un autre employeur sera donnée, en particulier en interdisant le transfert durant les douze premiers mois d’emploi.
La commission prend note des mesures prises par le gouvernement pour assurer une meilleure protection des travailleurs migrants en général et des travailleurs domestiques en particulier. Toutefois, elle regrette que la proposition d’amendement communiquée par le gouvernement en octobre 2018, qui vise à étendre expressément la pleine protection de la convention aux travailleurs migrants, ne réponde pas aux attentes de la commission et de la Commission de l’application des normes de la Conférence, puisque la protection contre la discrimination dans l’emploi et la profession accordée aux travailleurs domestiques et aux travailleurs migrants ne couvre pas tous les motifs expressément interdits par la convention. La commission prie donc instamment le gouvernement de faire en sorte que le texte finalement adopté couvre tous les points énumérés dans ses commentaires ci-dessus au titre de l’article 1, paragraphe 1 a), et de l’article 3 de la convention. La commission rappelle au gouvernement qu’il peut se prévaloir de l’assistance technique du BIT à cet égard.
En ce qui concerne le système de la kafala, la commission estime qu’il convient de saluer toute mesure visant à dissocier les travailleurs migrants du contrôle d’un seul parrain. Toutefois, les informations fournies à la mission de contacts directs et à la commission donnent à penser que le système de permis Flexi ne répond pas aux attentes du gouvernement et n’améliore pas de manière significative la mobilité des travailleurs migrants dans son ensemble. Notant que le système de permis Flexi est un système pilote qui sera réexaminé après un certain temps, la commission prie instamment le gouvernement de traiter ces questions et d’envisager de réduire les frais y relatifs et d’assouplir les critères d’admissibilité pour permettre à davantage de migrants de faire une demande de permis Flexi. En ce qui concerne les aspects du système de la kafala qui continuent de limiter la liberté de circulation des travailleurs migrants, la commission demande au gouvernement d’interdire de restreindre la liberté des travailleurs de changer d’employeur, y compris avant la fin de la période de douze mois à compter du début du contrat de travail, et de fournir des informations sur tout progrès réalisé à cet égard. Entre-temps, la commission demande au gouvernement de fournir des informations sur la mise en œuvre du système de permis Flexi et son impact sur la diminution de la vulnérabilité des travailleurs migrants à l’exploitation. Notant que la CSI et la GFBTU s’interrogent sur l’efficacité du Système de protection de l’amélioration des salaires et du contrat tripartite des travailleurs domestiques, la commission demande au gouvernement de fournir des informations sur la mise en pratique de ces deux mesures et de les évaluer périodiquement afin de suivre leur impact sur la diminution de la vulnérabilité des travailleurs migrants.
Article 5. Mesures spéciales de protection. La commission tient à rappeler que les mesures de protection adoptées en faveur des femmes peuvent être globalement classées en deux catégories: d’une part, celles qui visent à protéger la maternité au sens strict et qui relèvent à ce titre de l’article 5 et, d’autre part, celles qui ont pour finalité d’assurer de manière générale la protection des femmes en tant que telles et reposent quant à elles sur des représentations stéréotypées de leurs capacités et de leur rôle social. Ce type de mesures est contraire à la convention et constitue autant d’obstacles au recrutement et à l’emploi des femmes (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 839). La commission rappelle qu’elle estime que les dispositions relatives à la protection des personnes travaillant dans des conditions dangereuses ou difficiles devraient viser à protéger la santé et la sécurité des hommes comme des femmes au travail tout en tenant compte des différences qui font que chacun d’eux est exposé, en matière de santé, à des risques spécifiques. Par conséquent, toutes restrictions à l’accès des femmes au travail sur la base de considérations de santé et de sécurité doivent être justifiées et fondées sur des preuves scientifiques et, lorsqu’elles existent, doivent être réexaminées périodiquement à la lumière des évolutions technologiques et du progrès scientifique, afin de déterminer si elles sont encore nécessaires à des fins de protection. La commission souligne également la nécessité d’adopter des mesures et de mettre en place des services pour que les travailleurs ayant des responsabilités familiales, en particulier les femmes qui continuent à assumer la charge inégale des responsabilités familiales, puissent concilier vie professionnelle et vie familiale. En conséquence, dans ses précédents commentaires, la commission avait prié le gouvernement de prendre des mesures pour faire en sorte que les mesures de protection applicables aux femmes soient limitées à la protection de la maternité au sens strict, et d’abroger toutes dispositions constituant un obstacle au recrutement et à l’emploi des femmes, telles que l’arrêté ministériel no 16 de 2013 (concernant les professions et les circonstances dans lesquelles l’emploi de femmes est interdit pendant la nuit) et l’article 1 de l’ordonnance no 32 de 2013 (qui interdit l’emploi de femmes dans certains secteurs et certaines professions), et avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur les mesures spécifiques prises ou envisagées à cet égard. La commission accueille favorablement ces projets d’amendements communiqués par le gouvernement en réponse à la demande de la commission. Le projet d’amendements définit les travaux dans lesquels les femmes enceintes ou qui allaitent ne peuvent pas être employées. Toutefois, la commission est d’avis que le projet d’amendements est trop général tant pour les domaines de travail que pour les agents d’exposition (par exemple, à l’article 1, le texte fait référence à la «chaleur excessive» mais ne définit pas précisément «excessive»); le projet de texte omet également certains dangers comme, notamment, le rayonnement non ionisant et le rayonnement UV. Dans l’ensemble, le projet ne tient pas compte non plus des principes de prévention et de protection prévus par les instruments de l’OIT sur la sécurité et la santé au travail. Compte tenu de ce qui précède, tout en saluant la décision du gouvernement d’envisager la modification des arrêtés ministériels mentionnés ci-dessus, la commission prie instamment le gouvernement de se prévaloir de l’assistance technique du BIT à cet égard, avant d’adopter le projet d’amendement puisque celui-ci n’est pas approprié. Parallèlement, elle lui demande de revoir son approche relative aux restrictions à l’emploi des femmes à la lumière des principes mentionnés plus haut pour faire en sorte que toutes les mesures de protection prises soient strictement limitées à la protection de la maternité au sens strict, ou soient fondées sur une évaluation des risques en matière de sécurité et de santé au travail et ne constituent pas un obstacle à l’emploi des femmes, en particulier à leur accès à des postes offrant des perspectives de carrière et des responsabilités. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur toute évolution à cet égard.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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