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Informe definitivo - Informe núm. 6, 1953

Caso núm. 11 (Brasil) - Fecha de presentación de la queja:: 24-FEB-51 - Cerrado

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A. Analyse des plaintes

A. Analyse des plaintes
  1. 39. Dans une première communication adressée aux Nations Unies en date du 24 février 1951, le plaignant a allégué les griefs suivants:
    • a) En vertu d'un décret no 23046 de mai 1947, la Confédération des travailleurs brésiliens aurait été déclarée illégale, bien qu'elle représentât la majorité des syndicats.
    • b) Des élections syndicales auraient été interdites en 1943. Lorsqu'en 1950 il organisait des élections syndicales, le gouvernement, en violation des dispositions de la Constitution, aurait requis des candidats une déclaration d '«idéologie » sous serment, en vue d'empêcher de faire acte de candidature des personnes qui auraient participé à des grèves ou formulé des revendications devant les commissions de réclamation ou qui auraient été arrêtées en raison de leur activité syndicale ou politique.
    • c) Aux termes du décret no 9070 de 1946, la grève serait déclarée acte antisocial et les grévistes s'exposeraient à des poursuites judiciaires.
    • d) Au courant de l'année 1950, certains faits se seraient produits dans divers Etats du Brésil, qui constitueraient des atteintes spécifiques à la liberté syndicale, tels que la destitution de plusieurs dirigeants syndicalistes, l'emprisonnement d'un certain nombre d'autres dirigeants, la perquisition dans des locaux de syndicats, la suspension de l'activité d'une association de fonctionnaires, etc.
    • e) En vertu de la législation en vigueur au Brésil (loi sur le travail du 1er mai 1943), il serait interdit aux travailleurs de se faire les promoteurs d'un mouvement syndical indépendant ; les syndicats existants seraient des organismes gouvernementaux. Le ministère du Travail contrôlerait l'établissement de leurs statuts, leur fonctionnement intérieur, ainsi que leur gestion financière. Il percevrait notamment une taxe syndicale destinée à couvrir les frais des syndicats officiels.
  2. 40. Par câble du 22 mars 1952, également adressé aux Nations Unies, la Fédération syndicale mondiale, dans une seconde plainte, a protesté contre une violation des droits syndicaux qui aurait été commise à l'occasion d'une grève des travailleurs de l'aviation.

B. Analyse des réponses

B. Analyse des réponses
  • Analyse de la première réponse (3 décembre 1951)
    1. 41 Dans sa première réponse en date du 3 décembre 1951, le gouvernement brésilien a notamment fait valoir les arguments suivants:
      • a) La Confédération des travailleurs brésiliens, déclarée illégale en 1947, n'a jamais représenté la majorité des syndicats.
      • b) La déclaration d «idéologie » faite sous serment n'est plus exigée.
      • c) La grève est considérée comme un acte antisocial pour autant seulement que les moyens légaux de conciliation ne seraient pas épuisés.
      • d) Quant aux allégations contenues au point d) de la plainte, le gouvernement a fait savoir qu'il a demandé des informations aux délégations régionales du ministère du Travail.
      • e) Le gouvernement brésilien n'exerce pas de contrôle sur les affaires internes des syndicats. Ceux-ci sont libres d'établir leurs propres statuts. D'autre part, il n'existe pas de syndicat « officiel » au profit duquel serait perçu un impôt syndical.
    2. Demande d'informations complémentaires
    3. 42 A sa réunion du 10 au 12 janvier 1952, le Comité de la liberté syndicale prenant acte du fait que le gouvernement brésilien a entrepris une enquête sur les allégations relatives aux atteintes à la liberté syndicale qui auraient été commises dans diverses localités, a décidé de surseoir à l'examen de la plainte en attendant le résultat de cette enquête et de demander en même temps au gouvernement des renseignements complémentaires en ce qui concerne les dispositions régissant le fonctionnement des syndicats, les raisons ayant motivé la dissolution de la Confédération des travailleurs brésiliens ainsi que les conditions dans lesquelles il aurait été demandé aux candidats aux élections syndicales de 1950 une déclaration d'idéologie sous serment.
  • Analyse de la deuxième réponse (30 mai 1952)
    1. 43 Dans sa deuxième réponse en date du 30 mai 1952, le gouvernement a présenté un exposé sur le régime syndical actuellement en vigueur au Brésil, en donnant en particulier des précisions sur la dissolution de la Confédération des travailleurs brésiliens en 1947, ainsi que sur les conditions dans lesquelles les candidats à des postes de direction syndicale sont élus. En ce qui concerne les allégations relatives à la grève des travailleurs de l'aviation, le gouvernement s'est référé à sa réponse précitée du 3 décembre 1951.
  • Allégation concernant la dissolution de la Confédération des travailleurs brésiliens
    1. 44 En septembre 1946, un congrès national des travailleurs a été convoqué en vue de délibérer sur la constitution d'une Confédération nationale des syndicats. Deux tendances se sont affrontées au sein de ce congrès : l'une - ralliant la majorité -en faveur du système syndical traditionnel; l'autre, minoritaire, en faveur d'une Confédération unitaire de tendance communiste.
    2. 45 Contre l'avis de la majorité, la Confédération des travailleurs brésiliens a été constituée par la minorité en dehors même du Congrès. La Confédération n'a donc jamais représenté, comme le plaignant l'affirme, la majorité des travail leurs brésiliens. Placée sous l'emprise du parti communiste, cette Confédération s'est livrée à une activité politique illégale et a cherché à s'emparer par la violence des postes de direction des différents syndicats. De plus, la Confédération n'a pas été légalement reconnue comme telle, conformément aux dispositions de la loi sur le travail; elle n'a même pas sollicité une telle reconnaissance.
    3. 46 En raison de l'illégalité de ses activités et de l'irrégularité de son statut, le gouvernement, par décret du 7 mai 1947, a suspendu la Confédération pour une durée de six mois en chargeant en même temps le procureur de la République de requérir du tribunal compétent, conformément à l'article 6 du décret no 9085 du 25 mars 1946, la dissolution de la Confédération.
    4. 47 Cette dissolution a été prononcée par un jugement du 14 juillet 1948, après que le tribunal suprême fédéral, par décision du 29 octobre 1947, eut rejeté la demande de la Confédération tendant à déclarer illégale et anticonstitutionnelle la mesure de suspension prise par le gouvernement.
  • Allégation concernant les élections syndicales
    1. 48 En ce qui concerne la déclaration de loyauté politique de la part des candidats à des postes de dirigeants de syndicats, le gouvernement fait observer qu'une telle déclaration n'est plus requise. En effet, un arrêté du 8 avril 1952 a modifié les dispositions sur les élections syndicales. En vertu de cet arrêté, les candidats doivent simplement déclarer qu'ils ne sont pas inéligibles aux termes de la loi sur le travail ; d'autre part, la possibilité est donnée aux intéressés de contester l'éligibilité d'un candidat. De l'avis du gouvernement, ce système est en parfaite harmonie avec la disposition de la Constitution qui garantit la liberté syndicale.
  • Allégation concernant le régime syndical
    1. 49 Le régime syndical est basé sur l'article 159 de la Constitution fédérale de 1946, article qui est conçu comme suit : « L'association professionnelle ou syndicale est libre; la loi fixe la forme de sa constitution, sa représentation légale dans les conventions collectives du travail et l'exercice des fonctions déléguées par les pouvoirs publics. »
    2. 50 De l'avis du gouvernement, le statut syndical établi par la loi sur le travail en date du 1er mai 1943 est conforme à la Constitution et ne saurait, partant, être considéré comme contraire aux principes de la liberté syndicale. A cet effet, il fait observer que le législateur a réglé, d'une part, la forme de la constitution des syndicats et leur a délégué, d'autre part, certains pouvoirs, notamment ceux de conclure des conventions collectives avec effet normatif et de percevoir un impôt syndical. En contrepartie de cette délégation de pouvoirs, les syndicats sont soumis à certaines obligations portant notamment sur leur enregistrement et leur reconnaissance. De l'avis du gouvernement, la jouissance d'une liberté illimitée pourrait mettre en péril les bases mêmes du régime démocratique consacré par la Constitution. Le gouvernement relève que ce système a fait ses preuves, comme en témoigne le grand nombre de syndicats existants et qui va toujours en croissant.

C. C. Conclusions du comité

C. C. Conclusions du comité
  1. 51. Le gouvernement du Brésil a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, mais non la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical.
    • Allégation concernant la dissolution de la Confédération des travailleurs brésiliens
  2. 52. Le plaignant allègue que la Confédération des travailleurs brésiliens aurait été déclarée illégale bien quelle représentât la majorité des syndicats. Dans sa réponse en date du 3 décembre 1951, le gouvernement brésilien soutient que cette confédération n'a jamais représenté la majorité des syndicats. Dans sa communication du 30 mai 1952, le gouvernement donne des précisions sur les circonstances dans lesquelles la Confédération des travailleurs brésiliens a été dissoute, en y joignant en annexe copie d'une décision du tribunal suprême fédéral en date du 29 octobre 1947, ainsi que celle du jugement du tribunal ordinaire qui, en date du 14 janvier 1948, a prononcé la dissolution de cette organisation.
  3. 53. Il ressort de cette documentation que la procédure en dissolution s'est effectuée en deux étapes successives.
  4. 54. Le jour même où le parti communiste a été déclaré illégal et dissous de ce fait, le gouvernement, insistant sur les liens intimes entre ce parti et la Confédération des travailleurs brésiliens, a suspendu cette dernière pour une durée de six mois (décret no 23046, Diário Oficial, no 103 du 7 mai 1947, p. 6253).
  5. 55. En prenant cette mesure, le gouvernement s'est fondé sur un décret-loi no 9045 du 25 mars 1946 réglant l'enregistrement des associations de droit commun. En effet, la Confédération des travailleurs brésiliens n'a pas été une « confédération » reconnue au sens de la loi sur le travail. Elle avait été simplement inscrite comme société civile dans le registre des personnes juridiques. Or, en vertu du décret-loi de 1946, le gouvernement est autorisé à suspendre pour un délai ne dépassant pas six mois une association qui poursuit des activités illicites ou contraires à la sécurité de l'Etat ou à l'ordre public et social. La dissolution même d'une telle association est cependant de la compétence des tribunaux, qui doivent à cet effet être saisis par le procureur général.
  6. 56. L'arrêté de suspension est fondé essentiellement sur les deux motifs suivants : En premier lieu, la Confédération était composée d'organisations et de délégations qui n'étaient pas enregistrées conformément aux prescriptions de la loi sur le travail. A l'encontre des prescriptions légales, la Confédération a ainsi exercé une activité de défense professionnelle réservée aux seules organisations syndicales reconnues. En plus de cette activité illégale, la Confédération a déployé une agitation politique interdite même aux organisations syndicales reconnues.
  7. 57. Le gouvernement a ainsi suspendu la Confédération des travailleurs brésiliens pour une durée de six mois. En même temps, il a chargé le ministère public fédéral de requérir du tribunal compétent la dissolution de cette organisation.
  8. 58. Dans la deuxième étape, la procédure de dissolution a été engagée par le procureur de la République devant le tribunal ordinaire compétent.
  9. 59. Au cours de cette procédure, la Confédération a contesté la légalité de la mesure de suspension prise par le gouvernement et demandé incidemment que le cas soit porté devant le tribunal suprême fédéral en vue d'obtenir une «ordonnance de garantie » déclarant anticonstitutionnelle la décision gouvernementale. Par jugement du 29 octobre 1947, le tribunal suprême a rejeté cette demande. La majorité des hauts magistrats estimait en effet que la mesure de suspension était parfaitement légale. A leur avis, la Constitution, tout en garantissant la liberté syndicale, laisse au législateur le soin de régler la forme dans laquelle les organisations syndicales peuvent se constituer et fonctionner. La loi sur le travail règle précisément cette question. N'ayant pas rempli les formalités requises par cette loi, la Confédération n'est donc pas constituée légalement et ne peut par conséquent prétendre à être protégée contre une mesure de suspension.
  10. 60. Une minorité des juges a cependant estimé que la Constitution n'autorise aucune limitation de la liberté syndicale, qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'une réglementation de forme et, par conséquent, que l'ordonnance de garantie devrait être accordée au requérant.
  11. 61. Cet incident ayant été réglé, le tribunal, par décision en date du 14 juillet 1948, a déclaré dissoute la Confédération des travailleurs brésiliens.
  12. 62. Il ressort du texte du jugement, que le gouvernement a joint à sa réponse, que le tribunal s'est basé essentiellement sur les motifs suivants en premier lieu, la Confédération des travailleurs brésiliens n'a pas obtenu la reconnaissance requise par la loi sur le travail, loi qui n'a pas été abrogée par l'article 159 de la Constitution. En second lieu, la Confédération des travailleurs brésiliens, qui a pour but principal la propagation de doctrines incompatibles avec les institutions constitutionnelles du Brésil ainsi que l'exercice d'une activité d'ordre politique, ne remplissait pas les conditions requises pour être reconnue aux termes de la loi sur le travail. En troisième lieu, le parti communiste ayant été interdit, la Confédération est devenue illégale elle aussi.
  13. 63. Il ressort des explications données par le gouvernement que la suspension de la Confédération des travailleurs brésiliens, par mesure administrative, ne constituait qu'une première étape dans la procédure de dissolution par voie judiciaire. Le gouvernement a précisé que cette procédure offrait aux intéressés toutes les garanties de la loi.
  14. 64. Estimant qu'un principe généralement accepté exige que la suspension ou la dissolution d'une organisation d'employeurs ou de travailleurs ne soit prononcée que par les tribunaux, le Comité, tout en notant que, dans le cas présent, en définitive, la dissolution a été prononcée par le tribunal compétent, recommande au Conseil d'administration d'attirer l'attention du gouvernement sur le fait que, dans le cas où des mesures de suspension sont prises par une autorité administrative, il pourrait y avoir un danger que ces mesures ne paraissent être arbitraires, même si elles sont provisoires et limitées dans le temps et qu'elles soient suivies d'une action judiciaire.
    • Allégation concernant les élections syndicales
  15. 65. Le plaignant allègue que les élections syndicales auraient été interdites en 1943 et que, lorsqu'elles auraient été autorisées en 1950, le gouvernement aurait imposé aux candidats une déclaration de loyauté politique. Dans sa réponse du 3 décembre 1951, le gouvernement n'a pas fait allusion à l'interdiction des élections syndicales en 1943, mais a précisé que la déclaration de loyauté politique exigée par l'article 530 de la loi sur le travail n'est plus requise depuis l'entrée en vigueur d'un arrêté du 8 avril 1952 dont il a joint le texte à sa réponse.
  16. 66. Il ressort des explications données par le gouvernement qu'en application de l'article 530 de la loi sur le travail, le gouvernement, dans ses « instructions » pour les élections de 1950, avait effectivement demandé aux candidats à un poste de direction syndicale un certificat délivré par la police attestant «qu'ils ne professaient pas des idéologies incompatibles avec les institutions ou les intérêts de la nation ». Mais il a ajouté qu'en vertu de l'arrêté du 8 avril 1952, un tel certificat n'est plus exigé. Désormais, le candidat aux fonctions électives est simplement tenu de déclarer qu'il n'est pas inéligible pour aucune des raisons indiquées par la loi.
  17. 67. Il ressort des précisions données par le gouvernement que la double allégation du plaignant (interdiction des élections syndicales en 1943 et obligation de présenter un certificat de loyauté politique) est devenue sans objet depuis l'entrée en vigueur de l'arrêté du 8 avril 1952. Dans ces conditions, le Comité estime qu'il n'est pas appelé à exprimer une opinion sur la question de principe qui se pose dans des cas où des déclarations de loyauté peuvent être exigées.
    • Allégation concernant le droit de grève
  18. 68. Le plaignant allègue que la grève est considérée comme un acte antisocial et que tous les grévistes sont passibles de poursuites judiciaires. A cette allégation, il convient d'en joindre une autre, en date du 22 mars 1952, par laquelle le plaignant proteste contre la violation des droits syndicaux à l'occasion d'une grève des travailleurs de l'aviation.
  19. 69. Dans sa réponse du 3 décembre 1951, le gouvernement brésilien a précisé qu'une grève n'est considérée comme un acte antisocial que dans les cas où elle est déclarée avant que les moyens légaux prévus par le règlement des conflits du travail aient été épuisés. Dans sa communication en date du 30 mai 1952, il se réfère, à propos de la grève des travailleurs de l'aviation, expressément à cette première déclaration.
  20. 70. A l'appui de son allégation, le plaignant se réfère au décret no 970 du 15 mars 1946 (Série législative, 1946, Brésil ), texte auquel il convient donc de se reporter.
  21. 71. En vertu de cette réglementation, les différends collectifs du travail sont obligatoirement soumis à la conciliation préalable ou à la juridiction du travail. La cessation collective du travail n'est autorisée que dans les limites prévues par la loi. Elle est considérée comme une faute grave si elle se produit dans des branches économiques que le législateur qualifie d'« activités fondamentales», c'est-à-dire dans les services d'utilité publique tels que eau, gaz, électricité, hôpitaux, etc. Cette définition comprend également les transports et communications - y compris donc l'aviation -, les banques, l'agriculture, les écoles, etc. Le ministère du Travail, par voie d'arrêté, peut y inclure d'autres activités. Toutes les activités économiques qui ne sont pas classées parmi les activités fondamentales sont considérés comme des «activités accessoires ». Dans celles-ci, la grève est, en principe, autorisée, mais devient illégale si les salariés cessent le travail «sans égard aux procédures ou délais de conciliation ou de jugement prévus par les lois ».
  22. 72. Il ressort du texte du décret du 15 mars 1946 que toutes les grèves ne sont pas considérées comme des «actes antisociaux». La grève est illégale si elle se produit dans l'une des activités que le législateur estime vitales pour l'économie du pays. Par ailleurs, elle est susceptible de devenir illégale si elle est déclarée en violation des dispositions concernant le règlement des conflits du travail c'est-à-dire en violation des délais prescrits et «en désobéissance aux décisions des tribunaux du travail » (articles 723-724 de la loi sur le travail). C'est en effet à la juridiction du travail que la Constitution, dans son article 123, a confié la tâche de régler les différends individuels et collectifs entre salariés et employeurs.
  23. 73. Il convient d'ajouter que la Constitution, dans son article 158, reconnaît le droit de grève, en confiant au législateur la tâche d'en régler l'exercice.
  24. 74. Il ressort de cette analyse que les grèves ne sont interdites que dans les industries que le gouvernement qualifie clés fondamentales, mais que, dans les industries accessoires, la grève est autorisée dans les limites prévues par les procédures de conciliation et d'arbitrage volontaires.
  25. 75. Dans ces conditions, le Comité estime que l'allégation d'après laquelle « toute grève serait considérée comme un acte antisocial et tout gréviste serait passible de poursuites judiciaires » n'est pas fondée, mais recommande au Conseil d'administration d'attirer l'attention du gouvernement sur l'importance qu'il attache à ce que, dans les cas dans lesquels des grèves sont interdites dans les activités fondamentales, des garanties appropriées soient accordées pour sauvegarder pleinement les intérêts des travailleurs ainsi privés d'un moyen essentiel de défense professionnelle.
    • Allégations concernant certains cas spécifiques d'atteintes à la liberté syndicale
  26. 76. Le plaignant énumère enfin certains cas d'atteinte à la liberté syndicale qui se seraient produits dans plusieurs régions du pays au cours de l'année 1950.
  27. 77. Dans sa réponse du 3 décembre 1951, le gouvernement a signalé qu'il a demandé des informations aux autorités régionales compétentes, mais dans sa seconde communication, il n'a pas rendu compte du résultat de ses investigations. En revanche, il a fourni au Comité des précisions sur le régime syndical en général, ainsi que sur son application, en y joignant les textes de jugements importants et ceux de certains avis juridiques faisant autorité. Il en ressort que le gouvernement est bien conscient de la nécessité de garantir la liberté syndicale aux travailleurs dans toutes les régions du pays. A maintes reprises, il souligne que les travailleurs jouissent effectivement de cette liberté, pourvu que, dans l'exercice de leurs droits, ils s'en tiennent aux prescriptions de la loi. « Au Brésil, déclare-t-il notamment, le syndicat est libre de se livrer à tous les actes licites pour la défense des intérêts des travailleurs. Il a entière liberté d'action à condition que ses actes ne menacent ni l'ordre public ni les droits et les libertés des tierces personnes. »
  28. 78. Etant donné les explications générales fournies par le gouvernement, le Comité estime qu'il n'est pas nécessaire de lui demander des informations supplémentaires, mais recommande au Conseil d'administration d'attirer l'attention du gouvernement sur la nécessité de faire assurer l'application des principes de la liberté syndicale dans le pays entier par toutes les autorités et administrations sous ses ordres.
    • Allégations concernant la législation sur les syndicats
  29. 79. Le plaignant a allégué en premier lieu qu'aux termes de la législation sur les syndicats, il serait interdit, d'une part, de promouvoir la formation d'un mouvement syndical indépendant et que, d'autre part, les organisations existantes seraient placées sous le contrôle du gouvernement.
  30. 80. A l'appui de cette allégation, le plaignant s'est référé au décret-loi du 1er mai 1943 portant approbation de la consolidation de la législation du travail (Série législative, 1943, Brésil ; amendements 1945, Brésil ; 1946, Brésil ). Pour l'examen des deux griefs, il est donc nécessaire de se reporter à ce texte.
    • Allégations relatives à la restriction du droit des travailleurs de constituer des syndicats
  31. 81. Le titre V du décret-loi du 1er mai 1943, qui est consacré au régime syndical, prévoit l'institution de deux sortes d'organisations syndicales nettement distinctes : 1) les associations professionnelles enregistrées et 2) les syndicats reconnus.
    • Associations professionnelles enregistrées
  32. 82. Aux termes de l'article 511, est licite l'association, aux fins d'étude, de défense et de coordination de leurs intérêts économiques et professionnels, de tous ceux qui exercent, en qualité de salariés, la même occupation ou profession ou des occupations ou professions similaires ou connexes.
  33. 83. Toute association professionnelle est tenue de se faire enregistrer. L'enregistrement se fait auprès de l'autorité compétente du travail, sur requête accompagnée d'une copie authentique des statuts et d'une déclaration indiquant le nombre dès membres, le montant dé la fortuné et les services sociaux qui ont été institués. L'enregistrement confère à l'association professionnelle les droits qui sont énumérés dans la loi, à savoir : elle peut représenter devant les autorités administratives et judiciaires les intérêts individuels des associés en relation avec leurs occupations professionnelles ; elle peut collaborer avec l'Etat en qualité d'organe technique et consultatif, à l'étude et à la solution dès problèmes concernant la catégorie de personnes pour laquelle elle a été créée; elle peut également instituer dès bureaux de placement (art. 558).
    • Syndicats reconnus
  34. 84. Toutefois, il ne suffit pas qu'une association professionnelle soit enregistrée pour acquérir la qualité de « syndicat» au sens dé la loi. Elle devient syndicat seulement lorsqu'elle est reconnue telle par l'autorité compétente, acte qui lui confère les droits et obligations réservés aux syndicats (art. 512 et 561).
  35. 85. Afin de comprendre la différence que le législateur a établie entre l'association professionnelle simplement enregistrée et le syndicat reconnu, il convient d'examiner à la lumière de la loi, d'une part, les conditions dans lesquelles une association professionnelle peut être reconnue comme syndicat et, d'autre part, les droits et obligations des syndicats reconnus.
  36. 86. L'association professionnelle, pour être reconnue comme syndicat, doit réunir au minimum un tiers des personnes relevant de la catégorie pour laquelle elle a été constituée. Ces catégories sont établies par le ministère du Travail sur proposition d'une Commission d'organisation syndicale dans laquelle siègent, à côté dès représentants des services publics intéressés, deux représentants ouvriers et deux représentants employeurs nommés sur des listes présentées par les fédérations nationales respectives. Exceptionnellement, le ministre du Travail peut reconnaître une association à effectif plus faible.
  37. 87. Pour être reconnue, l'association professionnelle doit être la plus représentative au jugement du ministre du Travail, qui se fonde, entre autres éléments, sur le nombre des membres, les services sociaux existants et le montant de la fortune de l'association. Toutefois, il ne sera reconnu qu'un seul syndicat comme représentant la même catégorie économique ou professionnelle dans un ressort territorial déterminé.
  38. 88. Le ministère du Travail délimite le ressort territorial des syndicats. Ceux-ci sont des syndicats de district, municipaux, intermunicipaux, d'Etat ou inter-Etats ; exceptionnellement, dès syndicats nationaux sont reconnus.
  39. 89. Un syndicat reconnu est ténu de se conformer aux dispositions suivantes:
    • a) abstention de toute propagation de doctrines incompatibles avec les institutions et les intérêts de la nation, ainsi que de toute propagande en faveur de candidatures à des charges électives étrangères au syndicat ;
    • b) interdiction de cumuler des charges électives avec un emploi rémunéré par le syndicat;
    • c) caractère honorifique des charges électives ;
    • d) interdiction de toutes activités non comprises dans lés objets visés par la loi (art. 511), y compris celles déployées en faveur d'un parti politique ;
    • e) interdiction de céder des locaux à un organisme ayant le caractère d'un parti politique.
  40. 90. En plus des droits accordés aux associations professionnelles mentionnées ci-dessus, le syndicat reconnu possède les prérogatives suivantes:
    • a) de représenter devant les autorités publiques les intérêts généraux de la catégorie ;
    • b) le conclure des conventions collectives ;
    • c) de désigner lés représentants de la catégorie ;
    • d) dé percevoir dès cotisations dé tous les travailleurs qui appartiennent à la catégorie économique ou professionnelle.
  41. 91. En contrepartie, il a les obligations suivantes:
    • a) de collaborer avec les pouvoirs publics au développement de la solidarité sociale ;
    • b) d'entretenir des services d'assistance juridique pour les membres;
    • c) dé s'efforcer d'aboutir à la conciliation des différends du travail;
    • d) de promouvoir la création de sociétés coopératives ;
    • e) de fonder et d'entretenir dès écoles élémentaires et professionnelles.
  42. 92. Il semble ressortir de ces dispositions que les travailleurs ont, en principe, le droit de constituer sans autorisation préalable dès organisations de leur choix. Toutefois, la loi ne met pas sur le même plan les deux types d'organisation : l'association professionnelle et le syndicat reconnu. La première est formée librement sous la seule réserve de son enregistrement qui semble être de droit si lés conditions légales - au demeurant de pure forme - sont remplies. La seconde est une association professionnelle officiellement reconnue par le gouvernement en tant que syndicat. Alors que l'organisation du premier type a seulement le droit dé défendre les intérêts individuels de ses membres, le syndicat reconnu est investi du pouvoir dé représenter et de défendre l'intérêt collectif de tous lés travailleurs qui appartiennent à la catégorie pour laquelle le syndicat est constitué, qu'ils soient affiliés ou non au syndicat.
  43. 93. Il ressort de ces précisions qu'aucune organisation n'est tenue d'acquérir la reconnaissance. Elle est libre de la demander ou non ; si elle ne le fait pas, elle ne sera pas illégale de ce fait ; elle ne bénéficiera pas des avantages de la loi, mais ne sera pas non plus tenue aux obligations que celle-ci prévoit.
  44. 94. Dans ces conditions, la reconnaissance ne saurait être assimilée à une autorisation préalable, puisqu'elle s'applique à des organisations existantes, librement créées qui, en échange dès avantagés qu'elle leur confère, se soumettent librement aux conditions de formé et dé fond prévues par la loi pour l'obtenir.
  45. 95. On peut se demander toutefois si, du seul fait que les syndicats reconnus jouissent, à l'exclusion des autres organisations, de privilèges d'une importance capitale pour la défense des intérêts professionnels, les salariés ne sont pas indirectement tenus d'adhérer aux syndicats reconnus. Il arrive que le législateur d'autres pays confère, sans esprit de discrimination, à des syndicats reconnus qui sont en fait les plus représentatifs, certains privilèges en matière de défense dès intérêts professionnels qu'ils sont seuls en mesure d'exercer utilement. Mais l'octroi de tels privilèges ne saurait être subordonné à des conditions telles que les garanties fondamentales de la liberté syndicale puissent, de ce fait, être misés en causé.
  46. 96. Il convient dès lors d'examiner si, dans le cas d'espèce, les conditions mises à la reconnaissance ne mettent pas indirectement en cause le droit des travailleurs dé constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier.
    • Conditions mises à la reconnaissance du syndicat
  47. 97. L'association professionnelle, pour être reconnue, doit réunir, nous l'avons signalé plus haut, au moins le tiers des travailleurs de la catégorie intéressée. En plus du nombre minimum de membres requis, les services sociaux créés par l'organisation et le montant dé sa fortune sont les éléments essentiels qui doivent être pris en considération par le gouvernement. Enfin, la loi stipule expressément que l'autorité compétente doit toujours reconnaître l'association la plus représentative.
  48. 98. Il y a lieu d'ajouter que la Commission d'organisation syndicale prévue à l'article 576 de la loi est appelée à résoudre « tous les doutes et litiges relatifs à l'organisation syndicale ». La composition de cet organisme semble garantir un examen objectif des cas. En effet, sous la présidence du directeur général du Travail, elle comprend les personnes suivantes : un représentant de l'Institut national de technologie, un représentant de l'Actuariat, un représentant du Service statistique, un représentant du Département national de l'industrie et du commerce et un représentant de la Division de l'organisation et de l'assistance syndicales du Département national du travail désigné par le ministre du Travail, un représentant du ministère de l'Agriculture ainsi que deux représentants des employeurs et deux représentants des salariés nommés sur des listes présentées par les fédérations nationales respectives.
  49. 99. Il ressort de ces précisions que la décision de la reconnaissance est fondée sur un ensemble de critères objectifs qui semblent exclure toute intervention, arbitraire des autorités.
    • Conditions relatives à l'objet des syndicats
  50. 100. D'après l'article 518 de la loi, les statuts des syndicats reconnus doivent contenir la déclaration que « l'association agira en qualité d'organe de collaboration avec les pouvoirs publics et les autres associations dans le sens de la solidarité sociale et de la subordination des intérêts économiques et professionnels à l'intérêt de l'Etat ».
  51. 101. Une telle disposition peut naturellement prêter à des interprétations diverses. Interprétée libéralement, elle pourrait être comprise comme engageant simplement le syndicat à respecter l'ordre public existant. Interprétée restrictivement, cependant, elle pourrait impliquer une certaine subordination des syndicats à la politique économique et sociale du gouvernement. Telle semble avoir été l'intention des auteurs de la loi, car le texte primitif de l'article 555, paragraphe e) prévoyait le retrait de la reconnaissance dans le cas où le syndicat ne se conformerait pas aux instructions des «autorités corporatives » compétentes ou aux directives de politique économique données par le Président de la République, ou mettrait obstacle à leur application. Cependant, en vertu d'un décret-loi du 1 octobre 1945, cette disposition a été remplacée par un nouveau texte aux termes duquel la reconnaissance sera annulée lorsque le syndicat « mettra obstacle à l'exécution de la politique économique adoptée par le gouvernement ». Cette nouvelle disposition n'exige plus des syndicats une « conformité» absolue de leur politique avec celle du gouvernement, puisqu'elle ne prévoit l'annulation de la reconnaissance que si les syndicats mettent directement obstacle à l'exécution de la politique économique de l'Etat. Il se peut donc que le législateur ait entendu exclusivement viser par cette formule des actes illicites en droit commun tels que des actes de sabotage, etc.
  52. 102. Dans ces conditions, le Comité estime que le plaignant n'a pas apporté la preuve que cette disposition est appliquée de manière à porter atteinte au droit que doivent avoir les organisations d'employeurs et de travailleurs d'établir librement leur programme d'action. Toutefois, le Comité désire souligner qu'en raison de son imprécision, une telle formule pourrait impliquer une certaine restriction de la liberté d'action syndicale en matière de relations professionnelles, étant donné que la politique syndicale peut ne pas cadrer exactement avec la politique du gouvernement sans porter pour autant atteinte à l'ordre public.
    • Allégations concernant l'atteinte à l'autonomie syndicale
  53. 103. A l'appui du grief d'après lequel le fonctionnement des syndicats serait contrôlé par le ministère du Travail, le plaignant avance les trois allégations suivantes:
    • a) La loi règle les affaires internes des syndicats si strictement que ceux-ci ne peuvent pas établir librement leurs propres statuts.
    • b) Les problèmes relatifs aux syndicats ne peuvent être discutés qu'au siège même du syndicat et avec l'assentiment du ministère qui a le droit d'interdire des réunions et, lorsqu'il les autorise, d'intervenir dans l'inscription des questions à l'ordre du jour.
    • c) Le ministère du Travail exerce également un contrôle sur les finances des syndicats et perçoit annuellement une taxe correspondant au salaire d'une journée de travail pour couvrir les frais des syndicats officiels.
  54. 104. On examinera les dispositions de la loi relatives à ces divers points, mais il convient de noter au préalable que toutes ces dispositions s'appliquent exclusivement aux syndicats reconnus et non pas aux associations professionnelles simplement enregistrées.
    • Dispositions relatives aux statuts syndicaux
  55. 105. D'après le paragraphe 1 de l'article 518, les statuts des syndicats doivent contenir, à part la déclaration quant à l'objet des syndicats analysée plus haut (voir paragraphe 100 ci-dessus), les énonciations suivantes:
    • a) Dénomination et siège de l'association.
    • b) Catégorie économique et professionnelle pour laquelle la représentation est demandée.
    • c)...................................................................................................................................................
    • d) Attributions des administrateurs, procédure de leur élection et de leur vote, cas de perte de leur mandat et de leur remplacement.
    • e) Mode de constitution et d'administration du patrimoine social et destination qui sera donnée en cas de dissolution.
    • f) Conditions dans lesquelles l'association sera dissoute.
  56. 106. Il s'agit là de dispositions se rapportant à des matières qui sont usuellement réglées dans tout statut syndical et qui semblent avoir pour seul objet d'assurer le fonctionnement normal de l'organisation.
  57. 107. Ajoutons toutefois que, par décision du 22 août 1940 (Diario Oficial du 23 août 1940), le ministère du Travail a publié un modèle de statut ; mais il ressort nettement du paragraphe introductif de cette décision que, donnant suite aux demandes réitérées des intéressés, le ministre se limite à recommander l'adoption, mutatis mutandis, de ce modèle. Les dispositions de cet arrêté ministériel n'ont donc aucun caractère obligatoire.
  58. 108. Le Comité estime, dans ces conditions, que le plaignant n'a pas apporté de preuves suffisantes pour appuyer son allégation d'après laquelle les syndicats ne peuvent établir leurs propres statuts.
    • Dispositions concernant l'organisation intérieure des syndicats
  59. 109. Le plaignant allègue que le ministère du Travail exerce un contrôle sévère sur les affaires intérieures des syndicats ; qu'il peut interdire des réunions et intervenir dans l'inscription des questions à l'ordre du jour. La loi ne contient pas de dispositions spéciales à cet égard, mais son article 525 comporte la règle générale suivante:
    • Il est interdit aux personnes physiques ou morales étrangères au syndicat de s'immiscer dans son administration ou dans ses services.
    • Sont exclus de cette interdiction:
      • a) les délégués du ministère du Travail, de l'Industrie et du Commerce, spécialement désignés par le ministre ou son représentant...
    • 110. Le gouvernement brésilien, dans sa réponse, a déclaré qu'il n'exerce aucun contrôle sur les affaires intérieures des syndicats.
  60. 111. Il ne ressort certes pas de cette déclaration que la disposition précitée de la loi ait été abrogée, mais il semble qu'elle soit devenue caduque en fait. Le Comité estime donc que le plaignant, à défaut de toutes précisions de sa part, n'a pas apporté de preuves suffisantes de son allégation, d'après laquelle le gouvernement interviendrait dans les affaires intérieures des syndicats, au détriment de leurs droits.
    • Dispositions concernant les finances syndicales
    • Les ressources. - 112. Le plaignant allègue que le gouvernement exerce un contrôle sur les finances des syndicats et perçoit annuellement une taxe pour couvrir les dépenses des syndicats officiels.
  61. 113. D'après la loi sur le travail, les ressources des syndicats sont principalement les suivantes : les cotisations des membres fixées par les statuts et les cotisations dues par les travailleurs qui appartiennent aux catégories économiques ou professionnelles représentées par les syndicats « sous la dénomination d'impôt syndical » (article 548).
  62. 114. La réglementation de cet impôt syndical fait l'objet du chapitre III du titre V du Code du travail. Les principales dispositions peuvent être résumées comme suit.
  63. 115. L'impôt syndical est perçu en faveur des syndicats reconnus. Les associations professionnelles enregistrées mais non reconnues n'en bénéficient pas. Il est dû par tous les travailleurs, organisés ou non. Il est payé en une seule fois annuellement et consiste pour les salariés en un montant égal à un jour de salaire (article 580 a)), déduit du salaire par l'employeur (article 582) et versé par la Banque nationale (article 586).
  64. 116. La Banque nationale doit ouvrir un compte spécial au nom de chacune des organisations syndicales reconnues et remet annuellement au Département national du travail un extrait des comptes. Chaque organisation peut utiliser ses fonds au moyen de chèques signés par le trésorier et visés par le président (article 588).
  65. 117. Du total des impôts perçus annuellement est déduit, en faveur des fédérations et des confédérations syndicales reconnues, un montant de 20 pour cent, dont 15 pour cent vont aux fédérations et 5 pour cent à la confédération intéressée. Une autre somme de 20 pour cent est transférée au Fonds social syndical (articles 589 et 590), fonds qui est géré par une commission mixte et employé à des fins conformes aux intérêts généraux de l'organisation syndicale nationale (articles 592-594).
  66. 118. Le solde de l'impôt syndical sera employé par le syndicat reconnu à des fins définies par la loi telles que l'entretien des bureaux de placement, l'assistance sociale, la formation des travailleurs, etc. Dans ces limites, l'emploi de l'impôt est laissé à la discrétion de chaque syndicat, qui devra toujours prendre en considération les intérêts particuliers de la catégorie de travailleurs qu'il représente.
    • La gestion financière. - 119. Les biens et revenus des organisations syndicales ne peuvent être affectés à d'autres fins que celles prévues par la loi et par les statuts. Les titres de revenus et les biens immobiliers ne pourront être aliénés sans l'autorisation du ministre du Travail (article 549). Le projet de budget annuel doit être approuvé par le ministre. La comptabilité doit être visée par les organes compétents du ministère. Un rapport sur l'exercice précédent doit être annuellement présenté au ministère (articles 550-551). Les contraventions exposent les coupables non seulement à des sanctions administratives ou pénales prévues à cet effet par la loi sur le travail (article 553), mais encore à des amendes spéciales si elles concernent l'impôt syndical, ou encore à la peine de prison s'il s'agit d'actes de malversation ou de dilapidation, considérés comme des crimes ou délits contre l'économie nationale (article 552).
  67. 120. Il ressort de ces différentes dispositions que les syndicats reconnus tirent leurs ressources financières non seulement des cotisations des membres, mais bénéficient encore, en leur qualité de représentants légaux de tous les travailleurs, d'un impôt spécial perçu par l'Etat. Si l'emploi des fonds résultant de cet impôt est limité à des fins définies par la loi, il semble toutefois que les syndicats restent libres d'utiliser les revenus résultant des cotisations libres conformément à leurs propres statuts. Cependant, l'analyse de la loi montre que le gouvernement exerce un certain contrôle non seulement sur l'emploi par le syndicat des fonds provenant de l'impôt syndical, mais encore sur leur gestion financière dans son ensemble.
    • Dispositions concernant les fédérations et confédérations syndicales
  68. 121. D'après l'article 562 de la loi sur le travail, les termes « fédération » et « confédération» sont réservés aux associations de syndicats reconnus ; ce sont des «associations syndicales de grade supérieur». Les fédérations doivent être reconnues par le ministre du Travail, et les confédérations par le Président de la République (article 537). Lorsqu'il le juge être de l'intérêt même, de l'organisation syndicale, le Président de la République peut ordonner la constitution de fédérations ou de confédérations (article 536). Les fédérations sont formées pour les différents Etats qui constituent la République. Le ministre du Travail peut cependant autoriser également les fédérations «inter-Etats » ou nationales : exceptionnellement, des organisations régionales ou municipales sont autorisées. Les confédérations sont d'ordre national et industriel. La loi prévoit la constitution de sept confédérations, tant pour les employeurs que pour les travailleurs (article 535). Par ailleurs, les dispositions relatives aux syndicats s'appliquent aux fédérations et confédérations.
  69. 122. Aux termes de l'article 565, les associations syndicales reconnues ne peuvent s'affilier à des organisations internationales ou maintenir des relations avec celles-ci qu'avec l'autorisation préalable du Congrès national. Rappelons à cet égard que la loi, dans sa teneur primitive, avait absolument interdit une telle affiliation. La disposition dans sa forme actuelle a été édictée par décret-loi du 23 juillet 1946 (Série législative, 1946, Brésil, C). C'est en application de cette disposition que le Congrès a été appelé à autoriser les organisations du deuxième et du troisième degré à s'affilier à la Confédération internationale des syndicats libres.
  70. 123. Il ressort de ces dispositions que la formation de fédérations et de confédérations est le privilège des syndicats reconnus. De même que ces derniers, elles doivent être reconnues. Alors que la reconnaissance des fédérations est de la compétence du ministre du Travail, les confédérations doivent être reconnues par le Président de la République. L'affiliation des associations syndicales à une organisation internationale est expressément subordonnée à une autorisation préalable de la part du Congrès.
  71. 124. Il apparaît donc que la loi a conféré aux autorités publiques un large pouvoir de contrôle sur la constitution des organisations syndicales « de grade supérieur ».
  72. 125. Il ressort de cette analyse que le régime syndical est caractérisé par la coexistence de deux catégories d'organisations de travailleurs : les associations professionnelles simplement enregistrées et les associations reconnues en tant que syndicats. C'est a ces derniers que la loi a réservé certaines des fonctions que toute organisation professionnelle exerce normalement. Elle leur a en plus conféré certains privilèges, tels celui de conclure des conventions collectives avec effet normatif, celui de représenter l'ensemble des travailleurs de la catégorie pour laquelle ils sont constitués, celui de bénéficier d'une taxe syndicale imposée à tous les travailleurs, organisés ou non, et enfin celui de former des fédérations et des confédérations.
  73. 126. Dans sa réponse, le gouvernement a souligné que cette réglementation n'a pas pour but ou pour effet de museler le mouvement syndical, mais bien au contraire de promouvoir son essor. «Conscient des besoins des travailleurs, le gouvernement ne leur a pas seulement accordé la liberté de lutter dignement pour la défense de leurs intérêts, mais il est allé au-devant de leurs aspirations en leur garantissant le droit à l'organisation syndicale et en leur octroyant des droits. » Le gouvernement attire en outre l'attention sur le fait que le mouvement syndical s'est considérablement développé depuis la promulgation de la loi sur le travail. «Le mouvement syndical - déclare-t-il - participant au considérable développement qu'entraînent le progrès économique et l'exploitation des richesses du pays, édifiera dans les vingt ans qui vont suivre une société dans laquelle les travailleurs joueront un rôle prédominant...»
  74. 127. On a eu l'occasion de noter à diverses reprises que la législation syndicale qui semble avoir été primitivement conçue en fonction d'un régime corporatif aujourd'hui abandonné, a subi au cours des dernières années des adaptations importantes qui ont sensiblement assoupli la rigidité de nombreuses dispositions.
  75. 128. De plus, d'autres dispositions qui figurent toujours dans la loi du travail et qui, prises à la lettre, pourraient être interprétées comme limitant la liberté syndicale, semblent en fait être tombées en désuétude.
  76. 129. Enfin, la garantie constitutionnelle de la liberté syndicale ne peut manquer d'exercer la plus grande influence sur le futur développement de la législation syndicale.
  77. 130. Dans ces conditions, le Comité estime que le plaignant n'a pas apporté de preuves suffisantes pour justifier son allégation que la législation actuellement en vigueur empêcherait le développement d'un mouvement syndical indépendant.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 131. En conclusion, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de noter avec satisfaction que le gouvernement brésilien a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective et d'attirer particulièrement l'attention du gouvernement sur les articles 1 et 4 de cette convention qui interdisent toute discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi et prévoient l'utilisation la plus large des procédures de négociation collective ;
    • b) de suggérer au gouvernement qu'il pourrait, à la lumière des principes formulés dans la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et en vue d'étudier la possibilité de ratifier cette convention, envisager d'examiner la législation actuellement en vigueur en matière syndicale, spécialement en ce qui concerne:
    • i) la distinction actuellement faite entre les associations simplement enregistrées et les syndicats reconnus ;
    • ii) l'affiliation des organisations d'employeurs et de travailleurs à des organisations internationales ;
    • iii) certaines autres dispositions relatives, notamment, à l'objet des syndicats, à leur gestion financière et aux fédérations et confédérations syndicales;
    • c) de décider que, sous réserve des observations figurant aux paragraphes 64, 75 et 78 ci-dessus, l'ensemble du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
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