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  1. 461. Le comité a déjà examiné ce cas à ses sessions de novembre 1980 et février 1981 au cours desquelles il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration.
  2. 462. Depuis lors, les organisations plaignantes ont adressé au BIT les communications suivantes: Confédération mondiale du travail (CMT), 28 avril et 25 juin 1981; Fédération paysanne latino-américaine (FCLA), 23 juin 1981; Confédération internationale des syndicats libres (CISL), 24 juin, 26 juin, 7 juillet 1981 ainsi que 15 janvier 1982; comité extérieur de la Centrale ouvrière bolivienne (COB), 26 juin et 3 juillet 1981; Confédération latino-américaine des travailleurs (CLAT), 4 juillet 1981; Fédération syndicale mondiale (FSM), 6 juillet 1981.
  3. 463. Pour sa part, le gouvernement a fourni des observations dans des lettres du 20 juillet 1981 ainsi que des 25 et 28 janvier et 11 et 17 février 1982.
  4. 464. La Bolivie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examens antérieurs du cas

A. Examens antérieurs du cas
  1. 465. Les plaintes déposées dans le présent cas avaient trait à la répression dont a été l'objet le mouvement syndical à la suite du changement de gouvernement intervenu le 17 juillet 1980. Elles se référaient principalement à la mort violente de certains syndicalistes dont Gualberto Vega Yapura, dirigeant de la Fédération syndicale des travailleurs des mines de Bolivie, et à de très nombreuses arrestations de dirigeants et de militants syndicaux. Ainsi le comité extérieur de la Centrale ouvrière bolivienne avait fourni une liste de plus de 400 noms de personnes arrêtées, liste qui avait été transmise au gouvernement afin qu'il communique ses observations. Les plaintes portaient également sur la dissolution par voie administrative de la Centrale ouvrière bolivienne et de la quasi-totalité des organisations syndicales. Après une mission sur place effectuée par un représentant du Directeur général en octobre 1980, le comité avait procédé à un premier examen de l'affaire en novembre 1980. Par la suite, le comité avait été à nouveau saisi de plaintes relatives à la mort de plusieurs syndicalistes et à l'arrestation de dirigeants et militants syndicaux.
  2. 466. A sa session de mars 1981, le Conseil d'administration avait, sur recommandation du comité, exprimé sa préoccupation face à la gravité des allégations qui continuaient à être portées à sa connaissance. Il avait rappelé qu'un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer que dans le respect des droits fondamentaux de l'homme. Sur les allégations plus spécifiques des plaignants, le Conseil avait prié le gouvernement de poursuivre ses recherches sur la mort de Gualberto Vega et de fournir des informations sur les circonstances des décès de certains dirigeants syndicaux, dont Artemio Camargo, qui auraient eu lieu le 15 janvier 1981. Le Conseil avait également prié le gouvernement de fournir des informations aussi précises que possible sur le sort de Gregorio Andrade, dirigeant paysan, Walter Delgadillo, dirigeant de la COB, Pablo Copa, dirigeant de la Fédération des mineurs, et Gloria Ardaya qui auraient été arrêtés en janvier 1981. Enfin, en ce qui concerne la révision de la législation syndicale, le Conseil avait prié le gouvernement de continuer à le tenir informé des progrès réalisés en la matière et avait exprimé le ferme espoir que la législation ainsi amendée serait pleinement conforme aux dispositions des conventions nos 87 et 98, ratifiées par la Bolivie, et qu'elle permettrait rapidement la restauration de la liberté syndicale dans le pays.

B. Nouvelles allégations

B. Nouvelles allégations
  1. 467. Dans sa communication du 28 avril 1981, la CMT apporte des précisions sur les circonstances de l'arrestation de Gregorio Andrade, dirigeant paysan, membre du comité exécutif de la COB, qui aurait été arrêté le 15 janvier 1981, puis détenu dans la prison du département d'ordre politique (DOP) de La Paz, et qui serait disparu depuis le 12 mars 1981. La CMT se réfère également à la disparition, depuis le 17 juillet 1980, de Pené Sanchez, secrétaire de la Fédération des travailleurs de l'industrie de La Paz. Enfin, la CMT indique que de nombreux travailleurs ont été arrêtés à la suite de la réaction syndicale aux mesures économiques prises par le gouvernement à la mi-janvier 1981. Parmi eux, se trouvait le dirigeant syndical Bernabé Quiroz qui a été tué et dont le corps a été rendu par l'armée à sa famille.
  2. 468. Les communications envoyées par les organisations plaignantes en juin et juillet 1981 ont trait à l'arrestation de Genaro Flores, secrétaire général chargé des paysans au sein de la COB et coordinateur général de la COB dans la clandestinité. Selon les plaignants, Genaro Flores faisait partie d'un groupe de 22 dirigeants syndicaux qui furent attaqués le 19 juin 1981 par des groupes paramilitaires, puis arrêtés. Gravement blessé par balles à la colonne vertébrale, Genaro Flores fut transporté à l'hôpital de la police de La Paz. Les organisations plaignantes, craignant pour sa vie, demandaient au Directeur général d'intervenir pour que l'intéressé puisse quitter la Bolivie afin de gagner un pays où il pourrait être soigné.
  3. 469. Enfin, le comité extérieur de la COB allègue que, le 23 juin 1981, Marcelo Quezada, journaliste de la revue de la COB, a été arrêté à La Paz.

C. Réponse du gouvernement

C. Réponse du gouvernement
  1. 470. Au sujet de la mort des dirigeants syndicaux Gualberto Vega et Artemio Camargo, le gouvernement, dans sa communication du 28 janvier 1982, regrette de devoir confirmer la mort de ces deux personnes survenue, respectivement, les 17 juillet 1980 et 15 janvier 1981.
  2. 471. Le gouvernement indique également que Pablo Copa, Walter Delgadillo et Gloria Ardaya se trouvent en exil dans différents pays d'Europe.
  3. 472. Pour ce qui est de la situation de Genaro Flores, le gouvernement, après avoir déclaré dans sa lettre du 20 juillet 1981, que ce dirigeant avait été blessé par la police alors qu'il tentait de fuir et qu'il était soigné efficacement, indique dans sa communication du 28 janvier 1982 qu'il se trouve en exil en Europe.
  4. 473. Au sujet de la situation syndicale générale, le gouvernement affirme dans sa lettre du 25 janvier 1982 qu'en vue de résoudre graduellement et sectoriellement, par le dialogue, le problème du retour à la vie syndicale, il a signé, le 19 décembre 1981, un accord avec les représentants des travailleurs des mines, l'Eglise catholique étant intervenue comme médiatrice. Le gouvernement fournit le texte de l'accord en question en annexe à sa communication du 11 février 1982.
  5. 474. Cet accord reconnaît pleinement le droit d'association aux travailleurs boliviens. En conséquence, les travailleurs reconstitueront leurs organisations de représentation selon un calendrier sectoriel fixé par le ministère du Travail, de la même manière que les travailleurs des mines et immédiatement après eux.
  6. 475. Les travailleurs des mines constitueront leurs syndicats et leurs fédérations dans des délais respectifs de 90 et 180 jours à compter de l'accord. La Direction nationale des travailleurs de Bolivie sera reconstituée dans un délai de 365 jours quand tous les secteurs auront organisé leurs fédérations et confédérations.
  7. 476. En attendant l'application de ce calendrier, les travailleurs seront représentés dans leurs relations avec les employeurs par des comités de base élus démocratiquement dans chacun des secteurs d'activité. Le gouvernement a adopté à cet effet une résolution no 014/82 du 21 janvier 1982. Cette résolution, qui fixe les modalités des élections, précise qu'il n'existera qu'un seul comité de base par entreprise et que les candidats à ces comités devront remplir certaines conditions, et notamment être Boliviens de naissance, avoir une ancienneté minimum d'un an dans l'entreprise et ne pas être sous le coup d'une condamnation pénale. En outre, à partir du 15 janvier 1982, la discussion reprendra avec les représentants des travailleurs au sujet des salaires et de la dévolution des émetteurs de radio. Enfin, le gouvernement va réglementer les élections des comités de base selon un calendrier fixé dans l'accord du 19 décembre 1981. Sont ainsi abrogés les décrets nos 17531 et 17545 qui, respectivement, portaient dissolution des directions syndicales et nommaient des "préposés aux relations de travail".
  8. 477. Dans sa communication du 17 février 1982, le gouvernement indique que les travailleurs procèdent actuellement aux élections des comités de base dans une atmosphère de liberté. Jusqu'à maintenant, 300 comités de base ont été reconnus.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 478. Dune façon générale, le comité prend note de l'évolution de la situation syndicale en Bolivie. Il doit cependant constater avec regret que le gouvernement n'a répondu que de manière très partielle sur les allégations de fait qui avaient été formulées par les plaignants.
  2. 479. Ainsi, le comité regrette profondément que le gouvernement n'ait pas fourni d'informations spécifiques sur les circonstances du décès de Gualberto Vega et d'Artemio Camargo, pas plus qu'il n'ait répondu aux allégations sur la mort des huit dirigeants qui, comme Artemio Camargo, auraient été abattus à la Paz le 15 janvier 1981. Dans ces conditions, le comité ne peut que déplorer la mort violente de ces syndicalistes. Il tient à rappeler l'importance dans de tels cas de mener avec célérité des enquêtes impartiales et approfondies en vue d'éclaircir les faits et de déterminer les responsabilités. Une fois établies les responsabilités des fonctionnaires concernés et sanctionnées, conformément à la loi, les personnes qui auraient abusé de leurs pouvoirs, un climat de confiance indispensable au dialogue social, que le gouvernement déclare vouloir restaurer, pourrait plus facilement renaître.
  3. 480. Au sujet des quatre syndicalistes mentionnés dans les plaintes comme arrêtés en janvier 1981, le comité note que trois d'entre eux ont été contraints de s'exiler. A cet égard, le comité souligne qu'un exil forcé de syndicalistes, bien que moins rigoureux que les détentions, prive les intéressés de la possibilité de travailler dans leur pays et les sépare de leur famille. En outre, il constitue une atteinte à la liberté syndicale car il affaiblit le mouvement syndical en le privant de ses dirigeants. De plus, le rétablissement d'une vie syndicale normale ne pourra être considéré comme pleinement atteint que lorsque les dirigeants aujourd'hui exilés pourront, après leur retour en Bolivie, se porter à nouveau candidats à des élections syndicales et exercer les fonctions auxquelles ils seraient élus.
  4. 481. Le gouvernement n'a pas fourni d'informations sur le quatrième dirigeant mentionné comme arrêté en janvier 1981, Gregorio Andrade, pour lequel les plaignants ont indiqué depuis lors qu'il aurait disparu depuis mars 1981. il n'a pas non plus répondu aux nouvelles allégations formulées par les plaignants, à savoir l'arrestation de Marcelo Quezada, journaliste de la COB; la disparition de René Sanchez, secrétaire de la Fédération des travailleurs de l'industrie de La Paz; la mort de Bernabé Quiroz, dirigeant syndical.
  5. 482. Pour ce qui est de la situation de Genaro Flores, dirigeant de la COB, le comité a été informé de l'intervention du Directeur général auprès du gouvernement afin que l'intéressé puisse être soigné à l'étranger. Le comité note que Genaro Flores a pu quitter la Bolivie pour l'Europe où il vit maintenant en exil.
  6. 483. Au sujet de la situation syndicale générale, le comité note qu'un accord, signé avec les représentants des travailleurs des mines, fixe un calendrier pour le retour à la vie syndicale. Il note également que le gouvernement va organiser des élections dans les comités de base, mettant ainsi un terme aux fonctions des "préposés aux relations de travail" qui avaient été mis en place en août 1980 pour assurer la représentation des travailleurs. Toutefois, le comité note que la résolution ministérielle relative à ces comités de base contient plusieurs règles contraires aux principes de la liberté syndicale, et en particulier l'obligation d'un seul comité dans l'entreprise et diverses conditions d'éligibilité. Le comité note enfin que les décrets nos 17531 et 17545 sur lesquels il avait formulé des commentaires ont été abrogés.
  7. 484. Le comité exprime l'espoir que cet accord sera l'amorce nécessaire pour un retour à la vie syndicale normale sur la base d'une législation et d'une pratique conformes aux conventions nos 87 et 98 ratifiées par la Bolivie. En outre, le comité estime qu'il serait utile que tout projet de nouvelle législation qui serait élaboré par le gouvernement soit soumis au BIT pour commentaires préalables, comme cela a déjà été fait dans plusieurs autres cas et comme le gouvernement en avait manifesté l'intention au cours des contacts directs.
  8. 485. Le comité souhaiterait être tenu informé de l'évolution de la situation et, en particulier, de la mise en pratique de l'accord signé avec les représentants des mineurs, notamment quant à la constitution des organisations syndicales de base et des fédérations et confédérations. En outre, le comité souhaiterait obtenir des éclaircissements sur la portée de cet accord, en particulier sur la possibilité qu'auront les travailleurs de se doter d'une centrale interprofessionnelle nationale de leur choix.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 486. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:
    • a) Au sujet de la mort violente de dirigeants syndicaux, le comité regrette profondément que le gouvernement n'ait pas fourni d'informations spécifiques sur les circonstances de ces décès. Il estime qu'un climat de confiance, indispensable au dialogue social, pourrait renaître plus facilement une fois les responsabilités des fonctionnaires concernés établies et les personnes qui auraient abusé de leurs pouvoirs sanctionnées conformément à la loi.
    • b) Au sujet des syndicalistes arrêtés en janvier 1981, le comité note que trois d'entre eux ont été contraints de s'exiler. Il souligne qu'un exil forcé, outre qu'il prive les intéressés de la possibilité de travailler dans leur pays et les sépare de leur famille, constitue une atteinte à la liberté syndicale car il affaiblit le mouvement syndical en le privant de ses dirigeants. Le comité considère que les dirigeants syndicaux aujourd'hui exilés devraient pouvoir retourner en Bolivie et exercer les fonctions syndicales auxquelles ils seraient élus.
    • c) Au sujet des nouvelles allégations formulées par les plaignants, le comité prie le gouvernement de fournir ses observations sur les disparitions de Gregorio Andrade et René Sanchez, le décès de Bernabé Quiroz et l'arrestation de Marcelo Quezada.
    • d) Au sujet du rétablissement de la vie syndicale, le comité note que les décrets-lois nos 17531 et 17545 portant dissolution des directions syndicales et instituant des préposés aux relations de travail ont été abrogés. Il exprime l'espoir que l'accord signé entre le gouvernement et les représentants des travailleurs des mines sera l'amorce nécessaire pour un retour à la vie syndicale normale sur la base d'une législation et d'une pratique conformes aux conventions nos 87 et 98 ratifiées par la Bolivie. Il suggère au gouvernement, comme celui-ci en avait manifesté l'intention au cours des contacts directs, de soumettre au BIT, pour commentaires, tout projet de loi qui serait élaboré. Le comité prie le gouvernement de fournir des informations sur la mise en pratique et la portée de l'accord (constitution des organisations syndicales et possibilité de créer une centrale interprofessionnelle nationale de travailleurs)
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