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Informe provisional - Informe núm. 311, Noviembre 1998

Caso núm. 1951 (Canadá) - Fecha de presentación de la queja:: 02-FEB-98 - Cerrado

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170. Le Congrès du travail du Canada (CTC) et la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario ont présenté une plainte contre le gouvernement du Canada (Ontario) pour violation de la liberté syndicale dans une communication du 2 février 1998. Les plaignants ont transmis des informations complémentaires dans une communication du 4 mars 1998.

  1. 170. Le Congrès du travail du Canada (CTC) et la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario ont présenté une plainte contre le gouvernement du Canada (Ontario) pour violation de la liberté syndicale dans une communication du 2 février 1998. Les plaignants ont transmis des informations complémentaires dans une communication du 4 mars 1998.
  2. 171. En réponse à ces allégations, le gouvernement fédéral a transmis la réponse du gouvernement de l'Ontario dans une communication du 22 septembre 1998.
  3. 172. Le Canada a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. Il n'a ratifié ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ni la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, ni la convention ( no 154) sur la négociation collective, 1981.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 173. La plainte a trait à la législation portant sur le secteur de l'éducation en Ontario, à savoir la Loi de 1997 sur l'amélioration de la qualité de l'éducation (projet de loi 160) qui amende profondément la Loi sur l'éducation. Dans leur communication du 4 mars 1998, les plaignants allèguent que la législation, combinée à l'interprétation restrictive donnée par la Cour suprême du Canada au droit constitutionnel à la liberté syndicale (art. 2 d)) de la Charte canadienne des droits et libertés, 1982), viole la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949; la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978; et la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981. En annexe à leur plainte, les plaignants joignent une copie de la législation et des documents explicatifs. Les plaignants expriment leur préoccupation, notamment à l'égard, d'une part, de la réduction du champ de la négociation collective du fait de la législation, d'autre part, de l'exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints des unités de négociation, des syndicats et de la protection contre la discrimination antisyndicale et l'ingérence de l'employeur et, enfin, du défaut de consultation pendant la phase d'élaboration de la législation.
  2. 174. Pour situer le débat, les plaignants indiquent que la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario a été fondée en 1919, et représente actuellement environ 34 000 enseignants des écoles secondaires publiques, dont 1 550 directeurs d'école ou directeurs adjoints. La Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario est l'une des organisations affiliées de la Fédération des enseignants de l'Ontario.
    • Champ de la négociation collective
  3. 175. Les plaignants allèguent que le projet de loi 160, qui a été promulgué le 1er décembre 1997, modifie les structures de négociation collective et, notamment, exclut du processus de négociation collective la détermination de nombreux aspects relatifs aux conditions de travail des enseignants, en autorisant le gouvernement à déterminer unilatéralement nombre de ces conditions. Auparavant, en l'absence de toute limite législative à la négociation collective, les enseignants avaient le droit de négocier des conventions collectives avec les conseils scolaires qui les employaient. Conformément à la Loi de 1975 sur la négociation collective entre conseils scolaires et enseignants, les conseils scolaires locaux étaient tenus de négocier toute proposition relative aux conditions d'emploi avec les sections locales représentant les enseignants. A l'époque, les conseils scolaires jouissaient du droit de rassembler localement des fonds en appliquant des taxes sur les biens résidentiels et commerciaux, au besoin. Ainsi, les conditions d'emploi des enseignants ont été librement négociées entre les parties directement en charge de l'enseignement pendant plus de vingt ans. Les plaignants affirment que le projet de loi 160 supprime véritablement ces droits fondamentaux puisque, désormais, c'est le ministre de l'Education et de la Formation qui détermine les personnes qui peuvent enseigner, le temps de travail en classe ou d'enseignement aux élèves, le temps de travail sur l'année, les fonctions des enseignants et bien d'autres éléments. Aucune convention collective négociée au niveau local ne pourrait l'emporter sur une réglementation centralisée. Les plaignants allèguent que, d'une part, des conseils scolaires de district seraient susceptibles de supprimer des avantages dont la négociation et la mise en place ont demandé des années et, d'autre part, de grands pans des conventions collectives existantes pourraient perdre leur sens.
  4. 176. Les plaignants attirent l'attention sur les principaux domaines de compétence ministérielle qui, selon eux, portent atteinte à la libre négociation collective. Tout d'abord, les articles 171 (2) et (3) de la Loi sur l'éducation sont abrogés par l'article 82 du projet de loi 160 pour permettre à un conseil scolaire de district d'exiger des enseignants qu'ils travaillent tout ou partie des cinq jours ouvrables qui précèdent le début de l'année scolaire, et autoriser le directeur d'une école à prendre des décisions concernant le travail que les enseignants de l'école doivent fournir au cours de cette période. Les plaignants font observer que la nature du travail et la manière dont il sera effectué constitueront un sujet de discussion à la table des négociations, qui mettra une pression sur l'approche collégiale que la plupart des directeurs d'école ont tenté de maintenir grâce à leur présence dans l'unité de négociation.
  5. 177. En outre, l'article 11 (7) de la Loi sur l'éducation est amendé par l'article 7 (4) du projet de loi 160 pour permettre au ministre de l'Education et de la Formation de prendre des arrêtés:
    • a) prescrivant et régissant les dates relatives à l'année scolaire, aux trimestres ou semestres scolaires, aux congés scolaires et aux journées d'enseignement;
    • b) autorisant les conseils scolaires de district à modifier les dates relatives à un ou plusieurs trimestres ou semestres scolaires, congés scolaires ou journées d'enseignement selon ce que désignent les règlements;
    • c) permettant à des conseils scolaires de district, avec l'accord préalable du ministre, de désigner et de mettre en oeuvre, pour une ou plusieurs écoles qui relèvent de leur compétence, des dates relatives à l'année scolaire, aux trimestres ou semestres scolaires, aux congés scolaires ou aux journées d'enseignement qui diffèrent de celles que prescrivent les arrêtés; et
    • d) respectant l'élaboration et la mise en oeuvre de calendriers scolaires par les conseils scolaires de district.
  6. 178. Les plaignants affirment que le ministre utilisera probablement ces pouvoirs pour contrôler tous les aspects d'une journée d'enseignement, y compris les fonctions des enseignants, et qu'il aura désormais tout pouvoir pour remédier aux conséquences de toute grève ou lock-out légal éventuel. Les plaignants affirment en outre que la concentration du contrôle est régie par l'article 81 du projet de loi 160, ajoutant un article 170.1 à la Loi sur l'éducation, ce qui crée une ingérence ministérielle directe dans des affaires qui ont été négociées collectivement depuis des décennies. L'article 170.1 exige que chaque conseil scolaire de district respecte les effectifs de classe fixés, sauf autorisation ministérielle. De plus, l'article 170.2 a été ajouté, imposant à chaque conseil scolaire de district de respecter le temps minimal pendant lequel chaque enseignant doit faire cours ou enseigner des matières aux élèves, dans le programme d'enseignement quotidien. Au vu de ces dispositions, les plaignants concluent que la charge de travail des enseignants, ainsi que chaque minute de leur journée de travail, sera régie par les arrêtés ou la législation, ne laissant que peu de place, sinon aucune, à la négociation; ceci pourrait produire des effets dévastateurs sur les dispositions relatives au personnel. De plus, les plaignants font observer que, lorsque ces nouvelles dispositions sont combinées au pouvoir des conseils scolaires de district de contrôler le nombre de postes de responsabilité, chacun peut prévoir l'adoption par le ministre d'arrêtés empiétant sur tout "temps administratif" ayant pu être négocié au fil des années.
  7. 179. Les plaignants affirment que le projet de loi 160 empêche de respecter les conventions collectives existantes ou futures portant sur le secteur de l'éducation. En conséquence, le gouvernement décourage la négociation collective, déstabilise le climat des relations de travail en dissuadant les travailleurs d'adhérer aux syndicats, et il exclut d'importants aspects des conditions de travail du champ de la négociation collective.
    • Exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints
  8. 180. Un autre aspect du projet de loi 160 soulevé par les plaignants porte sur les dispositions visant à écarter les directeurs d'école et les directeurs adjoints des syndicats d'enseignants existants, et également à les empêcher de constituer de véritables associations en ne leur permettant pas de bénéficier des protections syndicales offertes par le régime de négociation collective de la province. Depuis 1919, les directeurs d'école et les directeurs adjoints ont été des membres actifs et indispensables de la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario. Depuis le début, ils ont occupé des postes de direction au sein de cette fédération, ils ont participé à toutes les activités, y compris la négociation collective et le développement professionnel, ils ont exercé des pressions sur les gouvernements et les conseils scolaires pour améliorer les conditions d'enseignement et d'apprentissage. Depuis 1964, le Conseil des directeurs des écoles secondaires de l'Ontario, une division interne de la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario, permet aux directeurs d'école et aux directeurs adjoints de coordonner leurs activités communes au sein de la fédération. En vertu de la Loi sur la profession enseignante et de la Loi sur la négociation collective entre conseils scolaires et enseignants, les directeurs d'école et les directeurs adjoints étaient obligés d'adhérer à la Fédération des enseignants de l'Ontario, à ses organisations affiliées et à ses sections locales depuis l'officialisation de la négociation collective dans le secteur de l'éducation en 1975.
  9. 181. Les plaignants déclarent que l'affiliation des directeurs d'école et des directeurs adjoints à la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario n'a pas créé de conflit avec leur rôle d'administrateur d'école. Les directeurs d'école et les directeurs adjoints membres de la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario soutiennent que celle-ci constitue toujours la meilleure forme de représentation de leurs intérêts. La relation collégiale entre les directeurs d'école, les directeurs adjoints et les enseignants a été essentielle au maintien et au développement d'un environnement studieux et sain pour les élèves.
  10. 182. Lorsque le projet de loi a été présenté en première lecture le 22 septembre 1997, il ne contenait pas les dispositions interdisant aux directeurs d'école et aux directeurs adjoints d'adhérer à la Fédération des enseignants de l'Ontario ou à ses organisations affiliées, y compris la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario; ils n'étaient pas non plus écartés des unités de négociation. Les amendements destinés à exclure les directeurs d'école et les directeurs adjoints ont été annoncés unilatéralement le 30 octobre 1997 et présentés le 5 novembre 1997. La décision du gouvernement d'écarter les directeurs d'école et les directeurs adjoints de leurs unités de négociation existantes constitue en grande partie, de l'avis des plaignants, une réponse à la participation des directeurs d'école et des directeurs adjoints à la contestation du projet de loi 160 par les enseignants.
  11. 183. Les plaignants attirent l'attention sur un certain nombre de dispositions du projet de loi 160 qui, lu conjointement, écartent les directeurs d'école et les directeurs adjoints des unités de négociation auxquelles ils appartenaient et leur refusent l'accès à la négociation collective, à savoir les articles 122, 127, 151, 167 et 180. Ces articles sont le résultat des amendements apportés par le gouvernement au projet de loi 160 et introduits entre la deuxième et la troisième lecture du projet de loi. En application de ces amendements: i) les directeurs d'école et les directeurs adjoints sont expressément exclus de la partie X.1 de la Loi sur l'éducation, intitulée "Négociation collective des enseignants"; ii) les directeurs d'école et les directeurs adjoints se voient accorder la possibilité de reprendre un poste d'enseignant avant le 1er avril 1998. S'ils choisissent cette option, ils bénéficieront de l'ancienneté accumulée lorsqu'ils occupaient un poste de directeur d'école ou de directeur adjoint; de cette manière, ils pourront réintégrer une unité de négociation au détriment d'un membre ayant moins d'ancienneté; iii) les directeurs d'école et les directeurs adjoints choisissant de conserver leur poste perdent leurs droits à l'ancienneté, leur affiliation à la Fédération des enseignants de l'Ontario et leurs droits de rappel et de réclamation. Ils deviennent directement des employés de la Commission d'éducation concernée; iv) malgré la définition récente de leur statut de personnel "d'encadrement" ou "de direction", les directeurs d'école et les directeurs adjoints se sont vu accorder le droit d'effectuer les travaux de l'unité de négociation affectés aux personnes répondant à la définition d'"enseignant"; v) la Loi sur les relations de travail et la Loi sur la négociation collective dans les écoles provinciales sont par conséquent amendées pour retranscrire l'exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints des unités de négociation et la suppression de tous leurs droits de négociation collective.
  12. 184. Les plaignants constatent qu'avant le projet de loi 160 le gouvernement de l'Ontario considérait que la présence des directeurs d'école et des directeurs adjoints dans les syndicats d'enseignants était satisfaisante. Dans le cadre d'une contestation en justice du projet de loi 160 et lors d'autres déclarations publiques, le gouvernement a affirmé que les directeurs d'école et les directeurs adjoints appartiennent au personnel d'encadrement et de direction. Cependant, du point de vue des plaignants, toutes les preuves produites devant la Cour à l'appui de cette déclaration ont un caractère purement spéculatif. De plus, la Commission des relations de travail de l'Ontario a maintenu à plusieurs reprises que les fonctions de directeur d'école et de directeur adjoint n'impliquaient pas d'être exclu des unités de négociation d'enseignants au titre de la Loi sur les relations de travail de l'Ontario, qui supprime le droit d'affiliation à un syndicat pour toute personne qui, de l'avis de la commission, exerce des fonctions de direction ou est employée à titre confidentiel dans des domaines liés aux relations de travail. En application d'une décision rendue par la Commission des relations de travail de l'Ontario (OLRB) en 1986, dont une copie a été annexée à la plainte, un directeur d'école ne jouit d'aucun pouvoir indépendant l'autorisant à embaucher, renvoyer ou sanctionner des enseignants sous contrat, et il n'occupe pas une fonction de "direction". La commission affirme en outre que l'affectation des enseignants, des directeurs d'école et des directeurs adjoints à la même organisation de négociation collective n'a pas, au vu des preuves qui lui sont présentées, entraîné de "résultats catastrophiques" ou de "friction" en matière de négociation collective. (Fédération des enseignants des écoles publiques de l'Ontario v. la Commission d'éducation de la ville de Windsor, 5 mars 1986). Dans la même affaire, il est fait référence à une décision précédente de l'OLRB qui précisait que la surveillance et l'évaluation par ses pairs n'est pas rare dans un environnement professionnel, et ne constitue pas en soi une fonction de direction... Le modèle contradictoire, la problématique du conflit d'intérêt, l'"approche double" de la négociation collective ne s'appliquent pas facilement à un groupe de professionnels -- ainsi que l'a indubitablement reconnu le pouvoir législatif en décidant que les directeurs d'école et les directeurs adjoints devraient appartenir aux mêmes unités de négociation que leurs collègues enseignants. Les plaignants soutiennent que toutes les décisions légales nationales reconnaissent que les directeurs d'école et les directeurs adjoints ne représentent pas vraiment les intérêts des conseils scolaires (les employeurs), qu'ils ne sont pas investis du pouvoir de décision ou de fonctions de direction et qu'on ne leur confie pas de fonctions de nature hautement confidentielle justifiant leur exclusion des syndicats d'enseignants.
  13. 185. Conformément au projet de loi 160, la Loi sur les relations de travail régit la négociation collective entre les enseignants et les conseils scolaires, remplaçant la Loi sur la négociation collective entre conseils scolaires et enseignants. Cependant, par application du projet de loi 160, les directeurs d'école et les directeurs adjoints ne pourront pas bénéficier du mécanisme et des procédures de la Loi sur les relations de travail pour faciliter la négociation collective. Ils sont privés de la protection offerte par les interdictions légales de discrimination ou de représailles pour engagement dans des activités syndicales, ou d'ingérence de l'employeur. Désormais, les syndicats ne peuvent plus être désignés comme agents négociateurs pour ces travailleurs. Les employeurs ne sont plus légalement obligés de négocier avec les syndicats ou associations représentant les directeurs d'école et les directeurs adjoints. En outre, les directeurs d'école et les directeurs adjoints n'ont plus le droit de grève et peuvent encourir des sanctions ou être renvoyés s'ils se mettent en grève, puisqu'ils relèvent de la common law et non de la Loi sur les relations de travail.
  14. 186. Les plaignants indiquent que l'interdiction pour les directeurs d'école et les directeurs adjoints d'adhérer à un syndicat et de participer à la négociation collective a été la conséquence de leur participation au mouvement de protestation contre le projet de loi 160. Ce mouvement a débuté le 27 octobre 1997, avec la participation de la Fédération des enseignants de l'Ontario, de toutes ses organisations affiliées et de citoyens. Les 126 000 enseignants de la province ont refusé d'enseigner en signe de protestation, et les directeurs d'école et directeurs adjoints ont soutenu le mouvement, une majorité d'entre eux suspendant leurs services pour protester avec les enseignants. Le 30 octobre 1997, alors que le mouvement de protestation se poursuivait, le gouvernement a annoncé unilatéralement une série d'amendements au projet de loi, cités précédemment, visant les directeurs d'école et les directeurs adjoints. Les plaignants déclarent que les membres de la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario et de la Fédération des directeurs des écoles secondaires de l'Ontario sont fermement convaincus que le retrait des directeurs d'école et des directeurs adjoints de la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario et des unités de négociation constitue "une réaction vindicative et arbitraire à l'exercice du droit de protestation politique dont ils ont fait usage". Le ministre de l'Education actuel a déclaré, d'après les plaignants, que les amendements avaient été faits en réponse à la participation d'un grand nombre de directeurs d'école et de directeurs adjoints au mouvement de protestation. Les plaignants soutiennent que cette exclusion est une décision délibérée du gouvernement qui porte atteinte à l'efficacité des syndicats d'enseignants et vise à punir les directeurs d'école et les directeurs adjoints pour leur participation au mouvement de protestation politique.
  15. 187. Les plaignants affirment qu'en pratique l'exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints des unités de négociation forcera un grand nombre d'entre eux à partir à la retraite, dans la mesure où ils ne désirent pas reprendre leur poste d'enseignant ou éliminer de l'unité de négociation les enseignants bénéficiant de moins d'ancienneté. De nombreux directeurs d'école et directeurs adjoints pourraient également refuser l'alternative qui consiste à conserver leurs postes sans être syndicalement représentés.
  16. 188. Du point de vue des plaignants, la législation aura pour autre conséquence que la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario et les autres syndicats d'enseignants se trouveront affaiblis, puisqu'ils seront privés d'une partie importante de leurs adhérents actuels. Suite au projet de loi 160, le nombre d'adhérents de la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario a baissé de 4 pour cent, entraînant des conséquences financières en proportion. La Fédération des enseignants des écoles publiques de l'Ontario, une autre organisation de la Fédération des enseignants de l'Ontario, représentait environ 13 000 enseignants des écoles publiques, dont 2 000 directeurs d'école et directeurs adjoints; c'est pourquoi le nombre de ses adhérents a été diminué de 15 pour cent par l'application du projet de loi 160. De plus, l'expérience et les connaissances des directeurs d'école et des directeurs adjoints qui occupaient des postes élus et participaient aux conseils et aux comités de la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario ont été perdues, affaiblissant encore les syndicats d'enseignants. Par ailleurs, les directeurs d'école et les directeurs adjoints jouaient également un rôle primordial dans le développement professionnel et l'amélioration des conditions d'éducation et d'enseignement, grâce à des actions telles que l'exercice de pressions sur les conseils scolaires et les gouvernements et la promotion de la qualité de l'enseignement.
    • Consultation préalable
  17. 189. Les plaignants prétendent que le gouvernement n'a pas consulté suffisamment les parties intéressées avant d'entamer une réforme rapide de tout le système éducatif, y compris de la structure de négociation collective pour les enseignants. Cette réforme a été en grande partie présentée aux enseignants comme un fait accompli alors que le processus de réforme arrivait à son terme, et elle a été réalisée avec une consultation réelle limitée. Le gouvernement avait annoncé son intention de promulguer la loi avant le début des négociations, lesquelles n'ont duré que quelques semaines. La consultation réduite qui a eu lieu n'a pas tenu compte des avis des syndicats d'enseignants ou des organisations de directeurs d'école et de directeurs adjoints sur les amendements tardifs apportés au projet de loi, qui visent à exclure les directeurs d'école et les directeurs adjoints des structures de négociation collective.
  18. 190. Les plaignants déclarent que, préalablement à l'introduction du projet de loi 160, des discussions ont eu lieu entre la Fédération des enseignants de l'Ontario et le gouvernement sur des sujets préoccupant les organisations affiliées, y compris la proposition du gouvernement d'écarter les directeurs d'école et les directeurs adjoints des organisations affiliées et des unités de négociation. La Fédération des enseignants de l'Ontario et ses organisations affiliées ont fait quelques suggestions et assisté à des réunions avec le ministre de l'Education et de la Formation, portant sur le caractère général du projet de loi 160, avant son introduction et après la première lecture. Lors de son introduction en première lecture, le projet de loi 160 n'interdisait aux directeurs d'école et aux directeurs adjoints ni d'adhérer à la Fédération des enseignants de l'Ontario, à la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario ou à d'autres organisations affiliées, ni de participer aux unités de négociation. Le 6 octobre 1997, une ordonnance de répartition du temps portant sur ce projet de loi 160 en a largement restreint le débat sur le fond. Ce projet de loi a été examiné en deuxième lecture le 7 octobre 1997. Les dispositions du projet de loi 160 demeurent des sujets de préoccupation pour la Fédération des enseignants de l'Ontario et ses organisations affiliées qui ont continué à manifester leur opposition en faisant des suggestions et en intervenant au cours de réunions avec le ministre de l'Education et de la Formation. Les plaignants affirment qu'à aucun moment, lors des réunions et plus particulièrement lors des négociations qui ont pris place entre le gouvernement et les enseignants entre le 24 et le 26 octobre 1997, le gouvernement n'a annoncé que l'exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints de la Fédération des enseignants de l'Ontario et de ses organisations affiliées serait envisagée. Depuis l'introduction du projet de loi, cette question centrale a fait l'objet d'une consultation très limitée.
  19. 191. Les plaignants ajoutent que, le 30 octobre 1997, le gouvernement a annoncé une série d'amendements au projet de loi 160 excluant les directeurs d'école et les directeurs adjoints, amendements présentés lors de la session de l'assemblée législative du 5 novembre 1997. Après l'introduction et l'adoption de ces amendements, la Fédération des enseignants de l'Ontario et ses organisations affiliées se sont vu refuser la possibilité de faire des suggestions au comité législatif chargé d'examiner le projet de loi. De plus, à aucun moment les directeurs d'école et les directeurs adjoints n'ont été consultés, en tant que groupe distinct, sur les modifications apportées au projet de loi 160 qui affectaient directement et considérablement leurs intérêts.
    • La Charte canadienne des droits et libertés
  20. 192. Les plaignants déclarent que les syndicats d'enseignants cherchent actuellement à faire respecter leurs droits à la liberté syndicale devant les tribunaux nationaux, mais que l'interprétation restrictive de la Cour suprême du Canada leur offre une protection limitée. Dès 1987, la Cour suprême du Canada a, dans un certain nombre de cas, examiné avec soin les restrictions législatives aux activités syndicales, cherchant à déterminer si ces restrictions violaient la garantie constitutionnelle de liberté syndicale telle que prévue à l'article 2 d) de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte). Les plaignants se réfèrent à un certain nombre de cas de la Cour suprême du Canada qui donnent une interprétation de l'article 2 d) de la Charte et dont des copies ont été jointes à la plainte. Les plaignants se réfèrent notamment aux conclusions de la Cour selon lesquelles la garantie de liberté syndicale n'inclut pas le droit de grève ou de négociation collective. ( Public Service Employee Relations Act (Alberta), (Renvoi relatif à la) (1987); Alliance de la Fonction Publique v. Canada (1987); S.D.G.M.R v. Saskatchewan (1987); Institut professionnel de la fonction publique du Canada v. Territoires du Nord-Ouest (Commissaire) (1990)).
  21. 193. Sur ce point, les plaignants concluent que la Constitution canadienne ne garantit pas les droits exigés par les normes et principes de l'OIT relatifs à la liberté syndicale, en particulier le droit de grève et de négociation collective; c'est pourquoi l'absence d'amendement de la Constitution par le gouvernement, notamment la Charte des droits et libertés, constitue une violation des obligations internationales du Canada. De plus, concernant l'éventualité préoccupante que les plaignants n'aient pas épuisé toutes les procédures nationales de recours puisque la contestation du projet de loi, fondée sur la Charte, est en instance, les plaignants allèguent que cela ne devrait pas gêner le comité, compte tenu des limitations des procédures légales internes envisagées à la lumière de l'interprétation restrictive de l'article 2 d) de la Charte donnée par la Cour suprême du Canada.
    • Climat général des relations de travail
  22. 194. Les plaignants invoquent les nombreux cas traités par le comité au cours des dernières années, notamment les affaires relatives aux travailleurs du secteur public. Ils soutiennent que, depuis 1975, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux du Canada ont fréquemment eu recours à la loi pour imposer des restrictions à la libre négociation collective et pour interdire les grèves, particulièrement dans le secteur public. En ce qui concerne plus particulièrement l'Ontario, les plaignants déclarent que, depuis 1995, date de l'arrivée au pouvoir du Parti conservateur, le gouvernement a mené une attaque délibérée et exceptionnellement vigoureuse contre la liberté syndicale en Ontario. L'attention est portée sur le récent cas concernant l'Ontario et relatif à la législation privant certains employés professionnels du droit de négociation collective, du droit de grève, de la protection contre la discrimination antisyndicale et de l'ingérence de l'employeur. (Voir 308e rapport, cas no 1900 (Canada/Ontario), paragr. 139-194. ) Les plaignants soulignent également le point de vue exprimé par le comité selon lequel le recours répété à de telles restrictions de la négociation collective ne peut, à long terme, qu'avoir un effet néfaste et déstabilisant sur le climat des relations professionnelles, si le législateur intervient fréquemment pour suspendre ou mettre fin à l'exercice des droits reconnus aux syndicats et à leurs membres. De plus, cela peut saper la foi des salariés en la valeur de l'appartenance à un syndicat, les membres ou les adhérents potentiels étant ainsi incités à considérer qu'il est inutile d'adhérer à une organisation dont le but principal est de représenter ses membres dans les négociations collectives, si les résultats de ces dernières sont annulés par voie législative. (Voir cas no 1607 (Canada/Terre-Neuve), 284e rapport, paragr. 589; cas no 1616 (Canada), 284e rapport, paragr. 637.)
  23. 195. Dans le but d'obtenir des renseignements plus précis afin de procéder à un examen plus approfondi et plus détaillé pour faciliter la recherche de solutions aux problèmes qui sont apparus, et afin de résoudre convenablement le problème de l'Ontario, de nature exceptionnelle et qui s'aggrave, et le non-respect des recommandations du comité, les plaignants demandent au comité de prendre l'une des mesures exceptionnelles suivantes: i) demander au Conseil d'administration du BIT, de sa propre initiative, de renvoyer l'affaire à une commission d'enquête, conformément à l'article 26 de la Constitution de l'OIT; ou ii) demander l'accord du gouvernement canadien pour renvoyer cette affaire devant la Commission d'investigation et de conciliation en matière de liberté syndicale, ou publier le refus.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  • Champ de la négociation collective
    1. 196 En ce qui concerne l'allégation selon laquelle le projet de loi 160 restreint le champ de la négociation collective en violation des normes et principes de liberté syndicale, le gouvernement déclare, dans sa communication du 22 septembre 1998, que les conseils scolaires constituent une catégorie particulière d'employeurs qui ont la charge de faire fonctionner des écoles pour environ 2 millions d'élèves en Ontario ayant le droit légal de fréquenter l'école. Le fonctionnement des écoles en tant que lieux de travail doit, du point de vue du gouvernement, être compatible avec l'apport d'une éducation de qualité aux élèves et une gestion financière des fonds publics responsable.
    2. 197 Le gouvernement fait observer que le projet de loi 160 supprime le pouvoir des conseils scolaires d'établir des taux pour les taxes foncières locales destinées à financer l'éducation -- un pouvoir qui leur avait été préalablement délégué. Ces taux sont désormais fixés par la province. Avant l'entrée en vigueur du projet de loi 160, les conseils scolaires pouvaient augmenter leurs recettes en taxant leurs contribuables locaux au-delà du taux établi au niveau provincial. Le gouvernement déclare que la capacité du conseil scolaire de recourir au contribuable local pour les recettes qui dépassent le montant fixé par le gouvernement provincial ne constitue pas un droit de négociation collective. Ainsi, les droits de négociation collective des enseignants n'ont pas été affectés par le nouveau système de financement mis en place par le projet de loi 160. En fait, seule leur capacité de convaincre les administrateurs des écoles de s'adresser au contribuable local pour financer les avantages et les conditions de travail a été affectée.
    3. 198 Le gouvernement déclare que le 22 juillet 1998 la Cour de l'Ontario (division générale) a jugé que les conseils scolaires catholiques jouissaient du droit constitutionnel d'imposer séparément ceux qui soutiennent les écoles qui relèvent de leur juridiction, parce que ce droit existait en Ontario pour les écoles confessionnelles à l'époque de la Confédération canadienne de 1867. Ce droit constitutionnel ne s'applique pas aux écoles publiques et n'a aucun lien avec les droits de négociation collective qui n'existaient pas en 1867. Cette même Cour a confirmé la constitutionnalité du pouvoir du gouvernement provincial de prescrire des taxes foncières. Il a été fait appel de cette décision devant la Cour d'appel de l'Ontario, où l'audience devrait avoir lieu en novembre 1998. Pendant ce laps de temps, le juge du fond a suspendu sa décision pour dix-sept mois.
    4. 199 Le gouvernement soutient, contrairement aux plaignants, que les réformes des relations de travail découlant du projet de loi 160 ont en réalité pour effet de renforcer les droits de négociation collective et les protections offertes aux enseignants. Les amendements ont doté les enseignants et leurs syndicats de certains droits dont ils ne bénéficiaient pas auparavant, y compris les droits suivants: i) le droit à une "représentation équitable" par leur syndicat; ii) une procédure d'arbitrage accélérée; iii) un accès plus large à la Commission des relations de travail de l'Ontario; iv) des délais de négociation plus courts; v) des interdictions de discrimination par un syndicat; vi) la suppression des contrats réglementaires d'enseignants qui prévoyaient auparavant des situations telles que des préavis en cas de licenciement d'un enseignant par un conseil scolaire; vii) le recouvrement des sommes dues selon la même procédure que les autres syndicats de l'Ontario, plutôt que de manière indirecte par l'intermédiaire de la Fédération des enseignants de l'Ontario, tel que prévu par les règlements.
    5. 200 De l'avis du gouvernement, suite à des consultations exhaustives avec les parents, les enseignants et les responsables des conseils scolaires, la Loi sur l'éducation a été amendée par le projet de loi 160 pour fixer des limites à l'effectif moyen des classes des écoles élémentaires et secondaires. Le gouvernement considère que les limites fixées seront bénéfiques pour les élèves comme pour les enseignants. Alors que le syndicat pourrait envisager "l'effectif des classes" sous l'angle de la charge de travail, cela illustre en fait les efforts déployés par l'Ontario pour assurer une éducation de qualité aux élèves. Le fait que les moyennes soient calculées au niveau du conseil scolaire permet aux conseils scolaires et aux enseignants d'être toujours à même de discuter sur le personnel nécessaire pour les classes aux différents niveaux. De plus, ils peuvent négocier sur l'effectif des classes qui n'atteignent pas les limites.
    6. 201 Le gouvernement déclare que les amendements ont également pour effet d'exiger des conseils scolaires qu'ils assignent aux enseignants un nombre minimum de minutes d'enseignement par période de cinq jours. Il s'agit du nombre moyen de minutes assigné à tous les enseignants employés par le conseil scolaire et calculé en fonction de leurs affectations sur l'année scolaire entière. De cette manière, les syndicats d'enseignants et les conseils disposent d'une certaine souplesse et d'une marge de manoeuvre pour négocier la mise en oeuvre de cette disposition. Le gouvernement indique également que le pouvoir réglementaire de définir l'année scolaire n'est pas une nouveauté et que le nombre total de jours de travail des enseignants au cours de l'année n'a pas été augmenté. Les amendements ont eu pour effet d'exiger qu'au cours de l'année plus de jours soient consacrés à l'enseignement en classe plutôt qu'aux examens ou aux journées pédagogiques des enseignants. Les conseils scolaires peuvent également exiger des enseignants qu'ils travaillent jusqu'à cinq jours avant le début de l'année scolaire, conformément aux usages.
    7. 202 Sur ce point, le gouvernement conclut que les conseils scolaires et les syndicats d'enseignants sont toujours en mesure de négocier les salaires, les avantages, les congés exceptionnels, les rapports entre élèves et enseignants, l'effectif des classes (dans les limites citées ci-dessus), d'autres dispositions relatives à la charge de travail, les postes à plus grande responsabilité (par exemple, chef de section), les réclamations, les congés payés pour activités syndicales, la protection du "motif valable" contre les sanctions et le licenciement, l'ancienneté, les procédures d'excédent de personnel et de rappel, etc. Le gouvernement souligne que l'affirmation des plaignants selon laquelle "chaque minute" d'une journée de travail d'un enseignant est réglementée n'est pas fondée.
  • Exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints
    1. 203 Dans sa réponse, le gouvernement fait remarquer que l'exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints des unités de négociation d'enseignants et d'une représentation syndicale en vertu de la Loi sur les relations de travail fait l'objet d'un recours devant la Cour de la part de la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario et d'autres syndicats d'enseignants qui prétendent que cette exclusion enfreint la Charte. Le 17 mars 1998, le recours a été rejeté, aucune violation de la Charte n'ayant pu être établie. Cette décision fait actuellement l'objet d'un appel devant la Cour d'appel de l'Ontario. Le gouvernement demande que, puisque la question de l'exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints n'a pas encore été réglée en droit interne, cet aspect de la plainte ne soit pas examiné avant l'épuisement des procédures nationales de recours.
    2. 204 En ce qui concerne l'examen du fond de l'affaire, le gouvernement demande au comité de prendre en compte un certain nombre de facteurs. Le gouvernement indique tout d'abord que la Loi sur l'éducation a été amendée par la loi 160 et que la plupart des changements ont pris effet au 1er janvier 1998. La loi 160 a également abrogé la Loi sur la négociation collective entre conseils scolaires et enseignants, qui constituait la législation sur la négociation collective applicable précisément aux conseils scolaires et aux enseignants (autres que les enseignants suppléants). La Loi sur les relations de travail s'applique désormais à la négociation collective entre enseignants (y compris les enseignants suppléants) et conseils scolaires, de la même manière qu'elle s'applique à la grande majorité des employés syndiqués de l'Ontario.
    3. 205 Le gouvernement indique que, pendant les consultations relatives aux réformes de l'éducation qu'il a entreprises, de nombreux directeurs d'école ont signalé que leur appartenance à une unité de négociation entrait en conflit avec leurs fonctions et leurs responsabilités de direction. L'exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints des unités de négociation d'enseignants et du fait qu'ils soient représentés par un syndicat en application de la Loi sur les relations de travail était donc nécessaire. L'exclusion des employés de direction de la négociation collective constitue un principe fondamental dans le domaine des relations de travail à travers tout le Canada. Les fonctions de direction d'un directeur d'école, qui peuvent être les fonctions d'un directeur adjoint, comprennent ce qui suit: i) évaluation de la performance du personnel d'enseignement; ii) recommandations au conseil scolaire sur la sélection, l'embauche, la rétrogradation et le renvoi d'enseignants; iii) affectation aux enseignants de fonctions d'enseignement en classe et d'encadrement des élèves; iv) affectation aux enseignants d'un minimum légal de temps d'enseignement, en dépit de toute disposition de convention collective; v) affectation de fonctions aux enseignants pendant les cinq jours qui précèdent le début de l'année scolaire, dans le cas où le conseil scolaire exige de ses enseignants qu'ils travaillent durant cette période. En outre, le gouvernement déclare que les directeurs d'école sont responsables de l'organisation et de la direction de leur école. En pratique, les directeurs d'école règlent fréquemment les conflits entre parents et enseignants; il est important pour les parents de constater que le directeur de l'école peut avoir une attitude objective dans la résolution des conflits avec les enseignants.
    4. 206 Le gouvernement conteste l'allégation des plaignants selon laquelle l'exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints était une réponse à la grève des enseignants. La motivation n'était pas une vengeance contre la participation à la grève qui a touché la province durant deux semaines en automne 1997; il s'agissait plutôt de résoudre le conflit entre les rôles de direction et de membres de syndicats des directeurs d'école et des directeurs adjoints. Le gouvernement déclare que "leur participation à une grève illégale n'a fait qu'illustrer la nécessité de clarifier leur rôle de direction".
    5. 207 Le gouvernement soutient que le droit à la liberté syndicale des directeurs d'école et des directeurs adjoints n'a pas été violé. Depuis le 1er janvier 1998, beaucoup d'entre eux ont adhéré à l'une des associations volontaires de directeurs d'école et de directeurs adjoints créées en réaction au projet de loi 160. Bien que ces associations ne soient pas des syndicats, et que les conseils scolaires ne soient pas obligés de négocier de convention collective avec celles-ci, elles s'impliquent activement dans les discussions avec les conseils scolaires portant sur les conditions d'emploi de leurs membres. Ces associations provinciales sont également reconnues comme des parties prenantes essentielles dans le secteur de l'éducation par le ministère de l'Education et de la Formation de l'Ontario. Le gouvernement explique que les directeurs d'école et les directeurs adjoints peuvent également devenir membres volontaires de la Fédération des enseignants de l'Ontario et participer aux initiatives de négociation non collective de ses organisations affiliées.
  • Consultation préalable
    1. 208 En ce qui concerne l'allégation selon laquelle les réformes législatives n'ont pas été précédées d'une consultation suffisante, le gouvernement déclare que les réformes sur les relations de travail visant les enseignants faisaient partie d'un programme de réforme de l'éducation plus vaste lancé par le gouvernement de l'Ontario avec pour objectif d'améliorer la qualité de l'éducation des élèves. Les parties prenantes du secteur de l'éducation et les citoyens ont pu exprimer leurs points de vue sur les réformes en communiquant directement avec le gouvernement ou en utilisant la procédure législative. Le gouvernement met l'accent sur le fait que la procédure législative de l'Ontario est publique et démocratique.
    2. 209 Le gouvernement déclare que les points de vue des syndicats d'enseignants sur la législation étaient clairs et sans équivoque. Un comité législatif permanent, composé de membres de tous les partis politiques, a procédé à des audiences afin de recueillir l'avis de la population à travers la province. Les syndicats d'enseignants ont fait des suggestions au cours de ces audiences. De plus, les syndicats d'enseignants ont organisé des réunions avec les principaux représentants du gouvernement de l'Ontario afin de débattre sur les nombreux aspects des modifications législatives proposées. Le gouvernement a répondu à de nombreuses préoccupations des syndicats par des propositions d'amendements au projet de loi 160 avant sa troisième lecture par l'assemblée législative.
    3. 210 Alors que les modifications visant les directeurs d'école et les directeurs adjoints ont été introduites sous forme d'amendements au projet de loi, le gouvernement affirme que la question de savoir si les directeurs d'école et les directeurs adjoints pouvaient adhérer aux syndicats d'enseignants ou non a fait l'objet de débats et a été le sujet d'études de la commission et de rapports du gouvernement parce que les enseignants jouissent du droit légal de négocier depuis 1975.
  • La Charte canadienne des droits et libertés
    1. 211 Le gouvernement reconnaît que la Cour suprême du Canada a interprété l'article 2 d) de manière à exclure le droit de grève et de négociation collective, et il se prononce en faveur de cette interprétation. Le gouvernement fait observer que la Cour suprême considère que ces droits sont d'origine législative et ne constituent pas des libertés fondamentales. La Loi sur les relations de travail de l'Ontario prévoit la négociation collective et la grève; par conséquent, les enseignants de l'Ontario peuvent négocier collectivement et faire grève.
    2. 212 Le gouvernement déclare qu'aucune disposition des conventions nos 87, 98, 151 ou 154 n'exige que ces droits apparaissent en toutes lettres dans la Charte. Le gouvernement observe ensuite "qu'il convient de remarquer qu'aucune convention de l'OIT ne comporte de référence expresse à un "droit de grève". Donc, les plaignants ont demandé au Canada une protection qui n'est pas conforme à ses obligations internationales."
  • Climat général des relations de travail
    1. 213 Le gouvernement déclare qu'il ne convient pas de présenter la loi 160 comme le dernier maillon d'une série de lois antisyndicales. L'objectif de la loi 160 est d'améliorer le système éducatif et elle n'empêche pas les enseignants de négocier collectivement ou de faire grève. Qui plus est, la majorité des affaires relatives aux relations de travail auxquelles les plaignants se réfèrent comportaient, selon le gouvernement, des objections concernant des restrictions salariales dans le secteur public qui avaient été étendues à toutes les provinces canadiennes.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 214. Le comité note que les allégations de violation de la liberté syndicale découlent de la Loi de 1997 sur l'amélioration de la qualité de l'éducation (projet de loi 160), récemment adoptée, qui amende la Loi sur l'éducation. Selon les plaignants, cette loi modifie considérablement les relations de travail dans le secteur de l'éducation. Plus particulièrement, la loi 160 exclut de la négociation collective certaines questions qui entraient auparavant dans ce domaine. La loi exclut également les directeurs d'école et les directeurs adjoints des unités de négociation collective pour ce qui a trait à la négociation collective, et les prive des droits et protections offerts par la Loi de 1995 sur les relations de travail de l'Ontario. Les plaignants soutiennent que ces modifications législatives ont été introduites en l'absence d'une consultation suffisante des parties intéressées. Dans la plainte, l'interprétation donnée par la Cour suprême du Canada du droit constitutionnel à la liberté syndicale garanti par la Charte canadienne des droits et libertés de 1982 est présentée comme une violation des normes et principes de liberté syndicale, dans la mesure où le droit de grève et le droit de négociation collective n'ont pas été reconnus comme faisant partie de la liberté syndicale.
  2. 215. Le comité constate que le projet de loi 160 a été examiné en première lecture le 22 septembre 1997, en deuxième lecture le 7 octobre 1997 et en troisième lecture le 1er décembre 1997. Il a été promulgué le 8 décembre 1997, et la plupart de ses dispositions sont entrées en vigueur le 1er janvier 1998.
    • Champ de la négociation collective
  3. 216. Le comité note qu'en application de la loi 160 la négociation collective dans le secteur de l'éducation n'est plus régie par la Loi de 1975 sur la négociation collective entre conseils scolaires et enseignants, abrogée par l'article 178 de la loi nouvelle. En vertu de l'article 8 de la Loi sur la négociation collective entre conseils scolaires et enseignants, des négociations doivent être conduites sur toute condition d'emploi évoquée par une partie. Les plaignants invoquent un certain nombre de dispositions de la loi 160 qui restreignent la capacité des parties de négocier sur certaines affaires, étant donné qu'au titre de l'article 277.13 de la loi, la Loi et les règlements d'application l'emportent sur les dispositions incompatibles d'une convention collective. Le comité prend note de l'affirmation des plaignants selon lesquels les restrictions législatives videraient de leur sens certaines dispositions de conventions collectives existantes.
  4. 217. Le comité note que l'article 7 (4) de la loi 160 confère au ministre de l'Education et de la Formation le pouvoir d'adopter des arrêtés afin de:
    • "a) prescrire et régir les dates relatives à l'année scolaire, aux trimestres ou semestres scolaires, aux congés scolaires et aux journées d'enseignement;
    • b) autoriser les conseils à modifier les dates relatives à un ou plusieurs trimestres ou semestres scolaires, congés scolaires ou journées d'enseignement, selon ce que désignent les règlements;
    • c) permettre aux conseils, avec l'approbation du ministre, de désigner et de mettre en oeuvre, pour une ou plusieurs écoles qui relèvent d'eux, des dates relatives à l'année scolaire, aux trimestres ou semestres scolaires, aux congés scolaires ou aux journées d'enseignement qui diffèrent de celles que prescrivent les règlements;
    • d) traiter de l'établissement et de la mise en oeuvre de calendriers scolaires par les conseils."
      • Cet article établit ensuite que le calendrier scolaire ne doit pas prévoir plus de dix journées d'examen ou quatre journées pédagogiques.
    • 218. L'article 81 de la loi 160 est également source de préoccupation, dans la mesure où il fixe des limites maximales à l'effectif moyen des classes. Ces plafonds peuvent être dépassés, sauf autorisation ministérielle. L'article 81 fixe également le temps d'enseignement assuré par les enseignants, calculé sur une moyenne minimale par période de cinq journées d'enseignement pendant l'année scolaire. Les plaignants attirent également l'attention sur l'article 82 qui précise que "Le conseil peut exiger des enseignants qu'ils travaillent tout ou partie des cinq jours ouvrables qui précèdent le début de l'année scolaire... Le conseil peut autoriser le directeur d'une école à prendre des décisions concernant le travail que les enseignants de l'école doivent effectuer pendant les jours ouvrables visés..."
  5. 219. Le comité note que, d'après le gouvernement, les élèves comme les parents tireront avantage de la limitation de l'effectif moyen des classes des écoles, une mesure qui s'inscrit dans l'effort déployé pour assurer une éducation de qualité aux élèves. En ce qui concerne le nombre minimal de minutes d'enseignement, le gouvernement déclare qu'il peut y avoir négociation sur les modalités d'application de la disposition. Quant au pouvoir de prescrire les dates relatives à l'année scolaire et le nombre total de jours de travail des enseignants, le comité note que, selon le gouvernement, il ne s'agit pas d'une nouveauté; les amendements ont pour conséquence d'exiger davantage de journées d'enseignement et moins de jours d'examens ou de journées pédagogiques pour les enseignants. Le gouvernement souligne également que des négociations peuvent toujours avoir lieu sur un certain nombre de questions, comme les salaires et les primes.
  6. 220. Le comité rappelle que le droit de négocier librement avec les employeurs au sujet des conditions de travail constitue un élément essentiel de la liberté syndicale, et que les syndicats devraient avoir le droit, par le moyen de négociations collectives ou par tout autre moyen légal, de chercher à améliorer les conditions de vie et de travail de ceux qu'ils représentent. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 782.) Le comité avait attiré l'attention sur l'importance de promouvoir la négociation collective, dans le secteur de l'éducation. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 804; 310e rapport, cas no 1928 (Canada/Manitoba), paragr. 175.) S'agissant de la négociation collective, le comité a admis que certaines questions qui relèvent au premier chef ou essentiellement de la gestion des affaires peuvent être considérées comme étrangères au champ de la négociation collective. L'élaboration des grandes lignes de la politique générale de l'enseignement est donnée comme un exemple d'un domaine qui peut être exclu de la négociation collective; en revanche, certaines autres questions qui se rapportent au premier chef aux conditions d'emploi ne devraient pas être considérées comme étant en dehors du champ des négociations collectives. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 182-183.) En ce qui concerne l'effectif des classes, le comité reconnaît que cette question, si elle est susceptible d'influer sur les conditions d'emploi, peut aussi être considérée comme un sujet davantage lié à la politique générale de l'enseignement. (Voir 310e rapport, cas no 1928 (Canada/Manitoba), paragr. 175.) Si le gouvernement considère que des questions telles que l'effectif des classes peuvent être réglées sans passer par les mécanismes de négociation collective, le comité demande au gouvernement d'assurer que les syndicats d'enseignants concernés soient pleinement consultés à cet égard. En ce qui concerne les autres questions exclues du champ de la négociation collective, le comité estime que certaines questions peuvent avoir un aspect de politique générale d'éducation. Cependant, ces décisions politiques peuvent avoir des conséquences importantes sur les conditions d'emploi qui devraient faire l'objet de libre négociation collective. Le comité demande donc au gouvernement de permettre que la négociation collective libre puisse avoir lieu sur les conséquences sur les conditions d'emploi des décisions de politique générale de l'éducation. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • Exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints
  7. 221. Le comité note que, avant la promulgation de la loi 160, les directeurs d'école et les directeurs adjoints appartenaient aux mêmes syndicats et aux mêmes unités de négociation que les enseignants, pour ce qui avait trait à la négociation collective. La loi 160 a exclu les directeurs d'école et les directeurs adjoints des mécanismes légaux de négociation collective. De plus, alors que les enseignants sont désormais couverts par les dispositions de la Loi sur les relations de travail, les directeurs d'école et les directeurs adjoints ne sont pas protégés par cette loi. Les dispositions applicables de la loi 160 comprennent les articles 122, 127, 151, 167, 180.
  8. 222. Le comité note que le gouvernement utilise le fait que les directeurs d'école et les directeurs adjoints sont des employés de direction pour justifier leur exclusion. Le gouvernement déclare que ces travailleurs peuvent appartenir à des associations volontaires de directeurs d'école et de directeurs adjoints. Le comité rappelle qu'en vertu des principes de liberté syndicale tous les travailleurs -- sauf éventuellement la police et les forces armées -- devraient pouvoir constituer les organisations de leur choix et s'y affilier, et que la liberté syndicale devraient être garantie sans discrimination. (Voir la convention no 87, art. 2; Recueil, op. cit., paragr. 205.) Cependant, le comité rappelle qu'il n'est pas nécessairement incompatible avec les principes de liberté syndicale de dénier au personnel de direction ou d'encadrement le droit d'appartenir aux mêmes syndicats que les autres travailleurs, mais seulement à deux conditions: premièrement, qu'ils aient le droit de créer leurs propres organisations pour la défense de leurs intérêts et, deuxièmement, que ces catégories de personnel ne soient pas définies en termes si larges que les organisations des autres travailleurs risquent de s'en trouver affaiblies, en les privant d'une proportion substantielle de leurs membres effectifs ou potentiels. Le terme "dirigeant" ou "superviseur" devrait se limiter aux seules personnes qui représentent effectivement les intérêts des employeurs. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 231-232.)
  9. 223. Le comité note que la question de l'exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints des unités de négociation d'enseignants et de l'impossibilité de s'affilier à un syndicat d'enseignants en vertu de la Loi sur les relations de travail fait l'objet d'un recours de la part de la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario et d'autres syndicats d'enseignants devant la Cour d'appel de l'Ontario. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des résultats de cet appel et de lui fournir une copie de la décision de justice quand elle sera rendue.
  10. 224. Le comité note également que les directeurs d'école et les directeurs adjoints sont exclus, d'une part, des mécanismes de négociation collective prévus par la loi 160 et, d'autre part, du domaine de la Loi sur les relations de travail, en application de l'article 277.2 de la Loi sur l'éducation, lu conjointement avec les articles 122 et 151 de la loi 160. En ce qui concerne l'exclusion de ces travailleurs des mécanismes de négociation collective mis en place en application de la loi 160 et de la Loi sur les relations de travail, le comité constate que le gouvernement reconnaît que les conseils scolaires ne sont plus obligés légalement de négocier avec les directeurs d'école et les directeurs adjoints ou leurs associations sur leurs conditions d'emploi. Conformément à l'article 127 de la loi 160, le lieutenant-gouverneur en conseil a compétence pour prendre des règlements régissant les conditions d'emploi des directeurs d'école et des directeurs adjoints; en vertu de l'article 277.13, l'un quelconque des règlements de cette catégorie l'emporte sur les dispositions incompatibles d'une convention collective. En outre, du fait de leur exclusion du domaine de la Loi sur les relations de travail, les directeurs d'école et les directeurs adjoints sont privés de protection contre la discrimination antisyndicale, y compris le licenciement, et contre l'ingérence de l'employeur dans les activités syndicales.
  11. 225. Le comité rappelle sa déclaration dans un cas similaire relatif à l'exclusion de travailleurs particuliers du domaine de la Loi sur les relations de travail en Ontario: "Sans négliger l'importance qu'il accorde à la nature volontaire de la négociation collective, le comité rappelle que des mesures devraient être prises pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d'employeurs, d'une part, et les organisations de travailleurs, d'autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 781.) En outre, les travaux préliminaires à l'adoption de la convention no 87 indiquent clairement que "l'un des buts principaux de la garantie de la liberté syndicale est de permettre aux employeurs et aux salariés de s'unir en organisations indépendantes des pouvoirs publics, capables de régler, par voie de conventions collectives librement conclues, les salaires et autres conditions d'emploi". (Voir Recueil, op. cit., paragr. 799.)" (Voir 308e rapport, cas no 1900 (Canada/Ontario), paragr. 186.)
  12. 226. En ce qui concerne la protection contre la discrimination antisyndicale et l'ingérence de l'employeur, le comité rappelle l'importance qu'il attache à la nécessité d'adopter, d'une part, des dispositions particulières interdisant les actes d'ingérence des employeurs à l'égard des travailleurs et des organisations de travailleurs, ainsi que la discrimination fondée sur l'adhésion à un syndicat ou la participation à des activités syndicales et, d'autre part, des procédures claires et des sanctions dissuasives. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 737 et suiv.) Le comité se réfère à nouveau à ses conclusions dans le cas récent Canada/Ontario relatif à la Loi sur les relations de travail, dans lequel il a déclaré ce qui suit: "Le comité estime donc que l'absence d'un mécanisme légal de promotion de la négociation collective et l'absence de protection contre la discrimination antisyndicale et l'ingérence de l'employeur dans les activités syndicales constituent un obstacle à l'un des principaux objectifs visés par la liberté syndicale, à savoir la constitution d'organisations indépendantes capables de conclure des conventions collectives." (Voir cas no 1900 (Canada/Ontario), 308e rapport, paragr. 187.) Le comité demande donc au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir l'accès des directeurs d'école et des directeurs adjoints au mécanisme et aux procédures facilitant la négociation collective et de faire en sorte que ces travailleurs jouissent effectivement d'une protection efficace contre la discrimination antisyndicale et l'ingérence de l'employeur. Le comité demande également au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  13. 227. Notant que l'exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints signifie également qu'ils ne sont pas couverts par les dispositions de la Loi sur les relations de travail qui accorde et protège le droit de grève, le comité rappelle qu'il a toujours reconnu aux travailleurs et à leurs organisations le droit de grève comme moyen légitime et essentiel de promotion et de défense de leurs intérêts économiques. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 474-475.) Cependant, le droit de grève peut, dans un nombre de cas limité, être limité, voire interdit. Bien que le comité ait estimé que le secteur de l'enseignement ne constitue pas un service essentiel (voir Recueil, op. cit., paragr. 545), il a jugé que les directeurs d'école et les directeurs adjoints peuvent voir leur droit de grève limité ou interdit. (Voir 277e rapport, cas no 1528 (Allemagne), paragr. 289.) Le comité considère donc que cet aspect du cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.
    • Consultation préalable
  14. 228. Constatant que la loi 160 modifie considérablement les relations de travail dans le secteur de l'enseignement, le comité rappelle que, lorsqu'un gouvernement souhaite modifier des structures de négociation dans lesquelles il agit directement ou indirectement en tant qu'employeur, il est particulièrement nécessaire qu'il suive une procédure de consultation appropriée, dans laquelle tous les objectifs puissent être examinés par toutes les parties intéressées. Ces consultations impliquent que la procédure soit conduite de bonne foi et que les deux parties disposent de toutes les informations nécessaires pour prendre une décision en connaissance de cause. (Voir 310e rapport, cas no 1928 (Canada/Manitoba), paragr. 183; 310e rapport, cas no 1943 (Canada/Ontario), paragr. 230.)
  15. 229. Le comité note que, bien que des consultations aient effectivement été menées avant l'introduction du projet de la loi 160, aucune consultation n'a été effectuée sur les amendements relatifs à l'exclusion des directeurs d'école et des directeurs adjoints après modification de la proposition du gouvernement. Ces dispositions sont intervenues tardivement dans la procédure législative et ont provoqué la surprise des organisations de travailleurs concernées. Du point de vue du comité, des modifications aussi importantes auraient dû faire l'objet d'une consultation exhaustive et réfléchie. Le comité demande au gouvernement de faire en sorte qu'à l'avenir les consultations soient conduites de bonne foi dans des circonstances permettant aux parties d'accéder à toute l'information nécessaire pour faire des propositions et prendre des décisions en toute connaissance de cause.
    • La Charte canadienne des droits et libertés
  16. 230. Le comité note que la Charte canadienne des droits et libertés, qui fait partie intégrante de la Constitution de 1982, dispose que "Chacun jouit des libertés fondamentales suivantes: ... liberté syndicale." (art. 2 d)). Les plaignants et le gouvernement sont d'avis que le droit constitutionnel à la liberté syndicale a été défini par la Cour suprême du Canada comme n'incluant pas le droit de grève et de négociation collective.
  17. 231. Le comité estime que le droit de grève et le droit de négociation collective font partie intégrante des principes de liberté syndicale, et que la garantie constitutionnelle de la liberté syndicale conformément à la Charte canadienne des droits et libertés n'inclut pas ces droits. Cependant, même si les normes et principes de liberté syndicale imposent la reconnaissance effective et la protection du droit de grève et du droit de négociation collective, la protection constitutionnelle de ces droits n'est pas obligatoire. Si ces droits sont protégés dans d'autres documents législatifs, il n'y a pas violation de la liberté syndicale.
    • Climat général des relations de travail
  18. 232. Le comité note avec préoccupation que cette affaire s'inscrit dans une série de cas relatifs à des réformes législatives en Ontario et, dans chacun des cas, le comité a constaté des incompatibilités avec les normes et principes de liberté syndicale. Le comité rappelle ses conclusions dans le cas no 1943 (Canada/Ontario): "Le comité ne peut que faire observer que, trois ans après la restriction des salaires imposée dans le secteur public en vertu de la Loi sur le contrat social, des modifications ont été apportées au système d'arbitrage obligatoire sans que les parties intéressées n'aient été pleinement consultées. En outre, comme cela a été récemment traité dans le cas no 1900 (voir 308e rapport, paragr. 139-194), les travailleurs agricoles, les travailleurs domestiques et ceux de certaines professions libérales se sont vu refuser, conformément à la législation, l'accès à la négociation collective et au droit de grève, et la législation relative aux obligations des employeurs successeurs a été abrogée. En outre, on a cherché à abroger des dispositions essentielles en matière d'égalité de salaire. Etant donné l'ensemble des facteurs qui compromettent les relations de travail en Ontario, le comité estime nécessaire de souligner que ces mesures et restrictions peuvent, à long terme, porter préjudice aux relations de travail et les déstabiliser." (Voir 310e rapport, paragr. 241.)
  19. 233. Le comité considère que le gouvernement devrait consulter pleinement les syndicats et les organisations d'employeurs afin de déterminer la façon de s'efforcer de promouvoir la confiance dans le système des relations de travail de l'Ontario. Afin de faciliter la recherche de solutions aux difficultés relatives aux relations de travail, le comité suggère au gouvernement d'envisager d'avoir recours à l'assistance du Bureau international du Travail et de le tenir informé à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 234. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande au gouvernement, s'il estime que des questions telles que les effectifs des classes doivent être réglées en dehors de la négociation collective, de faire en sorte que les syndicats d'enseignants intéressés soient pleinement consultés à cet égard.
    • b) Le comité demande au gouvernement de permettre que la négociation collective libre ait lieu sur les conséquences sur les conditions d'emploi des décisions de politique générale de l'éducation et de le tenir informé à cet égard.
    • c) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des résultats du recours devant la Cour d'appel de l'Ontario concernant l'impossibilité pour les directeurs et les directeurs adjoints d'école de s'affilier à des syndicats d'enseignants en application de la loi sur les relations de travail et de communiquer une copie de la décision de justice quand elle sera rendue.
    • d) Le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que les directeurs d'école et les directeurs adjoints aient accès aux mécanismes et procédures facilitant la négociation collective et que ces travailleurs jouissent d'une protection efficace contre la discrimination antisyndicale et l'ingérence de l'employeur. Le comité demande également au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • e) Le comité demande au gouvernement de faire en sorte que des consultations de bonne foi soient désormais menées au sujet des changements à apporter à la structure des négociations dans des conditions telles que les parties disposent de toutes les informations nécessaires pour faire des propositions et prendre des décisions en connaissance de cause.
    • f) Le comité demande au gouvernement de consulter pleinement les syndicats et les organisations d'employeurs afin de déterminer la façon de s'efforcer de promouvoir la confiance dans le système des relations de travail de l'Ontario.
    • g) Afin de faciliter la recherche de solutions aux difficultés relatives aux relations de travail, le comité suggère au gouvernement d'envisager d'avoir recours à l'assistance du Bureau international du Travail et de le tenir informé à cet égard.
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