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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2011, Publication : 100ème session CIT (2011)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Guatemala (Ratification: 1952)

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Le gouvernement a fourni les informations écrites suivantes.

Le gouvernement du Guatemala confirme l’importance qu’il attache à la protection et au développement de la liberté syndicale ainsi que la priorité absolue qui doit être donnée à la protection de la vie et de l’intégrité physique de tous les Guatémaltèques, et notamment des syndicalistes. Il tient à ce sujet à déclarer que des efforts redoublés ont été accomplis pour lutter contre la violence généralisée et que, malgré la crise difficile que traverse le Guatemala, des résultats ont été obtenus dans l’application de la justice dans son ensemble, c’est-à-dire grâce aux efforts déployés par toutes les institutions qui sont impliquées dans l’administration de la justice.

Conformément à la volonté du gouvernement d’accorder une attention particulière aux relations professionnelles, la Commission multi-institutionnelle du travail pour les relations professionnelles au Guatemala, qui comprend le ministère du Travail et de la Prévision sociale, le ministère de l’Economie et le ministère des Relations extérieures, lequel actuellement intègre également le ministère de l’Intérieur, dans le cadre de ses compétences respectives et sans porter atteinte à l’autonomie et à l’indépendance du président de l’organisme judiciaire et du Procureur général et chef du ministère public, s’est réunie 18 fois au cours de l’année dernière. Durant ces réunions, ont été analysés les problèmes que connaît le Guatemala dans le domaine du travail, et les efforts réalisés par cette commission ont été notés sur une feuille de route, avec les dates et les mesures concrètes que le gouvernement du Guatemala met en oeuvre pour renforcer l’application et l’exécution du droit du travail, en coordination avec l’organisme judiciaire et le ministère public.

A ce propos, le gouvernement tient à déclarer vigoureusement qu’il ne fait preuve d’aucune tolérance ni tendance à encourager des individus à proférer des menaces ou à porter atteinte à l’intégrité physique ou à la vie de tout Guatémaltèque, et notamment à l’encontre de syndicalistes et de sièges syndicaux, étant également du devoir de l’Etat de garantir la propriété privée en tant que droit inhérent à la personne humaine. Le gouvernement du Guatemala s’acquitte de son obligation d’enquêter sur les actes de violence et/ou de violation du droit à la propriété privée. Pour améliorer les enquêtes sur les délits commis contre des syndicalistes, tant la Commission multi-institutionnelle du travail pour les relations professionnelles au Guatemala que la Commission tripartite des affaires internationales du travail ont demandé que l’unité chargée de cette question soit renforcée.

Le gouvernement est heureux d’informer que le ministère public a procédé à une restructuration interne et qu’en vertu de l’accord no 49-2011 en date du 20 mai 2011, qui modifie l’accord no 37-2010 contenant le règlement d’organisation et de fonctionnement du parquet de la section des droits de l’homme, est créée l’Unité de procuration spéciale des délits commis contre les syndicalistes. Ces changements seront consignés dans le manuel de classification des postes et salaires du ministère public.

La Cour suprême de justice a procédé également à des changements importants s’agissant de son fonctionnement, notamment dans le domaine du travail où a été mis en place le nouveau modèle de gestion, grâce auquel on entend séparer les fonctions administratives des fonctions judiciaires, pour que les spécialistes se consacrent aux questions judiciaires et que le personnel administratif s’occupe des questions administratives. Toutes les juridictions du travail seront regroupées dans un seul bâtiment, ce nouvel emplacement et modèle de gestion permettant de concentrer et de faciliter l’attention. Il faut souligner que les actions mentionnées ci-dessus impliquent une réorganisation des institutions administrant la justice, ce qui permet de traiter de la protection des droits des travailleurs dans tous ses domaines d’application.

La Cour constitutionnelle, qui est une instance permanente de juridiction ayant se propre juridiction dont la fonction essentielle est la défense de l’ordre constitutionnel et qui agit de manière indépendante par rapport aux autres organes de l’Etat dans le but de garantir les droits des Guatémaltèques, s’est prononcée sur l’application du droit procédural et du droit du travail, dans les termes suivants:

– Appels aux fins de la protection des droits des travailleurs (amparos): lorsque l’appel est en cours, si pour une raison quelconque l’appel n’est pas poursuivi parce que la procédure n’a pas été respectée ou parce que celle-ci est entachée d’irrégularités, la Cour constitutionnelle, dans des affaires particulièrement pertinentes soulevant des questions de droits spécifiques (existence d’un contrat de travail, licenciement justifié ou, au contraire, sans juste cause, droit au recouvrement des salaires échus, etc.), a dit pour droit que l’appel suspend le cours du délai de prescription afférent à la reconnaissance d’un droit, principalement à l’égard des travailleurs, de sorte que les procédures judiciaires ordinaires peuvent être engagées sans que l’exception de prescription puisse être soulevée.

– Limitation de la faculté d’interjeter appel: la Cour constitutionnelle a fixé comme critère que les procédures prévoyant leurs règles propres de contestation ne sauraient se prêter à une autre voie de contestation à titre supplétif. De ce fait, par application du principe de spécialité, dans les procédures ordinaires en matière de travail, conformément aux dispositions de l’article 365 du Code du travail, il ne peut être interjeté appel que des décisions mettant fin au jugement et des sentences. Il ne peut pas être interjeté appel d’une décision qui ne réunit pas ces conditions.

– Protection des droits de la part des tribunaux en matière de droits des travailleurs (amparos laborales): la Cour constitutionnelle, usant des pouvoirs de régulation que lui reconnaît la loi sur la protection des droits de la part des tribunaux (Ley de amparo, exhibición personal y constitutionalidad), l’inviolabilité de la personne et la constitutionnalité, a apporté à l’accord 4-89 des modifications tendant à ce que les appels aux fins de la protection des droits en vertu de la Constitution ne constituent pas un obstacle au déroulement des procédures ordinaires. Deux modifications fondamentales apparaissent dans cette nouvelle législation: la première, c’est qu’il est établi dans cet accord que, lorsque la juridiction constitutionnelle n’a pas décidé qu’une protection des droits de la part des tribunaux s’applique, à titre conservatoire, les procédures ordinaires doivent suivre leur cours. Ce changement a modifié la «coutume» sur laquelle se fondaient les tribunaux pour suspendre le cours des procédures, dès lors que l’une de leurs décisions impliquait l’examen de violations présumées de droits constitutionnels. La deuxième modification a trait à la protection des droits en deuxième instance, où il est exigé que l’appel interjeté soit motivé. Cette modification permet d’éviter les simples appels ne constituant qu’un moyen mécanique et automatique de faire durer la procédure. Désormais, pour que l’appel soit fondé, la Cour constitutionnelle exige, outre une analyse intégrale de la décision attaquée tendant à déterminer l’existence éventuelle d’un vice de portée constitutionnelle, de n’avoir à examiner que les arguments présentés en appel.

Ces décisions de la Cour constitutionnelle font loi au Guatemala et sont de ce fait applicables dans toutes les procédures, y compris celles afférentes à la défense des travailleurs, ce qui constitue un progrès déterminant dans la protection des droits au travail. S’appuyant sur cette vision systématique et intégrale, le gouvernement du Guatemala a signé, pour renforcer l’application et l’exécution de la législation du travail, la Convention-cadre interinstitutions sur l’échange d’informations entre le ministère de l’Economie et le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale, par effet du décret 29-89 du Congrès de la République du Guatemala, de sorte que l’Inspection générale du travail dispose d’un registre unifié qui fait partie du système intégral du travail – SIL – accessible à toutes les entités bénéficiant des privilèges conférés par ledit décret, portant loi de promotion et de développement de l’activité exportatrice et des zones franches d’exportation (maquilas). Tout cela permet un contrôle croisé de l’information qui habilite l’action de surveillance de l’Inspection générale du travail sur les entreprises pour ce qui est du respect de la législation du travail. Cette action se trouve renforcée par l’intervention de la Direction des services au commerce et à l’investissement du ministère de l’Economie qui, par le biais de son Département de la politique industrielle, vérifie si les entreprises font une bonne utilisation des avantages que leur offre le ministère de l’Economie. Ces interventions permettent à l’Etat du Guatemala de se conformer à la législation en vigueur par le recours à un mécanisme efficace de mise en oeuvre des fonctions exécutoires du ministère de l’Economie, en coordination avec le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale, cela dans l’intérêt des travailleurs.

Le gouvernement tient à préciser que la détermination de la légitimité de la Commission tripartite sur les questions internationales du travail et de son intégration, de même que celle de la représentativité des organisations de travailleurs ne peuvent être établies qu’à travers les données figurant dans le Registre du travail de la Direction générale du travail du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale, lequel est actualisé par les chiffres des effectifs que doivent communiquer chaque année lesdites organisations. Outre le fait que cette commission ne dispose pas de la personnalité juridique, il est également impossible de déterminer son degré de représentativité. Le gouvernement guatémaltèque tient à signaler que l’appel aux candidatures de représentants des groupes des employeurs et des travailleurs pour faire partie de la Commission tripartite sur les questions internationales du travail, qui a vu le jour à la fin de l’année 2010, a été publié dans un quotidien de grande diffusion afin que puissent participer toutes les organisations qui le souhaitaient.

S’agissant des réformes législatives requises pour mettre la législation nationale en conformité avec les conventions internationales du travail ratifiées par le Guatemala, le Secrétariat général de la Présidence de la République prépare actuellement un accord gouvernemental qui institue une Commission présidentielle pour l’étude des réformes de la législation du travail, en vue de la mise en application des obligations découlant des conventions de l’Organisation internationale du Travail (OIT) ratifiées par le Guatemala et des autres engagements contractés dans le cadre du chapitre XVI de l’Accord de libre-échange entre l’Amérique centrale, les Etats-Unis d’Amérique et la République dominicaine (ALEAC).

Afin de garantir que l’Inspection générale du travail puisse exercer ses fonctions sans que l’accès aux centres de travail puisse être entravé d’aucune manière, le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale a institué, par l’ordonnance ministérielle no 42-2011, une procédure pour les cas de résistance à l’intervention des inspecteurs du travail.

Enfin, le gouvernement tient à réitérer qu’il a déployé beaucoup d’efforts afin d’améliorer la justice du travail. De grands progrès ont été réalisés au cours des deux dernières années pour jeter les bases d’un changement en profondeur dans l’application de la législation du travail.

En outre, devant la commission, un représentant gouvernemental a donné des informations sur les initiatives menées et les progrès réalisés dans le pays relativement aux questions liées au travail depuis la dernière session de la Conférence. En vue de donner suite aux conclusions de la commission formulées à cette occasion, du 9 au 13 mai 2011, le gouvernement a reçu le docteur Alfonso Valdivieso, accompagné de membres du personnel du BIT. Les membres de la mission ont été reçus par le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale, la Commission du travail du Congrès de la République, le Procureur général et chef du ministère public, par la Cour suprême de justice et par la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG), ainsi que par les membres de la Cour constitutionnelle. Son gouvernement est disposé à donner suite à leurs recommandations.

S’agissant de l’observation de la commission d’experts et des questions dont sont saisis les services du procureur, le ministère public a procédé à une restructuration interne, un accord ayant été conclu pour modifier le règlement sur l’organisation et le fonctionnement des services du procureur chargés des droits de l’homme, et une unité spéciale du procureur chargée des délits visant les syndicalistes a été créée. Quant aux questions législatives, le Président de la République a créé une commission présidentielle chargée d’examiner la réforme de la législation du travail, en vue de faire respecter les obligations découlant des conventions ratifiées de l’OIT. Elle comprend le ministre du Travail et de la Prévoyance sociale et les ministres de l’Economie et des Relations extérieures. S’agissant du taux d’affiliation syndicale et du nombre très bas de conventions collectives, il convient de souligner que, conformément à la convention, le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale n’a pas les moyens légaux d’influer sur l’affiliation syndicale et, en conséquence, il s’en est abstenu. Par ailleurs, en vertu du Code du travail, le ministre du Travail et de la Prévoyance sociale doit formuler et appliquer une politique nationale de défense et de développement du syndicalisme. Dans ce cadre, en 2011, 46 syndicats ont été enregistrés et, en novembre 2010, le premier accord collectif sur les conditions de travail a été conclu entre la Ligue nationale contre le cancer et son syndicat.

En ce qui concerne l’exercice des droits syndicaux dans la pratique dans les maquilas (zones franches d’exportation), le gouvernement a accepté l’assistance technique du Bureau pour aborder cette question et examiner les recommandations qui pourraient être formulées. En outre, au niveau gouvernemental, un accord-cadre interinstitutions a été officialisé. Il prévoit un échange d’informations entre le ministère de l’Economie et le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale. Par ailleurs, l’Inspection générale du travail dispose d’un registre unifié de toutes les entreprises commerciales qui bénéficient des avantages accordés par la loi de promotion et de développement des activités exportatrices et du secteur des maquilas. Depuis l’entrée en vigueur de l’accord mentionné, le ministère du Travail a inspecté les 747 entreprises exportatrices enregistrées, et il est apparu que 20 entreprises ne respectaient pas la législation du travail. Onze d’entre elles se sont conformées à la loi et quatre se sont vu supprimer leurs avantages fiscaux; des démarches sont en cours pour les autres.

En matière d’inspection du travail, un programme permanent de formation des inspecteurs du travail a été exécuté au niveau national avec le concours du département du Travail des Etats-Unis et du BIT. La première rencontre nationale des inspecteurs du travail et des inspecteurs techniques chargés de l’hygiène et de la sécurité a eu lieu; 90 pour cent de l’ensemble des inspecteurs du travail y ont pris part. La formation sur l’usage et l’établissement de collections de protocoles d’inspection, ainsi que sur les bonnes pratiques pour l’utilisation du système électronique de cas a également été renforcée. Le gouvernement canadien a également appuyé la formation des inspecteurs du travail au Guatemala au moyen du projet «Real Card». Enfin, le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale a publié un accord ministériel qui renforce les activités des inspecteurs du travail, afin que ces derniers ne rencontrent aucun obstacle lorsqu’ils inspectent les entreprises du pays, quel que soit le secteur productif considéré. Concernant l’enregistrement des syndicats, il a été demandé aux organisations syndicales de mettre à jour leurs informations, comme exigé par la loi, afin de donner une certaine sécurité juridique à leurs activités. S’agissant de l’enregistrement de l’Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA), le gouvernement a remis à la mission des documents dans lesquels sont données toutes les précisions sur le statut juridique de ce syndicat. Enfin, le gouvernement du Guatemala a conclu qu’il faisait preuve de volonté politique, plusieurs initiatives sont actuellement renforcées et commencent à porter leurs fruits. L’assistance prêtée à cette fin par le gouvernement des Etats-Unis, du Canada et de l’Espagne, l’Union européenne et le BIT est précieuse, et le gouvernement leur a adressé de vifs remerciements.

Une autre représentante gouvernementale, magistrate de la Cour suprême de justice, a fait état, s’agissant des questions d’ordre judiciaire, du lancement du programme «Tolérance zéro face à la corruption, au trafic d’influence et à l’impunité» et a indiqué que les tribunaux du travail créés pour rattraper les retards dans le traitement des affaires soumises à la juridiction du travail font actuellement diligence. Une unité spéciale a été créée pour contrôler et suivre les procédures en cours de traitement, ce qui permet d’accélérer les procédures, ainsi que d’orienter et informer les personnes concernées. De même, un système informatique permettant au juge de contrôler l’exécution des jugements et des mesures de réintégration a été mis en place, ce qui permet au juge d’agir d’office en cas de non-exécution. En 19 mois, la Chambre de protection des droits et de l’instruction (Cámara de Amparo y Antejuicio) a mis à jour le traitement de plus de 1 400 affaires en souffrance. Tout cela a été réalisé notamment grâce à l’assistance de l’Agence internationale pour le développement des Etats-Unis. De plus, une inspection du travail fonctionne dans le même bâtiment, de manière à orienter in situ les usagers sur les questions relatives au travail ou aux procédures et leur facilitant ainsi l’accès à l’information et à la justice. Cela contribue également à renforcer les liens interinstitutionnels de l’Etat.

S’agissant des mesures prises par la Cour suprême de justice, l’intervenante a indiqué que la Cour pénale a mis en oeuvre des mesures concernant l’accès des victimes de délits à l’assistance juridictionnelle, la coordination des actions interinstitutions et, enfin, la collaboration avec la société civile. Des mécanismes de coordination ont été mis en place entre le pouvoir judiciaire et une série d’organismes d’aide aux victimes, à travers un programme de formation dans le cadre duquel fonctionnent les instances communales d’aide aux victimes ainsi que les facilitateurs judiciaires habilités et soutenus par les autorités judiciaires. Les juges et les procureurs des tribunaux pénaux sont particulièrement vulnérables aux menaces et aux autres formes de coercition. Les tribunaux pénaux ordinaires sont inadaptés pour affronter cette réalité. C’est pourquoi des tribunaux pénaux d’exception ont été créés pour connaître des délits présentant les risques les plus élevés et faire face au mieux à la situation de violence généralisée qui sévit dans le pays; ceci résume la réponse apportée par la Cour suprême de justice au problème de l’impunité.

S’agissant des crimes commis contre des syndicalistes, l’intervenante a fait savoir que tout est fait pour que ces affaires soient dûment instruites et jugées. Il est prévu de pouvoir attribuer à l’un des tribunaux pénaux une compétence spécifique pour connaître des délits commis contre des syndicalistes, eu égard au statut spécifique de la victime, en dispensant aux juges et aux personnels auxiliaires une formation destinée à les sensibiliser sur le rôle de l’activité syndicale dans le pays. L’intervenante a évoqué, d’autre part, l’attention consacrée aux travailleuses. Depuis novembre 2010, six organes juridictionnels ayant spécialement compétence en matière de meurtres et de violences, y compris de violences commises sur des travailleuses sur le lieu de travail, ont été mis en place; cela a été possible grâce à l’appui de l’ambassade des Etats-Unis, de la Coopération espagnole et du Fonds des Nations Unies pour la population. Pour conclure, l’intervenante a exprimé la reconnaissance de son pays à l’égard des gouvernements, des organisations internationales et de la société civile qui ont rendu possible l’amélioration du système judiciaire du Guatemala.

Les membres employeurs ont souligné qu’il s’agit d’un cas à répétition, bien connu de la commission, et qui a déjà été discuté à 15 reprises au moins, la dernière fois en 2010. Il réapparaît cette année accompagné d’une demande précise de la commission d’experts invitant le gouvernement à fournir des informations complémentaires à la Conférence. Depuis 2001, on constate des faits de violence qui se généralisent dans le pays et sont la conséquence de l’extension que prend le trafic de drogues, ce qui a des répercussions sur l’exercice de la liberté syndicale et a eu pour effet de masquer ou occulter quelques progrès qu’on aurait pu constater auparavant en matière de changements législatifs. Les observations de la commission d’experts portent sur des faits de violence à l’encontre de syndicalistes, d’une part, et, de l’autre, des adaptations de la législation qui garantissent la création et le fonctionnement en toute liberté des organisations syndicales. Les informations que fournissent diverses organisations sont préoccupantes pour toutes les parties. Il faut souligner que de nombreuses interventions d’assistance technique du BIT ont tenté d’accompagner la modification du cadre législatif, bien que des points importants restent en suspens. Compte tenu de la gravité et de l’urgence de la situation, l’orateur a indiqué qu’il insisterait surtout sur l’important phénomène de violence généralisée qui ne semble pas évoluer dans un sens favorable. Il faut retenir que, afin de contribuer à améliorer la situation, plusieurs missions de contacts directs et de haut niveau se sont rendues dans le pays. Le gouvernement s’était engagé à élaborer une feuille de route pour l’élimination de la violence, par laquelle on a tenté sans succès de rapprocher les parties dans le cadre du dialogue social. En juin 2010, le gouvernement a en outre accepté la visite d’une personnalité internationale de premier plan qui s’est récemment concrétisée par la visite de M. Valdivieso accompagné de membres du personnel du BIT.

Les membres employeurs ont expliqué que les mesures réclamées pour éradiquer les actes de violence peuvent être classées en deux catégories. Celles de la première catégorie sont des mesures ayant pour objet de renforcer les institutions chargées de garantir dans la pratique le respect de la liberté syndicale. Le Guatemala est un pays en voie de développement, qui reste pauvre par comparaison avec d’autres pays de la région, où la violence semble gagner du terrain en raison d’une très grande faiblesse des institutions à laquelle il faut remédier. La feuille de route comme les demandes répétées de la commission d’experts et de la présente commission insistent sur la nécessité de renforcer le ministère public et d’augmenter sa dotation budgétaire, d’augmenter le nombre des magistrats, des inspecteurs et agents du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale; de resserrer les liens entre les institutions, d’accélérer les procédures pénales et celles des juridictions du travail en matière de liberté syndicale; de renforcer les moyens affectés à la protection de syndicalistes ou de leurs familles, de témoins qui ont fait l’objet de violences ou de menaces; et de faire appliquer les condamnations prononcées par les tribunaux. Les mesures de la deuxième catégorie se rapportent aux données et informations relatives à l’évaluation des mesures prises pour analyser l’évolution de ce phénomène.

En 2010, les membres employeurs ont exprimé leur préoccupation de manière très ferme et ont demandé au gouvernement de manifester par des actes concrets une volonté politique suffisante de donner la priorité à cette question, plus spécialement par le biais de moyens budgétaires, de l’exécution des peines et d’une amélioration des mécanismes de recours judiciaires et administratifs. La commission d’experts ne constate pas d’avancées qui inciteraient à considérer les progrès réalisés comme suffisants ou, à tout le moins, elle déplore que le rapport qui a été présenté ne renferme pas d’informations sur le renforcement des institutions et l’évaluation des progrès réalisés. En conséquence, elle exprime des préoccupations beaucoup plus vives que les années antérieures, qui l’ont sans doute incitée à demander au gouvernement de fournir un complément d’information à la Conférence. On constate, en outre, une dégradation de la situation, surtout au vu des conclusions du Comité de la liberté syndicale de 2009 et 2010.

Les membres employeurs se sont félicités des informations fournies par le gouvernement et les magistrats de la Cour suprême de justice s’agissant de la formation dispensée aux magistrats, du nombre des syndicats et de la restructuration de la magistrature. Quoi qu’il en soit, ces informations restent insuffisantes parce qu’elles devraient inclure des données sur l’évolution des faits de violence. La procédure d’enquête a de l’importance et elle doit permettre de distinguer clairement les faits de violence, qui s’inscrivent dans un climat de violence généralisée, de ceux qui sont purement antisyndicaux. On relève des actes de violence grave entraînant la mort de chefs d’entreprises, précisément dans l’exercice de leur liberté d’entreprendre et de leur droit de négociation collective. Le gouvernement a fait preuve de bonne volonté en acceptant plusieurs missions de haut niveau, de contacts directs et d’assistance technique, mais aussi en remettant régulièrement ses rapports. Cependant, cette bonne volonté ne suffit pas. En outre, les réductions budgétaires découlant d’une situation économique très fragile ne cadrent pas avec des actions prioritaires et urgentes dans ce domaine. Il y a lieu de préserver le dialogue avec le gouvernement et la collaboration avec cette commission et la commission d’experts, qui sont les meilleurs instruments pour garantir les droits fondamentaux au travail. Il ne faut pas que ces efforts soient utilisés dans le but de compromettre les perspectives d’investissement et de développement économique du pays, un développement indispensable au renforcement des institutions qui permettent de donner corps aux obligations résultant de la convention.

Les membres travailleurs ont rappelé les déclarations qu’ils avaient faites devant la commission à propos de ce cas lors de la session de juin 2010 de la Conférence, en ce qui concerne les actes de violence commis au Guatemala contre des syndicalistes, les problèmes législatifs de mise en oeuvre de la convention (no 87) et de la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et l’impunité judiciaire. Ils avaient alors présenté des conclusions très précises destinées à garantir l’exercice plein et entier de la liberté syndicale dans le cadre du renforcement de la démocratie au Guatemala et exprimé la ferme volonté de voir les conclusions de la commission reprises dans un paragraphe spécial de son rapport afin de souligner le mépris de la convention no 87 qui perdure dans ce pays depuis au moins 1991. Cette demande n’a cependant pas été suivie d’effets: à la suite d’une discussion très animée, la commission a préféré suivre la proposition des membres employeurs, en priant le gouvernement «d’accepter la possibilité d’une visite par une personnalité internationale importante, accompagnée d’une mission de haut niveau de l’OIT, qui examinerait ces questions et formulerait des recommandations». Les membres travailleurs se sont alors inclinés, par respect pour l’OIT. Quels sont les faits nouveaux en 2011 au regard des conclusions adoptées en 2010 par la commission? La question de la visite d’une personnalité internationale n’était pas claire jusqu’à la déclaration que le représentant gouvernemental vient de faire; en toute hypothèse c’est le gouvernement lui-même qui a choisi la personnalité qui lui convenait. Lors de sa dernière session, la commission d’experts ne disposait que de peu d’informations législatives ou factuelles au sujet de la situation dans le pays, alors que le gouvernement devait communiquer en 2010 un rapport détaillé au sujet des progrès tangibles sur l’ensemble des points mentionnés par la présente commission. A cet égard, les membres travailleurs ont rejeté tout argument consistant à faire grief à la commission d’experts d’avoir formulé ses commentaires sur la seule base des documents qui étaient alors en sa possession et ont souligné que ces commentaires relèvent strictement d’une interprétation littérale de la convention. Les informations recueillies de toutes parts prouvent que rien n’a changé et qu’il y a un manque de volonté politique traduisant un mépris des travailleurs. Si des textes législatifs changent, il n’en va pas de même de leur application. La réalité qui sous-tend cette situation est la convoitise économique.

Les membres travailleurs ont par ailleurs pris acte de la mission de haut niveau qui a eu lieu du 9 au 14 mai 2011 et du fait que le gouvernement avait demandé, en date du 1er octobre 2010, l’assistance technique du BIT pour éclaircir la situation de l’enregistrement de l’UNSITRAGUA. Ils ont rappelé la mission tripartite de haut niveau qui avait eu lieu en février 2009, au cours de laquelle les membres de la mission représentant les travailleurs avaient ressenti un manque total de considération de la part du gouvernement. Il ressort des conclusions adoptées par cette commission en 2010 que rien n’a changé depuis la mission de haut niveau de 2009. Ces conclusions portaient sur quatre points: a) l’aggravation de la situation de violence et d’impunité; b) le manque de volonté politique du gouvernement pour lutter contre la violence visant les dirigeants syndicaux et les syndicalistes, et pour combattre l’impunité; c) l’urgence de mettre en place une voie de recours simple et rapide ou tout autre recours efficace devant les tribunaux compétents; d) la nécessité de prendre des mesures pour renforcer le dialogue social, en redéfinissant les organes de représentation et en garantissant aux représentants librement élus par les organisations du pays l’accès à ces organes, conformément aux commentaires des organes de contrôle.

La mission de haut niveau qui s’est tenue en mai 2011 devait répondre à ces quatre points. Dans son rapport, elle a rappelé tout d’abord le nombre effrayant de dirigeants syndicaux et de syndicalistes qui ont été assassinés ou menacés de mort depuis 2007. Elle a évoqué la violence généralisée et la faiblesse des moyens engagés par la justice pour éradiquer la violence et rétablir le règne de l’état de droit. Elle a également relevé les questions législatives régulièrement soulevées par les organes de contrôle de l’OIT, en pointant très précisément les dispositions du Code du travail du Guatemala qui sont en contradiction avec la convention. En outre, la mission de haut niveau a constaté avec regret que, depuis l’année dernière, il n’y avait eu aucun progrès en relation avec les réformes demandées par la commission d’experts et que la Commission tripartite des affaires sociales n’avait présenté aucun projet de loi au Congrès. Tout en notant les arguments avancés par les autorités du Guatemala au sujet des progrès accomplis en matière de couverture de la négociation collective dans les maquilas, la mission de haut niveau a émis des doutes sur ce point en signalant le taux extrêmement faible de syndicalisation dans ces zones, qu’elle a pu établir suite à des contacts avec les centrales syndicales. Par ailleurs, elle a affirmé qu’il est urgent d’associer la CUSG (Confédération de l’unité syndicale du Guatemala), la CGT (Confédération générale des travailleurs du Guatemala) et l’UNSITRAGUA aux travaux de la Commission tripartite des affaires sociales, au sein de laquelle ces organisations ne siègent pas. La mission de haut niveau a ajouté qu’un organe du dialogue social qui ignorerait un pan aussi essentiel du mouvement syndical ne pourrait atteindre adéquatement ses objectifs. Enfin, le rapport de cette mission contient des considérations au sujet de l’enregistrement des organisations syndicales. Rien ne permet cependant de dire que le gouvernement reconnaît que des actions pour la mise en place d’une procédure visant à faciliter l’enregistrement des organisations syndicales doivent encore être envisagées. Il existe toutefois un point positif: la mission de haut niveau a pris note de la mise en place d’un groupe de travail bipartite au sein de la Commission tripartite des affaires sociales, qui sera chargé de présenter un projet de loi portant création d’un Conseil économique et social. Pour que ce projet ne soit pas que de la poudre aux yeux, il devra être encadré par une assistance technique du BIT.

Un observateur de la Confédération syndicale internationale (CSI) a déclaré que, pendant 57 ans, l’Etat du Guatemala, dirigé par des régimes militaires ou civils, a systématiquement violé la convention. Il existe une politique non écrite contre la liberté syndicale et, pour cette raison, pendant quinze années consécutives, le gouvernement a dû s’expliquer devant la commission. Bien que plusieurs missions – de haut niveau, de contacts directs et d’assistance technique – se soient déroulées, la commission d’experts continue à demander que la protection des syndicalistes menacés de mort soit assurée, que les procédures judiciaires s’accélèrent et que la lumière soit faite sur les assassinats et les autres crimes visant les syndicalistes afin de sanctionner les coupables et de régler le grave problème d’impunité des crimes dont sont victimes les syndicalistes. Dans le cadre de la mission de haut niveau, qui a eu lieu dans le pays en mai 2011, le ministre du Travail et de la Prévoyance sociale a déclaré que les accusations des syndicats n’étaient pas fondées, et que ces derniers cherchaient uniquement la confrontation. Est-ce chercher la confrontation que de mentionner les assassinats récents de dirigeants syndicaux, les persécutions systématiques dont font l’objet les syndicats, les licenciements antisyndicaux massifs, le non-respect, par les employeurs, des décisions de justice favorables aux syndicalistes et la non-élucidation de plusieurs assassinats? Comme l’indiquent les conclusions de la mission de haut niveau, la situation reste délicate, grave et préoccupante.

Le membre employeur du Guatemala a salué le caractère positif de la visite de M. Valdivieso, qui dirigeait la mission de haut niveau chargée d’examiner les questions pendantes devant la commission. Il a réaffirmé la volonté des employeurs du Guatemala de soutenir les recommandations qui seront formulées et a souligné qu’il partage les préoccupations qu’inspirent à la mission les actes de violence contre des syndicalistes. Il importe cependant de tenir compte du contexte dans lequel surviennent ces actes de violence ainsi que des efforts déployés par le pays pour consolider l’état de droit. Les employeurs ont un intérêt prééminent à ce que les actes de violence commis contre des syndicalistes et contre des employeurs donnent lieu à des enquêtes, afin que la justice suive son cours et que l’on sache clairement si les causes de ces crimes ont leur origine dans l’activité professionnelle des victimes. Parmi les chiffres préoccupants, il y a celui des morts violentes de chefs d’entreprise, qui s’est élevé à 28 pour l’année 2010.

Ces préoccupations sont partagées par les autorités judiciaires, et c’est ainsi que les magistrats de la Cour suprême de justice ont accordé une attention particulière à cette question, ce qui s’est traduit par l’ouverture de nouveaux tribunaux du travail. De même, la Commission tripartite des questions internationales du travail a fait valoir instamment auprès du Procureur général de la République la nécessité de renforcer l’instruction de ces affaires. L’exécutif a, quant à lui, engagé un processus de renforcement de l’Inspection générale du travail. Les employeurs du Guatemala veilleront, par le biais du Conseil de l’Inspection générale du travail, à ce que ce processus se poursuive. La mise en place de mécanismes plus transparents de désignation des hautes autorités en charge de l’administration de la justice et, d’autre part, l’action de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala constituent un pas dans la bonne direction, qui est celle de combattre le climat d’impunité. Le Guatemala est un pionnier dans la mise en oeuvre de mesures réelles et concrètes, adaptées à la réalité, prises avec l’assistance de la communauté internationale pour apporter une solution à un problème qui menace de s’étendre à toute la région. On ne peut affirmer à bon droit qu’il existe un climat de violence antisyndicale. Ce qui existe, c’est une violence qui frappe sans distinction toutes les composantes de la société.

S’agissant de la nécessité de réformes visant à rendre la législation nationale conforme aux conventions de l’OIT, l’orateur a réaffirmé la nécessité de dégager des consensus dans les espaces de dialogue tripartite et a réaffirmé la volonté des employeurs de parvenir à de tels accords. Il a exprimé son désaccord avec l’idée de la commission d’experts selon laquelle il faudrait modifier la législation concernant le droit de grève, considérant qu’aucune convention de l’OIT ne régit cette matière. Le dialogue social est menacé par les divisions entre les dirigeants syndicaux dans le pays.

Les taux d’affiliation syndicale et de négociation collective doivent s’analyser par référence à la population qui travaille dans l’économie formelle et non pas par référence à la totalité de la population économiquement active. De plus, le phénomène associatif a enregistré un recul à l’échelle mondiale, et le Guatemala ne saurait échapper à cette tendance. Les chiffres prouvent que la discrimination antisyndicale est pratiquement inexistante dans le secteur des maquilas. Il n’y a pas eu de fermetures illégales, grâce à l’étroite collaboration entre le secteur privé et les autorités compétentes en matière de travail. Enfin, l’orateur a souligné les progrès accomplis dans le domaine de l’application de la justice et la contribution apportée par la société civile au renforcement de l’état de droit, contribution qui constitue le seul moyen de résoudre les problèmes signalés par la commission d’experts. Même s’il existe encore des problèmes ardus à résoudre, le pays est engagé dans la bonne voie et parviendra ainsi à garantir à ses citoyens la jouissance pleine et entière de leurs droits.

Le membre gouvernemental de l’Argentine, s’exprimant au nom des membres gouvernementaux de la commission, qui sont membres du Groupe des pays d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), s’est félicité des informations fournies par le gouvernement, les magistrats de la Cour suprême de justice et les partenaires sociaux. La participation active du gouvernement montre la volonté politique de répondre aux défis relatifs à la mise en oeuvre de la convention dans le pays. L’orateur s’est félicité de la visite de M. Valdivieso, accompagné par des membres du personnel du BIT, conformément aux conclusions adoptées par la commission en 2010. Les recommandations qui ont été formulées par la mission devront contribuer à résoudre les problèmes auxquels les autorités sont confrontées. Le Guatemala doit être soutenu par l’OIT dans ses efforts, et le mécanisme d’examen qu’offre la commission doit aider les gouvernements à se conformer aux engagements pris en vertu des conventions de l’OIT qu’ils ont ratifiées. L’orateur a conclu en encourageant le gouvernement et le Bureau à poursuivre leurs efforts pour assurer la pleine application de la convention.

Le membre gouvernemental de la Belgique, s’exprimant également au nom du gouvernement du Luxembourg, a regretté devoir réitérer la déclaration qu’il avait faite en 2010 et a fait part de sa préoccupation à propos de ce cas. Depuis 1991, le Guatemala fait l’objet d’observations de la part de la commission d’experts pour non-respect de la liberté d’association. Depuis 2005, il a reçu cinq missions de haut niveau et différentes formes d’assistance technique du BIT, sans que des résultats législatifs concrets soient enregistrés. Les autorités du Guatemala doivent assurer la liberté d’association, en étroite collaboration avec les partenaires sociaux et avec l’assistance du BIT. Il est intéressant de constater qu’une Commission nationale tripartite pour la mise en oeuvre effective de la convention, assortie d’une feuille de route, a été mise en place. La nature tripartite de cette commission doit être préservée et si possible encouragée par un dialogue inclusif. Par ailleurs, au cours des trois dernières années, le nombre de morts violentes de syndicalistes a augmenté de manière dramatique, dans un contexte d’insécurité et de violence croissantes qui affecte l’ensemble de la population. Le gouvernement du Guatemala doit prendre des mesures afin d’empêcher le harcèlement, la persécution et l’assassinat de syndicalistes et lutter contre l’impunité. Les résultats des enquêtes menées doivent être rendus publics. Ce n’est qu’en adoptant de telles mesures que les autorités du Guatemala prouveront leur volonté politique de combattre de façon crédible la violence à l’encontre des syndicalistes et de lutter contre l’impunité, en conformité avec les nombreuses recommandations acceptées par le Guatemala dans le cadre de l’examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. Enfin, l’orateur a réaffirmé l’importance de la coopération entre les autorités du Guatemala et l’OIT.

La membre gouvernementale des Etats-Unis a noté que, depuis 2008, dans le cadre de l’Accord de libre-échange conclu entre l’Amérique centrale, les Etats-Unis d’Amérique et la République dominicaine (ALEAC), son gouvernement est en train d’examiner un certain nombre de questions posées par la commission d’experts en ce qui concerne l’application de la convention par le Guatemala et s’est largement engagé avec le gouvernement du Guatemala dans le but de résoudre les problèmes soulevés dans un recours public, déposé par l’AFL-CIO (Fédération américaine du travail et Congrès des organisations industrielles) et six syndicats du Guatemala, ainsi que pour répondre aux préoccupations systémiques relatives à l’application du droit du travail au Guatemala. Bien que certaines mesures positives aient été prises, le gouvernement demeure très préoccupé par le manque général de progrès à ce jour. L’oratrice a noté que le gouvernement du Guatemala a reconnu les graves problèmes auxquels il fait face pour protéger la liberté syndicale et qu’il a, à plusieurs reprises, fait appel à l’assistance technique du BIT pour surmonter ces défis. Toutefois, des actes de violence dévastateurs contre des syndicalistes persistent. En outre, de nombreuses lacunes subsistent dans les juridictions pénales, civiles et du travail, ce qui empêche l’application effective de la législation du travail; et la situation d’impunité est plus grave que jamais. Compte tenu de ces défis, l’oratrice a de nouveau exhorté fermement le gouvernement à intensifier ses efforts, en étroite collaboration avec le BIT et avec la pleine participation des partenaires sociaux, pour adopter des mesures concrètes et durables, qui sont requises de manière urgente, afin de garantir la liberté syndicale et le droit d’organisation au Guatemala. Enfin, l’oratrice a exprimé l’espoir que le gouvernement du Guatemala agira avec détermination et sans plus tarder pour mettre en oeuvre les conclusions et recommandations de la récente mission de haut niveau afin de marquer un tournant décisif dans l’application de la convention au Guatemala et des progrès authentiques en matière de respect des droits les plus fondamentaux des travailleurs.

Le membre travailleur des Etats-Unis a rappelé que le Guatemala est l’un des pays les plus fréquemment traités par les organes de contrôle de l’OIT à propos de violations des droits à la liberté syndicale et de négociation collective. Ces vingt dernières années, les organes de contrôle ont constaté et dénoncé des violations graves, étendues et systématiques de ces droits fondamentaux, et l’OIT a envoyé plusieurs missions de haut niveau au Guatemala, la dernière datant de moins d’un mois. Malgré ces efforts, on peut dire que les systèmes de justice du travail et de justice pénale du Guatemala présentent de graves défaillances. Cela est dû essentiellement à un manque total de volonté politique et aux administrations successives qui ont gaspillé les millions de dollars qui étaient destinés à créer des fonds pour le renforcement des capacités et l’assistance technique pour contribuer à renforcer l’administration du travail, à la réforme de la justice et à renforcer les capacités des magistrats du ministère public à combattre la violence à l’égard des syndicalistes. En ce qui concerne la violence antisyndicale, il faut rappeler que la liberté syndicale ne saurait s’exercer pleinement si les droits fondamentaux, en particulier les droits liés à la vie humaine et à la sécurité personnelle, ne sont pas entièrement respectés et garantis. Selon les informations communiquées par la CSI, le Guatemala est le deuxième pays le plus dangereux du monde pour les syndicalistes. En outre, les données issues de la mission de haut niveau de l’OIT indiquent que 53 syndicalistes ont été assassinés au cours des cinq dernières années. Le dernier assassinat a eu lieu le 26 mai 2011 et a visé le directeur des finances de SITRABI (Syndicat des travailleurs des bananeraies d’Izabal), M. Idar Joel Hernandez Godoy, qui a été tué au volant de la camionnette du syndicat. Ces cinq dernières années, trois autres dirigeants de SITRABI ont été tués et, en 1999, cinq membres du Comité exécutif de SITRABI ont été contraints à l’exil. A cet égard, l’orateur a relevé que la mise en place d’un Procureur spécial pour les crimes contre les syndicalistes et les journalistes en 2002 n’a pas permis de traduire les auteurs de ces crimes en justice. La police et certains procureurs se gardent souvent de diligenter les enquêtes appropriées et, trop souvent, ils n’enquêtent pas sur tous les motifs possibles, en particulier les motifs liés aux activités syndicales de la victime. Ces faits sont également relevés par la mission de haut niveau qui indique que, ces dernières années, les enquêteurs ont tendance à se concentrer sur tout motif autre que les activités syndicales. Cela explique que l’impunité au Guatemala atteint les 98 pour cent. Se référant aux observations de la commission d’experts, il a exprimé ses préoccupations devant les réductions budgétaires du système de justice annoncées pour 2011 qui pourraient conduire à aggraver la situation. Enfin, il a exhorté la présente commission à inclure ses conclusions sur le Guatemala dans un paragraphe spécial de son rapport, et a appelé le gouvernement du Guatemala à combattre la violence qui entrave l’exercice plein et entier de la liberté syndicale.

Un membre travailleur de la Colombie a déclaré que le cas du Guatemala est un cas grave, persistant et urgent auquel le gouvernement n’a pas apporté une réponse sérieuse et définitive. Il s’agit d’un cas de manquement réitéré et systématique. Le gouvernement poursuit toujours une politique antisyndicale et laisse les entreprises mener des pratiques visant à détruire le mouvement syndical. D’ailleurs, divers organes de contrôle de l’OIT traitent ce cas depuis plus de vingt ans. Ces organes ont identifié au moins 12 types de pratiques qui font obstacle au droit de constituer des organisations syndicales, notamment l’exigence d’une autorisation avant l’enregistrement d’un syndicat; la possibilité pour les employeurs de s’opposer à la constitution d’un syndicat; la vente de listes noires de travailleurs ayant adhéré à un syndicat; la suppression de l’immunité syndicale; la création d’organisations solidaristes sous le contrôle des employeurs; la fermeture frauduleuse ou le changement de nom du lieu de travail; le recours à des procédures judiciaires contre les travailleurs, entre autres choses. Ces pratiques se fondent sur des législations contraires à la convention, lesquelles n’ont pas été modifiées, et les pouvoirs publics n’ont pris aucune mesure pour les modifier ou pour introduire des mécanismes de protection face à ces abus. C’est à cause de ces politiques antisyndicales que le Guatemala affiche un taux de syndicalisation très bas, lequel n’atteint même pas 2 pour cent. Le ministère du Travail n’a toujours pas répondu à près de 200 demandes d’enregistrement de syndicats et que l’imposition de conditions illégales et abusives, qui retarde le dépôt des statuts des organisations, fait que sur les 961 syndicats constitués au Guatemala plus de la moitié, soit 561, ont cessé d’exister. Pas un seul des secteurs productifs du Guatemala n’atteint 1 pour cent d’affiliation syndicale, les taux de syndicalisation étant les suivants: 0,01 pour cent dans les services et le commerce; 0,31 pour cent dans le secteur financier; 0,11 pour cent dans le secteur de la construction; 0,5 dans les entreprises de zone franche (maquilas); 0,6 dans le secteur industriel; et 0,47 pour cent dans l’agriculture. Ce taux de syndicalisation, au total, ne dépasse donc pas 0,33 pour cent. La Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT) déplore qu’une centrale syndicale légitime et autonome telle que le Mouvement syndical du peuple indigène et des paysans guatémaltèques pour la défense des droits des travailleurs et des travailleuses (MSICG) fasse l’objet d’attaques constantes du fait qu’il n’a de cesse de dénoncer les violations aux normes internationales du travail et notamment à la liberté syndicale. Il a demandé à la commission qu’elle rappelle au Guatemala qu’il est inacceptable d’exclure du dialogue social les travailleurs associés au sein de différentes centrales parce qu’ils déposent des plaintes et défendent la classe ouvrière.

Le membre gouvernemental de l’Allemagne a regretté la persistance des violations des droits syndicaux. Tout en se félicitant des efforts déployés par le gouvernement du Guatemala, il espère que le gouvernement prendra note de la discussion qui a eu lieu devant la Commission de la Conférence et agira en conséquence, notamment en ce qui concerne l’amélioration de l’administration de la justice.

La membre gouvernementale de la République bolivarienne du Venezuela a fait part de la solidarité de son gouvernement envers les travailleurs du Guatemala et en particulier envers des organisations telles que le MSICG, pour les actes de harcèlement, d’intimidation et de persécutions dont ils font l’objet. Les actes de violation graves qui sont perpétrés dans les maquilas la préoccupent tout particulièrement. Elle communique les données ci-après recueillies par le MSICG à partir des registres officiels: sur les 90 000 travailleurs que compte le secteur des maquilas, seuls 488 sont syndiqués, répartis en six syndicats, tous travaillant dans des conditions précaires, et seulement trois d’entre eux ont réussi à négocier des conventions collectives, simplement pour des questions de forme, puisque ces dernières restreignent les droits contenus dans la législation ou, au mieux, les reproduisent tels quels. Entre 2006 et 2009, la fermeture de 71 maquilas a été demandée par l’inspection du travail mais, dans la plupart de ces cas, les employeurs n’ont pas rempli leurs obligations en matière de conditions de travail. Même si le gouvernement a déclaré avoir sanctionné ces entreprises en leur supprimant leurs avantages fiscaux, en réalité ces suppressions n’ont eu lieu qu’après que lesdites entreprises avaient cessé leur activité. La réalité est que, au contraire, les avantages fiscaux se sont accrus, comme le montre le décret no 29-89, suite à une initiative lancée par le Congrès. L’oratrice signale la présence d’autorités du pouvoir judiciaire dans la délégation gouvernementale et indique qu’un des thèmes les plus graves est l’échec systématique du système judiciaire. A cet égard, elle rappelle que le MSICG avait formulé des propositions à ce sujet lors de la mission qui a eu lieu en mai 2011, propositions visant à garantir un recours rapide et direct auprès des tribunaux compétents, dans le but de protéger les travailleurs contre des violations des droits fondamentaux. La justice est d’une lenteur importante, seulement 1 pour cent des procès intentés pour non-respect du droit de grève ont abouti à une déclaration de légalité de ladite grève. La justice prétend que cette lenteur de la procédure judiciaire est due au fait que les recours sont abusifs. Or c’est principalement le gouvernement du Guatemala qui, en tant qu’employeur, a intenté ces actions. Le gouvernement a intenté 40 pour cent des actions, et les employeurs privés 36 pour cent. L’oratrice rappelle que la commission a demandé que les recours à la justice soient accrus, alors que c’est le contraire qui s’est produit. La Cour suprême de justice elle-même a déclaré, le 12 mai 2011, que les budgets de la justice pour 2011 ont été considérablement réduits, de sorte qu’une grande partie des activités de l’administration de la justice risquent d’être suspendues. Enfin, compte tenu de l’absence de volonté politique et du refus de collaborer manifestés par le gouvernement depuis plusieurs années, l’oratrice demande à ce que les conclusions de ce cas fassent l’objet d’un paragraphe spécial.

Le membre travailleur de l’Uruguay a déclaré que les travailleurs de la PIT-CNT (Assemblée intersyndicale des travailleurs - Convention nationale des travailleurs) se plaignent de ce que l’absence de liberté syndicale est d’une gravité telle au Guatemala que, dans son rapport de 2010, l’Etat du Guatemala a accusé le MSICG (qui représente plus de 225 000 adhérents cotisants) d’être une centrale autonome représentative et le principal plaignant contre l’Etat guatémaltèque devant les organes de contrôle de l’OIT, de déstabiliser le pays en lui imputant le délit de terrorisme pour le seul fait d’avoir dénoncé l’absence de liberté syndicale. Il demande que les conclusions de la commission demandent au gouvernement d’assurer la protection du MSICG et de ses collaborateurs et que cessent la répression et la criminalisation car ils défendent la liberté syndicale. Pour que les syndicats puissent agir et jouir de la liberté syndicale, ils doivent pouvoir jouir des libertés publiques dans un climat de respect des droits de l’homme, en particulier des droits à la vie et à la sécurité des personnes. Une telle situation laisse supposer une protection ou une dissimulation de pratiques terroristes ou d’actions et omissions qui impliquent un terrorisme d’Etat de la part de l’institution qui devrait protéger ces droits mais ne le font pas. Il faut aussi mentionner d’autres droits syndicaux connexes qui font aussi l’objet d’actes d’ingérence, l’absence de poursuites des cas de non-respect des droits du travail, l’inexistence de procédures efficaces et aussi le non-respect du droit des syndicats de se constituer librement et de se doter de l’organisation qui leur convient le mieux. Il y a lieu à ce propos de prendre en compte l’obligation qu’a le gouvernement de promouvoir la liberté syndicale et la constitution de syndicats en adoptant des mesures pour faciliter leurs activités. Tel n’est pas le comportement actuel du gouvernement du Guatemala.

Le membre gouvernemental de la Norvège a rappelé que le gouvernement du Guatemala a déjà été amené à s’expliquer à plusieurs reprises devant la Commission de la Conférence en ce qui concerne les violations de la convention. A cet égard, son gouvernement, comme d’autres pays, ont instamment prié le Guatemala de prendre des mesures pour mettre sa législation et sa pratique en conformité avec la convention. Aussi, l’orateur s’associe à la déclaration faite par le membre gouvernemental de la Belgique.

Un autre membre travailleur de la Colombie a indiqué que, malgré les déclarations de bonne volonté du gouvernement, il est nécessaire de rappeler qu’au cours des quinze dernières années la commission n’a pas reçu de preuve probante de nature à lui permettre d’espérer des modifications législatives octroyant la plénitude des droits en matière de liberté syndicale. En 1998, la commission d’experts avait requis de manière ferme que le Guatemala mette sa législation en conformité avec les normes internationales du travail et les travailleurs trouvent inacceptables de ne pas avoir donné suite à cet appel. Malheureusement, les restrictions persistent en ce qui concerne la liberté syndicale, la négociation collective et la pénalisation du droit de grève, rendant ainsi le taux de syndicalisation si faible que ceux qui affirment que le Guatemala est un Etat de droit devraient avoir honte. Un Etat qui ne respecte pas les droits en question est un Etat défaillant, nécessairement voué à l’échec car il ne peut y avoir de démocratie sans respect des droits de la classe ouvrière. Le groupe des travailleurs pose les questions suivantes: 1) Jusqu’où ira l’attitude dilatoire des gouvernements successifs du Guatemala? 2) Pourquoi le gouvernement actuel ne présente-t-il pas les initiatives législatives nécessaires au Congrès? 3) Le gouvernement et les employeurs peuvent-ils vraiment présenter avec fierté un taux de syndicalisation inférieur à 2 pour cent? 4) Comment peuton prétendre établir un Etat de droit alors que les droits minimaux de la classe ouvrière ne sont pas respectés? La mission de haut niveau qui s’est rendue au Guatemala en mai 2011 a clairement exprimé sa préoccupation par rapport à la situation législative et en particulier à la pénalisation du droit de grève. En espérant que l’année prochaine la commission sera en mesure de constater de réels progrès, il a demandé que le cas figure dans un paragraphe spécial du rapport de la commission.

Le membre travailleur du Brésil s’est déclaré solidaire du mouvement syndical du Guatemala. L’absence de démocratie pourrait être l’une des causes des assassinats des syndicalistes au Guatemala. Le rapport de la commission d’experts fait état d’exemples concrets et alarmants de situations vécues par les syndicalistes: les cas d’assassinats de 47 syndicalistes entre 2007 et 2010, les actes d’intimidation, les actes de violence à l’encontre des syndicalistes et des locaux syndicaux, ou encore l’absence de négociation avec les entreprises du pays sont des situations honteuses pour le Guatemala, et pour l’Amérique latine. A cet égard, une protection spécifique des syndicalistes doit être mise en place et assurée par le Procureur spécial des droits de l’homme. Par ailleurs, il est important que toutes les centrales syndicales du Guatemala participent à tous les espaces de dialogue, de même qu’il est aussi important que le mouvement syndical des peuples indigènes ne soit pas discriminé et puisse participer au dialogue social. Car il n’incombe pas au gouvernement ou aux employeurs de choisir leurs interlocuteurs dans le dialogue social. Ce dialogue social doit être engagé dans le respect de tous les mouvements sociaux et de tous les mouvements syndicaux du pays.

Une observatrice représentante de la Fédération syndicale mondiale (FSM), après avoir signalé que le Mouvement syndical du peuple indigène et des paysans guatémaltèques pour la défense des droits des travailleurs et des travailleuses (MSICG) est une centrale syndicale autonome représentant plus de 255 000 travailleurs, a déploré que le gouvernement n’ait pas présenté à cette commission une réponse aux commentaires que le MSICG a formulés en 2010 et n’ait pas non plus répondu valablement aux organes de contrôle ni à la présente assemblée mais se borne à afficher une volonté politique qui n’a aucune réalité, comme le prouvent les exemples suivants: 1) bien que la commission ait prié le gouvernement d’accroître le budget de l’inspection du travail, des procureurs, de la police et de la Cour suprême de justice, cette dernière a fait connaître publiquement que l’administration de la justice a subi des réductions budgétaires inimaginables; 2) en 2010, le gouvernement a annoncé à la commission que les effectifs de l’inspection du travail augmentaient de 30 agents alors qu’en réalité ils baissaient, passant de 197 à 185; 3) chaque fois que le gouvernement est interrogé au sujet des violences antisyndicales, il crée ou bien il supprime – à sa convenance – l’Unité spéciale pour les délits commis contre les syndicalistes ou la fonction de procureur spécial; 4) le gouvernement présente comme un progrès l’accord ministériel 106-2011, promulgué le 3 mars 2011, qui permettrait, selon lui, l’accès de la police en même temps que des inspecteurs du travail à tout établissement dans un délai de trois jours à compter du refus de l’employeur, et ce seulement en cas de présomption de pratiques relevant des pires formes de travail des enfants, en cas de fermeture d’entreprise d’une zone franche d’exportation ou en cas de licenciement de plus de dix travailleurs. Seulement, l’accord en question constitue une grave régression ainsi qu’une violation flagrante de l’article 281 du Code du travail, lequel énonce l’obligation de l’inspection du travail de pénétrer avec le concours de la force publique dans tout établissement en cas de refus de l’employeur, et ce dans quelque circonstance que ce soit; 5) le gouvernement a déclaré avoir récupéré des sommes élevées revenant aux travailleurs licenciés par des entreprises des zones franches d’exportation, pourtant, de 2005 à 2010, les travailleurs ont perdu plus de 73 pour cent des prestations annexes qui leur étaient dues à cause d’initiatives erronées de l’inspection du travail; 6) s’agissant des entreprises des zones franches, il faut évoquer le cas d’une certaine entreprise, que le Procureur des droits de l’homme a reconnu coupable de violation des droits des travailleurs et à propos de laquelle des indices concordants de délits de la part des inspecteurs du travail ont été relevés, sans que rien ne soit fait à cet égard; 7) le gouvernement évoque la création de commissions ayant pour fonction de procéder à des réformes législatives mais celles-ci, qui ont bien été au nombre d’une centaine, n’aboutissent jamais à rien. En dernier lieu, l’oratrice a demandé que les conclusions fassent l’objet d’un paragraphe spécial, mesure qui serait un acte de justice à l’égard de tous les travailleurs victimes de violences antisyndicales commises sous diverses formes, telles que l’impossibilité de trouver du travail pour les travailleurs ayant formé des syndicats, les licenciements et les meurtres.

Le représentant gouvernemental a déclaré que les autorités du Guatemala ne font preuve d’aucune tolérance ni attitude susceptible d’inciter des individus à proférer des menaces ou à porter atteinte à l’intégrité physique ou à la vie d’un Guatémaltèque, contre des syndicalises ou les sièges de syndicats, étant entendu qu’il est également du devoir de l’Etat de garantir la propriété privée en tant que droit de la personne humaine. Il a rappelé que le ministère public procède à une restructuration interne, avec notamment la création de l’Unité spéciale pour les délits commis contre les syndicalistes. Selon les conclusions de la mission qui est venue récemment dans le pays, la violence qui est généralisée vise des syndicalistes, des chefs d’entreprise et tous les Guatémaltèques. Il n’existe donc pas de stigmatisation spécifiquement dirigée contre les travailleurs. Cette situation préoccupe le gouvernement qui s’efforce de remédier à cette situation, comme l’ont indiqué les magistrats présents à la réunion. S’agissant de la légitimité de la Commission tripartite des affaires internationales, il a indiqué qu’on ne peut guère remettre en doute sa légitimité étant donné que le ministère du Travail a publié, dans un quotidien à grand tirage, la convocation envoyée tant aux employeurs qu’aux travailleurs afin qu’ils proposent à leurs représentants d’y prendre part. Quant au nombre d’inspecteurs du travail, il a précisé qu’ils étaient aujourd’hui 214, ce qui montre que la promesse d’augmenter leur nombre a été tenue. Des efforts sont accomplis pas à pas comme, par exemple, les changements au sein du ministère public. Il s’est dit préoccupé que l’on qualifie de «plaisanterie» les efforts que déploie le gouvernement alors qu’il s’agit de changements réalisés au prix d’efforts considérables, avec le soutien du BIT et l’assistance d’autres organisations, qui résultent d’accords pris dans certains cas au sein de la commission tripartite. La commission qui révisera la législation inclura dans ses travaux le suivi du projet de réforme au Code du travail, élaboré par la commission tripartite avec l’assistance du BIT, connu sous le nom de «projet Marin». Sollicitant l’appui de la commission pour le gouvernement, il a déclaré que ce dernier poursuivra ses efforts en vue de l’application pleine et entière de la convention. Une nouvelle génération de Guatémaltèques assume désormais des positions de haut niveau avec pour objectif que tous les secteurs, notamment celui de la production, travaillent main dans la main en ayant une vision commune du progrès pour le pays.

Les membres employeurs ont souligné la gravité de la question et indiqué que le groupe des employeurs en était unanimement préoccupé. Le gouvernement du Guatemala a fait état de changements progressifs alors qu’il est nécessaire que ce dernier affiche une volonté politique plus claire en ce qui concerne la réforme des institutions et l’évaluation des progrès réalisés. Selon le gouvernement, certaines mesures ont évolué comme l’institution du procureur spécial et d’autres sont à prévoir comme celles visant à rationaliser les procédures, mais les membres employeurs espèrent que le gouvernement adopte une ligne de conduite plus décisive et que les actions prises permettront de mettre fin à la violence contre les syndicats. Les efforts déployés au sein de la commission ne doivent pas être utilisés pour saper le développement économique et les investissements du pays; le dialogue doit aboutir à l’adoption des modifications législatives pertinentes.

Les membres travailleurs ont apprécié les commentaires et encouragements formulés par les différents intervenants envers les travailleurs du Guatemala. Toutes les réformes législatives recommandées par les différentes missions de l’OIT, la commission d’experts et la Commission de la Conférence devraient être engagées avec une assistance attentive du Bureau et devraient avoir comme objectif principal la mise en conformité de la pratique avec les conventions nos 87 et 98 et de garantir aux travailleurs de pouvoir constituer des syndicats en toute liberté, sans menace ni pression et dans un climat exempt de peur. Le gouvernement devrait également engager des réformes supplémentaires concernant les points suivants: 1) l’augmentation significative des budgets alloués au ministère public, à la Cour suprême de justice, à la police et à l’inspection du travail, de sorte à rendre l’action du pouvoir judiciaire plus rapide, efficace et indépendante; 2) la mise en oeuvre d’une réforme fiscale pour garantir un Etat de droit et renforcer les institutions responsables du respect des droits de l’homme et des droits syndicaux; 3) la réintégration effective de tous les travailleurs licenciés dans leurs postes de travail dans la mesure où ils ont gagné leur procès; et 4) la garantie de la fin de l’impunité afin que les auteurs, les instigateurs et les complices de délits commis à l’encontre des défenseurs des droits syndicaux soient arrêtés, jugés et condamnés. Cela impliquera que les actes commis à l’encontre de syndicalistes ne soient plus systématiquement disqualifiés en délits de droit commun. Prenant bonne note des bonnes dispositions exprimées par le gouvernement pour mettre en place un dialogue constructif et participatif, les membres travailleurs ont insisté sur le fait que tous les syndicats du Guatemala devraient être invités, notamment la CUSG, la CGTG et l’UNSITRAGUA, et que la convocation devrait être publique. Les membres travailleurs ont indiqué s’attendre à ce que le prochain rapport de la commission d’experts fasse état de progrès réels concernant les différents points mentionnés. Cela implique que le gouvernement engage rapidement les réformes attendues avec les institutions concernées et en particulier en consultation avec les organisations de travailleurs. Entre-temps, les conclusions de la Commission de la Conférence sur ce cas devraient figurer dans un paragraphe spécial de son rapport.

Les membres employeurs ont soutenu la proposition des membres travailleurs d’inclure les conclusions de ce cas dans un paragraphe spécial du rapport de la commission.

Conclusions

La commission a pris note des déclarations du représentant gouvernemental et d’une magistrate de la Cour suprême de justice ainsi que du débat qui a suivi. Elle a également pris note des nombreux cas examinés par le Comité de la liberté syndicale et du fait qu’une mission de haut niveau s’est rendue au Guatemala du 9 au 13 mai 2011.

La commission a noté que la commission d’experts continue à exprimer sa préoccupation concernant les questions suivantes: actes de violence nombreux et graves, y compris des assassinats et des menaces visant des syndicalistes, des dispositions législatives ou pratiques incompatibles avec les droits reconnus par la convention et les problèmes liés à la composition de la Commission tripartite des affaires internationales. La commission a observé que la commission d’experts prend également note de la lenteur et de l’inefficacité des procédures pénales relatives aux actes de violence, des délais excessifs des procédures judiciaires et du manque d’indépendance du pouvoir judiciaire, ce qui entraîne une situation d’impunité grave et quasi totale.

La commission a pris note de l’indication du représentant gouvernemental selon laquelle son gouvernement ne fait preuve d’aucune tolérance et qu’il n’encourage personne à proférer des menaces ou à attenter à la vie ou à l’intégrité physique d’aucun Guatémaltèque et qu’il s’acquitte de son obligation d’enquêter sur les faits de violence, et que l’accord no 49-2011 du 20 mai 2011 a créé une Unité spéciale du ministère public pour les délits commis contre les syndicalistes. Le représentant gouvernemental a déclaré que la Cour constitutionnelle a amendé l’accord no 4-89 de telle sorte que la procédure des recours constitutionnels en matière de protection des droits ne constitue pas un obstacle au déroulement des procédures ordinaires. Le représentant gouvernemental a ajouté que la Commission interinstitutionnelle de travail pour les relations professionnelles a analysé la problématique en matière de travail et que les efforts entrepris se sont concrétisés par une feuille de route assortie d’un calendrier et par des actions concrètes du gouvernement pour renforcer l’application et l’exécution de la législation du travail. Par ordonnance gouvernementale, a été désignée une commission présidentielle pour étudier les réformes de la législation du travail nécessaires à la mise en oeuvre des obligations découlant des conventions de l’OIT que le Guatemala a ratifiées. Le représentant gouvernemental a souligné que l’appel à candidatures pour les postes de représentants des groupes des employeurs et des travailleurs à la Commission tripartite des affaires internationales, qui a vu le jour à la fin de l’année 2010, a été publié dans un quotidien de grande diffusion afin que puissent participer toutes les organisations qui le souhaitaient. Le représentant gouvernemental a indiqué que, pour que l’Inspection générale du travail puisse exercer ses fonctions sans que l’accès aux centres de travail puisse être entravé d’aucune manière, le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale a institué, par l’ordonnance ministérielle no 42-2011, une procédure pour les cas de résistance à l’intervention des inspecteurs du travail. Il a aussi indiqué que le nombre des syndicats enregistrés est en augmentation. Enfin, la magistrate de la Cour suprême de justice a fourni de nombreuses informations sur les dispositions prises pour accélérer les procédures pénales et relatives au droit du travail ainsi que sur d’autres mesures de restructuration du système judiciaire.

La commission a noté qu’il s’agit d’un cas important discuté depuis de nombreuses années et que le gouvernement a bénéficié de nombreuses missions d’assistance technique sur les différentes questions en instance. Elle a noté avec une vive préoccupation la situation de violence persistante régnant dans le pays ainsi qu’un niveau d’impunité croissant. La commission a observé également avec une vive préoccupation que le climat de violence est généralisé, ses victimes étant des syndicalistes, des chefs d’entreprise (28 assassinats en 2010 selon des sources citées par le groupe des employeurs) et d’autres catégories de personnes, et que le chiffre de 53 dirigeants syndicaux et syndicalistes assassinés ces dernières années montre que ce groupe est particulièrement exposé.

La commission a rappelé qu’il importe de garantir de toute urgence que les organisations de travailleurs et d’employeurs et leurs représentants puissent mener leurs activités dans un climat exempt de peur, de menaces et de violence, et aussi de distinguer, parmi les cas de violence, ceux qui visent en particulier des personnes en raison de leur qualité de représentants. La commission a considéré qu’il est important, pour l’investissement et la croissance économique, d’améliorer le climat, ce qui aurait aussi une incidence positive sur la lutte contre l’impunité.

La commission a souligné la nécessité de prendre sans délai toutes les mesures nécessaires afin de mener à terme les enquêtes et d’identifier les responsables des actes de violence commis à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, de les juger et de les sanctionner conformément à la loi. La commission s’est félicitée de la récente création de l’Unité spéciale du ministère public pour les délits commis contre les syndicalistes. Elle a exprimé l’espoir qu’elle disposera des ressources nécessaires pour mener à bien les enquêtes et que, comme il a été promis à la dernière mission qui s’est rendue au Guatemala, la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG) collaborera avec le ministère public à l’enquête et l’élucidation des 53 cas d’assassinats de dirigeants syndicaux et de syndicalistes. Tout en prenant note des indications du gouvernement à propos de la réforme du système judiciaire et des mesures prises pour améliorer son fonctionnement, la commission a souligné que d’autres mesures s’imposent pour renforcer le pouvoir judiciaire, la police et les services de l’inspection du travail et les doter de moyens humains et budgétaires plus importants. La commission a insisté sur la nécessité d’une réforme qui permettrait de renforcer l’état de droit ainsi que les institutions judiciaires et leur indépendance.

La commission a rappelé le lien intrinsèque existant entre la liberté syndicale, la démocratie et le respect des libertés civiles, et en particulier le droit à la sécurité de la personne comme condition préalable au respect de la convention.

La commission a noté avec regret que, en dépit d’une assistance technique spécifique du BIT, elle n’a pas constaté de progrès significatif s’agissant des réformes législatives demandées par la commission d’experts depuis de nombreuses années. Elle a formulé l’espoir que, dans un très proche avenir, le gouvernement sera en mesure de faire état de progrès concrets en la matière. La commission a prié le gouvernement de prendre des mesures afin de renforcer le dialogue social et, conformément aux conclusions de la mission de haut niveau, de veiller à ce que les confédérations syndicales représentatives mentionnées fassent partie de la Commission tripartite nationale.

La commission a exprimé sa vive préoccupation devant la situation et a pris note de l’absence de volonté politique claire et effective de la part du gouvernement. Elle a estimé que toutes les mesures doivent être prises d’urgence, et en concertation tripartite, pour s’attaquer à tous les problèmes de violence et d’impunité. Ceci doit se faire en totale coordination avec les instances de l’Etat concernées. L’assistance technique du BIT doit se poursuivre pour permettre au gouvernement de régler tous les problèmes législatifs en suspens afin d’assurer une entière conformité avec les dispositions de la convention.

La commission a insisté sur la nécessité de faire appliquer efficacement et sans délai les décisions de justice ordonnant la réintégration des syndicalistes licenciés.

La commission a demandé au gouvernement de communiquer cette année à la commission d’experts un rapport détaillé contenant, pour tous les points mentionnés, des informations qui permettront une évaluation complète de la situation et elle a exprimé le ferme espoir d’être en mesure, l’année prochaine, de prendre note d’améliorations substantielles dans l’application de la convention.

La commission a décidé d’inclure ses conclusions dans un paragraphe spécial de son rapport.

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