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Observation (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Thaïlande (Ratification: 1969)
Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930 - Thaïlande (Ratification: 2018)

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Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. Traite des personnes. 1. Contrôle de l’application de la loi. Dans ses commentaires précédents, la commission a pris note des commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) (devenue entre-temps la Confédération syndicale internationale (CSI)) relatifs à la persistance de pratiques de traite des personnes en provenance et à destination de la Thaïlande. Par la suite, la commission a pris note de l’adoption en 2008 de la loi contre la traite des personnes B.E. 2551 ainsi que d’informations détaillées fournies par le gouvernement, qui témoignaient du déploiement d’importants efforts pour lutter contre la traite. Elle a également pris note des observations du Congrès national du travail de Thaïlande (NCTL) selon lesquelles les statistiques montraient que le nombre des cas d’arrestations et de poursuites engagées dans le cadre d’affaires de traite restait faible, comparé au nombre des délinquants.
La commission note que le gouvernement répond que ceci résulte du fait que ces arrestations et ces poursuites concernent en général plus d’un suspect, dans la mesure où la traite des personnes est en général le fait du crime organisé ou de bandes criminelles. Le gouvernement déclare également que l’application de la loi contre la traite des personnes nécessite le concours de plusieurs organes publics, groupes spécialisés et ONG. Les difficultés rencontrées par les autorités compétentes dans l’application de la loi résultent notamment des demandes faites par les victimes à être rapatriées immédiatement et du manque d’interprètes expérimentés permettant de surmonter l’obstacle de la langue au stade de l’enquête et de l’instruction. Afin de renforcer les mécanismes d’application de la loi, la Police royale thaïe a mis en place une stratégie de prévention et de lutte contre la traite des personnes et pris certaines dispositions devant assurer une plus grande efficacité dans les enquêtes. Il s’agit notamment d’une collaboration plus étroite entre les organes de la force publique et le parquet et d’une vigilance accrue à l’égard de certains secteurs, comme les petites et moyennes entreprises, les pubs de karaoké et les maisons closes. La commission note que le nombre des arrestations dans les affaires de traite aux fins de prostitution a été de 162, le nombre des arrestations pour des faits de traite à des fins de travail forcé ou de services sous la contrainte a été de 25 et celui des arrestations pour des faits de traite à des fins d’esclavage a été de deux au cours de la période 2010-2012. Prenant dûment note des informations détaillées concernant les arrestations, la commission relève qu’aucune information n’est fournie en ce qui concerne le nombre de condamnations et de sanctions imposées dans ce contexte. Elle note cependant la copie des neuf décisions de justice prononcées sur la base de la loi sur la traite des personnes qui ont été jointes au rapport du gouvernement. Ces décisions concernent des poursuites engagées à l’égard de 18 personnes, qui ont abouti à 17 condamnations et un acquittement, et à l’imposition de peines d’emprisonnement (qui varient de deux à dix ans) à 15 condamnés et de peines d’amende dans deux de ces cas. La commission encourage vivement le gouvernement à poursuivre ses efforts de prévention, répression et lutte contre la traite des personnes et à continuer de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard, notamment les mesures prises pour qu’une formation appropriée soit dispensée aux fonctionnaires chargés d’assurer l’application de la loi, de la surveillance des frontières et de l’appareil judiciaire. Elle prie également le gouvernement de continuer à fournir des informations sur l’application dans la pratique de la loi contre la traite des personnes, notamment sur le nombre des arrestations, des poursuites engagées ainsi que des condamnations et des sanctions prononcées. Elle le prie enfin de continuer de communiquer copie de toute décision des juridictions compétentes ayant trait à l’application de la loi.
2. Protection et réinsertion des victimes de la traite. La commission a noté que la loi sur la traite des personnes comporte des dispositions concernant la protection des victimes. Le gouvernement a indiqué que l’action de l’inspection du travail et les initiatives de protection des travailleurs axées sur la protection des victimes de la traite, leur réadaptation et leur réinsertion sociale passent notamment par une coordination entre les organes publics compétents, des ONG, des organisations internationales et des ambassades de la Thaïlande à l’étranger. Des programmes de rapatriement visant à mettre en place des procédures efficaces et sûres dans ce domaine ont été convenus avec le Cambodge, la République démocratique populaire lao, le Myanmar et la province chinoise du Yunnan.
Le gouvernement déclare dans son rapport que des services de traduction sont assurés par des centres d’intervention d’urgence dans les provinces accueillant un grand nombre de travailleurs migrants. Une formation supplémentaire est également assurée au personnel assurant une éducation sur le terrain, y compris par le canal d’organismes chargés du soutien, de la réinsertion et du rapatriement des victimes, de manière à garantir une coopération intégrée entre tous les organismes concernés. S’agissant des difficultés rencontrées dans l’application de la convention, le gouvernement se réfère aux ressources limitées pour garantir une assistance aux travailleurs migrants au cours des phases d’enquêtes et de poursuites. Le gouvernement déclare également que le Centre de répression du travail clandestin mènera une enquête approfondie sur les travailleurs migrants en situation irrégulière interpellés, de manière à déterminer si ces personnes sont victimes de traite, et, le cas échéant, ces personnes ne seront pas poursuivies. Il indique cependant que, depuis l’entrée en fonction de ce centre, il n’a pas été découvert de situations dans lesquelles des personnes auraient été victimes de traite à des fins d’exploitation au travail. La commission prie le gouvernement de prendre des mesures pour renforcer les mécanismes permettant d’identifier les victimes de traite, et de continuer de fournir des informations sur toute difficulté rencontrée à cet égard. Elle prie également le gouvernement d’intensifier les efforts déployés pour assurer la protection et l’assistance, y compris sur le plan juridique, des victimes de la traite, et de fournir des informations sur le nombre de personnes qui auront ainsi bénéficié de tels services.
Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25. Vulnérabilité des travailleurs migrants à l’imposition de travail forcé. Dans ses commentaires précédents, la commission a pris note des préoccupations exprimées dans le supplément au rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies du 7 mai 2011 sur les droits de l’homme des migrants (A/HRC/17/33/Add.1) concernant les violations des droits de l’homme des travailleurs migrants en Thaïlande et, en particulier, les effets négatifs de la procédure d’enregistrement des travailleurs migrants auprès de l’organisme de vérification nationale. Selon ce rapport, 1 million de travailleurs migrants non enregistrés n’étaient pas admis à bénéficier de la procédure d’enregistrement auprès de cet organisme de vérification nationale et étaient considérés comme des migrants en situation irrégulière. Ces travailleurs migrants non enregistrés pouvaient se faire extorquer des sommes allant de 200 à 8 000 baht (THB), voire plus, par la police en échange de leur remise en liberté, lorsqu’ils étaient arrêtés. Le Rapporteur spécial s’est déclaré particulièrement préoccupé par les pratiques d’arrestations arbitraires de migrants et les faits associés de violence et d’exploitation. Ce phénomène a été exacerbé par l’ordonnance du Premier ministre du 2 juin 2010 portant création d’un centre spécial chargé d’arrêter et poursuivre les travailleurs étrangers clandestins, et par le nombre croissant des affaires d’abus systématique commis par des représentants de la loi, «notamment la “revente” de migrants en situation irrégulière à divers intermédiaires se chargeant de les réintroduire moyennant finances sur leurs chantiers ou encore de les “revendre” à divers employeurs des secteurs de la pêche et des activités domestiques». La commission a également pris note du rapport de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), daté du 14 janvier 2011, sur la traite des travailleurs utilisés comme pêcheurs en Thaïlande, rapport décrivant le processus de recrutement de travailleurs migrants dans la pêche, secteur resté largement informel, où ces pratiques conduisent fréquemment à des abus. De nombreux pêcheurs sont ainsi «vendus» à des propriétaires de bateaux de pêche par des intermédiaires et sont contraints de travailler sans percevoir de salaire pendant de longues périodes pour rembourser leurs dettes, ne pouvant se soustraire à leur situation du fait que les navires restent en mer pendant de longues périodes. Toujours selon ce rapport, les travailleurs migrants du secteur de la pêche, qui n’ont souvent aucuns papiers et ne sont pas enregistrés, sont souvent gardés à bord des navires indéfiniment, où ils sont maintenus de force et transférés d’un navire de pêche à l’autre sous la menace d’être dénoncés aux autorités de l’immigration. La commission a également noté les commentaires du NCTL déplorant l’absence de participation des organisations d’employeurs et de travailleurs dans la mise en œuvre de la convention dans le pays.
La commission note que le gouvernement déclare que les organisations d’employeurs et de travailleurs ont participé à des activités concernant l’application de la convention, notamment par l’intermédiaire du groupe de travail sur la résolution concernant le travail des enfants et le travail forcé dans la production de crevettes et dans l’agriculture. Le gouvernement indique que des mesures ont été prises pour assurer la protection des droits au travail des travailleurs migrants, notamment de ceux qui sont employés dans le secteur de la pêche, en particulier avec les préparatifs de la révision de la réglementation ministérielle no 10 B.E. 2541 adoptée en application de la loi sur la protection des travailleurs. Le gouvernement déclare s’être employé sans relâche à mettre en place, en suivant une démarche systématique, des solutions au problème des travailleurs migrants venant clandestinement du Myanmar, de la République démocratique populaire lao et du Cambodge, et pour éviter que ces travailleurs migrants ne se retrouvent victimes de pratiques de traite à des fins d’exploitation, notamment en concluant avec les pays concernés certains protocoles d’accords. Il indique qu’il effectue des visites d’inspection dans certains secteurs comme les petites et moyennes entreprises, ainsi que dans les entreprises qui omettent de communiquer à l’autorité compétente un rapport sur l’emploi et les conditions de travail et, enfin, dans les entreprises qui emploient couramment des travailleurs migrants, comme la pêche et les activités apparentées. Ces inspections sont menées avec le concours de diverses institutions, comme la marine royale thaïe, la police maritime, le Département des affaires maritimes et des ONG. C’est ainsi que 5 400 visites d’inspection axées sur la protection des travailleurs migrants ont été effectuées, concernant 408 000 travailleurs et se traduisant par la constatation de 117 cas d’infractions à la loi sur la protection des travailleurs. Le gouvernement fait état de l’adoption par le Premier ministre de l’ordonnance no 68/2555 du 13 mars 2012 sur le Centre de répression du travail clandestin, organisme qui a pour vocation de gérer la réponse des pouvoirs publics au problème du travail clandestin et de la traite de main-d’œuvre. Le centre fonctionne avec la participation des ministères de l’Intérieur, de la Justice et de la Défense, ainsi que de la Police royale thaïe, dans l’investigation de l’emploi de migrants clandestins. Le gouvernement indique avoir pris certaines mesures tendant à la régularisation de la situation de travailleurs migrants, mesures aux termes desquelles ces travailleurs peuvent s’enregistrer auprès des autorités concernées, obtenir un numéro d’identification et résider et travailler temporairement en Thaïlande en attendant leur rapatriement. Il indique en outre qu’il a mis en œuvre, en 2012, des mesures de lutte contre la traite à des fins d’exploitation au travail, notamment en diffusant de l’information dans des langues comprises des travailleurs migrants, en diligentant des inspections dans l’industrie de la pêche et en organisant des réunions avec les employeurs et les travailleurs, avec la coopération du BIT, dans le cadre du Plan d’action tripartite pour la protection des migrants contre l’exploitation au travail.
La commission note que, dans ses observations finales du 15 novembre 2012, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale s’est déclaré préoccupé par les abus et les pratiques d’exploitation dont sont victimes les travailleurs migrants, notamment ceux qui sont en situation irrégulière (CERD/C/THA/CO/1, paragr. 22). La commission rappelle qu’il est indispensable de prendre des mesures effectives afin de garantir que le système d’emploi des travailleurs migrants ne mette pas ces travailleurs dans une situation de vulnérabilité accrue, notamment lorsqu’ils sont victimes de pratiques abusives de la part de l’employeur, comme le non-paiement des salaires, la privation de liberté et les mauvais traitements, y compris les abus sexuels. De telles pratiques peuvent en effet transformer leur emploi en des situations qui relèvent du travail forcé. En particulier, le caractère itinérant du travail dans la pêche, caractérisé par de longues périodes passées en haute mer, rend plus difficile l’identification de conditions de travail relevant du travail forcé dont peuvent être victimes les travailleurs migrants employés dans ce secteur. Par conséquent, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les travailleurs migrants, notamment ceux qui travaillent dans l’industrie de la pêche, jouissent d’une protection pleine et entière contre les pratiques abusives et autres conditions qui relèvent du travail forcé. Elle prie également le gouvernement de renforcer davantage les organes chargés du contrôle de l’application de la loi, notamment par des mesures propres à une application stricte des lois contre la traite des personnes à l’égard de ceux qui exploitent les pêcheurs migrants et aussi par l’application de sanctions suffisamment efficaces à l’égard de ceux qui auront soumis des travailleurs à des conditions relevant du travail forcé. En outre, la commission prie le gouvernement de continuer de fournir dans son prochain rapport des informations sur les mesures spécialement conçues pour apporter des réponses aux situations difficiles dans lesquelles les travailleurs migrants peuvent se trouver, y compris par la prévention et la répression des abus commis contre ces travailleurs.
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