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Observation (CEACR) - adoptée 2015, publiée 105ème session CIT (2016)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Fidji (Ratification: 2002)

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La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 1er septembre 2015. Elle prend également note des observations de caractère général de l’Organisation internationale des employeurs (OIE), reçues le 1er septembre 2015.
Plainte présentée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT pour non-respect de la convention. La commission rappelle qu’une plainte alléguant l’inexécution de la convention par les Fidji avait été déposée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT par plusieurs délégués travailleurs à la session de 2013 de la Conférence internationale du Travail, que cette plainte avait été déclarée recevable et qu’elle est toujours en instance devant le Conseil d’administration. La commission prend note de l’accord tripartite signé le 25 mars 2015 par le gouvernement, le Congrès des syndicats des Fidji (FTUC) et la Fédération du commerce et des employeurs des Fidji (FCEF) entérinant la révision de la législation du travail, y compris de la Promulgation sur les relations d’emploi (ERP) devant être menée par le Conseil consultatif tripartite des relations d’emploi (ERAB) en vue d’en assurer la conformité aux conventions fondamentales de l’OIT. Elle note que le Conseil d’administration a regretté l’omission persistante du gouvernement de le saisir d’un rapport conjoint sur la mise en œuvre, conformément à l’accord tripartite signé par le gouvernement de la République des Fidji, le FTUC et la FCEF le 25 mars 2015, comme demandé par le Conseil d’administration à sa 324e session (juin 2015), et elle a appelé le gouvernement des Fidji à accepter une mission tripartite pour examiner les obstacles empêchant la soumission d’un rapport conjoint sur la mise en œuvre et examiner toutes les questions évoquées dans la plainte au titre de l’article 26 susmentionnée. La commission croit comprendre que la mission tripartite aura lieu dans un proche avenir et veut croire qu’il sera donné à cette mission d’aider le gouvernement et les partenaires sociaux à trouver des solutions aux questions en suspens concernant l’application de la convention.
Droits syndicaux et libertés publiques. La commission avait noté avec intérêt que le nouveau commissaire de police avait relancé l’enquête ouverte sur l’agression du dirigeant syndical Felix Anthony, dont il avait été question dans les commentaires précédents. La commission avait espéré que M. Anthony coopérerait de toutes les manières qu’il pourrait à cette enquête et priant le gouvernement de fournir des informations sur tous faits nouveaux à cet égard. La commission note que le gouvernement indique que le dossier d’enquête pertinent a été établi par la police fidjienne puis transmis à l’office du directeur des poursuites le 25 février 2015 pour avis sur suite à donner, et que M. Anthony n’a pas fait de déclaration formelle exprimant sa volonté de poursuivre son action et de communiquer les rapports médicaux attendus.
La commission rappelle en outre qu’elle avait également évoqué les affaires concernant M. Daniel Urai, président du FTUC, et M. Goundar, contre lesquels étaient retenues des charges pénales. La commission avait exprimé l’espoir que toutes les charges retenues contre M. Urai, à raison de l’exercice par l’intéressé d’une activité syndicale, seraient immédiatement abandonnées, et elle avait prié le gouvernement d’indiquer si des charges étaient encore retenues à l’encontre de M. Goundar. La commission croit comprendre et note avec satisfaction que les charges de sédition retenues contre M. Urai et une autre personne, quatre ans auparavant, ont été abandonnées par la Magistrate’s Court (juridiction de première instance) de Suva, sur une décision de non-lieu émanant du directeur des poursuites publiques, et que l’abandon des charges entraîne la restitution du passeport à l’intéressé ainsi que la levée de son interdiction de voyager. Notant que le gouvernement indique M. Urai doit comparaître dans une deuxième affaire pour rassemblement illégal, en infraction des dispositions du Règlement d’urgence sur l’ordre public (PER), la commission exprime le ferme espoir que le reste des charges retenues contre M. Urai, à raison de l’exercice par l’intéressé de son activité syndicale, sera également abandonné sans délai, et elle prie le gouvernement d’indiquer à nouveau si d’autres charges pèsent encore contre M. Goundar.
Questions d’ordre législatif. Loi (modificative) de 2015 sur les relations d’emploi. La commission note que, d’après le rapport du gouvernement ainsi que le rapport sur la mise en œuvre soumis par le gouvernement des Fidji le 15 octobre 2015: i) l’ERAB a tenu trois réunions en mai 2015, lors desquelles il a appuyé l’abrogation du décret de 2011 sur les industries nationales essentielles (ENID) puis discuté du projet de loi (modificative) sur les relations d’emploi élaboré par le gouvernement; ii) l’ERAB ayant fait connaître ses points de désaccord, le gouvernement a proposé de transmettre le projet de loi au ministre; et iii) le projet de loi sera déposé devant le Parlement le 22 mai 2015; la commission permanente du Parlement a entendu les soumissions de toutes les parties prenantes et le projet de loi a été approuvé par le Parlement et promulgué le 14 juillet 2015 en tant que loi (modificative) no 10 de 2015 sur les relations d’emploi.
La commission note avec satisfaction que les questions détaillées ci-après, qui avaient été soulevées antérieurement, ont été résolues à travers l’adoption de la loi (modificative) de 2015 sur les relations d’emploi: la possibilité, pour les travailleurs exerçant plus d’une activité professionnelle, d’appartenir à plus d’un syndicat du même secteur d’activité, de la même branche ou de la même profession alors que cela ne concerne pas le même employeur (art. 119(2) tel que modifié); le pouvoir du greffier d’inspecter à tout moment la comptabilité des organisations a été limitée au cas où 10 pour cent des membres votants en expriment la demande (art. 128(2)); la suppression des peines d’emprisonnement prévues contre ceux qui organisent une grève illégale (art. 250 et 256(a)). Cependant, rappelant que des sanctions pénales ne devraient être imposées pour la participation à des grèves pacifiques, la commission demande la modification des articles 250 et 256(a) afin de supprimer la peine d’amende pour une telle participation.
La commission note en outre que l’article 191BW de l’ERP, dans sa teneur modifiée de 2015, dispose que l’ENID est abrogé sauf pour ce qui concerne la partie nouvelle 19 de l’ERP. Tout en prenant note avec intérêt de l’abrogation de l’ENID, la commission note avec une profonde préoccupation que les modifications apportées à l’ERP reprennent un certain nombre des éléments de l’ENID à propos desquels elle avait exprimé ses préoccupations et qui sont traités ci-après.
Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et de s’affilier à de telles organisations. La commission note que la nouvelle partie 19 de l’ERP fixe les modalités de la présence des travailleurs dans tous les services et industries désignés comme essentiels. Les parties 1 à 12, 14 à 16, 18, 21 et 22 de l’ERP ne s’appliquent aux services et industries essentiels que dans la mesure où cela n’entre pas en conflit avec la partie 19. La commission note avec préoccupation que, aux termes de l’article 185 de l’ERP dans sa teneur modifiée, la liste des industries considérées comme services essentiels inclut désormais les services énumérés à l’annexe 7 de l’ERP (services de sauvetage aériens ou maritimes; services de régulation du trafic aérien; services de télécommunications de l’aviation civile; services de l’électricité; services d’urgence en situation de catastrophe naturelle; services de lutte contre l’incendie; services de santé; services hospitaliers; services des phares; services météorologiques; services d’épuisement des eaux, de ventilation et d’aérage des mines; services sanitaires; approvisionnement et distribution de combustibles, hydrocarbures, lubrifiants et courant électrique essentiels au maintien des services énumérés dans l’annexe 7; télécommunications; services de transport nécessaires au fonctionnement de tout service énuméré dans l’annexe 7; et services des eaux), les industries nationales essentielles au sens de l’ENID (industrie financière, industrie des télécommunications, industrie de l’aviation civile et industrie des infrastructures publiques) et les entreprises correspondantes désignées en application de l’ENID, de même que le gouvernement, les autorités réglementaires, les autorités locales et les entreprises commerciales publiques (selon le FTUC, ce dernier article classe l’industrie sucrière et l’industrie de la pêche parmi les services essentiels). Cette liste étendue, tel qu’indiqué par le gouvernement, concerne les lieux de travail où les travailleurs peuvent choisir des formes de représentation autres que les syndicats.
La nouvelle définition applicable à la partie 19 du terme «syndicat» (art. 185) vise un syndicat de travailleurs, enregistré conformément à l’ERP, qui inclura une unité de négociation, formée ou enregistrée conformément à l’ENID ou à la partie 19. L’article 189(1) dispose qu’une unité de négociation, constituée en application de l’ENID ou sur la décision exprimée par un vote secret de 25 pour cent des travailleurs employés par le même employeur du service essentiel (art. 189(4)), sera réputé syndicat aux fins de la partie 19 et sera habilité à négocier collectivement pour les travailleurs faisant partie de l’unité de négociation et à saisir la cour d’arbitrage au nom de ces travailleurs. Conformément à l’article 189(3), une unité de négociation aura le droit d’être enregistré comme syndicat au regard de l’ERP et, dès cet enregistrement, pourra prétendre à tous les droits et assumera toutes les responsabilités qui échoient à un syndicat conformément à l’ERP. L’article 190 dispose que tous les travailleurs d’un service essentiel auront le droit de constituer un syndicat ou une unité de négociation et de s’y affilier et auront le droit de s’engager dans une négociation collective et de saisir de leurs différends la cour d’arbitrage, conformément à la partie 19. Aux termes de l’article 189(2), si une majorité des travailleurs d’une unité de négociation constituée en application de l’ENID décide par vote secret de s’affilier à un syndicat constitué en application de l’ERP, l’unité de négociation cessera alors d’exister et les travailleurs seront, aux fins de la partie 19, représentés par ce syndicat.
La commission note qu’il existe une utilisation duelle du terme «syndicat» dans les dispositions susvisées: d’une part, le terme est employé au sens traditionnel d’organisation de travailleurs enregistrée conformément à la partie 14 de l’ERP et, d’autre part, le terme est employé pour des unités de négociation dont les membres dirigeants ne peuvent être que ceux qui travaillent dans ladite unité de négociation et dont les procédures d’enregistrement, conformément à la partie 14, ainsi que les règles relatives à la constitution, au règlement, à l’élection du bureau, aux assemblées générales, etc., ne sont pas claires. La création d’une unité de négociation ne semble nécessiter, au regard de l’ERP, que la tenue d’un scrutin par lequel 25 pour cent des travailleurs s’expriment favorablement. La commission rappelle que, selon le rapport de la mission de contacts directs de l’OIT de 2014:
De nombreux témoins ont exprimé leur profonde préoccupation quant aux répercussions de l’ENID sur le mouvement syndical dans le pays et sur la capacité des travailleurs d’exercer leurs droits syndicaux. De fait, au-delà des modifications législatives particulières déjà exigées par les organes de contrôle, les informations recueillies par la mission auprès de tous les intéressés, y compris les entreprises visées par le décret et leurs unités de négociation respectives, lui ont permis de comprendre que le décret entrave le fonctionnement normal des syndicats. … La révocation de l’enregistrement des syndicats et l’abrogation des conventions collectives ne se sont pas accompagnées de la constitution de syndicats d’entreprise mais ont plutôt donné lieu à la création d’unités de négociation, dont les représentants sont contraints de créer de nouvelles structures juridiques afin de pouvoir recueillir les cotisations. Même si – comme certains intervenants l’ont affirmé – les représentants des salariés de l’unité de négociation peuvent consulter un syndicat externe à l’entreprise, ils restent isolés pour négocier avec les représentants de la direction, qui fait parfois appel à des avocats beaucoup mieux formés à ce type d’exercice, entraînant ainsi un sérieux déséquilibre entre les parties, sans même mentionner les représailles dont les agents négociateurs des employés craignent d’être victimes, telles que des licenciements.
La commission observe que, dans le cas d’une longue liste d’industries et services essentiels, l’ERP dans sa teneur modifiée donne la préférence, exactement comme l’ENID, à la formation d’une représentation des travailleurs dans des structures autres que des syndicats, en autorisant la création d’«unités de négociation» par seulement 25 pour cent des travailleurs. Une telle représentation sera donc instaurée comme seule et unique représentation sur le lieu de travail à moins que les travailleurs, par un vote majoritaire (50 pour cent plus un), forment un syndicat. Dans ces circonstances, la commission ne peut que conclure que les amendements se traduisant par la reproduction de la conception de la représentation des travailleurs incarnés par l’ENID dans l’ERP perpétuent l’atteinte au droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et perpétueront vraisemblablement l’impact négatif de l’ENID sur le mouvement syndical qui avait été observé par la mission de contacts directs. La commission en appelle au gouvernement pour qu’il revoie les articles 185 et 189(1) et (3) de l’ERP en consultation avec les organisations représentatives des travailleurs et des employeurs au niveau national en vue de leur modification, de manière à garantir que les organisations de travailleurs ne soient pas affaiblies.
A cet égard, la commission rappelle que, si un nombre minimum de membres est imposé pour constituer une organisation de travailleurs ou d’employeurs, ce seuil devrait être fixé à un niveau raisonnable, de manière à ne pas entraver la constitution d’organisation. Et, au surplus, cela ne devrait pas empêcher, dans la pratique, la constitution de plus d’un syndicat dans une entreprise. Dans son étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragraphes 89 et 90, la commission a rappelé qu’imposer un minimum de 40 travailleurs simplement pour pouvoir constituer une organisation était excessif et elle a aussi critiqué l’instauration d’un seuil de 30 pour cent. Afin de permettre le pluralisme syndical et de garantir que l’exigence d’un nombre minimum ne restreint pas indûment le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et celui de s’affilier à de telles organisations, la commission est conduite à conclure qu’une disposition imposant dans des services présentés comme essentiels un minimum de 50 pour cent des travailleurs constitue une atteinte à l’article 2 de la convention, et elle prie instamment le gouvernement de prendre les mesures propres à modifier l’article 189(2) sans délai.
S’agissant de la notion de «syndicat» dans la partie 19, la commission souligne que certains droits traditionnellement considérés comme des droits syndicaux doivent également être reconnus aux représentants du personnel (par exemple la protection contre la discrimination antisyndicale) ou doivent pouvoir être exercés par ceux-ci lorsqu’il n’existe pas de syndicat. La commission considère que le droit de siéger dans des organes tripartites nationaux ainsi que le droit de désigner des délégués dans les instances internationales doivent rester la prérogative des organisations de travailleurs et d’employeurs au sens de la convention. A cet égard, elle observe que le gouvernement a nommé, en octobre 2015, 18 nouveaux membres à l’ERAB, qu’au moins six des nouveaux membres travailleurs étaient des représentants d’unités de négociation et que la CSI, dénonçant l’extension de l’ERAB, qui inclut désormais de nombreux participants n’ayant aucun statut, a fait savoir qu’elle ne pouvait pas être partie aux réunions de l’ERAB. La commission observe que des problèmes similaires risquent de se poser par suite de la nomination d’une liste de travailleurs à partir de laquelle la composition de la cour d’arbitrage pourrait être établie. La commission prie instamment le gouvernement de veiller à ce que les membres travailleurs et employeurs devant siéger dans ces instances soient désignés par les organisations représentatives des travailleurs et des employeurs au niveau national.
En outre, la commission note que le FTUC dénonce le fait qu’il n’a pas été remédié à l’annulation de l’enregistrement de plusieurs syndicats ni à la rupture de procédures consécutives à l’introduction de l’ENID, et elle observe que ces points étaient au nombre des sujets de désaccord concernant le projet de loi (modificative) sur les relations d’emploi que l’ERAB a décidé d’enregistrer en vue de son examen à un stade ultérieur. Elle note également que le gouvernement indique dans le rapport sur la mise en œuvre que l’ERAB a accepté que les procédures engagées par des salariés devant le tribunal de l’emploi, qui avaient été suspendues par effet des dispositions de l’ENID, soient rouvertes devant ces tribunaux, pour jugement. Observant que les effets négatifs de l’ENID sur le mouvement syndical persistent et rappelant ses précédents commentaires concernant les articles 6 et 26 de l’ENID aujourd’hui abrogée (annulation de l’enregistrement de tous les syndicats existants dans des «industries nationales essentielles»; absence de voies de recours judiciaires), la commission prie instamment le gouvernement de: i) rétablir l’enregistrement des syndicats dont l’enregistrement avait été annulé par effet de l’article 6 de l’ENID; et ii) mettre en œuvre la recommandation de l’ERAB tendant à rouvrir l’instruction des procédures qui avaient été suspendues par l’effet de l’article 26 de l’ENID.
La commission observe par ailleurs que les problèmes suivants soulevés précédemment se posent encore, après l’adoption de la loi (modificative) de 2015 sur les relations d’emploi: l’interdiction faite aux gardiens de prison de se syndiquer (art. 3(2)); le pouvoir excessif et discrétionnaire conféré au greffier des syndicats de déterminer si un syndicat satisfait aux conditions d’enregistrement établies par l’ERP (art. 125(1)(a) tel que modifié); l’obligation faite aux dirigeants syndicaux d’être des salariés de la branche d’activité du secteur ou de la profession correspondante depuis au moins trois mois (art. 127(a) tel que modifié); l’interdiction faite aux étrangers de siéger dans les instances dirigeantes d’un syndicat (art. 127(d)); l’ingérence dans les règlements intérieurs des syndicats (art. 184); les pouvoirs excessifs conférés au greffier des syndicats d’inspecter à tout moment la comptabilité de ces organisations (art. 128(3)); les dispositions qui peuvent entraver les actions collectives (art. 175(3)(b) et 180); et l’arbitrage obligatoire (art. 169 et 170; art. 181(c) tel que modifié, et le nouvel article 191BS (anciennement 191(1)(c)). Se référant à ses précédents commentaires, la commission prie le gouvernement de revoir les dispositions susmentionnées de l’ERP en consultation avec les organisations représentatives de travailleurs et d’employeurs au niveau national en vue de leur modification, de manière à rendre la législation pleinement conforme à la convention.
Article 3. Droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme d’action. La commission prend note avec préoccupation des autres divergences également signalées par la CSI entre les dispositions de l’ERP dans sa teneur modifiée de 2015 et la convention, s’agissant: des dispositions de nature à entraver les actions collectives (art. 191BN); les peines d’emprisonnement sanctionnant l’organisation (illicite ou éventuellement licite) d’une grève pacifique dans des services qualifiés d’essentiels (art. 191BQ(1), 256(a), 179 et 191BM); les pouvoirs excessifs et discrétionnaires conférés au ministre en matière de désignation ou de démission des membres de la cour d’arbitrage et de désignation des médiateurs, situation qui remet en cause l’impartialité des organes de règlement des conflits (art. 191D, 191E, 191G et 191Y); l’arbitrage obligatoire dans les services qualifiés d’essentiels (art. 191Q, 191R, 191S, 191T et 191AA); etc. La commission note que, à la lumière de la liste étendue des services essentiels (mentionnée précédemment sous l’article 2), ces restrictions couvriraient de larges pans de l’économie. La commission observe que ces restrictions n’instaurent pas une complète prohibition des actions collectives. Tout en notant avec intérêt que l’ERAB a convenu de recommander aux ministres l’abaissement de 28 à 14 jours du délai de préavis de grève, la commission observe avec préoccupation que le système d’arbitrage obligatoire applicable aux services essentiels, conjugué aux lourdes peines (y compris d’emprisonnement) prévues, a pour effet d’empêcher ou d’étouffer toute action syndicale dans ces services. La commission prie le gouvernement de revoir les dispositions susvisées de l’ERP en consultation avec les organisations représentatives de travailleurs et d’employeurs au niveau national, en vue de les modifier de manière à rendre la législation pleinement conforme à la convention.
Fonction publique. S’agissant des décrets visant le secteur public privant les travailleurs des services publics de tout recours devant une juridiction administrative ou judiciaire et restreignant les droits qui leur sont reconnus par la convention, la commission note avec intérêt que l’article 191BW de l’ERP dans sa teneur modifiée de 2015 prévoit que le décret (modificatif) no 21 de 2011 sur les relations d’emploi et le décret (modificatif) no 36 de 2011 sur la fonction publique sont abrogés, ce qui, selon ce que la commission croit comprendre, réintègre les travailleurs du service public dans le champ de l’ERP. La commission observe toutefois que les services publics dans leur ensemble, y compris les entreprises publiques, sont désormais qualifiés de services essentiels et entrent dans le champ de la partie 19 de l’ERP, avec les restrictions qui s’ensuivent quant au droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et, à ce propos, elle renvoie aux commentaires ci-dessus.
Décret électoral. La commission avait noté précédemment que l’article 154 du décret électoral no 11 du 27 mars 2014 dans sa teneur modifiée dispose que l’office électoral sera responsable de l’organisation de toutes les élections de tous les syndicats enregistrés. A ce propos, elle avait exprimé le ferme espoir que toute supervision d’élections au sein d’organisations d’employeurs ou de travailleurs serait assurée par une instance indépendante. Elle note l’indication du gouvernement, selon laquelle l’office électoral organise, en liaison avec le greffier des syndicats, la tenue des élections syndicales, et que l’office électoral a mené des campagnes de sensibilisation sur la procédure électorale et a élaboré un guide électoral suivant les prescriptions internationales. La commission prie le gouvernement de communiquer un exemplaire dudit guide électoral.
Constitution de la République des Fidji de 2013. La commission rappelle avoir noté dans ses précédents commentaires avec une profonde préoccupation que les droits afférents à la liberté d’association inscrits dans la nouvelle Constitution (art. 19 et 20) font l’objet de dérogations et de limitations particulièrement étendues, aux fins de la réglementation des syndicats, des procédures de négociation collective et des «industries et services essentiels conformément aux intérêts généraux de l’économie fidjienne et des citoyens de Fidji», dérogations qui peuvent être invoquées pour amoindrir des principes fondamentaux. La commission observe que le gouvernement n’a pas répondu à ces questions. Compte tenu des observations précédentes de la CSI selon lesquelles de telles limitations pourraient être interprétées dans un sens autorisant des restrictions particulièrement étendues du droit syndical, la commission prie une fois de plus le gouvernement de donner des informations sur toute décision judiciaire donnant une interprétation desdites dispositions, voulant croire que celles-ci seront appliquées dans un sens conforme aux dispositions de la convention.
Décret sur les partis politiques. La commission rappelle avoir noté dans ses précédents commentaires que, aux termes de l’article 14 du décret de 2013 sur les partis politiques, il est interdit aux personnes exerçant des fonctions dans une organisation d’employeurs ou de travailleurs d’être membre ou d’exercer une fonction dans un parti politique ou d’avoir une activité politique, y compris à travers le seul fait d’exprimer un soutien politique ou une opposition à un parti politique, et elle avait demandé des informations à ce sujet. La commission note que le gouvernement indique que les mêmes règles s’appliquent à l’égard des autres catégories de partenaires et adhérents d’organisations d’employeurs, du service public et de l’appareil judiciaire; et que leur finalité est d’assurer une participation politique loyale et prévenir tout recours à une influence indue pour se procurer un avantage sur la scène politique. La commission note en outre que les articles 113(2) et 115(1) du décret électoral interdisent à tout fonctionnaire de mener des activités de campagne ainsi qu’à toute personne, entité ou organisation bénéficiaire d’un financement ou d’une assistance d’un gouvernement étranger, d’une organisation intergouvernementale ou non gouvernementale, de s’engager dans, participer à ou conduire une campagne (y compris d’organiser des débats, des forums publics, des réunions, des interviews, des discussions ou de publier des documents) en rapport avec les élections. La commission rappelle que des dispositions imposant aux syndicats ou aux organisations d’employeurs une interdiction générale d’activités politiques visant à promouvoir leurs objectifs spécifiques sont contraires à la convention. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour revoir les dispositions susmentionnées, en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs représentatives au niveau national, en vue de les modifier de manière à assurer le respect de ce principe.
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