Allégations: L’organisation plaignante allègue le refus de la direction de la Compagnie de distribution d’électricité de Karachi (KESC) d’appliquer un accord tripartite auquel elle est partie. Elle allègue par ailleurs que la direction de l’entreprise a donné l’ordre d’ouvrir le feu sur des travailleurs qui manifestaient, en blessant neuf, et a porté plainte au pénal contre 30 responsables syndicaux
- 442. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de juin 2018 et, à cette occasion, a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 386e rapport, paragr. 502 à 513, approuvé par le Conseil d’administration à sa 333e session.]
- 443. Le Syndicat de la Compagnie de distribution d’électricité de Karachi (KESC) a présenté des informations complémentaires dans des communications en date des 8 juin et 30 septembre 2018.
- 444. Le gouvernement a fourni ses observations dans une communication en date des 2 octobre 2018 et 31 janvier et 1er février 2019.
- 445. Le Pakistan a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 446. Lors de sa réunion de juin 2018, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 386e rapport, paragr. 513]:
- a) Le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que l’accord tripartite de juillet 2011 soit mis en œuvre, en particulier que les travailleurs qui ont refusé le plan de départ volontaire soient réaffectés sans délai ou, si la réaffectation n’est pas possible pour des raisons objectives et impérieuses, que les travailleurs concernés reçoivent une indemnisation adéquate. Le comité prie le gouvernement de l’informer de tout fait nouveau à cet égard.
- b) Le comité s’attend à ce que la Commission nationale des relations industrielles (NIRC) examine sans délai les plaintes en instance pour discrimination antisyndicale déposées par les travailleurs du Syndicat de la KESC afin que, le cas échéant, des mesures de réparation adéquates puissent être ordonnées, et prie instamment le gouvernement de promouvoir une fois de plus la négociation entre l’organisation plaignante et l’entreprise en vue de résoudre toute question en suspens. Le comité prie le gouvernement de l’informer de tout fait nouveau à cet égard.
- c) Compte tenu de la gravité des questions soulevées dans le présent cas, le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour ouvrir une enquête indépendante au sujet: i) des allégations de recours à la violence à l’encontre de syndicalistes, dont neuf ont été blessés, alors que ceux-ci manifestaient en août 2011 contre le refus de la compagnie d’appliquer l’accord tripartite de juillet 2011; et ii) des allégations de licenciement de 30 responsables syndicaux et/ou de dépôt de plaintes au pénal à leur encontre, suite à cette manifestation, et ce en vue d’éclaircir pleinement les faits, de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et de prévenir la répétition de tels actes. Le comité s’attend à ce que cette enquête soit menée sans délai et s’attend en outre, dans le cas où il s’avérerait que les militants syndicaux en question ont été licenciés ou ont fait l’objet d’une plainte pour avoir exercé des activités syndicales légitimes, à ce que le gouvernement prenne toutes les mesures nécessaires pour garantir leur réintégration et l’abandon de toutes les charges qui pèsent sur eux. Si la réintégration n’est pas possible, pour des raisons objectives et impérieuses, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que les syndicalistes concernés reçoivent une indemnité adéquate et de nature à constituer une sanction suffisamment dissuasive contre la discrimination antisyndicale.
B. Informations complémentaires de l’organisation plaignante
B. Informations complémentaires de l’organisation plaignante- 447. Dans ses communications en date des 8 juin et 30 octobre 2018, le Syndicat de la KESC allègue l’absence d’action de la part du gouvernement dans ce cas et, plus spécifiquement, il allègue qu’aucun des travailleurs licenciés n’a été réintégré et que le référendum, initialement prévu en 2011, n’a toujours pas eu lieu en raison de la mauvaise foi de la direction de l’entreprise.
C. Réponse du gouvernement
C. Réponse du gouvernement- 448. Dans ses communications en date des 2 octobre 2018 et 31 janvier et 1er février 2019, le gouvernement indique que le ministère des Pakistanais de l’étranger et du Développement des ressources humaines (OPHRD) a désigné un secrétaire principal responsable des questions administratives et du registre des syndicats et l’a mandaté pour mener une enquête indépendante sur les allégations formulées par le Syndicat de la KESC contre la direction de la compagnie. Deux réunions ont eu lieu sous la présidence du secrétaire de l’OPHRD, en avril et juillet 2018, pour discuter de la façon de parvenir à une résolution à l’amiable de ce différend de longue date. Le gouvernement indique que des organisations d’employeurs et de travailleurs, l’organisation plaignante et la direction de l’entreprise ont participé aux réunions.
- 449. En ce qui concerne la recommandation a) du comité, le gouvernement signale que la réunion tripartite de juillet 2018 (à laquelle ont pris part la Fédération des travailleurs du Pakistan et la Fédération des employeurs du Pakistan) a recommandé ce qui suit:
- i) Dans la mesure où le responsable du registre a ordonné la tenue d’un référendum pour désigner un agent de négociation collective et un responsable des élections ayant ensuite été nommé, il est à espérer que nombre des problèmes seront résolus grâce au dialogue entre l’agent de négociation collective nouvellement élu et la direction.
- ii) Puisque le Syndicat de la KESC n’a pas tenu compte de l’accord du 26 juillet 2011 lorsqu’il a saisi la Commission nationale des relations industrielles du Pakistan (NIRC) à propos de la réduction des effectifs, affaire qui est toujours en attente d’une décision, il est recommandé que le nouvel agent de négociation collective et la direction concluent une nouvelle convention collective au plus vite pour résoudre toutes les questions en suspens.
- iii) Les deux parties devraient négocier ensemble et parvenir à une solution amiable par le dialogue social plutôt qu’au travers de procédures judiciaires. Le gouvernement fédéral va étendre sa coopération à tous les niveaux.
- iv) Etant donné que l’entreprise a indiqué que la réintégration ou la réaffectation des travailleurs licenciés n’est pas possible, la direction devrait prendre immédiatement des dispositions pour payer les arriérés aux travailleurs n’ayant pas encore accepté le plan de départ volontaire, comme cela a été convenu lors de la réunion. Le Syndicat de la KESC devrait faciliter le processus dans l’intérêt des travailleurs.
- 450. En ce qui concerne la recommandation b) du comité, le gouvernement indique que l’OPHRD a déjà prié la NIRC de Karachi d’examiner en priorité les affaires relatives à l’entreprise. Les cas sont promptement examinés.
- 451. En ce qui concerne la recommandation c) du comité, le gouvernement indique que, après avoir entendu les deux parties lors de la réunion tripartite de juillet 2018, il s’est avéré que, en août 2011, le syndicat a initié un mouvement de protestation à l’extérieur de l’entreprise qui a dégénéré en violences. Lorsque les travailleurs protestataires ont commencé à saccager des biens privés et publics, la police a tenté de les arrêter, et des heurts ont alors éclaté entre les forces de l’ordre et les manifestants. La réunion a par ailleurs observé que les accusations du syndicat portaient sur le renvoi de travailleurs et les blessures que plusieurs d’entre eux ont subies au cours de la manifestation. Le cas a fait l’objet d’une nouvelle enquête sous les ordres d’un juge civil le 24 novembre 2011, et un jugement a été rendu le 19 janvier 2012. Le Syndicat de la KESC n’a pas fait appel de la décision, qui est devenue définitive. La réunion a recommandé que les deux parties négocient ensemble pour parvenir à une solution amiable par le dialogue social plutôt qu’au travers de procédures judiciaires. Le gouvernement fédéral va étendre sa coopération à tous les niveaux. Le gouvernement indique que l’entreprise estime que la réintégration des travailleurs renvoyés n’est pas possible, car elle a sous-traité tous les emplois non techniques. Plus de 4 000 des 4 500 personnes employées à des postes non techniques ont accepté le plan de départ volontaire et ont déjà reçu leurs indemnités et réglé à l’amiable leur situation. L’OPHRD s’efforce également de persuader l’entreprise d’abandonner les poursuites à l’encontre des travailleurs licenciés et de les indemniser à hauteur de ce que prévoit le plan de départ volontaire.
- 452. Le gouvernement signale que la direction de la compagnie a assuré remédier à la situation en suivant les recommandations susmentionnées issues de l’enquête. La procédure de référendum est en cours et devrait s’achever prochainement. La direction accorde tout le soutien nécessaire dans la mesure de ses moyens et a envoyé des courriers à tous les anciens travailleurs pour qu’ils bénéficient des indemnités du plan de départ volontaire dans les plus brefs délais. Le gouvernement conclut en disant qu’il s’attend à une résolution à l’amiable de la situation dans un avenir proche.
D. Conclusions du comité
D. Conclusions du comité- 453. Le comité rappelle que la plainte dans ce cas a été déposée en 2011 et portait sur des allégations selon lesquelles la direction d’une entreprise d’électricité à Karachi a refusé d’appliquer un accord tripartite auquel elle était partie, ainsi que sur des allégations de recours à la violence contre des travailleurs protestataires, de licenciements et de dépôt de plaintes au pénal contre des responsables syndicaux.
- 454. Le comité accueille avec satisfaction l’information fournie par le gouvernement à propos de la désignation d’un secrétaire principal responsable des questions administratives et du registre des syndicats pour mener une enquête indépendante sur les allégations formulées par le Syndicat de la KESC contre la compagnie, et salue la tenue de deux réunions tripartites à cet effet en 2018 (avec la participation de la Fédération des travailleurs du Pakistan et de la Fédération des employeurs du Pakistan, de l’organisation plaignante et de la direction de l’entreprise) afin de discuter des recommandations que le comité a émises sur ce cas.
- 455. En ce qui concerne sa recommandation a), le comité note que la réunion tripartite de juillet 2018 a pris note de l’indication de la compagnie selon laquelle la réintégration ou la réaffectation des travailleurs licenciés n’était pas possible, puisque cette dernière a sous-traité tous les emplois non techniques; plus de 4 000 des 4 500 personnes employées à des postes non techniques ont accepté le plan de départ volontaire et ont déjà reçu leurs indemnités et réglé à l’amiable leur situation. Le comité note par ailleurs que la réunion tripartite a conclu que la direction devait prendre immédiatement des dispositions pour payer les arriérés aux travailleurs n’ayant pas accepté le plan de départ volontaire et que le Syndicat de la KESC devait faciliter le processus dans l’intérêt des travailleurs. Il note également l’indication du gouvernement selon laquelle la direction accorde tout le soutien nécessaire dans la mesure de ses moyens et a envoyé des courriers à tous les anciens travailleurs pour qu’ils bénéficient des indemnités du plan de départ volontaire dans les plus brefs délais. Néanmoins, le comité observe que l’organisation plaignante allègue l’absence de progrès sur ce point. Il prie donc le gouvernement d’intensifier ses efforts pour veiller à ce que les travailleurs concernés reçoivent une indemnisation adéquate et de renforcer la coopération avec le Syndicat de la KESC à ce propos. Le comité prie le gouvernement de l’informer de tout fait nouveau à cet égard.
- 456. Le comité note que le gouvernement réitère qu’il a demandé à la NIRC d’examiner en priorité les affaires relatives à l’entreprise. Il regrette que, malgré le temps écoulé depuis la présentation des plaintes par les membres du Syndicat de la KESC, ces revendications soient toujours en suspens et que les travailleurs n’aient toujours pas accès à des moyens de réparation efficaces pour des préjudices qui seraient fondés sur leur appartenance ou leurs activités syndicales. Rappelant une fois encore que le respect des principes de la liberté syndicale exige que les travailleurs qui estiment avoir subi des préjudices en raison de leurs activités syndicales disposent de moyens de recours expéditifs, peu coûteux et tout à fait impartiaux [voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 1142], le comité s’attend à ce que la NIRC examine sans délai les plaintes en instance pour discrimination antisyndicale afin que, le cas échéant, des mesures de réparation adéquates puissent être ordonnées et prie instamment à nouveau le gouvernement de continuer de promouvoir la négociation entre l’organisation plaignante et l’entreprise en vue de résoudre toute question en suspens. Le comité prie le gouvernement de l’informer de tout fait nouveau à cet égard.
- 457. En ce qui concerne les allégations de recours à la violence contre des syndicalistes, dont neuf ont été blessés, alors qu’ils manifestaient en août 2011 contre le refus de la compagnie d’appliquer l’accord de juillet 2011 et, suite à cette manifestation, de licenciement de 30 responsables syndicaux et/ou de dépôt de plaintes au pénal à leur encontre, le comité prend note que le gouvernement indique que la réunion tripartite de juillet 2018 a observé que: 1) lorsque les travailleurs protestataires ont commencé à saccager des biens privés et publics, la police a tenté de les arrêter, et des heurts ont alors éclaté entre les forces de l’ordre et les manifestants; 2) les accusations du syndicat portaient sur le renvoi de travailleurs et les blessures que plusieurs d’entre eux ont subies au cours de la manifestation; 3) le cas a fait l’objet d’une nouvelle enquête sous les ordres d’un juge civil le 24 novembre 2011, et un jugement a été rendu le 19 janvier 2012; et 4) le Syndicat de la KESC n’a pas fait appel de la décision, qui est devenue définitive. Le comité note en outre que la réunion tripartite a recommandé que les deux parties négocient ensemble pour parvenir à une solution amiable et que l’OPHRD s’efforce de persuader l’entreprise d’abandonner les poursuites à l’encontre des travailleurs licenciés et de les indemniser à hauteur de ce que prévoit le plan de départ volontaire. Le comité prie le gouvernement d’intensifier ses efforts à cet égard et de le tenir informé de tous faits nouveaux.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 458. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité prie le gouvernement d’intensifier ses efforts pour veiller à ce que l’accord tripartite conclu en juillet 2011 soit mis en œuvre, en particulier que les travailleurs qui ont refusé le plan de départ volontaire et qui n’ont pas été réaffectés reçoivent une indemnisation adéquate, et de coopérer avec le Syndicat de la KESC à ce propos. Le comité prie le gouvernement de l’informer de tout fait nouveau à cet égard.
- b) Le comité s’attend à ce que la Commission nationale des relations industrielles examine sans délai les plaintes en instance pour discrimination antisyndicale déposées par les travailleurs de la KESC afin que, le cas échéant, des mesures de réparation adéquates puissent être ordonnées et prie instamment à nouveau le gouvernement de continuer de promouvoir la négociation entre l’organisation plaignante et l’entreprise en vue de résoudre toute question en suspens. Le comité prie le gouvernement de l’informer de tout fait nouveau à cet égard.
- c) Notant l’indication du gouvernement selon laquelle il s’efforce de persuader l’entreprise d’abandonner les poursuites à l’encontre des travailleurs licenciés et de les indemniser, le comité le prie d’intensifier ses efforts et de le tenir informé de tous faits nouveaux à cet égard.