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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 84, 1965

Cas no 354 (Chili) - Date de la plainte: 10-MAI -63 - Clos

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  1. 23. La plainte de la Centrale unique des travailleurs du Chili et des autres organisations syndicales plaignantes est contenue dans une communication du 10 mai 1963. Cette communication a été transmise au gouvernement, qui a fait parvenir ses observations en date du 20 avril 1965.
  2. 24. Le Chili a ratifié la convention (no 11) sur le droit d'association (agriculture), 1921; il n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 25. Selon les plaignants, l'organisation syndicale et le règlement des conflits collectifs du travail sont régis au Chili, dans l'agriculture, par des dispositions spéciales, différentes de celles qui sont applicables aux travailleurs de l'industrie. Ces dispositions sont contenues dans la loi no 8811 du 29 juillet 1947, qui a été édictée bien des années après que le Chili eut ratifié la convention no 11. Elles constituent une violation flagrante de cet instrument, non seulement parce qu'elles établissent pour les ouvriers agricoles un régime différent de celui auquel sont assujettis les travailleurs de l'industrie, mais encore parce qu'elles sont si restrictives qu'elles suppriment en fait les libertés syndicales dans l'agriculture. Il s'ensuit que, à de rares exceptions près, il n'existe pas de syndicats agricoles et que les organisations qui se sont constituées néanmoins ont une existence précaire et sont absolument incapables de ce fait de défendre efficacement les intérêts professionnels de leurs membres. Les observations formulées année après année par la Commission de l'application des conventions et recommandations de la Conférence internationale du Travail n'ont produit jusqu'ici aucun effet: les ouvriers agricoles sont toujours soumis à des dispositions législatives qui n'auraient pas dû être adoptées ou qui auraient déjà dû être abrogées. Après ces considérations préliminaires, les plaignants indiquent en détail toutes les dispositions législatives relatives aux syndicats agricoles qui seraient contraires à la convention no 11.
  2. 26. Dans sa réponse, le gouvernement déclare qu'une comparaison sommaire entre les normes applicables aux travailleurs de l'industrie et les dispositions de la loi no 8811 sur l'organisation syndicale des ouvriers agricoles permet de conclure que le système législatif chilien n'assure pas « à toutes les personnes occupées dans l'agriculture les mêmes droits d'association et de coalition qu'aux travailleurs de l'industrie ». Aussi, bien que le Chili ait ratifié la convention no 11, la législation actuellement en vigueur n'est pas conforme aux normes contenues dans cet instrument. Selon le gouvernement, il convient cependant de ne pas perdre de vue que le fait d'assurer aux ouvriers agricoles les mêmes droits d'association qu'aux travailleurs de l'industrie ne constitue pas au Chili une garantie suffisante, car, d'une manière générale, la législation syndicale applicable aux travailleurs de l'industrie, du commerce, des mines, etc., ne respecte pas les principes de liberté syndicale énoncés dans la convention no 87.
  3. 27. Devant cet état de choses, le gouvernement a soumis au Congrès national, en date du 19 février 1965, un prof: t de loi qui modifie profondément le régime syndical et qui le rend conforme aux dispositions de la convention no 87, en ce sens que les dispositions en seront applicables à tous les travailleurs, indépendamment de leur activité. Afin de rendre ses explications plus claires, le gouvernement joint à sa communication une copie des dispositions législatives applicables actuellement aux syndicats d'ouvriers agricoles, ainsi que des dispositions du projet de loi soumis récemment au Congrès national.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 28. Le Comité constate que, pendant de longues années, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a présenté au gouvernement du Chili des observations au sujet de l'application de la convention no 11. Dans ces observations, la Commission indiquait expressément les divergences fondamentales qui existaient entre les dispositions de la législation syndicale applicables aux ouvriers agricoles et les dispositions applicables aux travailleurs de l'industrie. Ces divergences sont principalement les suivantes.
  2. 29. Alors que, selon l'article 366 du Code du travail, les travailleurs de l'industrie peuvent choisir entre deux formes de syndicats, les syndicats d'entreprise et les syndicats professionnels, aux termes de l'article 426 du même Code, les travailleurs agricoles ne peuvent constituer de syndicat que dans le cadre d'un même domaine agricole. De ce fait, les ouvriers agricoles se voient privés du droit de constituer des syndicats qui débordent le cadre d'une entreprise, comme du droit de constituer des fédérations ou des confédérations syndicales. En outre, il existe, entre les syndicats d'entreprise et les syndicats agricoles, des différences de traitement dont certaines ont pour effet de limiter considérablement le droit de coalition des ouvriers agricoles. On trouve de telles différences, par exemple, en ce qui concerne la gestion des fonds syndicaux et les conflits collectifs. A propos de ces derniers, il faut relever que, aux termes de l'article 470 du Code du travail, les syndicats agricoles ne peuvent présenter de revendications qu'en dehors des périodes d'ensemencements et de récoltes et, de toute manière, qu'une fois par année. Comme le constatait la Commission d'experts, pareille restriction, qui n'a pas d'équivalent dans les dispositions applicables aux travailleurs de l'industrie, conduit pratiquement à refuser tout droit d'organisation efficace aux travailleurs agricoles et, en particulier, aux travailleurs saisonniers et occasionnels. Enfin, l'article 433 du Code du travail, en raison des exigences qu'il énonce, aboutit en fait à refuser aux travailleurs saisonniers ou occasionnels le droit de constituer des syndicats. La restriction contenue dans cet article touche particulièrement les travailleurs des exploitations agricoles qui emploient une forte proportion de main-d'oeuvre saisonnière ou occasionnelle.
  3. 30. Cela dit, le Comité prend note du projet de loi sur l'organisation syndicale que le gouvernement a soumis récemment au Congrès national. Aux termes de ce projet (art. 1), « les employeurs et les travailleurs, qu'ils travaillent pour le compte d'autrui ou pour leur propre compte et quels que soient leur métier, leur profession ou leur activité, ont le droit de former des syndicats ». Le projet ne contient aucune disposition discriminatoire dirigée contre les travailleurs agricoles. Au contraire, il dispose (art. 23) que « les employeurs agricoles doivent accorder aux syndicats les plus grandes facilités pour leur permettre d'exercer leur activité au sein de l'exploitation. A cette fin, ils doivent mettre à la disposition des syndicats des locaux où ceux-ci puissent mener leurs activités normales, et autoriser les travailleurs ainsi que leurs dirigeants à pénétrer librement dans ces locaux et à assister librement aux réunions qui s'y tiennent. » Le Comité constate que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a pris note également du projet de loi susmentionné et que, après avoir relevé que les dispositions s'en appliquent sans distinction aux travailleurs de l'industrie et aux ouvriers agricoles, elle déclare espérer que l'adoption à bref délai de ce projet de loi mettra enfin la législation en pleine conformité avec la convention no 11.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 31. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de signaler à l'attention du gouvernement les divergences qui subsistent entre les dispositions législatives sur les syndicats agricoles en vigueur et celles de la convention (no 11) sur le droit d'association (agriculture), 1921, que le Chili a ratifiée;
    • b) de prendre note avec intérêt du projet de loi sur l'organisation syndicale que le gouvernement a soumis récemment au Congrès national et qui supprime les divergences en question;
    • c) de prier le gouvernement de le tenir au courant de l'évolution de la question, surtout en ce qui concerne le projet de loi susmentionné, et d'exprimer le voeu que ce projet soit adopté sous peu.
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