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Rapport intérimaire - Rapport No. 93, 1967

Cas no 456 (Bolivie (Etat plurinational de)) - Date de la plainte: 16-JUIL.-65 - Clos

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  1. 202. Le Comité estime qu'il serait utile et commode de traiter en un seul document les deux cas concernant la Bolivie qu'il examine actuellement. Le cas no 409 se rapporte à l'attentat qui aurait été commis en août 1964, selon une plainte de la Centrale ouvrière bolivienne, contre M. Juan Lechín, dirigeant de cette organisation. Le cas no 456 a trait aux plaintes formulées par la Centrale ouvrière bolivienne et la Fédération syndicale mondiale, qui allèguent que des mesures de répression auraient été prises en mai 1965 par la Junte militaire du gouvernement contre les organisations et les dirigeants syndicaux.
  2. 203. La Bolivie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; par contre, elle n'a pas ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations relatives à l'attentat commis contre M. Juan Lechín (août 1964)

A. Allégations relatives à l'attentat commis contre M. Juan Lechín (août 1964)
  1. 204. Par télégramme adressé le 8 août 1964 au B.I.T, la Centrale ouvrière bolivienne (C.O.B.) a fait savoir que son dirigeant, M. Juan Lechín, ex-Vice-président de la République, avait fait l'objet d'un attentat criminel et qu'il avait été séquestré par des agents du gouverne ment. La C.O.B demandait l'intervention de l'O.I.T pour que cette personne soit remise en liberté.
  2. 205. Après transmission de la plainte au gouvernement, celui-ci a répondu, par communication du 7 octobre 1964, que les personnes qui avaient attaqué M. Juan Lechín Oquendo, au cours d'un incident de caractère politique et non pas syndical, faisaient l'objet de poursuites conformément aux lois en vigueur. Le gouvernement affirmait que M. Lechín n'avait pas été séquestré et il joignait à sa communication une coupure de presse d'où il ressortait que la C.O.B avait annoncé que son leader se trouvait « en sûreté ». En outre, le gouvernement affirmait que M. Juan Lechín Oquendo était le chef et le fondateur d'une organisation politique extrémiste, qui s'efforçait d'assimiler le combat syndical aux luttes purement politiques. Il résultait d'une autre coupure de périodique jointe à cette communication que cinq agents de contrôle politique avaient été arrêtés et qu'une action judiciaire avait été ouverte contre eux en raison de l'agression commise contre M. Lechín.
  3. 206. Le Comité a suivi, dans le passé, la règle consistant à ajourner l'examen de cas soumis à un tribunal judiciaire national lorsque cette procédure pouvait lui fournir des éléments utiles pour apprécier les allégations formulées, et il a demandé aux gouvernements de lui envoyer des informations sur les poursuites judiciaires engagées et sur leurs résultats.
  4. 207. Conformément à cette règle, le Comité a prié le Directeur général, à sa session de novembre 1964, d'obtenir du gouvernement des informations détaillées sur le résultat du procès intenté aux auteurs de cet attentat, et il a réservé ses conclusions au sujet de ce cas jusqu'à ce qu'il soit en possession d'informations précises. Cette requête a été transmise au gouvernement par lettre du 21 novembre 1964 et celui-ci a répondu, par communication du 9 décembre 1964, qu'il avait demandé les informations nécessaires aux tribunaux ordinaires.
  5. 208. Par communication du 9 avril 1965, le gouvernement a fait savoir que le dossier du procès avait disparu du tribunal compétent et il a précisé que cette soustraction ou cette destruction serait survenue au cours des événements révolutionnaires du 4 novembre 1964. Cependant, la Cour suprême de justice a communiqué au procureur les éléments du cas pour qu'il décide de reprendre la procédure et qu'il poursuive l'instruction judiciaire ouverte contre les responsables.
  6. 209. A sa session de mai 1965, le Comité a décidé d'inviter le gouvernement à lui communiquer les résultats de ces nouvelles procédures. Lors de ses sessions de novembre 1965, février 1966 et mai 1966, le Comité a décidé chaque fois, comme ces informations n'étaient pas parvenues, d'ajourner l'examen du cas. Le Directeur général a informé le gouvernement de ces ajournements, en réitérant à chaque occasion la demande du Comité, sans qu'il ait reçu jusqu'ici les informations demandées.
  7. 210. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de prier le gouvernement, tout en exprimant son regret de ce que celui-ci, malgré les nombreuses demandes faites dans ce sens par le Comité, n'ait envoyé, depuis avril 1965, aucun renseignement sur les procès intentés aux agresseurs de M. Juan Lechín, de bien vouloir lui faire parvenir ces informations dans le plus bref délai possible.
    • Allégations relatives aux événements survenus en mai 1965 en Bolivie
  8. 211. Les plaintes relatives à ce cas sont contenues dans les trois communications suivantes: communication du 16 juillet 1965, envoyée directement à l'O.I.T par la Centrale ouvrière bolivienne en exil; communication du 21 octobre 1965, adressée aux Nations Unies depuis La Paz par le comité exécutif national de cette même organisation et transmise à l'O.I.T par le Secrétaire général des Nations Unies; enfin, communication du 13 décembre 1965, envoyée directement à l'O.I.T par la Fédération syndicale mondiale. Ces plaintes ont été transmises au gouvernement au fur et à mesure de leur réception, afin que le gouvernement communique ses observations.
  9. 212. Ces plaintes se rapportent en partie à l'adoption de différents décrets tendant à placer le mouvement syndical sous le contrôle du gouvernement. Le Comité a déjà examiné cet aspect de la question à sa session de novembre 1965, en étudiant le cas no 451, introduit par une plainte de la Confédération latino-américaine des syndicalistes chrétiens en date du 26 juillet 1965. A cette occasion, le Comité a soumis au Conseil d'administration un rapport intérimaire, reproduit aux paragraphes 126 à 154 de son quatre-vingt-sixième rapport, approuvé par le Conseil à sa 164ème session (février-mars 1966). C'est pourquoi, en ce qui concerne ces allégations de la C.O.B et de la F.S.M, le Comité s'en remet à ce qui est dit dans ce rapport.
  10. 213. Les autres allégations de la C.O.B et de la F.S.M concernent la répression d'une grève générale et d'un mouvement de résistance des travailleurs, en mai 1965, ainsi que la persécution, la capture et la déportation de nombreux dirigeants syndicaux et de nombreux travailleurs, mesures qui ont fait suite à cette grève.
  11. 214. La Centrale ouvrière bolivienne en exil a exposé, dans un long document du 16 juillet 1965, ce qui est résumé ci-après. Lorsque la Junte militaire eut pris le pouvoir, après les événements révolutionnaires de novembre 1964, la C.O.B lui présenta un mémoire en trente-huit points, en formulant des revendications qui reprenaient les inquiétudes de la classe ouvrière, des universitaires, des paysans, des membres des professions libérales et d'autres secteurs de la nation. Les travailleurs, dont les salaires étaient bloqués depuis décembre 1956, malgré la hausse constante du coût de la vie, rouvrirent les cahiers de revendications de leurs divers secteurs syndicaux. Plusieurs de ceux-ci, s'en tenant à la loi générale du travail, avaient épuisé ou étaient sur le point d'épuiser les moyens de conciliation et d'arbitrage obligatoire, avec des résultats complètement négatifs, et il ne leur restait donc que le recours à la grève pour appuyer leurs demandes. Le nouveau gouvernement avait élevé les soldes des forces armées dans une proportion de 400 pour cent, alors que les travailleurs n'avaient demandé que des augmentations de 20 à 60 pour cent.
  12. 215. C'est dans cette atmosphère de mécontentement populaire qu'eurent lieu les manifestations ouvrières du 1er mai 1965, organisées par la C.O.B. Dans la première quinzaine de ce mois, les travailleurs des industries minières et manufacturières, de la construction, de l'enseignement et des hôtels et restaurants signèrent un accord intersyndical qui fixait le plan de lutte et assurait la coordination de l'action, et ils désignèrent une commission chargée de traiter avec les autorités. Le 15 mai, M. Juan Lechín Oquendo, secrétaire exécutif de la C.O.B et de la Fédération syndicale des travailleurs des mines de Bolivie, qui était rentré à son domicile en raison des garanties de liberté personnelle que lui avait données le ministre du Travail, fut arrêté par la police, ce qui violait la liberté syndicale consacrée par la Constitution.
  13. 216. Etant donné qu'un des articles de l'accord intersyndical disposait que les associations intéressées feraient la grève générale en cas d'infractions à la liberté syndicale, d'interventions armées contre les sections syndicales, d'attentats contre les stations ouvrières de radio, etc., la C.O.B décida que la grève commencerait le 17 mai dans tout le pays. Cette grève aurait lieu pour appuyer les revendications suivantes: retour immédiat au pays du secrétaire exécutif (qui avait été déporté au Paraguay), respect de la liberté syndicale et augmentation des traitements et salaires dans les proportions demandées dans les cahiers de revendications.
  14. 217. Le premier jour de la grève eurent lieu deux grandes manifestations pacifiques, l'une à La Paz et l'autre à Oruro. Toutes les deux furent troublées par des agressions avec armes à feu, ce qui causa plusieurs morts et de nombreux blessés. Par la suite, les forces militaires attaquèrent les stations de radio « Continental » et « Excelsior », propriété des syndicats. Adrián Arec Quispe, secrétaire général du Syndicat des constructeurs de La Paz, fut appréhendé et assassiné dans le local de la radio «Excelsior». Les obsèques de ce dirigeant provoquèrent une autre manifestation, troublée à son tour par des attaques de l'armée. Le 22 mai, l'armée occupa toute la ville de La Paz, le local de la C.O.B fut envahi, et de nombreux dirigeants syndicaux furent arrêtés; certains d'entre eux furent déportés et d'autres conduits au camp de concentration de Puerto Rico, dans la région bolivienne de l'Amazone.
  15. 218. Toujours d'après la C.O.B, l'armée attaqua ensuite les centres miniers, et la plainte décrit les combats qui eurent lieu dans ces localités, ainsi que dans la ville de La Paz. Les 23 et 24 mai, quelque six cents personnes trouvèrent la mort et plusieurs autres centaines furent blessées. A cette dernière date, la Fédération des travailleurs des mines pria la C.O.B de proposer au Haut-commandement militaire une trêve de quarante-huit heures. Le 25 mai fut signé un « accord de trêve » qui prévoyait le cessez-le-feu, des consultations entre le gouvernement et les organisations syndicales pour trouver une solution définitive au conflit, la suspension de la grève, etc.
  16. 219. Selon la plainte de la C.O.B, les travailleurs se seraient procuré des armes, de type désuet, par leur victoire de 1952 sur l'armée et ils les auraient conservées, car elles constituaient la meilleure garantie de démocratie, de liberté, de souveraineté du pays et d'émancipation populaire. En conclusion de cette partie de ses allégations, la C.O.B expose que l'une des causes de la défaite subie par les travailleurs réside dans l'absence d'une direction politique adéquate, capable de comprendre le brusque changement qui s'était produit dans la situation nationale et de transformer la rébellion spontanée de La Paz et la résistance des centres miniers en un triomphe révolutionnaire de tout le peuple bolivien.
  17. 220. Ces événements auraient été suivis d'une campagne organisée par le gouvernement pour anéantir le mouvement syndical en emprisonnant et en exilant ses dirigeants librement élus, ainsi qu'un grand nombre de ses membres.
  18. 221. La communication du 21 octobre 1965 adressée aux Nations Unies par la C.O.B depuis La Paz et transmise au B.I.T constitue pour l'essentiel une pétition adressée à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies pour qu'elle envoie en Bolivie une délégation chargée d'enquêter au sujet des allégations de violation des droits de l'homme, et notamment des droits syndicaux. Dans sa communication du 13 décembre 1965, la Fédération syndicale mondiale mentionne, en particulier, l'arrestation et la déportation de M. Juan Lechín et d'autres dirigeants dont elle indique le nom, et elle déclare qu'au début du conflit le gouvernement a décrété l'état de siège, suspendu les garanties constitutionnelles et interdit arbitrairement les activités syndicales, tout en décrétant le service militaire obligatoire pour tous les citoyens âgés de dix-neuf à cinquante ans.
  19. 222. Le gouvernement a envoyé des observations au sujet de ce cas dans une communication du 5 mai 1966, qui a été reçue trop tard pour être examinée par le Comité à sa session de mai 1966, ainsi que dans une autre communication en date du 3 août 1966. Dans la première de ces communications, qui concernait l'arrestation et la déportation de Juan Lechín Oquendo, le gouvernement déclare que ces mesures ont été prises en raison « d'actes de caractère délictueux punis par le Code pénal, et dont les preuves sont irréfutables ». Le gouvernement affirmait que les allégations concernant le manque de liberté et les autres violations des droits syndicaux sont sans fondement, puisque, avant leur expatriation, M. Lechín Oquendo et d'autres dirigeants syndicaux jouissaient de toutes les garanties et d'une liberté pleine et entière pour toutes leurs activités de caractère syndical. En outre, le gouvernement communique que le décret no 07612, du 3 mai 1966, accorde l'amnistie politique générale en vue des élections fixées au 3 juillet.
  20. 223. A sa communication du 3 août 1966, le gouvernement joint le texte de divers documents et de coupures de presse, tous de date antérieure aux événements relatés dans les plaintes, à l'exception d'un rapport de juillet 1966 qui concerne les travaux du Conseil national du logement. Dans sa lettre, le gouvernement signale que cette documentation contient des faits relatifs à la situation syndicale telle qu'elle se présentait en Bolivie d'avril 1952 à novembre 1964, date à laquelle la Junte militaire a assumé le pouvoir. Il ajoute que, pendant la période indiquée, les personnes mêmes qui dénonçaient de prétendues violations de la liberté syndicale exerçaient activement la direction du syndicalisme bolivien et que c'est la Junte militaire qui a dû surmonter les difficultés auxquelles se heurtaient les travailleurs, au moyen d'une nouvelle politique syndicale fondée sur le strict respect des lois ainsi que des avantages et des conquêtes des travailleurs dans un contexte démocratique et un esprit de respect des droits de l'homme.
  21. 224. Le Comité note que la réponse du gouvernement, en date du 1er septembre 1965, aux allégations formulées au sujet du cas no 451 mentionné au paragraphe 212 ci-dessus, ont également rapport à certains aspects importants du cas. Dans une partie de cette réponse, que le Comité a examinée à sa session de novembre 1965, le gouvernement déclarait que la Junte militaire s'était vue obligée d'assumer le pouvoir à un moment où la démagogie et la prépondérance du parti gouvernemental menaçaient de conduire le pays à l'anarchie et où les syndicats exerçaient une dictature extrêmement rigoureuse sur la masse ouvrière, dont ils n'étaient pas les représentants légitimes. Il ajoutait que les syndicats possédaient des moyens modernes de propagande, tels que des stations de radio puissamment équipées, depuis lesquelles ils incitaient la masse ouvrière à se révolter contre le nouveau gouvernement, et que les dirigeants invitaient le peuple à faire usage des armes qu'il détenait depuis le jour où les travailleurs furent armés à des fins d'étroite domination politique.
  22. 225. Le Comité a toujours appliqué le principe selon lequel les allégations concernant le droit de grève n'échappent pas à sa compétence dans la mesure, mais seulement dans la mesure, où elles mettent en cause l'exercice des droits syndicaux. Le Comité a signalé, à l'occasion de différents cas antérieurs, que, normalement, le droit de grève est reconnu aux travailleurs et à leurs organisations en tant que moyen légitime de défense de leurs intérêts professionnels. Toutefois, à diverses reprises, le Comité a estimé que l'examen d'allégations relatives à des grèves qui n'avaient pas un caractère professionnel, à des grèves ayant pour but d'exercer une pression sur le gouvernement pour une question politique ou à des grèves dirigées contre la politique du gouvernement et qui « n'étaient pas issues d'un différend du travail » n'entrait pas dans sa compétence.
  23. 226. Dans le cas présent, le Comité note que les événements d'une extrême gravité auxquels se rapportent les plaintes semblent s'être produits à l'occasion d'une profonde crise intérieure. D'autre part, bien que les plaignants indiquent que leur action a été motivée par l'inertie du gouvernement en face des revendications des travailleurs pour la défense de leurs intérêts professionnels, notamment en matière de salaires, il est difficile, sur la base des éléments communiqués par ces mêmes plaignants, de dissocier la grève générale du mouvement de résistance armée qui a indubitablement outrepassé les limites d'une action de grève et, à en juger par les déclarations de la C.O.B mentionnées au paragraphe 219 ci-dessus, il semble que cette action ait eu pour objet d'appuyer les revendications beaucoup plus vastes entrant dans le domaine économique, social et politique.
  24. 227. Etant donné ces faits, à savoir la grève accompagnée d'un mouvement de résistance armée visant à exercer une pression sur le gouvernement pour qu'il adopte des mesures dans le domaine économique, social et politique, le Comité estime que les mesures prises par le gouvernement pour étouffer cette résistance ne permettent pas d'affirmer, dans le cas présent, qu'il y a eu violation des droits syndicaux, à la lumière des principes appliqués par le Comité dans ce domaine, principes qui ont été exposés dans le paragraphe 225 ci-dessus.
  25. 228. Cependant, la C.O.B, dans sa communication du 16 juillet 1965, aussi bien que la F.S.M, dans sa communication du 13 décembre 1965, signalent que de nombreux syndicalistes, dont ces organisations indiquent le nom, ont été incarcérés ou exilés et le Comité note que le gouvernement n'a pas communiqué ses observations au sujet de ces mesures, sauf en ce qui concerne M. Juan Lechín Oquendo, lequel, selon les plaignants, aurait été arrêté et exilé avant la grève générale et les autres événements mentionnés ci-dessus, alors que, selon le gouvernement, il aurait commis des infractions passibles du Code pénal.
  26. 229. Le gouvernement fait également allusion à l'adoption, par un décret du mois de mai 1966, d'une mesure d'amnistie politique, mais il n'explique pas si cette mesure s'applique à M. Lechín Oquendo et aux autres syndicalistes qui pourraient être détenus ou exilés du fait des événements dont il est question dans les plaintes.
  27. 230. En ce qui concerne le cas de M. Lechín Oquendo, le Comité fait observer que, lorsque à l'occasion de cas précédents les gouvernements ont répondu à des allégations selon lesquelles des dirigeants syndicaux ou des travailleurs avaient été emprisonnés en raison d'activités syndicales, en déclarant que les personnes en question étaient en réalité détenues pour des activités subversives, pour des raisons de sécurité intérieure ou pour des délits de droit commun, le Comité a toujours suivi la règle qui consiste à prier les gouvernements intéressés de fournir des informations complémentaires aussi précises que possible au sujet de ces détentions et de leurs motifs exacts. Si, dans certains cas, le Comité a décidé que des allégations relatives à l'arrestation ou à la détention de militants syndicalistes n'appelaient pas un examen plus approfondi, c'est parce qu'il avait reçu des gouvernements certaines informations prouvant de façon suffisamment évidente et précise que ces arrestations ou détentions n'avaient rien à voir avec les activités syndicales, mais qu'elles étaient la conséquence d'activités étrangères aux questions syndicales, préjudiciables à l'ordre public ou de caractère politique.
  28. 231. D'autre part, le Comité a toujours souligné que quand des syndicalistes sont détenus en raison de délits politiques ou de délits de droit commun, les personnes en question devraient être jugées équitablement, dans le plus bref délai possible, par des autorités judiciaires impartiales et indépendantes.
  29. 232. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de prendre note des déclarations du gouvernement au sujet de l'arrestation et de la déportation de M. Juan Lechín Oquendo et d'inviter le gouvernement à bien vouloir: a) communiquer la nature précise des délits imputés à cette personne et faire savoir si M. Lechín Oquendo a fait l'objet de poursuites pour de tels délits devant une autorité judiciaire impartiale et indépendante; b) communiquer ses observations concrètes au sujet de l'arrestation ou de l'exil des autres syndicalistes dont le nom est mentionné dans les plaintes; c) indiquer si la mesure d'amnistie politique adoptée en mai 1966 s'applique ou non à M. Lechin Oquendo et aux autres syndicalistes mentionnés et, dans l'affirmative, quelles ont été les conséquences de cette mesure pour ce qui est de la jouissance, par ces personnes, de leurs droits syndicaux.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 233. Pour ce qui est de ces cas dans leur ensemble, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) en ce qui concerne les allégations relatives à l'attentat du mois d'août 1964 contre M. Juan Lechín Oquendo, de demander au gouvernement, tout en déplorant que celui-ci, malgré les nombreuses demandes qui lui ont été adressées dans ce sens, n'ait envoyé, depuis le mois d'avril 1965, aucune des informations sollicitées par le Comité au sujet des poursuites judiciaires intentées contre les responsables de l'attentat, de faire parvenir ces informations dans le plus bref délai possible;
    • b) en ce qui concerne les allégations relatives aux événements de mai 1965:
    • i) de prendre note des déclarations du gouvernement selon lesquelles M. Juan Lechín Oquendo a été arrêté et déporté en raison d'actes délictueux relevant du Code pénal;
    • ii) de demander au gouvernement, compte tenu des principes exprimés dans les paragraphes 230 et 231 ci-dessus, de bien vouloir lui communiquer la nature précise des délits imputés à M. Juan Lechín Oquendo et de lui faire savoir si cette personne a fait l'objet de poursuites pour ces délits devant une autorité judiciaire impartiale et indépendante;
    • iii) d'inviter le gouvernement à lui faire parvenir ses observations concrètes au sujet de l'arrestation et de l'exil des syndicalistes dont le nom figure dans les plaintes de la Centrale ouvrière bolivienne, en date du 16 juillet 1965, et de la Fédération syndicale mondiale, du 13 décembre 1965;
    • iv) d'inviter le gouvernement à lui faire savoir si l'amnistie politique prévue par le décret du 13 mai 1966 s'applique ou non à M. Lechín Oquendo et aux autres syndicalistes auxquels se rapporte l'alinéa iii) et, dans l'affirmative, quelles ont été les conséquences de cette mesure pour ces personnes, en ce qui concerne la jouissance de leurs droits syndicaux;
    • c) de prendre note du présent rapport intérimaire, étant entendu que le Comité présentera un nouveau rapport lorsqu'il aura reçu les informations demandées au gouvernement dans les alinéas a) et b) ii), iii) et iv) du présent paragraphe.
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