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Rapport intérimaire - Rapport No. 278, Juin 1991

Cas no 1508 (Soudan) - Date de la plainte: 18-AOÛT -89 - Clos

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  1. 347. Le comité a déjà examiné ce cas à deux reprises et a présenté à chaque fois des conclusions intérimaires au Conseil d'administration; les plus récentes ont été approuvées en février-mars 1991. (Voir 277e rapport, paragr. 335 à 356.)
  2. 348. Le gouvernement a fourni d'autres observations sur ce cas dans une communication datée du 14 mars 1991.
  3. 349. Le Soudan n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 350. Le présent cas concerne de graves allégations relatives aux mesures prises par les autorités militaires après le coup d'Etat militaire du 30 juin 1989. Les organisations plaignantes s'étaient initialement plaintent des violations suivantes de la liberté syndicale: dissolution de toutes les organisations syndicales du pays par décret militaire; emprisonnement d'un grand nombre de dirigeants et militants syndicaux qui n'ont, semble-t-il, été ni inculpés ni jugés; confiscation des biens et avoirs des syndicats par les autorités militaires; licenciement et mise sous surveillance de dirigeants syndicaux nommément désignés; et lourdes peines - notamment condamnation à mort - infligées par les tribunaux militaires à des dirigeants syndicaux nommément désignés. Des allégations plus récentes portaient sur le décès, par suite de tortures, d'un dirigeant syndical nommément désigné, sur la détention continue de plusieurs dirigeants syndicaux dans des conditions extrêmement précaires ainsi que sur l'enlèvement et la disparition d'un autre dirigeant syndical.
  2. 351. Dans ses diverses réponses, le gouvernement a annoncé la levée de la peine de mort et la libération de deux médecins syndicalistes à la suite d'un appel à la clémence lancé par le comité; la libération de tous les syndicalistes détenus; la restitution de tous les biens syndicaux à leurs propriétaires, en vertu du décret no 10 promulgué le 27 septembre 1989 par la direction du comité politique et des autres ordonnances rendues aux termes de ce décret; la reprise des activités des syndicats nouvellement formés qui sont, au dire du gouvernement, "les anciens syndicats qui font fonction de comités préparatoires et de comités directeurs". Le gouvernement a également mentionné un dialogue syndical qui s'est tenu à Khartoum et qui a recommandé la révision de toutes les lois syndicales actuelles.
  3. 352. En février-mars 1991, le Conseil d'administration a, au vu des conclusions intérimaires du comité, approuvé les recommandations intérimaires suivantes:
    • a) Le comité note que, au dire du gouvernement, tous les détenus ont été relaxés; il demande néanmoins au gouvernement de lui fournir des renseignements précis sur la situation actuelle des syndicalistes relaxés et de lui indiquer notamment si ceux-ci ont pu, en pratique, reprendre leurs fonctions syndicales et s'ils sont en mesure d'exercer librement leurs activités syndicales.
    • b) Le comité note également que tous les biens syndicaux confisqués ont, selon le gouvernement, été restitués à leurs propriétaires légitimes en vertu du décret no 10 promulgué le 27 septembre 1989, et il demande au gouvernement de lui fournir un exemplaire de ce décret.
    • c) Puisque le gouvernement est en train d'élaborer un projet de loi syndicale et qu'il envisage d'organiser des consultations avec les partenaires sociaux au sujet du texte qui devrait révoquer les divers décrets actuellement en vigueur de dissolution de l'ensemble des associations professionnelles, le comité suggère au gouvernement de soumettre ce projet de loi au BIT pour commentaires, avant qu'il ne soit définitivement adopté.
    • d) Le comité regrette que le gouvernement n'ait pas répondu aux dernières allégations transmises respectivement en mai et en octobre 1990 et qui présentent un caractère extrêmement grave; il demande au gouvernement de lui envoyer dès que possible une réponse détaillée sur la mort alléguée, par suite de tortures, d'un dirigeant syndical nommément désigné ainsi que sur la détention, dans des conditions très précaires, de sept dirigeants syndicaux nommément désignés, ainsi que sur l'enlèvement et la disparition alléguée de M. Mohamed Faig.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 353. Dans sa communication du 14 mars 1990, le gouvernement souligne tout d'abord que, s'il est vrai que le Dr Ali Fadul est décédé en prison, le médecin légiste a conclu qu'il s'agissait d'une mort naturelle.
  2. 354. Deuxièmement, le gouvernement donne des informations sur les huit syndicalistes suivants, dont sept seraient, au dire des fédérations plaignantes, toujours en détention:
    • - le Dr Al Sheikh Kineish est libre et il a été autorisé à prendre un congé sabbatique pour voyager; il se trouve actuellement au Royaume-Uni;
    • - Al Hag Osman n'est pas, selon les fichiers du gouvernement, un syndicaliste;
    • - Yahia Ali Abdalla et Mohamed Ali Al Simiet ne sont plus des syndicalistes mais ils ont été libérés;
    • - Ali Aidarous Hamed et Gibril Awad ont été mis en liberté;
    • - Mohamed Al Hassan Abdalla a été libéré et il exerce des activités syndicales;
    • - Mannalla Abdalla ne figure pas en tant que syndicaliste dans les dossiers du gouvernement.
  3. 355. En réponse aux dernières allégations, qui sont restées en suspens lors du dernier examen du comité, le gouvernement déclare que le Dr Ahmed Osman Sirag a été accusé d'avoir participé à un coup d'Etat, qu'il a reconnu sa culpabilité et est désormais en prison; il est en bonne santé, bien traité et reçoit des visites régulières de sa famille.
  4. 356. Enfin, le gouvernement déclare que les allégations relatives aux autres détenus ne sont pas fondées, et notamment celles concernant les deux avocats Ali Ahmed Al-Sayid et Abdelrahim Al Fihail, ainsi que l'ingénieur M. Mohamed Faig. Il ajoute que, selon les dossiers du gouvernement, ces personnes ne sont pas des syndicalistes.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 357. Le comité regrette vivement que, en ce qui concerne l'allégation extrêmement grave selon laquelle le Dr Ali Fadul serait décédé en prison des suites de tortures, le gouvernement se contente de déclarer qu'il s'agit d'une "mort naturelle" sans fournir de copie du rapport d'autopsie ou de tout autre document officiel attestant sa version du décès. La CISL avait décrit le Dr Fadul comme étant un membre éminent du Syndicat soudanais des médecins, détenu depuis mars 1990 pour avoir participé à des activités syndicales. Le comité aimerait rappeler que les syndicalistes, au même titre que quiconque, ne devraient pas être arrêtés sauf dans le cadre d'une procédure pénale de droit commun, qu'ils devraient avoir le droit de bénéficier des garanties énoncées dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, et que les gouvernements devraient donner des instructions nécessaires pour faire en sorte qu'aucun détenu ne fasse l'objet de mauvais traitements ou de pressions et infliger des sanctions efficaces dans les cas où des mauvais traitements ont été démontrés. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 84.) Le comité réitère en particulier sa conviction que les gouvernements devraient effectuer des enquêtes approfondies lorsque des plaintes alléguant le mauvais traitement de détenus ont été formulées; il demande que, pour le cas présent, le gouvernement lui fournisse les résultats d'enquêtes précises, de même qu'une copie du rapport du médecin légiste, auquel s'est référé le gouvernement.
  2. 358. En ce qui concerne les sept syndicalistes qui, au dire des plaignants, étaient toujours en prison à la mi-octobre 1990, alors que de nombreux autres avaient été remis en liberté (MM. Al Hag Osman, Y.A. Abdalla, Al Simiet, Al Hassan, Hamad, Awad et M. Abdalla, dont les fonctions sont exposées dans le 277e rapport du comité, paragr. 344), le comité prend note des renseignements fournis par le gouvernement à leur sujet. Il constate également que le gouvernement donne des renseignements sur des individus qui n'ont pas été désignés, lors des anciens examens de ce cas, comme étant des syndicalistes (et notamment le Dr Al Sheikh Kineish et le Dr Ahmed Osman Sirag, ainsi que deux avocats: Ali Ahmed Al-Sayid et Abdelrahim Al Fihail) et que le gouvernement réfute la thèse selon laquelle M. Mohamed Faig aurait disparu après avoir été détenu par les forces de sécurité.
  3. 359. Il semble, d'après les renseignements du gouvernement, que les personnes en question ne seraient pas des syndicalistes ou, en tout cas, qu'elles auraient été relâchées et seraient libres d'exercer des activités syndicales. Le comité demande cependant au gouvernement de lui indiquer plus précisément où se trouvent MM. Al Hag Osman, Mannalla Abdalla et Faig. Le comité ne peut se contenter, pour formuler une recommandation en toute connaissance de cause sur ces aspects du cas, de la réponse du gouvernement qui prétend que ces personnes ne sont pas des syndicalistes. Le comité demande également aux organisations plaignantes de fournir tout renseignement supplémentaire qui pourrait exister au sujet de ces trois personnes.
  4. 360. Le comité regrette que le gouvernement n'ait pas envoyé un exemplaire du décret no 10 promulgué le 27 septembre 1989, en vertu duquel tous les biens et avoirs des syndicats qui avaient été confisqués auraient été rendus à leurs propriétaires légitimes, et qu'il avait réclamé lors du dernier examen du cas. (Voir 277e rapport du comité, paragr. 349, 351 et 356 b).) Le comité demande donc une nouvelle fois au gouvernement de lui fournir un exemplaire de ce texte aux termes duquel auraient été prises près de 3.000 décisions restituant les biens à leurs propriétaires, selon le gouvernement.
  5. 361. Enfin, le comité note que le gouvernement passe sous silence la révision en cours de la législation sur les relations professionnelles. Il rappelle que, lors du dernier examen de ce cas, le gouvernement avait évoqué la future création d'un comité tripartite dans le but d'adopter de nouvelles lois syndicales qui, de l'opinion du comité, devraient remplacer les décrets actuellement en vigueur (nos 2, 77, 78, 79 et 80 adoptés à la suite du coup d'Etat militaire de juin 1989) qui ont dissous toutes les organisations de travailleurs et organisations d'employeurs et les ont remplacées par des comités préparatoires ou des comités directeurs.
  6. 362. Lors du dernier examen de ce cas, le comité avait demandé spécifiquement au gouvernement de lui confirmer, même s'il n'en était qu'au stade préliminaire, que la nouvelle législation du travail envisagée abrogerait effectivement les décrets mentionnés ci-dessus. Faute d'informations sur cet aspect du cas, le comité ne peut que demander une fois encore au gouvernement de modifier d'urgence la législation soudanaise du travail et lui suggérer à nouveau de soumettre tout projet de loi au BIT pour commentaires, avant qu'il ne soit définitivement adopté.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 363. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité regrette vivement que le gouvernement se soit contenté d'affirmer que le Dr Ali Fadul était décédé en prison de "mort naturelle" sans fournir de documents officiels pour réfuter l'allégation selon laquelle la mort serait imputable à des tortures; il demande au gouvernement de lui communiquer les résultats de toute enquête relative aux mauvais traitements dont le détenu aurait été victime, ainsi qu'une copie du rapport du médecin légiste auquel s'est référé le gouvernement.
    • b) Tout en prenant note des indications du gouvernement selon lesquelles plusieurs syndicalistes encore en détention à la mi-octobre 1990 auraient été relâchés, le comité demande au gouvernement de lui fournir des informations précises sur la situation actuelle de MM. Al Hag Osman, Mannalla Abdalla et Mohamed Faig à propos desquels le gouvernement se contente de nier qu'il s'agissait de syndicalistes.
    • c) Le comité demande également aux organisations plaignantes de fournir tout renseignement additionnel qui pourrait exister au sujet de MM. Al Hag Osman, Mannalla Abdalla et Mohamed Faig.
    • d) Le comité demande au gouvernement, comme il l'avait déjà fait lors du dernier examen de ce cas, de lui communiquer une copie du décret no 10 de 1989 qui, selon le gouvernement, ordonne la restitution à leurs propriétaires légitimes des biens syndicaux confisqués.
    • e) Rappelant que les décrets militaires visant à dissoudre toutes les organisations de travailleurs et d'employeurs et à les remplacer par des comités préparatoires ou directeurs sont encore en vigueur et que, dans sa dernière réponse, le gouvernement n'a pas apporté de nouvelles informations sur une éventuelle révision de la législation du travail actuelle, le comité demande une fois de plus au gouvernement d'adopter d'urgence des mesures pour mettre sa législation en conformité avec les principes de la liberté syndicale et lui suggère à nouveau de soumettre tout projet de loi au BIT pour commentaires, avant qu'il soit définitivement adopté.
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