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Rapport définitif - Rapport No. 311, Novembre 1998

Cas no 1950 (Danemark) - Date de la plainte: 22-JANV.-98 - Clos

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430. Dans une communication en date du 22 janvier 1998, le Syndicat danois des enseignants (DUT) et la Confédération des salariés et des fonctionnaires (FTF) ont présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Danemark. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication du 20 mai 1998.

  1. 430. Dans une communication en date du 22 janvier 1998, le Syndicat danois des enseignants (DUT) et la Confédération des salariés et des fonctionnaires (FTF) ont présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Danemark. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication du 20 mai 1998.
  2. 431. Le Danemark a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 432. Les plaignants indiquent tout d'abord que le Syndicat danois des enseignants (DUT) est membre de la Confédération des salariés et des fonctionnaires (FTF) qui, en tant qu'organisation centrale, défend les intérêts de ses organisations membres pour les questions d'ordre général et international. Le DUT défend ses intérêts en ce qui concerne les conditions de salaire et d'emploi à l'échelle nationale par le biais de l'Organisation centrale danoise des enseignants (LC).
  2. 433. Les plaignants contestent une décision du 8 janvier 1997 dans laquelle le tribunal disciplinaire de la fonction publique locale a conclu que le boycott qui s'inscrivait dans le cadre d'une grève officielle organisée par la LC allait à l'encontre de la loi danoise sur les fonctionnaires. Ce boycott portait sur les postes d'enseignants visés par la grève. Celle-ci, qui constituait une action revendicative licite en vue d'obtenir de meilleures conditions de salaire et de travail conformément aux conventions collectives, s'adressait à l'ensemble des membres du DUT occupant tous les postes régis par la convention collective du 9 juillet 1993. Cette convention, qui est venue à expiration, avait été conclue entre les enseignants du primaire et du secondaire et la Direction des écoles de Copenhague. Les enseignants en question ne sont pas fonctionnaires et, par conséquent, la grève ne visait pas les fonctionnaires. Toutefois, le boycott s'adressait à tous les membres de la LC, dont les fonctionnaires, et leur interdisait de solliciter ou d'accepter des postes régis par la convention collective susmentionnée.
  3. 434. Le tribunal disciplinaire de la fonction publique locale a condamné la LC à une amende de 100 000 couronnes danoises. Conformément aux statuts de la LC, cette amende doit être versée par le DUT étant donné que la grève visait seulement ses membres. Une copie de la décision du tribunal a été jointe à la plainte.
  4. 435. Deux organisations d'employeurs, l'Association nationale des autorités locales du Danemark et l'autorité locale de Frederiksberg, ont déclaré au tribunal disciplinaire de la fonction publique locale que le fait que le boycott se rapportait au groupe de fonctionnaires dénommé "groupe fermé" (Note 1) indiquait qu'il s'agissait d'une action revendicative collective engagée par des fonctionnaires dans le but d'influencer en fait la fixation des salaires dans le conflit du travail en question.
  5. 436. La LC fait valoir que le boycott ne constitue pas une infraction collective de ce qui pourrait être considéré comme faisant partie des obligations des fonctionnaires intéressés, ceux-ci n'étant pas tenus de solliciter ou d'accepter l'un quelconque des postes visés par le boycott. Ne pas se porter candidat à ces postes ne constitue un manquement à aucune obligation. Le boycott n'empêchait pas les employeurs de nommer des fonctionnaires à d'autres postes ou de classer ces postes dans la catégorie des postes de fonctionnaires employés par des autorités locales.
  6. 437. Au Danemark, comme il ressort notamment de la décision du tribunal disciplinaire de la fonction publique locale, la loi sur les fonctionnaires interdit aux enseignants ayant statut de fonctionnaire d'engager une action collective, que ce soit sous la forme d'un boycott ou d'une grève.
  7. 438. En résumé, les droits des diverses catégories d'enseignants du primaire et du secondaire qui effectuent un même travail et perçoivent un même salaire diffèrent considérablement en matière d'action collective. Les enseignants couverts par une convention collective jouissent entre autres du droit de grève alors que ceux qui sont fonctionnaires n'ont pas le droit de recourir à la grève ou à toute autre forme d'action collective.
  8. 439. En conclusion, le DUT et la FTF estiment que cette situation juridique va à l'encontre des conventions nos 87 et 98 de l'OIT et de l'interprétation que le Comité de la liberté syndicale en a donnée dans plusieurs de ses décisions.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 440. Dans sa communication du 20 mai 1998, le gouvernement indique tout d'abord que le tribunal disciplinaire de la fonction publique locale, dans sa décision du 8 janvier 1998, a jugé contraire à la loi sur les fonctionnaires le fait que les enseignants ayant statut de fonctionnaire ont participé à une action collective à l'occasion d'une grève organisée par des enseignants couverts par une convention collective.
  2. 441. Le tribunal a estimé que l'appel lancé par la LC a conduit à une action collective qui, d'une manière générale, a été comparable à une violation par les fonctionnaires de leurs obligations au regard de la loi sur les fonctionnaires et de la loi sur le tribunal disciplinaire de la fonction publique locale. L'action collective prévue visait à interdire à tous les enseignants fonctionnaires de solliciter ou d'accepter des postes couverts par la convention collective qui avait pris fin et n'avait pas été renégociée. La Constitution danoise indique que le statut relatif au recrutement, au licenciement, à la mutation et à la retraite des fonctionnaires est défini par la loi. Les conditions d'emploi et de pension des fonctionnaires de l'Etat sont régies en partie par la législation -- à savoir la loi no 572 du 5 août 1991 relative aux fonctionnaires de l'Etat, du système scolaire et de l'Eglise nationale, telle qu'amendée (TL), et la loi no 724 du 9 septembre 1993 relative aux pensions des fonctionnaires de l'Etat, du système scolaire et de l'Eglise nationale (TPL) -- et en partie par voie d'accord, conformément à l'article 45 de la TL.
  3. 442. La procédure pour la négociation et la conclusion d'accords a été établie par l'accord de base qui s'applique aux fonctionnaires (c'est-à-dire la loi no 715 du 28 novembre 1969 sur l'accord de base prévu dans la loi no 291 du 18 juin 1969 relative aux fonctionnaires de l'Etat, du système scolaire et de l'Eglise nationale). Toutefois, le règlement de tout différend est régi par l'article 46 de la TL.
  4. 443. Les fonctionnaires ne relèvent pas du droit commun du travail, et la plupart des dispositions de la législation générale du travail ne s'appliquent pas aux fonctionnaires.
  5. 444. Le gouvernement considère que toute relation d'emploi se caractérise par un certain équilibre entre les droits et les devoirs des employeurs et des salariés.
  6. 445. A l'origine, les fonctionnaires de l'Etat étaient employés à vie et étaient tenus à une loyauté toute particulière, qui était compensée par la sécurité de l'emploi et par des droits à pension, à une époque où la notion de pension n'existait pas sur le marché du travail.
  7. 446. Les principales différences entre les conditions d'emploi des fonctionnaires et celles définies dans le droit commun du travail sont les suivantes:
  8. 1) Le règlement des différends dans le cadre de négociations (art. 46 de la TL). La loi définit un certain nombre de dispositions fondamentales en matière d'emploi, mais la plupart des conditions d'emploi et de salaire sont établies par des accords conclus entre les organisations centrales de fonctionnaires et le ministère des Finances.
    • Si les parties ne s'entendent pas sur la reconduction des accords, elles ne peuvent pas se libérer de leurs obligations au regard des accords par le biais d'une action collective. Il faut pour cela que le ministre des Finances présente un projet de loi, conformément à l'article 46 de la TL. Cette modalité de règlement n'a pas été utilisée depuis que le système a été mis en place dans le cadre de la réforme du statut des fonctionnaires en 1969 (toutefois, les fonctionnaires ont fait l'objet de lois de prorogation qui couvraient l'ensemble du secteur public du marché du travail).
  9. 2) Les fonctionnaires ont droit à une indemnité de licenciement pendant trois ans si leur poste est supprimé et qu'un autre poste approprié ne peut leur être offert. L'indemnité de licenciement consiste en un versement mensuel qui correspond au montant du dernier salaire (art. 32 de la TL). Au bout des trois ans, le fonctionnaire perçoit une pension s'il avait au moins dix ans d'ancienneté.
  10. 3) A certains égards, les fonctionnaires bénéficient d'un régime de pension particulièrement favorable qui est défini dans la TPL.
    • Lorsqu'un fonctionnaire employé depuis au moins dix ans est licencié en raison d'un événement imprévisible (maladie, incompétence, problèmes de communication), il a droit à une pension individuelle spécifique dont le montant est fonction de son ancienneté et du salaire qui lui était versé au moment de la cessation de ses fonctions (art. 2 de la TPL).
  11. 4) En cas de retraite anticipée, les fonctionnaires bénéficient d'un régime avantageux.
  12. 5) Les fonctionnaires sont couverts par un ensemble spécifique de règles disciplinaires (art. 19-25 de la TL). Ces règles garantissent aux fonctionnaires ayant manqué à leurs devoirs à titre individuel que les faits en cause leur soient notifiés et qu'ils aient la possibilité de se défendre. En cas de manquement grave, ils sont interrogés par un interrogateur spécial.
    • Les sanctions diffèrent suivant la nature de l'infraction de sorte qu'elles soient proportionnées aux délits commis. Au sujet des règles disciplinaires, il convient de tenir compte du devoir de réserve (art. 10 de la TL) en vertu duquel un fonctionnaire doit observer consciencieusement les règles inhérentes à sa position et avoir une conduite respectable et loyale tant pendant son service qu'en dehors de celui-ci.
    • Les règles disciplinaires s'appliquent en cas d'infractions individuelles; le tribunal disciplinaire de la fonction publique locale est compétent en matière d'infractions collectives (grèves, etc.) (art. 52-54 de la TL).
  13. 6) Outre ces différences importantes qui, pour la plupart, sont à l'avantage des fonctionnaires, il existe des différences d'ordre secondaire en ce qui concerne les questions suivantes: période de stage, obligation d'accepter une mutation, préavis de licenciement et réduction de la durée du travail en cas de maladie, sans diminution du salaire.
  14. 447. Le gouvernement estime que les fonctionnaires sont assujettis à des conditions d'emploi spécifiques qui comportent des obligations particulières mais aussi un certain nombre d'avantages.
  15. 448. Selon le gouvernement, l'obligation d'accepter une mutation est compensée par la possibilité, le cas échéant, d'accéder plus facilement à un autre poste: par ailleurs, le devoir de réserve et l'interdiction qui en découle de faire grève sont contrebalancés par des dispositions favorables en matière de licenciement ou le versement d'une pension dans des situations particulières, en dehors de la pension de vieillesse ou de retraite anticipée. En outre, les règles disciplinaires garantissent que les fautes de conduite font l'objet d'une enquête approfondie et que les sanctions soient proportionnées aux délits. Le statut des fonctionnaires, comme toute autre relation d'emploi, devrait être considéré de manière globale. Ainsi, c'est la relation d'emploi tout entière qui devrait être réexaminée dans le cas où certaines de ces composantes seraient supprimées ou profondément modifiées.
  16. 449. Lorsque les autorités locales sont devenues compétentes pour fixer les conditions de salaires et d'emploi des enseignants du primaire et du secondaire, le principe a été que les conditions d'emploi des enseignants devraient à l'avenir être définies par les conventions collectives. Etant donné que les enseignants qui avaient déjà le statut de fonctionnaire ne pouvaient pas être mutés contre leur gré à un poste couvert par une convention collective, une loi a été adoptée qui garantit leur statut de fonctionnaire. Ces enseignants forment ledit "groupe fermé" (loi no 382 du 20 mai 1992). A la demande du Syndicat danois des enseignants, ce statut particulier a été garanti même dans le cas de certains types de mutations.
  17. 450. C'est pourquoi il existe deux statuts différents d'emploi dans le système scolaire: les salariés du "groupe fermé" qui relèvent de la fonction publique et les autres qui sont couverts par des conventions collectives et des régimes privés de pension.
  18. 451. En conclusion, le gouvernement souligne que les enseignants fonctionnaires qui ont pris part à l'action collective caractérisée par le boycott des offres des postes d'enseignants couverts par des conventions collectives seront tous libres de choisir d'être employés dans le cadre d'une convention collective. Toutefois, l'expérience montre que cela n'est normalement jamais le cas et que les enseignants préfèrent conserver leur statut de fonctionnaire, en particulier pour ce qui est des mutations. Cela est également confirmé par le fait que la LC a conclu l'accord spécial en vertu duquel les fonctionnaires ont la possibilité de conserver leur statut, notamment en cas de mutation. Il s'avère que seul un groupe extrêmement réduit de quelque cinq personnes a été muté à des postes couverts par une convention collective, par exemple dans le cas où les autorités locales en matière de recrutement ont indiqué que la promotion à un poste de vice-principal s'assortissait de cette condition.
  19. 452. Il se trouve donc que ce groupe d'enseignants a préféré conserver son statut de fonctionnaire, ainsi que les droits et obligations qui s'y rattachent, notamment celle de ne pas engager d'action collective.
  20. 453. Les enseignants étant donc libres de choisir un statut d'emploi régi par le droit du travail, le gouvernement considère qu'il n'a pas violé les conventions nos 87 et 98. Toutefois, le fait que de nombreuses personnes sont employées en tant que fonctionnaires est susceptible de poser des problèmes au regard des obligations du Danemark à l'échelle internationale. Aussi le gouvernement s'est-il efforcé ces dernières années de réduire le nombre de fonctionnaires. Des négociations sur ce point sont actuellement menées entre le ministère des Finances et les organisations danoises de fonctionnaires.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 454. Le comité observe que, dans le présent cas, les allégations se réfèrent à une restriction au droit de grève de certains enseignants qui relèvent de la législation et des réglementations de la fonction publique.
  2. 455. En particulier, le comité note, au vu de la décision prise en 1995 par le tribunal disciplinaire de la fonction publique locale à propos du cas Association nationale des autorités locales du Danemark et de l'autorité locale de Frederiksberg contre l'Organisation centrale des enseignants (LC), que cette organisation a été accusée d'avoir engagé une action collective visant quelque 35 000 enseignants du système éducatif danois du primaire et du secondaire. Ces enseignants, qui sont considérés comme des fonctionnaires, relèvent de la loi sur le tribunal disciplinaire de la fonction publique locale et de la loi sur les fonctionnaires dont les articles 2(1) et 3(3), d'une part, et les articles 53(1) et (2) et 54, d'autre part, interdisent les actions collectives (voir annexe). Le tribunal a donc condamné la LC à payer une amende de 100 000 couronnes danoises.
  3. 456. Le comité note en premier lieu que l'action qui, de fait, a été sanctionnée est le "boycott", de la part des membres des organisations affiliées à la LC. Le boycott visait à refuser de solliciter ou d'accepter des postes d'enseignants du primaire et du secondaire régis par la convention collective venue à expiration. Or le tribunal s'est prononcé contre la LC au motif que le boycott visait des fonctionnaires "afin d'influencer en fait la fixation des salaires dans le conflit du travail en question". Ce boycott s'inscrivait dans "l'action collective" entreprise par les personnes occupant les postes relevant de la convention collective venue à expiration. Tout en notant que la LC a fait valoir devant le tribunal que les fonctionnaires n'avaient pas l'obligation de solliciter ou d'accepter les postes faisant l'objet de l'avis de boycott et que, par conséquent, ils n'avaient pas enfreint leurs obligations, le comité estime qu'il suffit d'examiner la question principale du présent cas, c'est-à-dire le fait que le tribunal a jugé l'action collective contraire à la loi sur le tribunal disciplinaire de la fonction publique locale et à la loi sur les fonctionnaires. La question qui se pose pour le comité est celle de savoir si les enseignants peuvent voir leur droit de grève limité du fait qu'ils sont des fonctionnaires.
  4. 457. Le comité rappelle qu'il a été saisi de nombreux cas de restrictions du droit de certains enseignants du secteur privé et du secteur public d'entreprendre une action collective. Il a toujours estimé que les enseignants qui ont souvent un statut et des fonctions particuliers devraient pouvoir jouir du droit de grève. (272e rapport, cas no 1503 (Pérou), paragr. 116 et 117; 277e rapport, cas no 1528 (Allemagne), paragr. 285 et 286; 286e rapport, cas no 1629 (République de Corée), paragr. 563.) Le comité ne peut donc que réitérer qu'il a toujours considéré que le droit de grève est l'un des droits fondamentaux des travailleurs et de leurs organisations; il est l'un des moyens essentiels dont ils disposent pour promouvoir et défendre leurs intérêts professionnels. Le comité rappelle que le droit de grève peut seulement être restreint, voire interdit: 1) dans la fonction publique uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d'autorité au nom de l'Etat; ou 2) dans les services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire les services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 526.) Or le comité considère que les enseignants ne tombent pas dans la définition des services essentiels ou de la fonction publique exerçant des prérogatives de puissance publique. (Op. cit., cas nos 1503, 1528 et 1629.)
  5. 458. Le comité note que le gouvernement a estimé dans sa réponse que le devoir de réserve et "l'interdiction qui en découle de faire grève" sont compensés par des réglementations favorables en matière d'indemnités de licenciement, de pension et de retraite anticipée. En outre, le comité note que le gouvernement a indiqué que deux statuts coexistent dans le système éducatif: d'un côté, le "groupe fermé" des enseignants ayant statut de fonctionnaires et, de l'autre, les enseignants qui relèvent de conventions collectives (et jouissent du droit de grève); par ailleurs, le gouvernement a signalé que, alors qu'ils étaient libres de choisir leur statut, certains enseignants ont préféré et préféreront probablement conserver leur statut de fonctionnaire en raison des avantages qu'il comporte. Toutefois, le comité a déjà souligné à ce sujet qu'il ne tenait pas compte du statut ou de la dénomination qu'un système national accorde ou applique aux enseignants, mais qu'il se souciait de savoir si les salariés qui sont privés du droit de grève exercent leurs responsabilités dans des services essentiels ou agissent en tant qu'organes de la puissance publique. Pour paraphraser la commission d'experts (étude d'ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1983, paragr. 214), le principe du droit de grève perdrait tout son sens si l'on retenait une définition trop extensive de la fonction publique. (277e rapport, cas no 1528 (Allemagne), paragr. 287.) Les arguments, à savoir que traditionnellement les fonctionnaires ne bénéficient pas du droit de grève parce que l'Etat en tant que leur employeur a un devoir de protection supérieur à la moyenne vis-à-vis d'eux, n'ont pas convaincu le comité de modifier sa position sur le droit de grève des enseignants. (Ibid., paragr. 288.)
  6. 459. En conséquence, il prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les enseignants puissent exercer leur droit de grève, même s'ils sont fonctionnaires, et de le tenir informé de l'évolution de la situation.
  7. 460. De plus, tout en tenant dûment compte du fait que le plaignant, dans le présent cas, est le Syndicat danois des enseignants étant donné que, conformément aux statuts de son organisation de tutelle -- l'Organisation centrale danoise des enseignants (LC) --, c'est lui qui doit payer l'amende, le comité rappelle que nul ne devrait faire l'objet de sanctions pour avoir déclenché ou tenté de déclencher une grève légitime et que des sanctions devraient pouvoir être infligées pour fait de grève uniquement dans les cas où les interdictions en question sont conformes aux principes de la liberté syndicale. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 590, et Liberté syndicale et négociation collective, 1994, paragr. 176.) Le comité prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que la décision du tribunal disciplinaire de la fonction publique locale puisse être révisée en considération des principes susmentionnés de liberté syndicale et de le tenir informé à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 461. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que tous les enseignants, même s'ils sont fonctionnaires, puissent exercer leur droit de grève et de le tenir informé de l'évolution de la situation.
    • b) Le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que la décision du tribunal disciplinaire de la fonction publique locale puisse être révisée en considération des principes susmentionnés de liberté syndicale et de le tenir informé à cet égard.

Z. Annexe

Z. Annexe
  • Loi sur les fonctionnaires (TL)
  • Article 10
  • Le fonctionnaire observe consciencieusement les règlements
  • afférents à son
  • poste et, tant dans le cadre de son service qu'en dehors de
  • celui-ci, il se
  • montre digne de l'estime et de la confiance inhérentes à sa
  • fonction.
  • Article 53, paragraphes 1 et 2
  • Le tribunal disciplinaire de la fonction publique locale est
  • compétent pour
  • les cas relatifs aux questions suivantes:
    1. 1) violation ou interprétation des accords conclus ou des
  • dispositions qui,
  • conformément aux articles 46 et 47, tiennent lieu d'accords;
    1. 2) infraction collective à l'article 10 commise par des
  • fonctionnaires qui
  • relèvent d'une ou de plusieurs des organisations centrales
  • mentionnées à
  • l'article 49.
    1. 1) Dans les cas analogues à ceux qui sont mentionnés au
  • paragraphe 2 de
  • l'article 53(1), le président du tribunal ou son adjoint peut
  • ordonner de
  • mettre un terme à l'infraction.
    1. 2) Tout fonctionnaire ayant commis l'une des infractions
  • mentionnées au
  • paragraphe 2 de l'article 53(1) peut faire l'objet d'un
  • avertissement ou d'un
  • blâme ou se voir infliger une amende par le tribunal.
    1. 3) Une ou plusieurs des organisations centrales mentionnées à
  • l'article 49
  • peuvent se voir infliger une amende par le tribunal en cas de
  • soutien à une
  • violation analogue à celle mentionnée au paragraphe 2 de
  • l'article 53(1) ou
  • lorsque l'organisation n'a pas tenté, par tous les moyens
  • raisonnables,
  • d'empêcher l'infraction ou d'y mettre un terme. L'amende est
  • versée à la
  • partie qui a engagé la procédure. Les dispositions contenues
  • dans la première
  • et la deuxième phrase s'appliquent en conséquence aux
  • organisations affiliées
  • aux organisations centrales.
  • Loi sur le tribunal disciplinaire de la fonction publique locale
  • Article 2(1)
  • Le tribunal est compétent en cas d'infraction collective aux
  • dispositions
  • ayant trait à l'article 10 de la loi danoise sur les fonctionnaires,
  • aux
  • règles et aux statuts applicables aux fonctionnaires employés
  • par les
  • autorités locales et aux fonctionnaires employés par la
  • Corporation des
  • hôpitaux de Copenhague, ainsi qu'aux réglementations qui
  • s'appliquent au
  • personnel employé à l'échelle locale ou régionale dans des
  • garderies ou
  • internats ou dans des établissements de ce type qui sont
  • indépendants et ont
  • conclu un accord d'exploitation avec un conseil local ou un
  • conseil de comté.
  • Le tribunal n'est pas compétent en cas d'infractions commises
  • par des salariés
  • qui relèvent d'une organisation jouissant du droit de
  • négociation.
  • Article 3(3)
  • Le tribunal peut décider qu'une ou plusieurs des organisations
  • mentionnées à
  • l'article 1(4) seront passibles d'une amende en cas de soutien
  • à une
  • infraction analogue à celle qui est mentionnée à l'article 2(1)
  • ou lorsque
  • l'organisation n'a pas tenté, par tous les moyens raisonnables,
  • d'empêcher
  • l'infraction ou d'y mettre un terme. L'amende est versée à la
  • partie qui a
  • engagé la procédure.
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