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Rapport intérimaire - Rapport No. 335, Novembre 2004

Cas no 2320 (Chili) - Date de la plainte: 30-NOV. -03 - Clos

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  • du groupe d’entreprises PLASTYVERG: licenciements de délégués syndicaux et de travailleurs syndiqués, pressions pour que
  • les travailleurs syndiqués démissionnent du syndicat, actes d’ingérence commis par diverses entreprises pour isoler le syndicat et négocier avec les délégués du personnel nommés par l’employeur; répression violente de la grève nationale du 13 août 2003 en dépit de son caractère pacifique; arrestations de syndicalistes, menaces et intimidations à l’encontre des travailleurs ayant participé
  • à la grève, utilisation de blindés, lances à eau
  • et gaz lacrymogènes – y compris contre le siège de la CUT –, mauvais traitements, fermetures de rues autorisées pour la manifestation, agression contre le secrétaire général de la CUT, tir de projectiles en caoutchouc, atteintes à l’intégrité physique de travailleurs, tortures commises sur un détenu, établissement de listes des participants à la grève dans différents établissements, licenciement d’une dirigeante syndicale de l’enseignement et de sa sœur; violations des droits syndicaux de la part de l’entreprise d’Etat CODELCO et des entreprises HERPA SA, Viñas Tarapacá et Santa Helena.
    1. 567 Les plaintes figurent dans des communications du Syndicat national interentreprises des travailleurs de la métallurgie, des communications, de l’énergie et des activités connexes (SME), datées du 30 novembre 2003 et des 14 janvier et 23 février 2004, et dans une communication de la Fédération syndicale mondiale (bureau régional des Amériques) datée du 29 mars 2004. Le SME a transmis des informations complémentaires et présenté de nouvelles allégations dans des communications datées des 10 mai, 2 juin et 4 septembre. Le gouvernement a fait part de ses observations dans des communications datées des 20 mai et 30 juin 2004. Le groupe PLASTYVERG a adressé ses commentaires dans une communication datée du 30 avril 2004.
    2. 568 Le Chili a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 569. Dans sa communication du 30 novembre 2003, le Syndicat national interentreprises des travailleurs de la métallurgie, des communications, de l’énergie et des activités connexes (SME) dénonce les pratiques antisyndicales suivies au sein du groupe d’entreprises PLASTYVERG, et il évoque le licenciement, par une des entreprises du groupe (l’entreprise Promociones Packs y Ofertas SA), des délégués syndicaux José Saavedra Araya (le 23 septembre 2003) et Luis Labarca Lazo (le 27 septembre 2003), ainsi que de Pablo Villavicencio, travailleur syndiqué; a également été licencié Luis Martínez, délégué syndical dans l’entreprise Center Packs, lequel a toutefois été réintégré à une date ultérieure (parce qu’il bénéficiait de l’immunité syndicale), mais dans un établissement différent; par la suite, cette entreprise a demandé au délégué syndical Luis Martínez Duarte de démissionner du syndicat et de créer un groupe de travailleurs à part; devant son refus, l’entreprise Promociones Packs y Ofertas SA a nommé un délégué du personnel et obtenu la signature d’un groupe de travailleurs après leur avoir accordé des avantages financiers; parallèlement, l’entreprise a commencé à faire pression sur les syndiqués pour qu’ils démissionnent du syndicat et adhèrent au groupe de travailleurs en question.
  2. 570. En octobre 2003, le SME a présenté à titre de syndicat interentreprises des projets de contrat collectif aux différentes entreprises de PLASTYVERG, lesquelles ont refusé d’y prêter attention et ont continué d’exercer des pressions sur les travailleurs pour qu’ils se retirent du syndicat et des négociations. Par la suite, les projets ont été présentés en tant que projets élaborés par des groupes de travailleurs (comme le prévoit la loi). L’entreprise Promociones Packs y Ofertas SA a accepté d’entendre la requête du délégué du personnel (qu’elle avait fait nommer, ainsi qu’on l’a dit). Pour toutes ces raisons, le SME a porté plainte auprès de l’inspection du travail; les travailleurs ont continué de subir des pressions pour qu’ils démissionnent du syndicat et qu’ils se retirent des négociations collectives; le délégué syndical Rafael San Martín Artete s’est vu changer d’affectation, pour être embauché à emballer des rouleaux, outre que l’entreprise l’a menacé de diminuer son salaire. Le 26 novembre 2004, le directeur général des entreprises PLASTYVERG a informé le délégué syndical Sergio Cornejo Durán que, au terme des négociations collectives, les travailleurs devraient démissionner du syndicat.
  3. 571. Dans leurs communications des 29 mars et 10 mai 2004, respectivement, la Fédération syndicale mondiale (bureau régional des Amériques) et le SME allèguent qu’Antonio Cordero et Juan Muñoz, membres du SME, ont été licenciés pour ne s’être pas pliés à l’ordre émis par l’entreprise PLASTYVERG de démissionner «volontairement» du syndicat «pour les besoins de l’entreprise». En outre, à la suite des pressions et des actes de harcèlement constants commis par l’entreprise, les syndiqués Nelson Araneda, Víctor Viera, José Vera, Fernando Martínez, José Poblete, Ramón Lizama et Héctor González ont fini par céder et accepter de signer, après avoir été licenciés, une supposée déclaration de «départ volontaire»; l’entreprise a ensuite engagé d’autres personnes, en nombre inférieur. L’entreprise avait antérieurement indiqué que tous ceux qui avaient participé aux négociations collectives seraient licenciés à l’expiration de la période d’immunité légale.
  4. 572. Depuis le lundi 15 mars dernier, après avoir reçu de l’association professionnelle (SOFOFA) copie de la plainte adressée à l’OIT par notre syndicat, l’entreprise oblige les travailleurs à signer une déclaration en blanc, du format papier à lettre. Tous les travailleurs sont menacés de licenciement s’ils ne soutiennent pas l’entreprise en apposant leur signature. Telle est la menace brandie par les chefs de section ou les supérieurs: «Si vous désirez conserver votre emploi, signez cette déclaration». Tout travailleur qui refusera de signer sera licencié «pour les besoins de l’entreprise» en vertu de l’article 161 du Code du travail, comme cela a été le cas de Vladimir Castillo.
  5. 573. Pour obtenir ladite signature, des représentants de l’entreprise présentent à chaque travailleur, l’un après l’autre, sur le lieu de travail, une lettre adressée par l’entreprise et l’association patronale SOFOFA à l’Organisation internationale du Travail. Il y est fait référence à la plainte déposée le 30 novembre 2003 par le syndicat auprès de l’OIT, contre l’Etat chilien, pour cause d’infraction aux conventions nos 87 et 98. Jusqu’au jeudi 19 mars, face à cette situation et à l’absence de protection contre le licenciement antisyndical, le syndicat a conseillé aux travailleurs de signer la déclaration s’ils subissaient des pressions, façon de prouver l’existence d’une action antisyndicale. En conséquence, en date du jeudi 19 mars 2004, l’entreprise avait recueilli 198 signatures de travailleurs de différentes branches dans le but de court-circuiter l’organisation plaignante, ce qui lui permettrait, croyait-elle, de battre en brèche les arguments avancés par cette dernière.
  6. 574. De la même manière, depuis le mercredi 17 mars 2004, l’entreprise et les délégués du personnel nommés par elle obligent les travailleurs à signer une lettre toute prête, dans laquelle le signataire est censé prendre position contre le syndicat et exige que les délégués syndicaux soient sanctionnés. Les délégués du personnel nommés par l’entreprise et ayant participé à la chasse aux signatures pour que des sanctions soient prononcées contre les délégués syndicaux (ainsi que sont désignés les représentants des travailleurs aux termes de la législation du Chili) sont au nombre de trois; ces délégués, dont aucun n’est membre du syndicat, prennent part à toutes les actions antisyndicales montées par l’entreprise.
  7. 575. Selon l’organisation plaignante, tous ces événements ont été déclenchés par le fait que, le 15 mars, la direction de PLASTYVERG a reçu une copie de la plainte officielle déposée le 30 novembre 2003 auprès de l’OIT, ce qui a donné lieu à une vague d’actions contre la liberté syndicale de la part de l’entreprise et, en conséquence, à un grave préjudice pour les travailleurs. Le syndicat attend le jugement d’une première plainte déposée devant les tribunaux et qui résume les six premiers mois de pratiques antisyndicales suivies par cette entreprise.
  8. 576. Les travailleurs des entreprises PLASTYVERG membres du syndicat qui ont dû se démettre de leurs fonctions sont les suivants: Fernando Martínez (Center Packs), Víctor Viera (Promo Packs), José Poblete (Center Packs), Ramón Lizama (Promo Packs), Nelson Araneda (PLASTYVERG), Vladimir Castillo (Promo Packs), José Vera Vera (Promo Packs), Antonio Cordero Espinoza (Center Packs), Héctor González (Promo Packs), Juan Carlos Muñoz (Promo Packs). Certains ont accepté de signer une supposée déclaration de démission volontaire (qui n’a de volontaire que le nom) en échange d’un meilleur salaire après avoir fait l’objet de harcèlements et de mises à pied répétés, politique adoptée par l’entreprise pour occulter ses pratiques antisyndicales. Deux autres travailleurs, ayant refusé de démissionner, ont été licenciés pour les besoins de l’entreprise alors que, depuis lors, ils ont été remplacés à leur poste.
  9. 577. Dans sa communication du 2 juin 2004, le SME allègue que les travailleurs syndiqués suivants ont été licenciés le 31 mai 2004 «pour les besoins de l’entreprise» (art. 161 du Code du travail): Mario Sandoval, Guillermo Pérez, Jorge Cerda et Alex Delgado. L’entreprise a déjà engagé d’autres personnes pour leur succéder. Le syndicat a demandé à la Direction du travail de constater l’existence d’atteintes à la liberté syndicale, lesquelles n’ont fait que redoubler au sein des entreprises PLASTYVERG.
  10. 578. Enfin, dans ses communications des 14 janvier et 23 février 2004, le SME invoque des atteintes aux droits syndicaux de la part des entreprises HERPA SA, Viñas Tarapacá et Santa Helena et de l’entreprise d’Etat CODELCO.
  11. 579. Le SME allègue que, le 27 mai 2003, les travailleurs de la multinationale espagnole HERPA SA Chile ont désigné Néstor Carrasco comme délégué syndical. L’entreprise a refusé de reconnaître le SME et le délégué syndical, lequel a été licencié et a dû être réintégré par ordre de justice. A la demande du syndicat, la Direction du travail a effectué un contrôle le 11 septembre 2003, à l’issue duquel elle a condamné l’entreprise à des amendes pour défaut de versement des rémunérations dues, non-respect des normes de sécurité et mise à pied illégale d’un délégué syndical protégé par l’immunité syndicale. Le 22 octobre 2003 a été constituée la commission chargée d’engager les négociations, au sein de laquelle ont été nommés les travailleurs suivants: Néstor Carrasco, Marcos Rojas et Andrés Sánchez. Le lendemain, l’entreprise a mis à pied illégalement Alberto Carrasco, Marcos Rojas et Jaime Vera, tous membres du SME, afin d’empêcher que les travailleurs atteignent le quorum voulu pour que les négociations puissent avoir lieu. Le 11 décembre 2003, un contrôle a été demandé à l’encontre de l’entreprise accusée de pratiques antisyndicales: refus de fournir l’emploi prévu au contrat, modification des fonctions du délégué syndical, nouvelles embauches pour remplacer illégalement les travailleurs syndiqués, isolement, aux heures des repas, des travailleurs réintégrés par rapport aux autres travailleurs pour éviter qu’ils communiquent entre eux, menaces de licenciement contre les syndiqués.
  12. 580. L’entreprise a continué de harceler Néstor Carrasco pour qu’il démissionne du syndicat et de l’entreprise. Il a fini par annoncer qu’il renonçait «volontairement» à ses fonctions auprès de l’Inspection du travail de San Bernardo le 18 décembre 2003. Le 21 janvier 2004, l’entreprise a approuvé quelques éléments des négociations collectives mais rejeté tous les autres. Le lendemain, la fin des négociations a été déclarée à la Direction du travail, notamment parce que l’employeur refusait d’octroyer toute augmentation de salaire. Le 23 janvier a marqué le début de la grève légale avec occupation de l’entreprise. L’entreprise a déposé un recours aux fins de protection de ses droits (amparo) auprès de la Cour d’appel, recours actuellement en cours de jugement. Depuis le début de la grève, l’entreprise refuse de rencontrer les dirigeants syndicaux. Le 26 janvier, des inspecteurs ont tenté de déloger les travailleurs au motif que la grève était illégale. Le 2 février, l’entreprise a fait appel à 12 briseurs de grève détachés par une entreprise de sécurité. Cette situation a été dénoncée auprès de l’inspection du travail, qui a constaté l’infraction et ordonné à ces travailleurs d’évacuer l’entreprise.
  13. 581. Le 17 février, à 6 h 30, les travailleurs ont réinvesti l’entreprise de manière pacifique. A 8 h 30 s’est présentée une unité de carabiniers, mais les travailleurs ont refusé d’évacuer les locaux en l’absence d’un ordre de la justice. Plus tard est arrivé un important contingent de renforts de la police qui a procédé par la force, avec une violence extrême et disproportionnée, à l’évacuation des cinq travailleurs qui se trouvaient dans l’entreprise. En conséquence, trois des travailleurs ont subi des blessures graves et tous ont été arrêtés avec les trois travailleurs qui leur avaient manifesté leur solidarité. Les carabiniers, au nombre de plus de 60, parmi eux deux motocyclistes, ont utilisé une lance à eau, trois fourgons et des grenades lacrymogènes. Jusqu’à la date de dépôt de la plainte, les carabiniers ont maintenu une présence à l’intérieur de l’entreprise, ce qui équivaut à un acte d’intimidation contre les grévistes.
  14. 582. L’organisation plaignante allègue que ces faits sont imputables à une entente entre les grandes entreprises exportatrices et les multinationales qui leur fournissent des services pour qu’elles puissent produire, sans que l’Etat prenne les mesures appropriées pour mettre fin à ce comportement. Les autorités se contentent d’imposer une amende d’un faible montant à l’entreprise en infraction sans mettre un terme à ses agissements. Le SME allègue en outre que les entreprises Viñas Tarapacá et Santa Helena sont tout aussi fautives pour avoir permis à des briseurs de grève de pénétrer dans leurs locaux et de prendre la place des grévistes de HERPA SA.
  15. 583. Le SME signale d’autre part que l’entreprise d’Etat CODELCO, Division de la mine El Teniente à Rancagua, VIe région, recourt, pour l’exploitation des gisements de cuivre, à des entreprises générales, et que ces dernières font à leur tour appel à des sous-traitants. De cette façon, l’entreprise CODELCO n’a pas de relations contractuelles avec tous les mineurs qui travaillent sur son territoire. Le SME allègue que, en novembre 2002, ces entreprises ont opposé un refus aux négociations collectives. L’Inspection provinciale du travail, qui est revenue sur sa position initiale, soutient aujourd’hui les entreprises générales dans leurs agissements, en alléguant des avis rendus par la Direction du travail elle-même, avis qui n’ont pas été sanctionnés par le Parlement, et qui impliquent en pratique une modification de la loi, étant donné que le droit de négocier collectivement est refusé à des milliers de travailleurs syndiqués.
  16. 584. Diverses tentatives effectuées par le Syndicat interentreprises des travailleurs de CODELCO, SITELCO, de créer un organisme conjoint pour essayer de trouver des solutions avec les représentants de l’entreprise CODELCO se sont heurtées à l’argument selon lequel l’entreprise n’a pas de relations contractuelles avec les travailleurs. CODELCO ne reconnaît pas le syndicat, et a même engagé une action en justice à son encontre, estimant qu’il constitue une association illicite.
  17. 585. Peu de temps après la présentation du projet de contrat collectif aux entreprises générales travaillant pour CODELCO, Division de la mine El Teniente, trois dirigeants du syndicat ont été agressés sur la voie publique «pour qu’ils cessent de créer des problèmes». Au début de décembre 2003, l’entreprise CODELCO a empêché les dirigeants du syndicat d’accéder au lieu de travail des ouvriers syndiqués. Le 15 décembre, les travailleurs des entreprises générales ont entamé une grève sur le tas pour que leurs patrons acceptent de négocier à une même table avec le syndicat le projet de contrat collectif. Apparemment, à la suite d’une intervention de CODELCO, les entreprises ont refusé la proposition et déclaré qu’elles négocieraient uniquement avec les délégués du personnel, mais pas avec le syndicat.
  18. 586. Au cours de la discussion qui s’est tenue sur le lieu de travail, les entreprises ont proposé de négocier sous une forme particulière (entreprise par entreprise) en présence du syndicat. En dépit de l’accord du syndicat, les entreprises ont ultérieurement retiré leur proposition. Les travailleurs ont alors bloqué, dans l’après-midi du 15 décembre, les accès principaux de manière pacifique. Aucun cas d’agression contre des personnes n’a été relevé et la sécurité n’a jamais été menacée. Dans la matinée du 16 décembre, les travailleurs ont reçu de l’entreprise un ultimatum les engageant à quitter la mine. Environ deux heures plus tard, sans qu’il y ait eu la moindre tentative de négocier une solution, les carabiniers ont lancé leur assaut contre les travailleurs. Ils ont utilisé pour ce faire des matraques, des armes à feu, des carabines de calibre 12 avec des billes ou des plombs en acier revêtus de caoutchouc.
  19. 587. Seize travailleurs ont subi des blessures plus ou moins graves. Enzo Pérez a reçu 20 balles dans le corps. Cent quinze grévistes ont été arrêtés (y compris les blessés) puis remis en liberté l’après-midi même. La police a réussi à briser la grève et l’occupation des lieux.
  20. 588. A la date de dépôt de la plainte, 220 travailleurs avaient été licenciés pour avoir participé à cette action syndicale. CODELCO a demandé le renvoi des grévistes et l’inscription de leur nom sur des listes noires pour les empêcher de revenir dans ses locaux et de travailler pour ses entreprises contractantes.
  21. 589. Le SME allègue qu’il n’y a jamais eu d’ordre de justice pour expulser les grévistes et que l’autorité policière a agi illégalement en faveur de l’entreprise d’Etat CODELCO, comme en de nombreuses autres occasions.
  22. 590. Le SME rappelle que le véritable employeur des travailleurs engagés est CODELCO, laquelle est solidairement responsable, avec ses fournisseurs, à l’égard des travailleurs, y compris en matière de droits syndicaux. Il ajoute que, CODELCO étant une entreprise d’Etat, elle doit également répondre des actions antisyndicales.
  23. 591. Dans sa communication du 4 septembre 2003, le SME allègue que, à l’occasion des célébrations du 1er mai 2003, la Centrale unitaire des travailleurs avait appelé les travailleurs chiliens à une grève nationale de 24 heures pour le 13 août 2003. Cette communication était également signée par les organisations suivantes: Confédération nationale des travailleurs de la construction (CNTC), Confédération nationale des travailleurs de la santé (CONFENATS), Association nationale des travailleurs du service national des mineurs (ANTRASE), Ordre métropolitain des enseignants (CRP), Confédération nationale des travailleurs des transports terrestres (CONUTT), Syndicat national interentreprises des travailleurs du commerce, du textile, du vêtement et d’autres secteurs (SCTV) et Syndicat national interentreprises des gardes, vigiles et travailleurs des services généraux et connexes. Les travailleurs ont répondu à l’appel et ont participé activement au mouvement; toutes les villes du pays ont été le théâtre de manifestations, d’encombrements monstres et d’une occupation de la voie publique au cours de défilés et de rassemblements de travailleurs, situation dont les autorités ont été informées en temps opportun. Pour éviter que la population subisse des désagréments trop graves, les différents syndicats et associations professionnelles ont maintenu un service d’urgence comme, par exemple, dans les services de santé publique; dans les écoles, les enseignants ont même veillé à ce que des repas soient servis aux élèves indigents. Les dirigeants syndicaux et les travailleurs syndiqués ont préparé toute cette opération avec un grand sens des responsabilités et une extrême prudence. Lors d’une réunion tenue en septembre 2002 avec le Président de la République et ses ministres, les travailleurs chiliens avaient remis une liste de revendications intitulée «Pour un Chili juste», qui expliquait les raisons de cette grève nationale. Les revendications et raisons en question sont les suivantes:
  24. – contre l’aggravation et l’injustice des inégalités sociales;
  25. – contre l’application d’un modèle économique qui engendre le chômage et favorise le travail précaire;
  26. – pour que les autorités fassent respecter le droit du travail, qui est bafoué systématiquement par plus de la moitié des entreprises;
  27. – mettre un terme aux persécutions manifestes contre les syndicats, garantir aux travailleurs le droit de former des syndicats en toute liberté et sans subir de menaces;
  28. – assurer aux travailleurs de véritables négociations collectives, droit qui n’existe pas dans la pratique;
  29. – empêcher que l’on porte atteinte au droit de la femme qui travaille à un congé de maternité;
  30. – pour le droit à un emploi décent, à un salaire digne et à la sécurité sociale;
  31. – pour une protection sociale véritable et effective de tous les travailleurs salariés ou indépendants;
  32. – contre les politiques du gouvernement chilien qui sont contraires aux intérêts des travailleurs;
  33. – pour la réforme des tribunaux du travail, dont les jugements prennent plusieurs années.
  34. 592. Plus tôt, en août 2002, lors d’un rassemblement public, la haute direction de la CUT avait présenté ses motifs et griefs aux autorités du pays, et le Président de la République avait chargé le ministère du Travail d’étudier les revendications de la Centrale en septembre 2002. La veille de la grève, le 12 août, le Président de la République a déclaré le mouvement illégal et indiqué ne pas avoir eu connaissance des motifs de l’action engagée par la Centrale syndicale, témoignant ainsi du désintérêt et de l’insensibilité du gouvernement.
  35. 593. Dans les jours ayant précédé la grève, le pouvoir a commencé son action de discrédit, d’accusation et de discrimination contre ce mouvement des travailleurs. On a assisté en même temps aux premiers actes de répression de la force publique contre les syndicalistes. Le vendredi 8 août, par exemple, les carabiniers ont arrêté le conseiller national de la CUT, Sergio Troncoso, et le dirigeant national du Syndicat des travailleurs intermittents et travailleurs mis à pied, Pedro Muñoz, accusés d’avoir distribué des tracts sur la grève nationale. Après avoir passé trois heures au commissariat, ils ont été remis en liberté. Ils se sont vus saisir la totalité de leur matériel de propagande.
  36. 594. Pendant la phase préparatoire de la grève, les ministres de la Santé et de l’Education ont d’abord lancé des menaces contre les travailleurs du secteur public qui participeraient à ce mouvement syndical. C’est ainsi que le secrétaire à la Santé a adressé, le 23 juillet, la lettre suivante à ses subalternes: «Je vous informe que mon secrétariat n’approuve pas l’interruption ni la paralysie des activités, qu’elles soient totales ou partielles … En conséquence, je vous donne pour instruction ... de recourir … à la force publique.» De la même manière, le secrétaire à l’Education, Sergio Bitar, et d’autres hauts fonctionnaires du gouvernement ont menacé de sanctions – poursuites judiciaires, diminution du salaire, etc. – les travailleurs du secteur public qui participeraient à la grève nationale.
  37. 595. Ces actions d’intimidation de la part des autorités avaient clairement pour objet d’inquiéter les travailleurs pour qu’ils renoncent à exercer leurs droits. Des menaces et des intimidations du même type ont également été exercées par le ministère des Transports, qui a même menacé d’appliquer des amendes aux travailleurs et qui a obligé les propriétaires des minibus à licencier les travailleurs grévistes du secteur des transports collectifs. La première vague de violence, déclenchée par les carabiniers aux premières heures de la grève, a obligé les travailleurs à se présenter à leur poste. Les pouvoirs publics ont ordonné aux chefs d’entreprise d’engager des briseurs de grève; les travailleurs du métro ont été contraints de faire des journées de 12 heures.
  38. 596. Comme à l’occasion de mouvements antérieurs, on a pu observer, le matin du 13 août, trois jeunes masqués qui ne participaient pas aux défilés en train de commettre des actes d’obstruction de la voie publique à proximité des marcheurs. Au lieu de les arrêter, la police s’en est prise à des dirigeants et travailleurs qui défilaient pacifiquement et les a embarqués. Le lendemain, le compte rendu officiel faisait état de «quatre accidents graves et d’une dégradation du domaine public». Ces faits isolés et sans rapport avec les six rassemblements, qui se sont formés en différents endroits de la ville pour inviter pacifiquement les travailleurs à ne pas se présenter dans leur entreprise et à suivre la grève nationale, ont servi de déclencheur et d’excuse à l’entrée en action de milliers de carabiniers dans toute la capitale.
  39. 597. Les carabiniers étaient équipés de tout le matériel nécessaire pour réprimer une révolte populaire: des tenues de combat, des blindés, beaucoup de lances à eau et un nombre très important d’engins lacrymogènes d’un nouveau type. Au lieu d’essayer d’arrêter les mauvais éléments isolés, cet énorme déploiement des forces publiques a lancé un assaut contre les groupes de manifestants qui tentaient de s’approcher du siège de la Centrale. Certains de ces groupes n’ont pu s’échapper, les carabiniers ayant bouclé les rues dont l’accès avait été autorisé pour la manifestation. Les autres ont subi des violences d’un degré sans précédent. Tout l’arsenal des armes de répression et d’intimidation a été utilisé avec brutalité. Les lances à eau ont servi à disperser les manifestants, de petits groupes de marcheurs ont été bombardés de grenades lacrymogènes et les carabiniers ont procédé sans discernement aucun à l’arrestation de marcheurs. Ainsi qu’on a pu l’observer, les carabiniers se sont lancés dans de véritables chasses à l’homme sans autre raison que la volonté de détruire avec une agressivité inusitée un mouvement organisé. Aucun des groupes de manifestants n’a pu parvenir d’une manière ordonnée au siège de la Centrale unitaire des travailleurs.
  40. 598. Tous ceux qui ont approché de la Centrale – petits groupes de marcheurs dispersés, personnes isolées – ont été reçus par une pluie d’eau contenant des produits chimiques ou par des grenades lacrymogènes. Pendant les attaques menées contre les travailleurs devant l’immeuble de la Centrale, les lances à eau ont atteint la hauteur du deuxième étage, qui abrite les bureaux du président et du directeur général de la CUT. C’est exactement à cet endroit que la police a déversé la plus grande quantité de gaz lacrymogène. En outre, alors qu’il s’adressait aux travailleurs aux abords de la Centrale, en compagnie du président du SME et de dirigeants syndicaux des secteurs de l’enseignement, de la santé, du transport, du commerce et du cuivre, entre autres, le secrétaire général de la CUT a été agressé sans aucune raison par des carabiniers munis de lances à eau mélangée à des produits chimiques.
  41. 599. Une autre illustration du degré de préparation des membres du corps policier est le comportement dont ils ont fait preuve durant le reste de la journée. Toutes les tentatives d’organisation d’un mouvement syndical avaient pris fin, la voie publique était libre et il ne restait plus que quelques heures avant le terme annoncé de la grève. Une commune du sud de Santiago a pourtant été le théâtre de quelques incidents. En dehors de la zone de ces incidents, des carabiniers ont lancé des projectiles en caoutchouc, sans aucune explication, par la fenêtre d’une maison particulière et en ont expulsé tous les occupants, blessé un individu par balle et, à partir de 16 heures, bombardé des maisons avec des grenades lacrymogènes. Dans un autre secteur de la capitale, des blindés de la police sont entrés en action. De tels actes témoignent bien de la volonté d’agresser, de provoquer. Pendant toute la journée, ce sont bien ces agissements qui se sont révélés les plus dangereux, et non les incidents isolés.
  42. 600. On ne connaît pas exactement le nombre de personnes blessées à la suite des attaques délictueuses commises par la police. Plusieurs travailleurs, victimes d’un préjudice physique, ont porté plainte contre les responsables pour atteintes criminelles à l’intégrité de leur personne; les dirigeants syndicaux ont intenté des poursuites pour l’attaque du bâtiment de la Centrale, et engagé un recours aux fins de protection pour un manifestant torturé dans un commissariat du sud de Santiago où il avait été détenu.
  43. 601. Le propre Intendant de Santiago a menacé de licenciement les travailleurs de l’Intendance qui prendraient part à la grève et s’est exprimé sur les ondes aux premières heures de la matinée pour rappeler que de tels actes se terminaient toujours par la mort d’hommes. Au Service national des mineurs, l’ordre a été donné de dresser des listes des participants au mouvement national, mesure qui a été communiquée aux fonctionnaires pour qu’ils s’abstiennent de prendre part à la grève.
  44. 602. Pour les autorités, la grève n’était pas justifiée étant donné que l’on avait déjà satisfait à une exigence de la CUT, à savoir l’envoi du projet de réforme des tribunaux du travail, nouvelle qu’elle avait abondamment diffusée avant la grève mais qui demandait à être confirmée, si l’on en croit la Chambre des députés, selon laquelle le projet en question est parvenu au Parlement au début d’octobre et est en attente d’un examen du Congrès.
  45. 603. La manifestation pacifique des syndicats ne peut expliquer en aucune manière la brutalité dont les carabiniers ont fait usage à l’encontre des manifestants.
  46. 604. A la suite du 13 août, une plainte consécutive à l’incendie d’un autobus a été déposée en vertu de la loi de sécurité intérieure de l’Etat, plainte dont toute la presse a été informée de manière à créer un climat d’insécurité et à établir un lien entre ces faits et le mouvement de grève, lorsque la CUT a appelé à une grève nationale et que toute sa direction s’est employée à l’organiser de façon à parer à toute action de provocateurs et d’agents infiltrés des forces de police.
  47. 605. Une dirigeante du syndicat d’enseignants, Marcela Mallea Bustos, évacuée avec d’autres professeurs du lycée de San Pedro de la région métropolitaine pour avoir pris une part active à la grève, a été licenciée; sa sœur enseignante, Patricia Mallea Bustos, a subi le même sort à titre de représailles.
  48. B. Réponse du gouvernement
  49. 606. Dans sa communication du 15 juin 2004, le gouvernement déclare que la plainte du Syndicat national interentreprises des travailleurs de la métallurgie, des communications, de l’énergie et des activités connexes (SME) porte sur de supposées infractions aux droits syndicaux, qui auraient été commises au sein du groupe PLASTYVERG. Ce groupe est constitué des entreprises suivantes: Inmobiliaria La Vergara, Poli Packs, Promociones Packs y Ofertas SA et Center Packs.
  50. 607. Fondamentalement, les faits invoqués concernent, d’une part, les pressions exercées par les entreprises à l’encontre des délégués du syndicat mentionné et, d’autre part, le refus des entreprises d’engager des négociations collectives et les pressions qu’elles ont exercées pendant le processus pour dissuader les travailleurs de rester dans l’organisation syndicale indiquée.
  51. 608. A cet égard, et compte tenu des éléments en la possession de la Direction du travail, le syndicat en question a présenté, conformément aux dispositions de l’article 334 bis du Code du travail, des projets de contrat collectif aux entreprises du groupe, lesquelles, faisant usage de la faculté prévue dans ledit Code, ont exprimé leur refus de négocier collectivement avec le syndicat plaignant. L’article 334 bis du Code du travail dit en effet que l’engagement de négociations avec un syndicat interentreprises constitue pour les entreprises une option facultative:
  52. Art. 334 bis. Nonobstant les dispositions du deuxième alinéa de l’article 303, le syndicat interentreprises pourra présenter un projet de contrat collectif de travail, au nom de ses membres et des travailleurs appelés à adhérer, à des entreprises qui emploient des travailleurs adhérents dudit syndicat, lequel sera habilité à souscrire les contrats collectifs respectifs.
  53. Pour pouvoir être présentée, une telle proposition doit être soutenue par au moins quatre travailleurs de chaque entreprise.
  54. Dans ces conditions, des négociations par groupe de travailleurs se sont engagées conformément aux règles générales en vigueur. Ces projets ont été présentés le jour même où les employeurs ont annoncé leur refus de négocier. Tous devaient être avisés par l’inspection du travail aux dates suivantes: Promo Packs (20 octobre 2003), Center Packs (20 octobre 2003), Poli Packs (27 octobre 2003) et Inmobiliaria La Vergara (27 octobre 2003).
  55. 609. Les travailleurs ont invoqué le fait que les entreprises n’avaient pas informé les travailleurs comme le stipule l’article 320 du Code du travail, observation vérifiée et corroborée par l’inspection du travail. L’article 320 du Code du travail dit en effet ceci:
  56. Art. 320. L’employeur devra communiquer tout projet de contrat collectif à l’ensemble des travailleurs de l’entreprise et ces derniers disposeront d’un délai de trente jours à compter de la date de la communication pour présenter des projets sous la forme et dans les conditions prévues par le présent Code ou adhérer au projet présenté.
  57. Le dernier jour du délai susmentionné sera retenu comme date limite de présentation de tous les projets, pour le calcul des délais prévus dans le présent Code pour permettre aux intéressés de donner leur réponse et d’engager les négociations.
  58. De leur côté, les employeurs ont fait connaître leur réponse aux commissions de négociation de Promo Packs et Center Packs le 3 novembre 2003. Ces commissions avaient jusqu’au 29 novembre 2003 pour formuler des objections quant à la légalité des projets. Les employeurs, à leur tour, ont contesté la légalité du mode de présentation de ces projets attendu que, selon eux, les commissions de négociation n’avaient pas été désignées en conformité avec les dispositions de l’article 326 du Code du travail, qui énonce:
  59. Art. 326. La représentation des travailleurs aux négociations collectives incombera à une commission de négociation constituée sous la forme exposée ci-après.
  60. Si le projet de contrat collectif a été présenté par un syndicat, la commission de négociation sera la direction du syndicat en question, et si plusieurs syndicats ont présenté un projet conjoint, la commission sera composée de leurs dirigeants.
  61. Si le projet de contrat collectif est présenté par un groupe de travailleurs réunis dans le seul but de négocier, une commission de négociation devra être désignée conformément aux règles suivantes:
  62. a) toute personne souhaitant être nommée à la commission de négociation devra satisfaire aux mêmes conditions que celles exigées pour les fonctions de dirigeant syndical;
  63. b) la commission de négociation sera composée de trois membres. Toutefois, si le groupe négociateur comporte au moins 250 travailleurs, cinq membres pourront être nommés, ou sept si le groupe comporte au moins 1 000 travailleurs, ou bien neuf s’il comporte au moins 3 000 travailleurs;
  64. c) l’élection des membres de la commission de négociation s’effectuera à bulletins secrets, obligatoirement en présence d’un officier public, si le groupe se compose d’au moins 250 travailleurs;
  65. d) chaque travailleur aura droit à deux, trois, quatre ou cinq voix non cumulatives, selon que la commission de négociation sera composée de trois, cinq, sept ou neuf membres, respectivement.
  66. De son côté, l’employeur aura le droit d’être représenté aux négociations au maximum par trois mandataires faisant partie de l’entreprise, lesquels pourront être des dirigeants de l’entreprise ou des associés ayant des fonctions d’administration.
  67. 610. En l’occurrence, les commissions de négociation n’ont pas fait usage, dans le délai imparti, de la faculté de formuler des objections, raison pour laquelle, conformément aux dispositions contenues, entre autres, dans l’avis no 4431/106 du 20 juin 1998, on en a déduit qu’elles acceptaient la réponse des employeurs et leurs observations. Pourtant, dans les deux entreprises, un contrat collectif a été conclu dont la durée de validité s’étend, dans les deux cas, jusqu’au 30 août 2006, ce dont l’inspection du travail a été informée par les entreprises le 21 janvier 2004.
  68. 611. En ce qui a trait aux négociations collectives, qui concernent les deux autres entreprises, à savoir Inmobiliaria La Vergara et Poli Packs, les employeurs ont respecté l’obligation d’informer les autres travailleurs, comme le stipule l’article 320, ce qui a été constaté par des contrôleurs lors d’une inspection.
  69. 612. Le 1er décembre 2003, l’employeur a joint une copie des réponses notifiées le 28 novembre et le 1er décembre, respectivement. Dans sa réponse au projet intéressant la première entreprise, il conteste la légitimité de l’un des membres de la commission de négociation, qui ne serait pas employé de l’entreprise, et il invoque l’absence du quorum nécessaire pour négocier, le projet étant accompagné d’une liste de quatre travailleurs. La commission de négociation a formulé à son tour des objections sur la légalité du processus. Quant à la seconde entreprise, elle a également signalé dans sa réponse le manque de quorum, seuls quatre travailleurs étant cités.
  70. 613. A ce sujet, l’Inspection communale du travail du Maipo a pris les résolutions nos 450 et 451, toutes deux le 9 décembre 2003, dans lesquelles elle confirme l’absence de quorum pour négocier. Malgré cela, les commissions de négociation ont demandé la présence d’un officier public pour voter en faveur de la dernière offre ou de la grève, demande qui n’a pas été acceptée par l’inspection du travail.
  71. 614. Néanmoins, la Direction du travail a considéré, conformément au droit, que l’absence de quorum pour négocier, qui n’a pas suscité d’objection de la part des commissions de négociation dans le délai imparti, entraînait nécessairement la fin du processus de négociation, raison pour laquelle les travailleurs ont cessé de bénéficier de l’immunité, et il n’y avait pas lieu de procéder à un contrôle pour essayer de réintégrer les travailleurs licenciés, mais on devait en revanche entamer une enquête sur l’existence de pratiques antisyndicales.
  72. 615. Cette enquête a permis de confirmer que les entreprises avaient exercé des pressions en vue de l’élection des délégués du personnel et pour que les travailleurs syndiqués démissionnent de leur organisation pendant le processus de négociation collective.
  73. 616. Cette enquête a servi de base au dépôt d’une plainte auprès de la justice pour cause de pratiques antisyndicales (affaire no 7939-2002), laquelle a été jugée par la première chambre de San Bernardo, dont le jugement, récemment rendu, n’a pas encore été confirmé, et reconnaît partiellement le bien-fondé de la plainte concernant les pressions indûment exercées pour que les travailleurs syndiqués démissionnent de leur organisation, en plus d’ordonner à l’entreprise de cesser ses agissements et de verser une amende de 75 UTM. L’accusation relative à l’intervention de l’employeur dans l’élection du délégué du personnel n’a pas été retenue. A ce sujet, une seconde plainte a été déposée par la direction du syndicat interentreprises, qui fait actuellement l’objet d’une enquête.
  74. 617. Le 6 avril 2004, le directeur des opérations de l’entreprise PLASTYVERG a signalé par téléphone que l’enceinte de l’entreprise avait été investie par cinq délégués syndicaux et quatre travailleurs, appuyés de l’extérieur par un groupe d’environ 15 personnes, et que la situation avait été réglée par l’intervention de carabiniers, lesquels se seraient contentés d’être présents sur les lieux.
  75. 618. Pour sa part, le 29 mars 2004, la direction du syndicat interentreprises a remis à la Direction du travail copie d’une note envoyée à l’Intendant de la région métropolitaine dans laquelle elle sollicitait la non-intervention des forces de police au cours des manifestations que les travailleurs organiseraient à la suite des licenciements antisyndicaux.
  76. 619. Enfin, lors de la réunion tenue le 16 avril 2004 entre la Direction du travail et l’Association des exportateurs, dont le groupe PLASTYVERG est adhérent, on s’est entendu sur l’instauration d’une médiation pour essayer de régler les conflits opposant les entreprises et l’organisation syndicale, question qui sera étudiée au cours des prochains jours.
  77. 620. L’idée ayant été émise de demander des informations à l’organisation d’employeurs concernée pour que le Comité de la liberté syndicale puisse connaître son point de vue et celui du groupe PLASTYVERG, une consultation a été menée avec la Confédération de la production et du commerce, organisation d’employeurs faîtière, qui a transmis la demande au président du groupe PLASTYVERG, lequel a fourni un volumineux dossier avec une photocopie de documents à l’appui qui illustrent le point de vue de l’entreprise et de l’organisation d’employeurs en réponse à la plainte dont l’OIT a été saisie. Selon l’entreprise:
  78. – M. José Saavedra a gravement failli aux obligations que lui impose son contrat de travail en ayant été surpris, le 17 septembre 2003, en état d’ébriété pendant ses heures de travail habituelles, et il a déclaré qu’il causerait de graves ennuis à l’entreprise s’il était renvoyé; en outre, il avait utilisé sans autorisation des véhicules de l’entreprise, photocopié des renseignements confidentiels et tenu des propos irrévérencieux au directeur et au sous-directeur. Il avait menacé de tirer sur un travailleur en présence de collègues. Pour toutes ces raisons, il a été décidé de le licencier, outre qu’il lui a été demandé de quitter le logement qui lui était fourni pendant la durée de la relation de travail, un autre logement lui étant proposé (pendant 90 jours en attendant qu’il trouve un foyer) dans lequel il ne serait pas en contact direct avec des renseignements confidentiels. C’est seulement le 27 septembre que l’entreprise a reçu une attestation officielle selon laquelle M. Saavedra et M. Luis Labarca avaient été élus délégués syndicaux le 22 septembre.
  79. – Devant la mauvaise volonté et le manque d’empressement manifestés par M. Luis Labarca en sa qualité de gardien de nuit et de vigile, vu qu’il laissait M. Saavedra libre de pénétrer dans les locaux, qu’il n’effectuait pas certaines rondes nocturnes, etc., l’entreprise a décidé de mettre un terme à son contrat de travail le 27 septembre, décision qui lui a été communiquée, et de lui verser son salaire de départ avec toutes les indemnités dues. Parallèlement à la communication, l’intéressé a remis une copie du certificat no 2185 de l’inspection du travail d’où il ressort que lui-même et M. Saavedra sont délégués syndicaux, raison pour laquelle le licenciement prononcé demeure sans effet du fait de l’immunité dont il bénéficie en tant que délégué. Devant le refus de M. Labarca d’accomplir sa tâche, l’entreprise lui adresse le 30 septembre une communication pour lui demander de revoir sa conduite et de remplir ses fonctions du mieux possible. Le 4 octobre, M. Labarca a décidé de quitter l’entreprise pour des motifs strictement personnels qui l’ont empêché de faire convenablement son travail. Il a en outre demandé une augmentation du montant des prestations de départ compte tenu d’une dette qu’il possède avec une caisse d’assurance. L’entreprise a accédé à sa demande et le solde de tout compte a été versé le 6 octobre devant notaire. Par ailleurs, l’intéressé a renoncé à ses fonctions de dirigeant syndical. Des copies de ces documents sont jointes.
  80. – Les faits qui précèdent donnent l’impression que M. Saavedra et M. Luis Labarca de concert ont utilisé les instances syndicales pour négocier leur départ et tirer un avantage économique de leurs responsabilités syndicales. Tels sont les faits qui ont déclenché des dizaines de démissions du syndicat, tous les travailleurs ayant pu constater la mauvaise foi manifestée par ces dirigeants syndicaux.
  81. – Concernant le licenciement de M. Pablo Villavicencio, membre supposé du syndicat interentreprises, il a eu lieu le 27 septembre et, le 8 octobre, soit 11 jours plus tard, le syndicat a remis sa liste d’adhérents avec le projet de contrat collectif. Avant cette date, l’entreprise n’avait pas eu connaissance de ladite liste. Les prestations de départ sont finalement établies devant notaire d’un commun accord entre les parties.
  82. – Il en va de même pour M. Daniel González, dont les conditions de départ sont arrêtées devant notaire le 7 octobre d’un commun accord entre les parties et, dès le 10 octobre, il est inscrit sur la liste de travailleurs syndiqués. Par ailleurs, il est absolument faux qu’on lui ait coupé l’électricité et l’eau. Est jointe l’attestation des prestations de départ signée d’un commun accord entre les parties.
  83. – S’agissant du travailleur Luis Martínez, l’entreprise a décidé de mettre un terme à son contrat de travail le 24 septembre. Seulement cinq jours plus tard, le 29 septembre, le travailleur a présenté un certificat attestant qu’il a été élu délégué syndical le 23 septembre, soit avant son renvoi, de sorte qu’il a été réintégré dans l’entreprise. Vu qu’il n’avait pas été à son poste pendant cinq jours et que les équipes avaient été réorganisées pour combler son absence, il s’est vu changer de lieu d’affectation. Devant son désaccord, l’entreprise l’a rétabli à son ancien poste, à la suite de quoi il a retiré sa réclamation. Des documents sont joints à l’appui de ces faits, ainsi que des pièces attestant que l’intéressé et quatre autres syndicalistes ont mis fin à leur relation de travail et renoncé à toute action en justice.
  84. – Devant la pression et le climat d’hostilité engendrés dans l’entreprise par la présence d’un autobus lançant des consignes par haut-parleurs et la diffusion d’affiches faisant allusion à l’organisation d’une grève dans l’entreprise, les travailleurs non membres du syndicat interentreprises ont décidé de s’organiser rapidement et ont nommé des délégués du personnel, parmi eux M. Gerardo Díaz. Cette initiative majoritaire a trouvé son aboutissement le 8 octobre, lorsque les travailleurs ont présenté leurs listes signées à l’inspection du travail pour officialiser l’élection de ces délégués du personnel. Chaque liste faisait clairement état de l’entreprise concernée et du délégué du personnel qu’elle soutenait. Le même jour, M. Díaz a fait parvenir une copie de la communication présentée à l’inspection du travail et le chef du personnel s’est limité à informer l’organisation de l’élection de M. Gerardo Díaz comme délégué du personnel.
  85. – L’entreprise n’a jamais refusé de recevoir les travailleurs, pas plus que les délégués syndicaux ni les délégués du personnel. L’entreprise ayant choisi, comme l’y autorise l’article 334 bis A de la loi, de ne pas négocier avec le syndicat interentreprises et, compte tenu des pressions exercées par ce syndicat sous la forme d’appels téléphoniques aux dirigeants de l’entreprise en dehors des heures de bureau, etc., il a été décidé de ne recevoir aucune personne étrangère à l’entreprise et de maintenir le dialogue avec tous les travailleurs.
  86. – Avec la liste des délégués du personnel élus dans les formes légales (qui a été ratifiée par l’inspection du travail), les délégués ont remis à l’entreprise plusieurs demandes en rapport avec des inquiétudes des travailleurs qu’ils représentaient, à la suite de quoi l’entreprise, malgré la concurrence difficile à laquelle elle faisait face, mais consciente des besoins de ses travailleurs et du caractère raisonnable de leurs demandes, a décidé d’accéder à leurs requêtes. Ces demandes visaient essentiellement un rattrapage des salaires pour compenser la perte de pouvoir d’achat. Selon la convention passée avec les délégués du personnel, l’équivalent de 200 pour cent de l’IPC des douze derniers mois a été accordé aux travailleurs qui n’avaient bénéficié d’aucun réajustement pendant la période. L’entreprise a également accepté de procéder à un réajustement similaire un an plus tard et de fournir des vêtements de travail selon un plan arrêté. Ces délégués du personnel ont été élus librement parmi leurs pairs et n’ont rien d’un groupe de travailleurs à la solde de l’entreprise, contrairement à ce qui est dit dans la plainte en termes désobligeants. Ces travailleurs, qui représentent plus de 90 pour cent du personnel de l’entreprise, ont voulu défendre leur entreprise contre des dirigeants qui ne défendent pas leurs intérêts et qui sont peu soucieux du bien-être de l’entreprise, de son personnel et du maintien d’un bon climat de travail.
  87. – Le 10 octobre, le syndicat interentreprises a présenté un projet de contrat collectif à l’entreprise qui, faisant usage de la faculté que lui confère la loi et dans le délai légal de 10 jours prévu, s’est prévalue du droit qui est reconnu à l’employeur par l’article 334 bis A, soit le droit de négocier en toute liberté avec le syndicat interentreprises, de sorte qu’elle a choisi de ne pas négocier avec ledit syndicat. Le même jour, c’est-à-dire le 20 octobre, l’entreprise ayant annoncé son refus de négocier, le groupe de travailleurs membres du syndicat interentreprises a présenté le même projet de contrat collectif, sous la même forme et sur le même papier à en-tête du syndicat, sans laisser entendre qu’ils se soient réunis pour élire la commission de négociation comme le stipule l’article 326 du Code du travail. Plusieurs travailleurs membres de ce syndicat se sont dits surpris de voir que le projet de contrat collectif était de nouveau présenté, qui plus est par des gens qui avaient été élus à la commission de négociation, d’autant plus que, ainsi qu’ils l’ont expliqué, ils n’avaient pas été consultés sur la question.
  88. – Les violences verbales et écrites observées et l’intervention d’agitateurs extérieurs venus perturber l’activité avec des camions munis de haut-parleurs et des affiches, ajoutées à la publication d’articles dans un journal de la CUT, ont fait qu’il a été décidé d’interdire l’utilisation des panneaux dont se sert l’entreprise pour présenter des statistiques sur la production, des communications sur la norme ISO, des communications internes, etc. Parallèlement, en réaction à cette intervention extérieure, les travailleurs sont de plus en plus nombreux à soutenir les délégués du personnel, qui déplorent que l’entreprise fasse l’objet d’attaques et qu’on ne la laisse pas travailler sereinement et s’entendre avec ses travailleurs pour assurer un bon déroulement de l’activité. Beaucoup décident de démissionner du syndicat interentreprises, mais ce dernier refuse leur démission. En décembre 2003, dans un numéro du quotidien Chile Justo, on peut lire que ce syndicat a porté plainte contre l’Etat chilien. Dans sa plainte, il prétend que, le 26 novembre, notre directeur général a demandé à M. Sergio Cornejo de radier ces travailleurs du syndicat, ce qui est absolument faux. Ce qui est vrai, c’est que les travailleurs ont continué de démissionner de ce syndicat, parce qu’il était extérieur à l’entreprise et à cause de son mauvais comportement.
  89. – En réponse au projet de contrat collectif, l’entreprise en conteste sérieusement la légalité quant à la forme et au fond par rapport à la façon dont il a été présenté et négocié mais, le groupe de travailleurs n’ayant opposé aucune objection aux observations de l’entreprise dans le délai légal prévu, le projet de contrat n’est pas censé avoir été présenté, conformément à l’article 331. Les choses sont d’autant plus claires que, dans sa communication no 1756 datée du 10 novembre, l’Inspection du travail du Maipo fixe les délais à respecter dans le cadre du processus de négociation et que, par la suite, l’entreprise a écrit à l’inspection du travail pour lui demander de se prononcer sur ce qu’a observé l’Unité des relations professionnelles de l’inspection du travail quant au fait que le groupe de travailleurs n’a formulé aucune objection ni argumentation face aux graves réserves émises par l’entreprise sur la légalité des projets présentés. En conséquence, l’entreprise estime que le silence de la commission de négociation vaut acceptation de ces réserves et que le processus de négociation est terminé. Dans la résolution no 452 de l’inspection du travail, il apparaît clairement que la commission de négociation du groupe de travailleurs n’a pas présenté dans les délais ses réserves sur la légalité du projet. Ce dernier obéit à des règles, selon lesquelles les deux parties doivent respecter un nombre minimum de conditions et de délais, chose que la commission de négociation du groupe de travailleurs n’a pas faite.
  90. – Malgré ce qui précède, un vote illégal a été organisé le 9 janvier 2004, après qu’une abondante publicité a été faite en faveur de la grève et que des pressions ont été exercées sur les travailleurs, menacés d’amendes et de sanctions s’ils ne vont pas voter. Ont assisté à ce vote des représentants de l’Inspection du travail de San Bernardo, présents uniquement à titre d’officiers publics et délégués par le bureau central de l’inspection du travail.
  91. – Le 9 janvier, l’entreprise a décidé de proposer ses bons offices aux parties en présence, soucieuse de ne pas compromettre les relations avec ses travailleurs, et cela malgré la tournure prise par les événements et bien qu’elle soit convaincue que le processus de négociation est terminé, que la commission de négociation des travailleurs n’en a pas respecté les règles et que l’inspection du travail n’a rien fait pour mettre un terme aux actes illégaux. Pourtant, bien que la direction les ait avisés par voie orale, les dirigeants syndicaux ont organisé, le lundi 9 janvier, une grève illégale de deux heures, qui a empêché le libre accès des travailleurs jusqu’à l’arrivée des représentants de l’inspection du travail, qui leur a remis par écrit la proposition de bons offices. Un tel comportement d’affrontement ne contribue en rien à l’existence de bonnes relations entre l’employeur et son personnel. Déçus par l’évolution de la situation, les membres du syndicat ont continué d’en déserter les rangs.
  92. – Après sept jours de négociations au Centre de médiation et de conciliation de la Direction du travail, les représentants des travailleurs et ceux de l’employeur sont parvenus à signer une convention collective le mardi 20 janvier 2004.
  93. – Depuis la présentation, en octobre 2003, du projet de contrat collectif par le syndicat interentreprises, l’entreprise a fait l’objet de plusieurs contrôles de la part de l’inspection du travail: à ce jour, elle a reçu plus de 12 visites d’inspecteurs, qui ont demandé à consulter le dossier de chaque travailleur, y compris le dimanche, jour où le service du personnel est fermé et où les dossiers ne peuvent être sortis qu’en cas d’urgence, ce qui n’a pas empêché les inspecteurs de dresser un contrat d’infraction.
  94. – Beaucoup de travailleurs, voyant la persécution et le harcèlement dont l’entreprise était l’objet de la part de personnes liées au syndicat interentreprises, ont voulu en démissionner pour apporter leur soutien aux délégués du personnel, mais en ont été empêchés par le refus du syndicat. Ils se sont alors adressés à la direction de l’entreprise, mais celle-ci s’est déclarée dans l’impossibilité de prendre des mesures qui seraient assimilées à des pratiques antisyndicales. Elle s’est contentée de conseiller aux travailleurs dans cette situation de saisir l’inspection du travail vu que, conformément au principe de liberté syndicale consacré à l’article 19 de la Constitution chilienne et dans les conventions nos 87 et 98 de l’Organisation internationale du Travail, un travailleur a le droit d’adhérer à une organisation syndicale ou d’en sortir au moment qu’il juge pour lui opportun, ce qui n’était pas le cas en l’espèce, étant donné que le syndicat interentreprises refusait aux travailleurs la liberté de démissionner. Ce sont là aussi des «pratiques antisyndicales» et donc condamnables à ce titre.
  95. – A l’heure qu’il est, une forte proportion de démissions ont été rejetées par ce syndicat extérieur, rejets qui ont obligé les travailleurs à présenter une nouvelle demande de départ. Ils ont demandé par la même occasion qu’on leur communique les statuts du syndicat et se sont heurtés à un refus, lequel constitue une atteinte aux droits des travailleurs et à leur liberté syndicale.
  96. – Les actes de violence et de harcèlement ont atteint un degré tel que, le 24 mars 2004, des tracts ont été distribués au domicile du directeur général et de ses voisins, dans lesquels il était qualifié «d’exploiteur et de menteur», de «spécialiste des pratiques antisyndicales», etc., propos ouvertement diffamatoires et calomnieux. Les auteurs exigeaient en outre le respect du contrat collectif, alors que l’entreprise n’avait jamais cessé d’exécuter le contrat passé. Le cheval de bataille utilisé est la réintégration des deux travailleurs mis à pied, à qui sont refusées des prestations de départ complètes, alors que les responsables du syndicat interentreprises déplorent qu’on ne les ait pas consultés avant de procéder aux mises à pied et demandent que, à l’avenir, tout licenciement soit décidé de concert avec eux.
  97. – Actuellement, l’entreprise est on ne peut plus disposée à travailler en harmonie avec son personnel et à respecter à la lettre les conditions établies dans le contrat collectif passé avec le groupe de travailleurs membres du syndicat. Qui plus est, elle a étendu à toute l’entreprise les avantages consentis aux délégués du personnel car elle ne veut faire aucune distinction entre les travailleurs. Les délégués du personnel ont l’appui d’environ 90 pour cent des travailleurs de l’entreprise. A cet égard, est adressée au Comité de la liberté syndicale une liste de 203 signatures de travailleurs qui désapprouvent le syndicat et la plainte présentée à l’OIT.
  98. – Le 6 avril, les cinq délégués du syndicat, aidés par une vingtaine de personnes étrangères à l’entreprise et commandées par M. José Ortiz Arcos, ont investi l’entreprise et ont usé de violences physiques et verbales pour empêcher le personnel de venir travailler. Au total, pendant quelque trois heures, l’entreprise a été plongée dans un climat de brutalités physiques et psychologiques, a perdu des heures de travail précieuses, a vu la production perturbée par la paralysie soudaine des machines, etc. Ces moments ont fait naître un sentiment d’insécurité chez beaucoup de personnes qui se sont dit que de tels actes de vandalisme pourraient se répéter à n’importe quel moment. Ces faits se sont traduits par des blessures pour quatre travailleurs qui ont dû être hospitalisés; ces blessures et l’occupation illégale des locaux ont donné lieu à des plaintes. L’attitude et l’autorité excessive manifestées par les dirigeants du syndicat interentreprises, ajoutées à l’occupation des locaux avec la pose de chaînes aux portes d’entrée pour bloquer le passage des travailleurs et du personnel d’administration, ont déclenché la démission de plusieurs adhérents qui fait que, en date du 21 avril, le syndicat est soutenu par moins de 5 pour cent des travailleurs et continue de recevoir chaque jour des lettres de démission.
  99. 621. Dans sa communication du 20 mai 2004, concernant les supposées atteintes à la liberté syndicale et, plus précisément, les conséquences sur l’ordre public d’un mouvement illégal de 24 heures déclenché par la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) le 13 août 2003, le gouvernement déclare que, aux termes de la résolution du 12 août 2003, l’Intendant de la région métropolitaine a autorisé la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) à organiser le 13 août 2003, à partir de 10 heures, une manifestation sous la forme de six marches ou défilés de protestation dans diverses rues de Santiago. Cette résolution dit expressément que le déplacement des manifestants s’effectuera le long d’une seule artère afin de ne pas créer d’encombrement de véhicules et de piétons.
  100. 622. Cependant, le jour en question et selon les informations des carabiniers, 214 personnes au total ont été arrêtées dans la région métropolitaine, pour les motifs suivants: troubles (24 personnes), troubles graves sur la voie publique (177 personnes), troubles graves et dommages au domaine public (quatre personnes), port d’engin incendiaire (quatre personnes), agression contre des carabiniers (deux personnes), atteinte à la vie d’un carabinier en service (une personne) et infraction à l’article 445 du Code pénal (deux personnes). Le comité est informé que toutes ces personnes (les 214) se trouvent en liberté.
  101. 623. L’article 445 du Code pénal dit ceci:
  102. Art. 445. Toute personne suspectée d’avoir fabriqué, vendu ou détenu de fausses clés, des pinces ou d’autres instruments manifestement destinés à la réalisation d’un vol avec effraction, et incapable de fournir des preuves à sa décharge sur leur fabrication, leur vente, leur acquisition ou leur détention, sera passible d’une peine légère d’emprisonnement.
  103. 624. La marche autorisée, qui a rassemblé approximativement 3 000 personnes, a été marquée par des incidents lorsque les manifestants ont essayé de bloquer la circulation en contrevenant aux instructions données par les carabiniers, raison pour laquelle les forces de police se sont vues obligées de recourir à des moyens de dissuasion, tels que les lances à eau et les gaz lacrymogènes. S’il est vrai que le droit de réunion est garanti par la Constitution, il n’en est pas moins vrai que, en vertu de la Charte fondamentale, il doit s’exercer d’une manière pacifique et sans armes. En conséquence, lorsque ces principes ne sont pas respectés, il incombe à la police en tenue d’intervenir pour veiller à l’ordre public et pour le préserver.
  104. 625. En effet, le paragraphe 13 de l’article 19 de la Constitution garantit le droit de réunion:
  105. Des droits et devoirs constitutionnels
  106. Article 19. La Constitution garantit à toutes les personnes:
  107. 13. Le droit de se réunir sans autorisation préalable de manière pacifique et en l’absence d’armes. Les réunions sur les places, dans la rue et dans d’autres lieux publics sont régies par les dispositions générales de la politique.
  108. 626. Les incidents signalés se sont produits dans 17 communes de la région métropolitaine.
  109. 627. Selon des allégations, le Service national des mineurs (SENAME) aurait confectionné des listes de fonctionnaires ayant participé au débrayage illégal de 24 heures. La direction nationale du Service national des mineurs a indiqué que l’Association nationale des travailleurs (ANTRASE) ne lui avait adressé aucune plainte directe et qu’il n’existait ou que l’on ne connaissait aucun élément qui corrobore l’accusation formulée.
  110. 628. En aucun cas la direction générale du SENAME et les autres organes de cette administration n’ont dressé de liste de noms de personnes ayant répondu à l’appel à la grève nationale, pas plus qu’ils ne sont intervenus ou qu’ils n’ont exercé de pressions auprès des fonctionnaires affiliés aux organisations professionnelles de ce service pour qu’ils participent ou ne participent pas aux mouvements déclenchés par lesdites organisations professionnelles.
  111. 629. Concernant les faits décrits dans la plainte, il faut savoir que, normalement, lorsque les associations professionnelles déclenchent un mouvement à caractère professionnel quel qu’il soit, il est procédé à un recensement des fonctionnaires qui restent sur leur lieu de travail, pour déterminer avec précision la main-d’œuvre dont dispose le service et, au besoin, pour renforcer les secteurs qui ne possèdent pas l’effectif voulu. Le but est de maintenir du mieux possible, avec les ressources disponibles, la continuité de la fonction confiée à ce service par la loi organique no 18575 de 1986 sur les principes fondamentaux de l’administration de l’Etat.
  112. 630. Dans ce cas, les seuls éléments demandés aux directions générales du service ont été un rapport sur la situation des directions régionales et des centres d’administration directe des mineurs relevant d’elles par rapport à la participation à la grève en question, et des preuves montrant que les institutions remplissent normalement leur office, compte tenu du fait que, en vertu de la Constitution et de la loi, les autorités et chefs de service ont pour tâche de veiller à la bonne marche administrative et technique de chaque institution. C’est ce qui a été indiqué préalablement sous forme orale à chacun des présidents des associations professionnelles membres du SENAME, qui n’ont émis aucune réserve à propos de la procédure suivie par la direction générale du SENAME.
  113. 631. Il importe de rappeler que le Service national des mineurs (SENAME) est un organisme d’Etat qui a pour mission de garantir et promouvoir les droits des enfants et adolescents de moins de 18 ans victimes d’atteintes à l’exercice de ces droits, ainsi que l’insertion sociale des adolescents en infraction avec le droit pénal et privés de liberté par ordre de la justice. Le SENAME remplit cette mission par l’entremise de 26 centres d’accueil répartis dans tout le pays, ouverts 24 heures sur 24 et 365 jours par an, ce qui montre combien il est nécessaire qu’ils puissent fonctionner d’une manière ininterrompue. C’est pourquoi il importe de veiller à ce que ces centres soient dotés d’un effectif qui leur permette de s’occuper convenablement des enfants et adolescents qui se trouvent sous leur responsabilité à la suite d’un jugement des tribunaux. Cette caractéristique particulière du SENAME est comprise par tous les fonctionnaires et leurs associations professionnelles, lesquelles ont été informées de la volonté du service de ne pas s’ingérer dans leurs activités, et ont été priées de prendre les mesures voulues pour assurer une rotation entre les différents centres du pays. C’est une préoccupation partagée par la direction des associations professionnelles et qui fait que les prestations directes fournies aux enfants et adolescents clients des centres administrés par le service n’ont jamais été mises en péril.
  114. 632. Le SENAME, s’appuyant sur la législation nationale en vigueur et dans le strict respect des conventions et normes internationales ratifiées par le gouvernement chilien, a appliqué à la lettre les accords passés avec les associations professionnelles, outre qu’il a toujours fait le maximum pour maintenir des relations fluides, opportunes et ouvertes avec les quatre associations professionnelles du service: l’AFUSE, qui compte approximativement 1 370 membres et qui représente 56,45 pour cent des fonctionnaires; l’ANFUR, qui, avec 149 adhérents, représente 6,12 pour cent du total; l’ANTRASE, qui a signé la plainte adressée à l’OIT et qui, avec environ 550 membres, représente 22,68 pour cent de l’effectif du service; et enfin l’ARHSE, qui compte 90 adhérents, soit 3,70 pour cent du total.
  115. 633. Par ailleurs, avant qu’un appel à la grève soit lancé, il est courant de rencontrer ces organisations, l’une après l’autre ou toutes ensemble, afin de coordonner les actions et de fournir tout le soutien nécessaire, ce qui aide ces organisations à remplir la mission principale qui leur est dévolue en vertu de l’article 7 de la loi no 19296.
  116. 634. Selon des allégations, le ministre de l’Education et d’autres hauts fonctionnaires auraient adressé des menaces aux travailleurs ayant participé à l’arrêt de travail du mercredi 13 août 2003. Sur ce point, il faut rappeler que le ministère de l’Education n’a pas pour politique de porter atteinte aux droits syndicaux des fonctionnaires.
  117. 635. Lorsque la coalition gouvernementale «Concertation pour la démocratie» a été au pouvoir, aucune retenue sur les salaires n’a été effectuée et aucune menace n’a été proférée à l’encontre des travailleurs qui, comme la loi les y autorise, ont participé à une manifestation pour demander une amélioration de leur condition.
  118. 636. S’agissant maintenant du licenciement des enseignantes Marcela et Patricia Mallea Bustos, c’est une question qui ne relève pas du ministère de l’Education, vu que les enseignants traitent directement avec leurs employeurs et que leurs relations avec eux sont régies par le «Statut de l’enseignant» dans le cas des employeurs municipaux, ou par le Code du travail dans le cas des employeurs privés. Quand on se trouve devant un licenciement injustifié, il appartient aux tribunaux du travail de statuer lorsqu’il s’agit d’enseignants du secteur privé, et au Conseil d’Etat lorsqu’il s’agit d’enseignants en poste dans un établissement administré directement par une municipalité.
  119. 637. Concernant les propos attribués au ministre de la Santé et qualifiés par le plaignant de «menaces aux travailleurs du secteur public» ayant eu pour but de les empêcher de participer à la grève illégale du 13 août 2003, le comité est informé que les phrases citées correspondent à des extraits d’une instruction du ministère de la Santé qui avait pour objet de souligner la nécessité de prendre les mesures nécessaires pour assurer le fonctionnement normal des services de santé du pays et attirer de cette façon l’attention des usagers du système sur l’appel au débrayage lancé par les organisations syndicales en août 2003. Cet acte s’est rigoureusement inscrit dans le cadre légal en vigueur dans le pays, et n’a en aucune façon constitué une menace pour les travailleurs du public.
  120. 638. Le recours à la force publique n’est demandé que dans le cas d’une altération du fonctionnement normal des services de santé et des établissements hospitaliers provoquée par des actions violentes pouvant nuire aux services que reçoivent les patients et usagers.
  121. 639. Sur le plan syndical, le ministère de la Santé s’est aligné sur la politique gouvernementale puisqu’il est intervenu dans le strict respect des droits reconnus aux travailleurs dans les conventions de l’Organisation internationale du Travail, en vigueur au Chili, qui garantissent la liberté d’organisation et de négociation aux travailleurs du secteur, un de ses principaux objectifs étant de tout faire pour harmoniser les intérêts et activités des institutions et ceux des associations professionnelles, afin d’améliorer la communication et les moyens de participation au sein du système de santé du pays.
  122. 640. Concernant la plainte selon laquelle les travailleurs d’Empresa Metro SA (régie du métro) auraient été «contraints de faire des journées de 12 heures», la Direction régionale du travail de la région métropolitaine a été consultée et a indiqué n’avoir eu connaissance d’aucune plainte pour un dépassement du nombre normal d’heures de travail qui aurait eu lieu le 13 août 2003 dans ladite Empresa Metro SA.
  123. 641. De son côté, la Direction nationale du travail a passé en revue toutes ses opérations de contrôle et n’a relevé aucune demande de contrôle de la part du syndicat ni des travailleurs du métro.
  124. 642. S’agissant des conditions dans lesquelles l’arrêt de travail illégal a été organisé le 13 août 2003 par la CUT, les précisions suivantes sont apportées: au 31 décembre 2002, la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) regroupait 303 organisations syndicales, du secteur public comme du secteur privé, et comptait 408 562 adhérents; durant les jours qui ont précédé le 13 août 2003, seules 14 des 303 organisations affiliées avaient confirmé leur participation à la journée d’arrêt de travail, laquelle a été marquée par divers actes de violence, notamment ceux qui suivent:
  125. – détonation d’une bombe posée au pied d’un pylône dans la commune de Maipú dans la région métropolitaine;
  126. – détonation d’un engin explosif devant la mairie de San Ramón, commune de San Ramón, dans la région métropolitaine;
  127. – pose de «hérissons» (engins en fer destinés à crever les pneus) dans plusieurs artères de la périphérie de la capitale, et installation de 15 barricades pour bloquer les mouvements des véhicules publics et privés dans la région métropolitaine;
  128. – interception et appropriation illégale d’un véhicule de transport public par plusieurs individus en possession d’armes à feu, véhicule qu’ils ont ensuite incendié, dans la région métropolitaine;
  129. – affrontement entre des étudiants de l’Université de Concepción et la police en tenue de la VIIIe région;
  130. – blocage du transport fluvial sur la rivière Pedro de Valdivia par des embarcations de dimensions moyennes dans la Xe région;
  131. – interruption de la circulation sur l’avenue Vicuña Mackenna par une partie des chauffeurs de taxis collectifs, dont certains ont en outre été impliqués dans des incidents avec la police en tenue;
  132. – lancement d’une bombe incendiaire «molotov» à l’intérieur d’un véhicule de la police dans la région métropolitaine;
  133. – affrontements violents entre la police et des manifestants sur l’avenue Alameda Bernardo O’Higgins, au cours desquels ces derniers ont utilisé des bombes incendiaires «molotov», des pierres et des sacs remplis de peinture.
  134. 643. Le ministère de l’Intérieur a estimé que le 13 août 2003 n’a pas donné lieu à la paralysie générale annoncée par la CUT, mais simplement à des mouvements locaux et des défilés. Un absentéisme partiel a été enregistré dans quelques collèges, cabinets médicaux et services publics.
  135. 644. Concernant la réforme de la justice du travail, il faut savoir que le gouvernement a présenté au Parlement, en septembre 2003, trois projets de loi en la matière: le projet de loi de réforme de la loi no 17322 sur le recouvrement judiciaire des prestations d’aide sociale et l’application d’amendes; le projet de loi créant de nouveaux tribunaux pour le règlement des conflits du travail et le recouvrement des indemnités et des prestations d’aide sociale; et le projet de loi instaurant une nouvelle procédure judiciaire du travail.
  136. 645. Ces trois projets de loi ont été déposés devant la Chambre des députés, dont la Commission du travail et de la sécurité sociale a été saisie et a traité du contenu du premier texte. Une fois approuvé, celui-ci sera soumis à l’examen et à l’accord de la Chambre des députés, pour arriver au terme de sa première lecture constitutionnelle, avant de passer en seconde lecture devant le sénat. Entre-temps, la Commission du travail et de la sécurité sociale entamera la discussion du deuxième projet de loi qui vise à créer de nouveaux tribunaux du travail dans tout le pays.
  137. 646. Dans sa communication du 30 juin 2004, le gouvernement annonce, concernant les allégations relatives à l’entreprise HERPA SA, que, selon les éléments enregistrés à la Direction du travail, un projet de contrat collectif a été déposé par un groupe de travailleurs de l’entreprise le 29 octobre 2003 auprès de l’Inspection communale du travail du Maipo à des fins de notification. Le 13 novembre 2003, le Syndicat interentreprises des travailleurs de la métallurgie, de la communication, de l’énergie et des activités connexes a déposé plainte contre l’employeur, lui reprochant de ne pas avoir informé de ce fait les autres travailleurs de l’entreprise, comme le prescrit l’article 320 du Code du travail, et d’avoir licencié illégalement des travailleurs protégés par l’immunité, situation qui a été réglée ainsi que l’a indiqué l’unité de contrôle de l’Inspection communale du travail du Maipo.
  138. 647. L’inspection réalisée dans la multinationale espagnole le 14 novembre 2003 avait pour objet de vérifier l’existence d’autres instruments collectifs et d’autres travailleurs ayant dû recevoir la communication en question comme le stipule l’article 320, et d’informer la commission de négociation que la réponse était suspendue pendant un délai de 30 jours, à savoir jusqu’au 3 décembre, et que, à compter de cette date, la commission de négociation disposait de cinq jours pour contester la légalité de la réponse de l’employeur. Le 22 janvier 2004, la mission de bons offices sollicitée par l’employeur a pris fin, sans accord entre les parties. Le lendemain a marqué le début de la grève légale approuvée par les huit travailleurs en cause. Comme l’a expliqué le chef de bureau, ce jour là, les portes de l’entreprise étaient fermées avec des chaînes et les huit travailleurs se trouvant à l’intérieur en ont interdit l’accès à l’employeur et aux autres travailleurs non impliqués dans la grève. Le chef de bureau a suggéré à la commission de négociation de laisser entrer ces derniers, ce qu’elle n’a pas accepté. Le représentant légal de l’entreprise, à son tour, a opposé son refus à la poursuite des discussions tant que les travailleurs conserveraient cette attitude.
  139. 648. L’inspection du travail a offert sa médiation aux deux parties, dans le seul but de les amener à dialoguer. C’est dans ce contexte qu’ont eu lieu les faits objet de la plainte.
  140. 649. Quant au licenciement illégal et aux actes de persécution qui auraient été commis contre le délégué syndical Néstor Carrasco et qui l’auraient obligé à présenter sa démission et aux pressions exercées pour que les syndiqués abandonnent leur organisation, le gouvernement indique que ces faits ont été examinés par une commission, sous l’autorité de l’unité spéciale d’enquête de la région métropolitaine, qui a pu en constater la réalité, ainsi que les obstacles créés au fonctionnement du syndicat et les actes de harcèlement, à l’encontre du délégué comme des syndiqués. Ce constat a été à l’origine de la plainte déposée contre l’entreprise auprès de la deuxième chambre d’instruction de San Bernardo, qui a donné l’ordre de réintégrer Néstor Carrasco, ordre qui a été suivi par l’entreprise. Plus tard, cependant, le 18 décembre 2003, M. Carrasco a demandé le versement de prestations de départ pour cause de démission.
  141. 650. Quant au licenciement illégal des travailleurs Alberto Carrasco, Marcos Rojas et Jaime Vera, membres de la commission de négociation, le gouvernement indique que ce fait a été examiné par une commission de l’Inspection communale du travail du Maipo, qui a obtenu la réintégration des intéressés. L’enquête réalisée par l’unité spéciale de la région métropolitaine a permis de constater que l’employeur avait effectivement refusé de recevoir les membres de la commission de négociation et de leur fournir l’emploi convenu. Il s’est également avéré que ces travailleurs avaient été embauchés avant le déclenchement de la grève. L’enquête a permis de vérifier que l’employeur avait refusé de recevoir les dirigeants syndicaux et accepté de rencontrer uniquement le délégué syndical. Concernant le non-versement de rémunérations, il a été constaté que, au contraire, l’employeur avait bien versé lesdites rémunérations sous forme électronique. Concernant le recours à des briseurs de grève, il est apparu qu’une entreprise extérieure avait été engagée pour renforcer le service de surveillance à l’intérieur de l’entreprise. Les menaces de licenciement dénoncées ne se sont pas vérifiées.
  142. 651. Dans sa communication du 20 juillet 2004, le gouvernement indique que, jusqu’au mois de juin 2004, selon la Direction régionale du travail de la VIe région, dans laquelle se trouve la mine de cuivre El Teniente, propriété de l’entreprise CODELCO, aucune plainte n’avait été reçue de la part des travailleurs du syndicat en rapport avec les faits dénoncés dans la communication de janvier 2004. Le 2 décembre 2003, le Syndicat interentreprises des travailleurs des fournisseurs de CODELCO Chile, Division El Teniente (SITECO), a présenté à l’Inspection provinciale du travail de Rancagua des projets de convention collective intéressant diverses entreprises générales, avec des listes de travailleurs participant aux négociations, listes toutefois non revêtues de leur signature. Ces projets s’inspiraient des conventions nos 87 et 98 de l’OIT et non des articles 334 et suivants du Code du travail. Par conséquent, il s’agissait de négociations collectives non régies par ce texte de loi.
  143. 652. Ces projets de contrat collectif donnaient à chaque employeur jusqu’au 10 décembre pour fournir une réponse, à défaut de laquelle le syndicat pouvait déclencher la grève. Il était également fait mention d’une proposition de réunion fixée au 5 décembre 2003 pour arrêter la procédure qui régirait les modalités de négociation; aucune des 13 entreprises invitées ne s’est présentée au rendez-vous. En conséquence, le 16 décembre ont commencé les mouvements de contestation des travailleurs. Ainsi que l’a expliqué le dirigeant du SITECO, Danilo Jorquera, le plus grave d’entre eux a pris la forme d’une grève sur le tas, aux fonderies de Caletones et à l’intérieur de la mine. A Caletones, les travailleurs ont signé un accord pour entamer un processus de négociation collective par entreprise, mais qui n’a pas été suivi d’effet. A l’intérieur de la mine, la police en tenue est intervenue pour déloger les travailleurs et a arrêté une centaine d’entre eux qui, après vérification de leur domicile, ont été remis en liberté. Les autorités policières ont précisé qu’à aucun moment elles n’avaient utilisé d’armes à feu et qu’elles ne s’étaient servies que d’instruments de dissuasion, comme des produits chimiques et de l’eau. Pour leur part, les autorités sanitaires ont indiqué que seuls deux travailleurs avaient été victimes de lésions et qu’un congé avait été donné aux autres travailleurs le jour même, à la suite des examens médicaux.
  144. 653. La direction syndicale a mis de côté les processus de négociation collective; l’entreprise mandante, CODELCO Chile, Division El Teniente, quant à elle, a informé ses fournisseurs que 200 travailleurs ne pouvaient demeurer dans les installations de la mine et leur a retiré leur laissez-passer.
  145. 654. En conséquence, les entreprises contractantes ont licencié ces travailleurs, à l’exception de quelques délégués syndicaux, en raison de l’immunité dont ils bénéficiaient. L’organisation syndicale, par l’entremise de M. Luis Salazar, est entrée en pourparlers avec l’entreprise mandante afin de débloquer la situation, obtenant ainsi de CODELCO qu’elle revienne sur la décision selon laquelle 200 travailleurs ne pouvaient demeurer dans les installations des entreprises. Aucune plainte n’a été déposée devant des tribunaux en rapport avec ces faits. Au cours des dernières semaines, la direction syndicale a repris le dialogue avec l’entreprise CODELCO Chile, au travers du secrétaire régional du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, mais on n’en connaît pas encore l’issue.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 655. Le comité prend note des allégations des organisations plaignantes concernant: 1) les pratiques antisyndicales du groupe d’entreprises PLASTYVERG, qui incluent le licenciement de délégués syndicaux et de travailleurs syndiqués, les pressions exercées pour que les syndiqués démissionnent de leur organisation syndicale, les ingérences effectuées par diverses entreprises pour isoler le syndicat et négocier avec les délégués des travailleurs nommés par l’employeur; 2) la répression violente de la grève nationale du 13 août 2003 en dépit de son caractère pacifique; l’arrestation de syndicalistes, les menaces et intimidations à l’encontre des travailleurs ayant participé à la grève, l’utilisation de blindés, de lances à eau, de gaz lacrymogènes – y compris contre le siège de la CUT –, les mauvais traitements, la fermeture de rues autorisées pour la manifestation, l’agression sur le secrétaire général de la CUT, le tir de projectiles en caoutchouc, les atteintes à l’intégrité physique de travailleurs, les tortures commises sur un des détenus, l’établissement de listes des participants à la grève dans différents établissements et le licenciement d’une dirigeante syndicale du secteur enseignant et de sa sœur; 3) violations des droits syndicaux de la part de l’entreprise d’Etat CODELCO et des entreprises HERPA SA, Viñas Tarapacá et Santa Helena.
  2. Entreprises PLASTYVERG
  3. 656. Concernant les allégations relatives au groupe d’entreprises PLASTYVERG, le comité prend note des déclarations du gouvernement et, notamment, du fait que la Direction du travail a effectué une enquête au terme de laquelle elle a constaté les pressions exercées par les entreprises pour l’élection des délégués du personnel, ainsi que l’existence de pressions pour que les travailleurs syndiqués démissionnent de leur organisation syndicale pendant le processus de négociation collective, raison pour laquelle une plainte a été déposée auprès de la justice pour cause de pratiques antisyndicales; l’autorité judiciaire, qui a accepté en partie la plainte concernant les pressions visant à amener les travailleurs à démissionner de leur syndicat, a ordonné à l’entreprise de mettre fin à cette conduite et l’a condamné à verser 75 UTM. Elle n’a pas confirmé la thèse d’une intervention de l’employeur dans l’élection du délégué du personnel et il existe à cet égard une deuxième plainte du syndicat qui fait l’objet d’une enquête; une médiation a été proposée et cette question sera abordée prochainement. Le comité prend note des déclarations dans lesquelles les entreprises concernées rejettent les allégations de violation des droits syndicaux et font savoir qu’elles ont déposé une plainte au pénal contre divers délégués syndicaux; les entreprises font parvenir des pièces justificatives sur la fin de la relation de travail avec les syndicalistes José Saavedra, Antonio Labarca, Pablo Villavicencio, Daniel Antonio Duarte Arce et Luis Osvaldo Martínez Duarte, qui ont renoncé à toute action en justice; elles font également parvenir une liste de 203 travailleurs ayant désavoué la présente plainte adressée au comité. Dans ces conditions, le comité déplore les pressions antisyndicales exercées par l’entreprise et constatées par l’autorité judiciaire. Toutefois, avant de formuler des conclusions définitives sur ces allégations, le comité demande au gouvernement de lui envoyer une copie des rapports relatifs aux enquêtes administratives réalisées et à l’ensemble des jugements rendus.
  4. Actes de violence
  5. 657. Concernant les allégations relatives à la répression violente de la grève nationale du 13 août 2003 (atteintes à l’intégrité physique, détentions, menaces et intimidations, utilisation de grenades lacrymogènes et de lances à eau, licenciement de deux syndicalistes, tortures sur un des détenus, etc.), le comité note que le gouvernement nie catégoriquement le caractère pacifique de la grève, mentionne 214 infractions pénales comprenant la possession d’engins explosifs, la pose de «hérissons», l’appropriation illégale d’un véhicule de transport de personnes, qui a été ultérieurement incendié, des affrontements violents, l’arrêt de la circulation, etc.; le gouvernement nie également que l’on ait dressé des listes de grévistes ou que les autorités aient proféré des menaces; 214 personnes ont été arrêtées et se trouvent actuellement en liberté.
  6. 658. Le comité doit constater la contradiction évidente existant entre les allégations présentées et la réponse du gouvernement, déplore tous les actes de violence survenus pendant la grève générale et demande au gouvernement de lui communiquer les jugements qui seront rendus par la justice en rapport avec les actions pénales évoquées par les plaignants ou avec toute autre action violente mentionnées par le gouvernement.
  7. Entreprises HERPA SA, Viñas Tarapacá
  8. et Santa Helena
  9. 659. Concernant les allégations relatives aux entreprises HERPA SA, Viñas Tarapacá et Santa Helena, le comité prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle, le 29 octobre 2003, un projet de contrat collectif a été déposé par un groupe de travailleurs de l’entreprise auprès de l’Inspection communale du travail du Maipo, à des fins de notification. Le 13 novembre 2003, le SME a déposé plainte contre l’employeur, lui reprochant de ne pas avoir informé de ce fait les autres travailleurs de l’entreprise, comme le prescrit l’article 320 du Code du travail, et d’avoir licencié illégalement des travailleurs protégés par l’immunité, situation qui a été réglée ainsi que l’a indiqué l’Unité de contrôle de l’Inspection communale du travail du Maipo. Le 22 janvier 2004, la mission de bons offices sollicitée par l’employeur a pris fin, sans accord entre les parties. Le lendemain a marqué le début de la grève légale approuvée par les huit travailleurs en cause. Ce jour là, les portes de l’entreprise étaient fermées avec des chaînes et les huit travailleurs se trouvant à l’intérieur en ont interdit l’accès à l’employeur et aux autres travailleurs non impliqués dans la grève. Le chef de bureau a suggéré à la commission de négociation de laisser entrer ces derniers, ce qu’elle n’a pas accepté. Le représentant légal de l’entreprise, à son tour, a opposé son refus à la poursuite des discussions tant que les travailleurs conserveraient cette attitude. L’inspection du travail a offert sa médiation aux deux parties. C’est dans ce contexte que se sont produits les faits mentionnés.
  10. 660. Quant au licenciement illégal et aux actes de persécution qui auraient été commis contre le délégué syndical Néstor Carrasco, qui l’auraient obligé à présenter sa démission, et aux pressions exercées pour que les syndiqués abandonnent leur organisation, le comité note que, selon le gouvernement, la commission d’inspection a constaté la réalité de ces faits, ainsi que les obstacles créés au fonctionnement du syndicat et les actes de harcèlement, à l’encontre du délégué comme des syndiqués. Ce constat a été à l’origine de la plainte déposée contre l’entreprise auprès de la deuxième chambre d’instruction de San Bernardo, qui a donné l’ordre de réintégrer Néstor Carrasco, ordre qui a été suivi par l’entreprise. Plus tard, cependant, le 18 décembre 2003, M. Carrasco a demandé le versement de prestations de départ pour cause de démission.
  11. 661. Quant au licenciement illégal allégué des travailleurs Alberto Carrasco, Marcos Rojas et Jaime Vera, membres de la commission de négociation, le comité note que, selon le gouvernement, la réintégration des intéressés a pu être obtenue. L’enquête réalisée par l’Unité spéciale de la région métropolitaine a permis de constater que l’employeur avait effectivement refusé de recevoir les membres de la Commission de négociation, et de leur fournir l’emploi convenu. Il s’est également avéré que ces travailleurs avaient été embauchés avant le déclenchement de la grève et que l’employeur avait refusé de recevoir les dirigeants syndicaux au motif qu’il accepterait de rencontrer uniquement le délégué syndical élu. Concernant le non-versement de rémunérations, il a été constaté que, au contraire, l’employeur avait bien versé lesdites rémunérations sous forme électronique; concernant le premier point (le recours à des briseurs de grève), il est apparu qu’une entreprise extérieure avait été engagée pour renforcer le service de surveillance à l’intérieur de l’entreprise. Les menaces de licenciement dénoncées ne se sont pas vérifiées.
  12. 662. Dans ces conditions, le comité exprime sa préoccupation face aux actes antisyndicaux commis dans les entreprises HERPA SA, Viñas Tarapacá et Santa Helena, constatés par les autorités, et il observe que l’intervention de ces dernières a permis la réintégration des syndicalistes Néstor Carrasco, Alberto Carrasco, Marcos Rojas et Jaime Vera. Le comité demande au gouvernement: 1) de lui indiquer si la dernière enquête administrative réalisée dans ces entreprises a donné lieu à une action en justice et, dans l’affirmative, de lui en communiquer le résultat; et 2) de lui apporter des précisions sur les allégations relatives à la détention de travailleurs et à l’intervention violente menée par la police pour évacuer les travailleurs en dépit de l’absence d’un ordre de la justice.
  13. Entreprise d’Etat CODELCO
  14. 663. Concernant les allégations relatives à l’entreprise d’Etat CODELCO (refus de négocier collectivement avec le syndicat SME, agression contre trois dirigeants sur la voie publique, interdiction aux dirigeants syndicaux d’avoir des contacts avec les syndiqués dans les mines, intervention illégale violente de la police contre les grévistes, qui s’est soldée par l’arrestation de 115 travailleurs remis en liberté le jour même, l’inscription de 220 licenciés sur des listes noires, et des blessures infligées à 20 travailleurs – dont l’un a essuyé 20 coups de feu –, le comité prend note des déclarations du gouvernement dans lesquelles il indique que, pendant la grève, 100 travailleurs ont été arrêtés, puis libérés après vérification de leur domicile, que la police n’a pas utilisé d’armes à feu mais des produits chimiques et de l’eau, que seuls deux travailleurs ont subi des blessures et que les autres ont été libérés le jour même. Le comité prend également note du fait que l’entreprise a informé ses fournisseurs que les travailleurs licenciés ne pouvaient demeurer dans les installations de la mine et a retiré leur laissez-passer à 200 travailleurs, mais que cette interdiction a été levée par la suite. Le comité note enfin qu’aucune plainte n’a été déposée devant l’autorité judiciaire et que, par l’intermédiaire de l’administration du travail, la direction syndicale a repris le dialogue avec l’entreprise.
  15. 664. Le comité regrette les actes de violence commis, et déplore que la réponse du gouvernement ne fasse pas référence à toutes les allégations présentées (refus de négocier, interdiction aux dirigeants syndicaux de rencontrer les syndiqués, établissement de listes noires, etc.). Le comité rappelle que: «les travailleurs doivent pouvoir jouir du droit de manifestation pacifique pour défendre leurs intérêts professionnels» et que, s’il appartient aux syndicats de respecter les dispositions légales visant à assurer le maintien de l’ordre public, les autorités publiques n’en sont pas moins tenues de s’abstenir de toute intervention de nature à restreindre le droit des syndicats d’organiser librement la tenue et le déroulement des réunions». [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 132 et 144.] Le comité demande au gouvernement d’effectuer une enquête complète et impartiale à ce sujet, y compris à propos des blessures subies par des travailleurs, et de l’informer des résultats obtenus ainsi que de l’issue du dialogue rétabli entre la direction syndicale et l’entreprise.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 665. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Concernant les allégations relatives au groupe d’entreprises PLASTYVERG, le comité demande au gouvernement de lui envoyer une copie des rapports relatifs aux enquêtes administratives réalisées et à l’ensemble des jugements rendus.
    • b) Concernant les allégations relatives à la répression violente de la grève nationale le 13 août 2003, le comité doit constater la contradiction évidente existant entre les allégations présentées et la réponse du gouvernement, déplore tous les actes de violence survenus pendant la grève générale et demande au gouvernement de lui communiquer les jugements qui seront rendus par la justice en rapport avec les actions pénales évoquées par les plaignants ou avec toute autre action violente mentionnées par le gouvernement.
    • c) Concernant les allégations relatives aux entreprises HERPA SA, Viñas Tarapacá et Santa Helena, le comité demande au gouvernement: 1) de lui indiquer si la dernière enquête administrative réalisée dans ces entreprises a donné lieu à une action en justice et, dans l’affirmative, de lui en communiquer le résultat; et 2) de lui apporter des précisions sur les allégations relatives à la détention de travailleurs et à l’intervention violente menée par la police pour évacuer les travailleurs en dépit de l’absence d’un ordre de la justice.
    • d) Concernant les allégations relatives à l’entreprise d’Etat CODELCO, le comité demande au gouvernement d’effectuer une enquête complète et impartiale à ce sujet, y compris à propos des blessures subies par des travailleurs, et de l’informer des résultats obtenus ainsi que de l’issue du dialogue rétabli entre la direction syndicale et l’entreprise.
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