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Observation (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - République démocratique du Congo (Ratification: 2001)

Autre commentaire sur C105

Observation
  1. 2022
  2. 2021
  3. 2017

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Article 1 a) de la convention. Peines de prison impliquant une obligation de travailler imposées en tant que sanction de l’expression d’opinions politiques ou de la manifestation d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. La commission a précédemment instamment prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mettre en conformité avec la convention certaines dispositions de la législation, en vertu desquelles des activités pouvant relever du champ d’application de l’article 1 a) de la convention sont passibles de sanctions pénales (peines de servitude pénale) comportant un travail obligatoire (art. 8 du Code pénal). Les dispositions en question sont les suivantes:
  • –Code pénal, art. 74, 75 et 77: imputations dommageables et injures; art. 136 et 137: outrage aux membres de l’Assemblée nationale, du gouvernement et aux dépositaires de l’autorité ou de la force publique; art. 199 bis et ter: diffusion de faux bruits de nature à inquiéter la population; art. 209: mise en circulation de tracts, bulletins ou papillons d’origine ou d’inspiration étrangère de nature à nuire à l’intérêt national; art. 211, paragr. 3: exposition dans les lieux publics de dessins, affiches, gravures, peintures, photographies et tout objet ou image de nature à troubler la paix publique.
  • –loi no 96-002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l’exercice de la liberté de la presse: art. 73 à 76 qui renvoient au Code pénal pour la qualification et la sanction des délits de presse.
  • –ordonnance-loi no 25-557 du 6 novembre 1959 sur les peines à appliquer en cas d’infraction à des mesures d’ordre général.
  • –Ordonnances-lois nos 300 et 301 du 16 décembre 1963 sur la répression des offenses envers le chef de l’État et les chefs d’État étrangers.
Le gouvernement indique dans son rapport que le travail forcé en tant que sanction prévue par le Code pénal ne concerne pas l’expression d’opinions politiques ou la manifestation d’une opposition idéologique à l’ordre politique, économique ou social établi. Le travail forcé comme sanction n’est prononcé que contre les auteurs de détournements de deniers publics. La commission prend note de cette information et rappelle que, parmi les peines prévues par le Code pénal, la peine de servitude pénale (art. 8 du Code pénal) peut impliquer un travail obligatoire et que les infractions prévues dans les dispositions précitées de la législation sont passibles de peines de servitude pénale. La commission se voit donc dans l’obligation de souligner une nouvelle fois que l’interdiction d’imposer du travail obligatoire dans le cadre de l’article 1 a) de la convention ne se limite pas à la peine de travail forcé, mais à tout travail ou service exigé à l’égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi, notamment lorsque ce travail prend la forme d’un travail pénitentiaire imposé aux personnes condamnées.
Par ailleurs, la commission note avec préoccupation que, dans son rapport sur la situation des droits de l’homme en République démocratique du Congo du 15 juillet 2021, la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme fait état d’attaques, de menaces et d’intimidations à l’encontre des journalistes, défenseurs des droits de l’homme et membres de la société civile, ainsi que de répression violente de certaines manifestations pacifiques, et de restrictions aux libertés fondamentales. La Haute-Commissaire ajoute qu’au moins 433 personnes ont fait l’objet d’arrestations arbitraires ou de détentions illégales et arbitraires lors de l’exercice par celles-ci de leurs droits à la liberté d’opinion et d’expression, de réunion pacifique ou d’association (A/HRC/48/47, paragr. 3 et 10). La commission prend également note de la résolution 2612 adoptée par le Conseil de sécurité des Nations Unies le 20 décembre 2021, dans laquelle le Conseil se félicite des mesures prises par le gouvernement pour libérer les prisonniers politiques ainsi que pour enquêter sur les faits d’usage disproportionné de la force par les forces de sécurité sur des manifestants pacifiques.
La commission note également l’adoption, le 14 octobre 2022, de la loi modifiant la loi no 96/002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l’exercice de la liberté de la presse. Elle note en outre que des projets de législation sont à l’examen concernant l’accès à l’information, les manifestations publiques, la protection des défenseurs des droits de l’homme, et les associations à but non lucratif. La commission rappelle que parmi les activités qui, en vertu de l’article 1 a) de la convention, ne doivent pas faire l’objet d’une sanction comportant un travail obligatoire, figurent les activités qui s’exercent dans le cadre de la liberté d’exprimer des opinions politiques ou idéologiques (oralement, par voie de presse ou par d’autres moyens de communication), ainsi que divers autres droits généralement reconnus, tels que par exemple les droits d’association et de réunion, droits par lesquels les citoyens cherchent à faire connaître et accepter leur opinion (Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 302 et 303).
La commission prie une nouvelle fois instamment le gouvernement de modifier ou d’abroger les dispositions précitées du Code pénal, de l’ordonnance-loi no 25-557 du 6 novembre 1959, et des ordonnances-lois nos 300 et 301 du 16 décembre 1963, et de s’assurer que, tant en droit qu’en pratique, aucune sanction impliquant du travail pénitentiaire obligatoire (y compris dans le cadre de la peine de servitude pénale) ne peut être imposée en tant que punition de l’expression d’opinions politiques ou de la manifestation pacifique d’une opposition idéologique à l’ordre établi. La commission prie le gouvernement de faire état des progrès réalisés en ce sens.
En ce qui concerne les projets de lois concernant l’accès à l’information, les manifestations publiques, la protection des défenseurs des droits de l’homme et les associations à but non lucratif, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur leur état d’avancement. La commission exprime le ferme espoir que les dispositions de ces textes tiendront compte des développements qui précèdent et des obligations contractées au titre de la convention. Elle prie également le gouvernement de fournir une copie de la loi modifiant la loi no 96/002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l’exercice de la liberté de la presse.
Article 1 d). Peines de prison impliquant une obligation de travailler sanctionnant la participation à des grèves. La commission a précédemment demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les dispositions de l’article 326 du Code du travail, de manière à ce qu’aucune peine de prison impliquant une obligation de travailler ne puisse être imposée en tant que sanction pour la participation à une grève. L’article 326 du Code du travail permet en effet de sanctionner par une amende et/ou une peine de servitude pénale de six mois maximum toute personne qui contreviendrait à l’article 315 du Code du travail qui réglemente les conditions du droit à la cessation collective de travail en cas de conflit collectif de travail.
Le gouvernement indique dans son rapport que les peines prévues à l’article 326 du Code du travail, à savoir une peine de servitude pénale de six mois maximum et une peine d’amende, sont les seules sanctions pouvant être imposées en cas de condamnation du travailleur gréviste. La commission note avec regret l’absence de mesures prises par le gouvernement pour amender l’article 326 du Code du travail, malgré les modifications apportées au Code du travail en 2016 par la loi no 16/010 du 15 juillet 2016 modifiant et complétant le Code du travail, le gouvernement se limitant à indiquer que les peines possibles sont la peine de servitude pénale et la peine d’amende. La commission rappelle que la peine de servitude pénale implique pour la personne condamnée un travail obligatoire (art. 8 du Code pénal), et entre par conséquent dans le champ d’application de la convention. Elle souligne que, conformément à l’article 1 d) de la convention, aucune peine impliquant une obligation de travailler ne doit pouvoir être imposée à des travailleurs ayant participé pacifiquement à une grève. La commission veut croire par conséquent que le gouvernement prendra les mesures nécessaires et tiendra compte des commentaires qui précèdent ainsi que de ceux formulés au titre de l’application de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, pour modifier l’article 326 du Code du travail, de manière à ce que la législation ne permette pas de sanctionner par une peine de servitude pénale, qui implique une obligation de travailler, les personnes ayant participé pacifiquement à une grève. Elle prie le gouvernement de communiquer des informations sur les avancés réalisées à cet égard.
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