Jugement n° 4491
Décision
1. La décision attaquée en date du 29 janvier 2018 est annulée, de même que la décision initiale du 7 septembre 2017 portant révocation de la requérante. 2. L’OEB réintégrera la requérante à compter de la date du prononcé du présent jugement. 3. L’OEB versera à la requérante une indemnité pour tort moral d’un montant de 30 000 euros. 4. L’OEB versera également à la requérante la somme de 8 000 euros à titre de dépens. 5. Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Synthèse
La requérante conteste la décision de la révoquer avec effet immédiat pour faute grave.
Mots-clés du jugement
Mots-clés
Requête admise; Réintégration; Allocations familiales; Faute; Renvoi sans préavis
Considérant 10
Extrait:
La majorité [de la Commission] a [...] exposé sa conclusion concernant la conduite de la requérante et a recommandé de lui infliger la sanction de rétrogradation. Elle a fait observer qu’un agent de l’OEB avait le devoir de communiquer à l’administration tous les faits pouvant être pertinents afin de lui permettre de «prendre une décision correcte concernant l’allocation de prestations à [un] agent» et que le fait de ne pas s’acquitter de ce devoir constituait une faute. Mais ce n’est pas cette faute qui était reprochée à la requérante. L’allégation formulée à son encontre était qu’elle avait fait de fausses déclarations concernant son statut et commis une fraude. La fraude suppose l’existence d’une intention d’obtenir un gain pécuniaire par tromperie (voir, par exemple, les jugements 4238, au considérant 5, et 3402, au considérant 9).
Référence(s)
Jugement(s) TAOIT: 3402, 4238
Mots-clés
Faute; Procédure disciplinaire; Fraude; Accusations disciplinaires
Considérant 19
Extrait:
Dans une telle situation, la jurisprudence du Tribunal est claire. Le fonctionnaire accusé d’avoir commis une faute bénéficie de la présomption de non-culpabilité et le doute doit lui profiter (voir, par exemple, le jugement 2913, au considérant 9). La charge de la preuve en cas d’allégations de faute incombe à l’organisation et la faute doit être prouvée au-delà de tout doute raisonnable (voir, par exemple, le jugement 4364, au considérant 10). Lorsqu’il examine une décision de sanctionner un fonctionnaire pour faute, le Tribunal ne cherche habituellement pas à déterminer si l’organisation s’est acquittée de la charge de la preuve, mais déterminera plutôt si l’organe compétent aurait pu, au-delà de tout doute raisonnable, conclure à la culpabilité de l’intéressé (voir, par exemple, le jugement 4362, aux considérants 7 à 10).
Référence(s)
Jugement(s) TAOIT: 2913, 4362, 4364
Mots-clés
Présomption d'innocence; Bénéfice du doute; Sanction disciplinaire; Niveau de preuve; Au-delà de tout doute raisonnable; Rôle du Tribunal
Considérant 20
Extrait:
[I]l y a eu une réticence manifeste à accepter, voire un refus d’accepter, que la requérante disait la vérité. Il est certes évident qu’une personne qui est coupable de fraude peut souvent mentir et inventer des faits pour éviter d’avoir à subir les conséquences de sa conduite frauduleuse. Il est tout aussi évident qu’une organisation doit être consciente de cette possibilité lorsqu’elle mène une enquête et doit se prononcer sur la conduite d’un fonctionnaire qui lui semble frauduleuse ou est soupçonnée de l’être. Mais, en l’espèce, la preuve de l’hypothèse selon laquelle le récit et l’explication de la requérante étaient faux et qu’elle aurait agi de manière frauduleuse reposait sur une analyse abusive et déformée des faits. Le Tribunal estime qu’il n’était pas légitime de conclure à la culpabilité de la requérante au-delà de tout doute raisonnable s’agissant de l’allégation de faute.
Mots-clés
Preuve; Procédure disciplinaire; Fraude; Au-delà de tout doute raisonnable
Considérant 22
Extrait:
À titre de conclusion principale, la requérante demande que soit ordonnée sa réintégration. L’OEB n’avance aucun argument spécifique dans ses écritures selon lequel, dans l’éventualité où la requérante démontrerait que sa révocation était illégale, elle ne devrait néanmoins pas être réintégrée. Cette mesure est appropriée compte tenu des circonstances (voir le jugement 4043, au considérant 25). La décision initiale de révoquer la requérante et la décision attaquée doivent être annulées. La requérante sera réintégrée à compter de la date du prononcé du présent jugement. Dans les circonstances inhabituelles de l’espèce, pour déterminer la date de la réintégration, le Tribunal a tenu compte du point soulevé par la Commission de discipline, à savoir que la requérante aurait dû être plus explicite au sujet de sa situation personnelle.
Référence(s)
Jugement(s) TAOIT: 4043
Mots-clés
Entrée en vigueur; Réintégration
Considérant 23
Extrait:
[Il y a eu] tort moral manifeste, tenant notamment à une grave détresse, causé à la requérante par le fait qu’elle a fait l’objet d’une enquête, a été accusée d’avoir commis une fraude, a été reconnue coupable de cette faute et a finalement été révoquée. Le montant de ces dommages-intérêts pour tort moral est évalué à 30 000 euros.
Mots-clés
Tort moral; Faute; Procédure disciplinaire
Considérant 24
Extrait:
La requérante a réclamé des dépens au titre de la procédure disciplinaire et de la procédure conduite devant le Président, soit dans le cadre de la demande de réexamen. Même s’il est loisible au Tribunal de répondre favorablement à une telle demande, il n’y aurait aucun motif rationnel de traiter celle-ci différemment d’une conclusion tendant à l’octroi de dépens au titre de la procédure interne. De tels dépens ne peuvent être octroyés que dans des circonstances exceptionnelles (voir les jugements 4392, au considérant 13, et 4399, au considérant 13), qui ne se rencontrent pas en l’espèce.
Référence(s)
Jugement(s) TAOIT: 4392, 4399
Mots-clés
Dépens pour la procédure de recours interne
Considérant 24
Extrait:
[La requérante] demande que son interdiction d’accès aux locaux de l’OEB soit levée. Cela découlera nécessairement de la réintégration ordonnée.
Mots-clés
Réintégration; Interdiction d'accès aux locaux
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