Jugement n° 4504
Décision
1. La décision attaquée est annulée dans la mesure indiquée au considérant 17 du jugement et l’affaire est renvoyée à l’OMPI afin qu’elle soit réexaminée à la lumière du présent jugement. 2. L’OMPI remboursera à la requérante, à titre de dommages-intérêts pour tort matériel, l’ensemble des traitements et indemnités que celle-ci aurait perçus si la sanction disciplinaire de rétrogradation ne lui avait pas été infligée. 3. L’OMPI versera à la requérante la somme de 8 000 francs suisses à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal. 4. L’OMPI versera également à la requérante la moitié des dépens qu’elle a engagés dans la procédure de recours interne, en déduisant de ce montant la somme qui lui a déjà été versée à ce titre. 5. Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Synthèse
La requérante conteste la décision de la rétrograder du grade P4 au grade P3 pendant une période de deux ans.
Mots-clés du jugement
Mots-clés
Requête admise; Sanction disciplinaire; Rétrogradation
Considérant 4
Extrait:
Conformément à la jurisprudence du Tribunal, les dépens au titre de la procédure de recours interne ne peuvent être octroyés que dans des circonstances exceptionnelles (voir, par exemple, le jugement 4369, au considérant 22). Or de telles circonstances ne se rencontrent pas en l’espèce. Toutefois, en accordant à la requérante le remboursement de huit heures d’honoraires d’avocat, le Directeur général a indiqué dans la décision attaquée que cette décision «a[vait] été prise à titre exceptionnel, car les dépens ne sont normalement pas remboursés au stade de la procédure interne devant le Comité», mais qu’il avait pris cette décision «compte tenu du fait que [la requérante avait] contesté devant le Comité une mesure disciplinaire comportant un élément financier et aussi parce qu[’elle avait] partiellement obtenu gain de cause». Le Directeur général a ainsi justifié le remboursement à la requérante de huit heures d’honoraires d’avocat, sans indiquer comment il était parvenu à ce montant. Étant donné que le recours interne a abouti à une réduction substantielle de la période de rétrogradation prévue initialement, il était raisonnable, de l’avis du Tribunal, d’accorder à la requérante la moitié des dépens qu’elle avait engagés dans le cadre du recours interne, en déduisant de ce montant la somme qui lui avait déjà été versée à ce titre. C’est ce qu’ordonnera le Tribunal.
Référence(s)
ILOAT Judgment(s): 4369
Mots-clés
Dépens pour la procédure de recours interne
Considérant 6
Extrait:
Selon une jurisprudence constante, les décisions portant sur des questions disciplinaires relèvent du pouvoir d’appréciation du chef exécutif d’une organisation internationale et ne peuvent faire l’objet que d’un contrôle limité. Il appartient au Tribunal de déterminer si une décision prise en vertu du pouvoir discrétionnaire émane d’un organe compétent, est régulière en la forme, si la procédure a été correctement suivie et, en ce qui concerne la légalité interne, si l’appréciation à laquelle l’autorité administrative a procédé est fondée sur une erreur de droit ou des faits inexacts, ou si elle révèle que des éléments essentiels n’ont pas été pris en considération ou si des conclusions manifestement erronées ont été tirées des pièces du dossier ou enfin si un détournement de pouvoir est établi. De plus, le Tribunal ne mettra en cause les constatations d’un organe d’enquête qu’en cas d’erreur manifeste (voir, par exemple, le jugement 4444, au considérant 5).
Référence(s)
ILOAT Judgment(s): 4444
Mots-clés
Sanction disciplinaire; Pouvoir d'appréciation; Rôle du Tribunal
Considérant 10
Extrait:
Étant donné que, dans le cadre d’un recours interne, le rôle du Comité d’appel est consultatif, le Directeur général peut rejeter ses recommandations à condition qu’il avance des motifs clairs et convaincants pour justifier cette décision (voir, par exemple, le jugement 2699, au considérant 24).
Référence(s)
ILOAT Judgment(s): 2699
Mots-clés
Sanction disciplinaire; Décision définitive; Motivation; Organe disciplinaire
Considérant 11
Extrait:
S’agissant de la sévérité de la sanction, il ressort de la jurisprudence du Tribunal que «[l]’autorité investie du pouvoir disciplinaire au sein d’une organisation internationale dispose d’un pouvoir d’appréciation quant au choix de la sanction infligée à l’un de ses fonctionnaires à raison d’une faute commise par ce dernier. Sa décision doit cependant, dans tous les cas, respecter le principe de proportionnalité qui s’impose en la matière» (voir, par exemple, les jugements 3971, au considérant 17, 3953, au considérant 14, 3944, au considérant 12, et 3640, au considérant 29). La question qui se pose en l’espèce est celle de savoir si la sanction de rétrogradation du grade P4 au grade P3 infligée à la requérante pendant une période de deux ans était ou non disproportionnée compte tenu de la faute qui a été établie. Lors de l’examen de la proportionnalité de la sanction, le Tribunal ne saurait substituer son appréciation à celle d’une autorité disciplinaire; il se borne à évaluer si la décision est dans les limites de l’acceptable. Le défaut de proportionnalité doit être considéré comme une erreur de droit justifiant l’annulation d’une mesure disciplinaire, même si la décision en cause est de nature discrétionnaire. Lorsque l’on cherche à déterminer si une mesure disciplinaire est disproportionnée au regard de la faute commise, il y a lieu de prendre en compte les circonstances, tant objectives que subjectives (voir le jugement 4478, au considérant 11, et la jurisprudence citée).
Référence(s)
ILOAT Judgment(s): 3640, 3944, 3971, 4478
Mots-clés
Proportionnalité; Sanction disciplinaire
Considérant 17
Extrait:
[L]a décision attaquée devra être annulée en tant qu’elle a conclu que la rétrogradation du grade P4, échelon PP1, au grade P3, échelon PP2, pendant une période de deux ans constituait une mesure disciplinaire proportionnée. L’affaire sera renvoyée à l’OMPI afin qu’elle réexamine la question de savoir si, compte tenu de l’ensemble des circonstances, une sanction disciplinaire moins sévère devrait être infligée et, dans l’affirmative, laquelle. Par suite de l’annulation de la décision attaquée dans la mesure indiquée dans le présent considérant, il sera ordonné à l’OMPI de rembourser à la requérante, à titre de dommages-intérêts pour tort matériel, l’ensemble des traitements et indemnités qu’elle aurait perçus si la sanction disciplinaire de rétrogradation ne lui avait pas été infligée.
Mots-clés
Annulation de la décision; Sanction disciplinaire; Dommages-intérêts pour tort matériel
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