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88e session
Genève,  30 mai - 15 juin 2000


Rapport de la Commission de la protection de la maternité

Rapport
Convention proposée et recommandation proposée

Présentation, discussion et adoption
 

Original espagnol: Le PRÉSIDENT — Nous allons maintenant examiner le premier point à l'ordre du jour. Il s'agit du rapport de la Commission de la protection de la maternité qui figure dans le Compte rendu provisoire n° 20.

Je donne la parole à Mme Samuel, rapporteur de la commission, qui va présenter le rapport.

Original anglais: Mme SAMUEL (déléguée gouvernementale, rapporteur de la Commission de la protection de la maternité, Chypre) — J'ai l'honneur et le privilège de jouer pour la deuxième fois le rôle de rapporteur de la Commission de la protection de la maternité, qui a été chargée de réviser la convention n° 103 et la recommandation n° 95 sur la protection de la maternité. La commission avait à faire face à une tâche particulièrement difficile cette année. Elle devait en un temps très court parvenir à un accord sur un nouvel instrument qui assurerait la plus grande protection possible, qui serait tourné vers l'avenir et qui aurait de bonnes perspectives de ratification, et ce qui est plus important encore, d'application dans les différents pays.

A la suite de la première discussion en juin 1999 et tout au long de l'année écoulée, une grande incertitude a régné quant à l'issue finale de ce processus. C'est la raison pour laquelle les membres de la commission ont déployé beaucoup d'énergie pour défendre vigoureusement leur point de vue au long de nos réunions.

Le débat a été enrichi grâce à la diversité des expériences et des compétences des membres de la commission, qui comptait notamment des Membres ayant des connaissances approfondies et une vaste expérience dans des domaines extrêmement variés allant de la sécurité sociale à la santé et la sécurité au travail en passant par les droits de l'homme, l'égalité entre les sexes, l'emploi et les relations professionnelles en général.

Tous les membres de la commission se sont bien rendu compte de l'importance que revêt aujourd'hui la protection de la maternité dans un monde où les femmes sont de plus en plus à nombreuses à exercer une activité professionnelle et où leur contribution au revenu familial augmente rapidement.

Ils n'avaient donc qu'un seul objectif à l'esprit: se mettre d'accord sur des instruments qui marqueraient une amélioration par rapport aux instruments adoptés en 1952. Par contre, les avis étaient partagés quant à la façon de procéder à cette amélioration.

Nombre de participants étaient d'avis que l'on ne pourrait apporter des améliorations que si les instruments précédents étaient entièrement préservés et renforcés par l'ajout de certains éléments propres à assurer un degré de protection plus élevé.

Pour eux, il était important de mettre en place un modèle de bonnes pratiques auxquelles les pays pourraient finalement aspirer. D'autres ont estimé qu'une convention améliorée serait une convention qui assurerait une bonne protection de base largement applicable dans un nombre de pays aussi grand que possible et qui conduirait à des améliorations à l'échelon national. Selon ces délégations, la révision n'a pas nécessairement pour corollaire une augmentation des normes antérieures dans tous les domaines, mais consiste plutôt à écarter les obstacles qui jusqu'à présent avaient empêché la ratification de la convention actuelle.

Si nous avons pu parvenir à un résultat heureux à la fin de la réunion, en dépit d'approches aussi différentes, c'est grâce aux membres de la commission, gouvernements, employeurs et travailleurs, qui ont en effet trouvé un équilibre lors de la prise de décisions sur les questions cruciales.

Lors de la discussion, les employeurs ont d'emblée réaffirmé combien il était important pour eux d'avoir une convention (révisée) qui ne soit pas trop normative et qui puisse ainsi être appliquée dans tous les Etats Membres malgré la diversité de leurs particularités sociales et économiques.

Ils ont reconnu les responsabilités des employeurs en matière de protection de la maternité et ont souligné qu'elles devaient être contrebalancées par les responsabilités des gouvernements et des femmes concernés.

Il est essentiel d'assurer la protection de la maternité en évitant d'en faire supporter les coûts financiers et opérationnels directs aux employeurs si l'on veut continuer d'améliorer les perspectives d'emploi pour les femmes.

Les travailleurs, tout en reconnaissant l'importance de la ratification, ont soutenu sans démordre que la priorité des priorités était le contenu de la protection prévue par les instruments. La protection de la maternité ne concerne pas seulement les femmes et les enfants. En effet, c'est l'avenir de la société dans son ensemble qui est en jeu.

Les ONG et autres organisations internationales qui ont eu la possibilité de participer à la réunion et de faire connaître leur point de vue se sont fait l'écho de ces aspirations.

Pour vous donner une vue d'ensemble des résultats de nos délibérations, je vais maintenant passer en revue les modifications que la Commission propose d'apporter à la convention et à la recommandation.

Le préambule de la convention n° 103, qui se limitait à l'essentiel, a été considérablement étoffé et énonce notamment les objectifs essentiels de la convention. Il reconnaît la nécessité de promouvoir davantage l'égalité de toutes les femmes qui travaillent ainsi que la santé et la sécurité de la mère et de l'enfant.

Il reconnaît en outre la diversité du développement économique et social des Membres ainsi que la diversité des entreprises. La portée de la convention a particulièrement intéressé la commission. La nouvelle convention s'applique à toutes les femmes employées, y compris les femmes qui sont employées dans le cadre de formes atypiques de travail dépendant, ce qui fait que cette convention touche des millions de femmes qui, jusqu'à présent, étaient exclues de son champ d'application.

La nouvelle convention, à la différence de la convention n° 103, ne se limite pas aux femmes qui sont employées dans certaines entreprises ou dans certaines professions.

Toutes les femmes qui sont employées dans des conditions de dépendance, y compris dans le cadre de relations non déclarées, que ce soit dans le secteur formel ou dans le secteur informel, sont couvertes par la convention. Les possibilités d'exclusion ont été réduites. Un Etat Membre ne peut exclure que des catégories limitées de travailleurs, et ce à deux conditions: il faut premièrement que l'application de la convention à ces catégories soulève des problèmes spéciaux d'une importance particulière. Deuxièmement, ne peuvent procéder à cette exclusion qu'après consultations les organisations représentatives des employeurs et des travailleurs intéressées

Il ne sera pas possible, par exemple, d'exclure des catégories d'entreprises en raison de leur taille.

La convention n° 103 ne fait obligation aux Membres ni de consulter les organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs avant d'exclure certains travailleurs ni de prouver que l'application de la convention à ces travailleurs soulèverait d'importants problèmes. La nouvelle disposition concernant la protection de la santé, qui a été ajoutée à la convention, a été accueillie favorablement par toutes les parties. Elle dispose que les femmes enceintes ou allaitantes ne doivent pas être contraintes d'accomplir un travail qui a été déterminé par l'autorité compétente comme préjudiciable à leur santé ou à celle de leur enfant, ou qui comporte un risque significatif pour leur santé ou pour celle de leur enfant.

Aucune disposition concernant la protection de la santé ne figurait dans la convention no 103.

Quatre-vingts ans après fixation d'un premier congé de maternité à douze semaines (convention n° 3) en 1919, la durée de ce congé a été portée à quatorze semaines au minimum. Bien entendu, certains pays prévoient déjà un congé de maternité plus long. Mais la durée de quatorze semaines a été jugée comme étant une norme appropriée à laquelle la plupart des pays pourraient aspirer.

La disposition de la convention n° 103 exigeant un minimum de six semaines de congé postnatal obligatoire a été maintenue en raison de l'importance qu'elle revêt pour la protection de la santé de la mère et de l'enfant. Toutefois, un certain degré de flexibilité a été introduit: il peut être dérogé à cette obligation dans les pays où un accord tripartite a été conclu à l'échelon national entre le gouvernement et les organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs.

Lorsqu'un tel accord n'existe pas, la disposition concernant le congé postnatal obligatoire s'applique. Cette flexibilité a été introduite pour tenir compte de la situation dans laquelle se trouvent certains pays où le congé maternité obligatoire est considéré comme une discrimination à l'encontre des femmes.

Les travailleurs ont apporté leur appui aux employeurs et à certains gouvernements pour introduire cette flexibilité et ont souligné le rôle de plus en plus important joué par les partenaires sociaux dans le cadre du dialogue social.

La nouvelle convention prévoit aussi un nouveau droit au congé avant ou après le congé maternité en cas de complications ou de risques de complications découlant de la grossesse ou de l'accouchement. Il s'agit donc d'un renforcement de la protection par rapport à la convention no 103 qui n'avait que des dispositions concernant la maladie découlant de la grossesse ou de l'accouchement, les dispositions concernant les complications et les risques de complications étant reléguées dans la recommandation connexe.

La question la plus épineuse que devait examiner la commission était celle des prestations. Pour cette raison, nous avons décidé de soumettre tout d'abord cette question à un groupe de travail tripartite dans l'espoir que ce dernier serait à même de trouver une solution tenant compte des différences entre les pays concernant les systèmes de financement et les méthodes de calcul des prestations.

Même si le groupe de travail n'a pas parachevé ses travaux, le débat nous a permis de dégager les points qui pourraient faire l'objet d'un consensus et les points appelant une décision.

Je saisis cette occasion pour remercier le président du groupe de travail, M. Ron Saunders, membre gouvernemental du Canada, de son excellent travail.

La convention n° 103 stipulait que les prestations de maternité ne pouvaient être financées que par le biais d'un système d'assurance obligatoire ou par prélèvement sur des fonds publics.

Or de nombreux pays n'ont pas de système d'assurance sociale obligatoire, ou, s'ils en ont un, la portée en est tellement limitée qu'ils doivent compter sur les employeurs pour financer tout ou partie des prestations maternité.

Cette situation a donc dû être prise en considération. La disposition qui a finalement été adoptée concernant le financement des prestations a été considérée comme réaliste tant par les travailleurs que par les employeurs. Elle reconnaît que les prestations afférentes au congé de maternité et aux congés pris en cas de maladie ou de complications découlant de la grossesse ou de l'accouchement doivent être assurées par une assurance sociale obligatoire ou par prélèvement sur des fonds publics ou d'une manière déterminée par la législation et la pratique nationales.

Comme auparavant, l'employeur ne doit pas être tenu personnellement responsable du coût direct des prestations financières de maternité due à une femme qu'il emploie, sans y avoir expressément consenti, à moins que — et il s'agit là d'une disposition nouvelle — cela n'ait été prévu par la pratique ou par la législation en vigueur dans l'Etat Membre avant l'adoption de la convention, ou encore qu'il en soit ainsi décidé, ultérieurement au niveau national, par le gouvernement et les organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs.

Il s'agit là d'une disposition clé de la convention qui est le fruit des efforts déployés par les partenaires sociaux pour parvenir à un équilibre entre les intérêts des uns et des autres, compte tenu des spécificités des Etats Membres.

En ce qui concerne le montant des prestations, l'ancienne convention prévoyait qu'il ne devait pas être inférieur aux deux tiers du gain antérieur de la femme pris en considération pour le calcul des prestations versées par l'assurance sociale. Aucun niveau n'était fixé pour les prestations financées par prélèvement sur des fonds publics et il n'était pas fait mention du montant des prestations financées par d'autres sources de financement puisque celles-ci n'étaient pas autorisées.

La nouvelle convention prévoit toujours que le montant des prestations ne doit pas être inférieur aux deux tiers des revenus antérieurs de la femme ou à un montant du même ordre de grandeur en moyenne mais ce critère a été étendu à tous les systèmes de paiement et à tous les modes de calcul. A titre exceptionnel, la convention autorise les pays dont l'économie et le système de sécurité sociale sont insuffisamment développés à verser le même taux pour les prestations de maternité que pour les prestations de maladie ou d'incapacité temporaire. Le principe fondamental énoncé dans la convention n° 103 selon lequel les prestations en espèces doivent, en tout état de cause, être établies à un niveau tel que la femme puisse subvenir à son entretien et à celui de son enfant, dans de bonnes conditions sanitaires et selon un niveau de vie convenable, a été retenu.

Il faut souligner que certains pays ont été déçus de l'issue du débat sur le niveau des prestations. Ils auraient souhaité que la convention prescrive des prestations égales aux revenus antérieurs de la femme, comme cela est prévu dans leurs propres législations. Toutefois, l'objectif du versement d'une prestation équivalente au plein revenu antérieur est, pour le moment, visé dans la recommandation.

La convention, quant à elle, prescrit un taux de prestations qui permettra une plus large ratification et qui définit un taux plancher pour tous les pays développés ou en développement, quelle que soit la façon dont les prestations sont calculées et quel que soit le mécanisme de financement des bénéfices.

Par comparaison, la convention n° 103 ne fixe un plancher que lorsque les prestations en espèces sont versées étaient prévues dans le cadre d'un régime d'assurance obligatoire ou lorsqu'elles sont calculées sur la base des revenus antérieurs.

J'en viens maintenant à la question suivante, à savoir la protection de l'emploi. La période de protection contre le licenciement a été beaucoup allongée. Le projet de convention prévoit une protection de l'emploi pendant toute la durée de la grossesse, pendant la durée du congé de maternité et pendant la durée du congé pour maladie ou des complications liées à la maternité et également pendant une certaine période après le retour au travail. En vertu de la convention n° 103, le licenciement était strictement prohibé mais uniquement pendant le congé de maternité.

En vertu de la nouvelle convention, la protection pendant cette période considérablement plus étendue n'est pas absolue, mais un licenciement n'est possible que s'il n'a aucun rapport avec la grossesse ou la naissance de l'enfant ou les conséquences des soins donnés à l'enfant. Le projet de convention stipule en outre que c'est l'employeur qui doit apporter la preuve que les raisons pour lesquelles il licencie une femme ne sont pas liées à la maternité. Une fois encore, on peut faire une comparaison avec la recommandation n° 95 qui comprenait une liste non exhaustive de raisons légitimes de licenciement mais qui ne contenait aucune disposition concernant la charge de la preuve. Une nouvelle disposition de la convention protège en outre les femmes contre la discrimination en leur garantissant, au retour de leur congé de maternité, le droit de retrouver le même poste que celui qu'elles occupaient avant leur maternité ou un poste équivalent avec un salaire égal. Ce qui est plus important encore, c'est que le projet de convention contient également une disposition générale selon laquelle des mesures doivent être prises pour s'assurer que la maternité ne constitue pas une source de discrimination dans l'emploi. Ces mesures comprennent notamment l'interdiction de la demande de tests de grossesse lorsqu'une femme sollicite un emploi, sauf dans les cas où ces tests sont requis par la loi pour des raisons de protection de la santé.

Si l'on considère toutes ces dispositions dans leur ensemble, le projet de convention contient des dispositions concernant la période de protection, la charge de la preuve, la garantie du droit de retour à l'emploi, la protection contre la discrimination, qui représentent un renforcement considérable de la sécurité de l'emploi par rapport à ce qui était prévu dans l'instrument précédent.

Les pauses payées pour l'allaitement au sein étaient déjà prévues dans la convention (nº 103) sur la protection de la maternité (révisée), 1952. Une disposition similaire figure dans le projet de convention mais, en outre, les femmes ont maintenant le droit de demander une réduction quotidienne de leurs heures de travail pour allaiter leurs enfants. La disposition concernant les pauses d'allaitement payées prévues dans l'ancienne convention avaient souvent été considérées comme un obstacle à la ratification dans certains pays, et un débat animé a eu lieu sur cette question. Au bout du compte, l'importance de l'allaitement pour la santé de l'enfant a prévalu sur les préoccupations exprimées par la plupart des membres de la commission quant aux difficultés que pourrait soulever l'application de cette disposition.

J'en viens maintenant à la recommandation. Je tiens à souligner qu'elle explicite certain points mais va plus loin sur certains autres — Ainsi, il est recommandé que le congé de maternité soit porté à 18 semaines, que le niveau des prestations soit égal au plein salaire de la femme avant sa maternité et que des locaux soient prévus pour les soins à donner aux enfants. D'autre part, la recommandation recommande l'octroi d'un congé parental et, lorsque la législation nationale et la pratique le permettent, que des droits à congé soient accordés aux parents adoptifs.

Ce serait manquer à mon devoir de ne pas dire que le texte de la convention n'a pas donné satisfaction à tous les membres de la commission. Certains n'étaient pas satisfaits car ils considèrent que les dispositions de la nouvelle convention vont plus loin qu'elles ne le devraient et risquent de mettre en danger son avenir. D'autres membres, par contre, ont été déçus de constater que, à certains égards, la convention antérieure conférait une meilleure protection. Ils étaient déçus que la protection contre le licenciement pendant le congé de maternité ne soit plus absolu. Ils auraient préféré qu'aucune flexibilité ne soit permise concernant le congé obligatoire après l'accouchement, ou le financement des prestations maternité. A leur avis, les normes devraient être libellées de façon à ne prévoir aucune exception. Certains de ces membres auraient souhaité que la convention (nº 103) sur la protection de la maternité (révisée), 1952, reste ouverte à ratification après l'entrée en vigueur de la nouvelle convention. Mais, l'activité normative exige un équilibre entre les diverses positions et priorités des différents mandants dans les différentes régions. Les membres de ,a commission avaient sans cesse cela a l'esprit.

Les travailleurs et les employeurs ont une optique différente de la protection de la maternité et les gouvernements ont dû sans cesse contrebalancer les intérêts des travailleurs, ceux des employeurs et leurs propres intérêts.

Ma conviction personnelle est, et j'espère que vous serez d'accord avec moi, que lorsque l'on considère l'ensemble des améliorations et des possibilités d'application qu'offre la nouvelle convention, elle représente véritablement un pas en avant dans la défense de la justice sociale.

Une fois que la convention aura été adoptée, ce que je recommande de tout cœur personnellement, notre tâche ne sera pas achevée. Avec l'aide du Bureau nous devons la promouvoir et la faire bien comprendre. Cela est essentiel car c'est en promouvant cet instrument que nous assurerons que cet exercice de révision important et audacieux aura une incidence concrète sur la législation et la pratique dans les États Membres. Dans bien des cas des formes très pratiques d'assistance technique seront nécessaires dans un certain nombre de domaines, en particulier dans celui de la sécurité sociale.

Avant de conclure, je tiens à rendre hommage une fois de plus à notre excellente Présidente, Mme Andersen, qui, avec équité et fermeté, a su mener les travaux de la commission pendant cette deuxième année et a su les amener à une conclusion heureuse.

Mme Knowles et Mme Engelen-Kefer qui connaissent fort bien les questions en jeu et qui ont des qualités de leaders confirmées ont su représenter le mieux possible les intérêts de leurs groupes respectifs. Si la commission a pu accomplir sa tâche c'est grâce à l'excellente préparation ainsi qu'au rapport de base préparé par Mme Dy-Hammar, représentante du Secrétaire général, ainsi que son équipe dont chacun a pu apprécier la grande compétence. Mme Dy-Hammar et son excellente équipe méritent nos éloges et nos remerciements chaleureux. Leur travail a démontré leur dévotion à la cause de la justice sociale. Ils ont travaillé d'arrache-pied, souvent jusqu'au petit matin, pour s'assurer que les réunions se déroulent sans heurt et que les membres de la commission bénéficient de toute l'assistance dont ils avaient besoin. Nous avons également bénéficié des conseils précieux du représentant du conseiller juridique, Mme Doumbia-Henry, ainsi que de l'appui des experts du Bureau.

Enfin, et surtout, je tiens à rendre hommage à mes collègues venant de tous les gouvernements qui, grâce à leurs interventions, nous ont aidé à résoudre des problèmes épineux et à aboutir à des textes équilibrés en dépit de la diversité des approches et des points de vue.

Je tiens à souligner que le texte du projet de convention et du projet de recommandation dont vous êtes saisis ne comprend pas encore les changements découlant des commentaires faits par les délégations concernant l'élaboration de ces instruments. Une fois que le rapport de la commission aura été adopté par la Conférence, le comité de rédaction de la Conférence se réunira et examinera toutes les observations qui ont été faites. Les instruments soumis demain au vote de la Conférence seront les versions définitives amendées s'il y a lieu par le comité de rédaction de la Conférence.

Depuis que le Conseil d'administration a pris, en 1997, la décision de réviser la convention (nº 103) sur la protection de la maternité (révisée), 1952 et la recommandation qui l'accompagne, des efforts énormes ont été déployés afin de s'assurer que cette révision reflète les intérêts des gouvernements, des organisations d'employeurs et de travailleurs du monde entier.

La protection de la maternité est un sujet qui nous touche tous profondément. Cela est manifeste si l'on en juge par le nombre considérable de réponses aux questionnaires envoyés par le Bureau qui a dépassé les records précédents, en particulier ceux enregistrés lors des travaux préparatoires sur les pires formes de travail des enfants.

Les deux années de délibérations qui se sont déroulées dans le cadre de la Commission de la protection de la maternité, ainsi que les discussions intenses qui ont eu lieu aux niveaux national et régional nous ont permis d'aboutir aux textes sur lesquels vous serez appelés à voter demain. Ces textes sont dignes d'éloge et je vous demande instamment de confirmer que les efforts que nous avons déployés ne l'ont pas été en vain.

Original anglais: Mme KNOWLES (déléguée des employeurs, Nouvelle-Zélande;vice-présidente employeur de la Commission de la protection de la maternité) — Il n'a pas été facile d'être membre du groupe des employeurs dans ce débat sur la révision de la convention relative à la protection de la maternité au travail.

Chacun d'entre nous a une fille ou un fils, la plupart d'entre nous sommes mère ou père, et tous nous travaillons. Nous savons tous, par expérience, quelle est l'importance de la protection de la maternité au travail.

Mais ce que nous savons aussi, c'est qu'il est important de préserver l'équilibre entre les droits et les responsabilités, de reconnaître la diversité des conditions sociales, économiques et culturelles entre les 175 Membres de l'OIT, et surtout de reconnaître la réalité. Les linguistes pourront forger les mots les plus justes dans les conventions internationales, les gouvernements pourront adopter des lois suscitant l'envie du monde entier, sans mise en œuvre pratique au niveau du terrain, tout ceci ne servira à rien.

Dans ma déclaration en séance plénière l'année dernière, j'ai dit que le groupe des employeurs pouvait soutenir l'adoption du rapport de la première discussion, parce qu'il ne s'agissait que d'un rapport intérimaire, mais j'ai regretté que, de l'avis des employeurs, il y ait un manque d'équilibre entre les droits et les responsabilités des trois parties représentées dans la discussion, et manque d'équilibre entre l'approche fondée sur les principes et l'approche prescriptive.

Dans le débat qui a eu lieu au cours des deux dernières semaines, le groupe des employeurs a pris très au sérieux le mandat qui lui avait été confié par le Conseil d'administration de réviser la convention nº 103 et d'élaborer un instrument sur la protection de la maternité au travail qui suscite une large adhésion des mandants.

Nous nous en sommes fermement tenus à notre conviction que l'instrument doit établir des principes qui puissent ensuite être mis en œuvre conformément à la législation et à la pratique nationales de chaque pays. Nous reconnaissons que chaque Etat Membre est souverain, et que donc sa législation dépend de l'idée que ses mandants — c'est-à-dire le peuple — se fait de ce qui constitue une priorité, particulièrement en ce qui concerne les droits et les prestations.

Nous savions que l'ancienne approche n'était plus adaptée et qu'il fallait en trouver une meilleure.

Cette nécessité d'une nouvelle méthode a été reconnue par le Directeur général dans son rapport sur le travail décent de l'année dernière: Si l'on veut que l'OIT continue d'affirmer sa présence dans ce domaine et réaffirme l'utilité des normes internationales, il faudra qu'elle redouble d'efforts et qu'elle adopte de nouvelles approches.

Je dois dire que cette déclaration s'appliquait directement à nous. Nous avons été la première commission qui a commencé à travailler selon la nouvelle approche recommandée par le Directeur général et adoptée par la Conférence.

Nous avions l'occasion à saisir de montrer l'exemple, nous avions l'occasion d'abandonner les instruments anciens, prescriptifs, «taille unique», généralement adoptés à une majorité étroite par la Conférence, et qui n'étaient ratifiés que par un très petit nombre de pays. Nous pouvions adopter un instrument beaucoup plus vaste, basé sur des principes auxquels nous pouvions tous nous rallier, en sachant que chaque pays pourrait prendre des mesures effectives en se fondant sur ces principes, un instrument qui mériterait son nom de convention sur la protection de la maternité 2000.

Le groupe des employeurs a pris l'appel du Directeur général autant au sérieux cette année qu'il l'avait fait l'année dernière. Nous l'avons cru, de même que nous avons cru le Conseil d'administration qui le soutenait, lorsqu'il a dit qu'il fallait suivre une nouvelle approche normative.

Au cours de la première séance de notre commission cette année, j'ai rappelé la forme de convention que le groupe des employeurs avait soutenue l'année dernière: nous souhaitons que l'instrument précise ce qui suit: tout Membre pour lequel la présente convention est en vigueur s'engage à formuler et à mener une politique nationale destinée à promouvoir — par des moyens conformes à la situation et à la pratique nationales — la protection de la maternité et le bénéfice du congé de maternité pour toutes les femmes employées.

Notre déclaration de principe était la suivante: En tant que moyen de protection indispensable de la santé de la femme et de son enfant, le droit de la femme à un congé de maternité, à une protection contre le licenciement pour des motifs liés à la grossesse ou au congé de maternité et à des moyens lui permettant d'assurer sa subsistance et celle de son enfant constitue l'élément fondamental de cet instrument.

Nous espérions que pendant les douze mois écoulés les Etats Membres aient examiné cette approche et conclu à son bien-fondé, comme le groupe des employeurs. Nous avons donc reformulé notre pensée et avons présenté chaque déclaration de principe séparément.

Une déclaration générale en faveur de la protection de la femme enceinte ou allaitante et de son enfant a été acceptée, à n'en pas douter, parce qu'elle a été présentée par des membres gouvernementaux, et non pas par le groupe des employeurs.

La réponse à notre première tentative pour promouvoir une approche fondée sur des principes a été telle que nous y avons renoncé. Nous avons admis notre défaite. Nous avions tout simplement échoué.

C'est avec un sincère regret que les membres du groupe des employeurs considère le résultat de nos travaux en cours des deuxdernières semaines. Nous avons un instrument qui revêt la même forme prescriptive que l'ancienne convention n° 103.

En dépit d'un certain degré de souplesse introduit dans certains domaines, nous craignons que le nouvel instrument soit encore moins ratifiable que la convention qu'il révise.

Il ne permet pas aux Etats Membres d'exclure de son application certaines catégories d'entreprises — tous ceux dont la législation ou la pratique nationales, de façon tout à fait légitime, compte tenu de leur contexte économique et social, exclut les entreprises familiales, les petites et les micro-entreprises ou les entreprises agricoles ne pourront pas ratifier la convention.

Le nouvel instrument fixe le congé de maternité à quatorze semaines. Dans le rapport IV (2A), le Bureau signale que seuls 40 pour cent des Etats Membres prévoient à l'heure actuelle un congé maternité de quatorze semaines ou plus; 60 pour cent des Etats Membres de l'OIT ne seront donc pas en mesure de ratifier la nouvelle convention.

Celle-ci fait porter la charge de la preuve à l'employeur uniquement en cas de licenciement. Beaucoup d'Etats Membres ont une conception tout à fait différente du règlement des conflits, et ils ne pourront donc pas non plus ratifier cette convention.

Elle prévoit que des pauses d'allaitement soit accordées aux femmes, comptées comme temps de travail et rémunérées en conséquence. Or dans le rapport V (2) de l'année dernière, le Bureau signale que les pauses d'allaitement sont l'une des principales raisons qui ont fait obstacle à la ratification par un grand nombre d'Etats Membres, et que c'est ce qui explique qu'il ait transféré cette disposition de la convention à la recommandation.

Le groupe des employeurs demande si la situation à cet égard a changé dans les Etats Membres au cours des douze derniers mois. Si tel n'est pas le cas, les Etats Membres ne pourront pas ratifier cette convention. Or la ratification est importante.

C'est précisément le petit nombre de ratifications qui a poussé la révision de la convention n° 103 à l'ordre du jour de la Conférence. Ce n'est donc pas qu'une question de chiffres ni de ratification en soi; c'est une chose très sérieuse.

Les Etats Membres, lorsqu'ils ratifient une convention, s'engagent à mettre leur législation en conformité avec ses dispositions. Ils s'engagent à l'appliquer et, en vertu de l'article 22 de la Constitution, ils sont tenus de faire rapport. Et c'est là l'élément clé.

La ratification revient à dire que l'Etat Membre va faire quelque chose, qu'il va signaler ce qu'il fait et qu'il accepte que le Bureau lui dise s'il ne fait pas assez.

Quand il n'y a pas de ratification rien ne se passe. Le groupe des employeurs pense que les femmes, partout dans le monde, ont besoin qu'il se passe quelque chose.

Il faut que les procédures normatives changent. Je rappelle ce que le Directeur général a dit en séance plénière la semaine dernière. La révision ne saurait se limiter à une simple amélioration des droits et des prestations. La révision suppose que l'on analyse soigneusement les obstacles à la ratification et que l'on offre de bonnes solutions de rechange.

Le rôle de la commission est d'examiner des questions de principe, et non pas de débattre pendant quarante minutes pour savoir si les mots «au moins» doivent figurer ou non dans le texte. Nous devons avoir le courage de confier la question à un groupe de travail et de respecter ses recommandations.

Il faut qu'il soit tenu davantage compte des réponses approfondies que les gouvernements, les employeurs et les travailleurs adressent au Bureau pour qu'elles servent de base à ses rapports.

Notre rapporteur a signalé qu'en l'occurrence le Bureau a reçu un nombre sans précédent de réponses.

Une majorité significative de gouvernements s'étant déclarée contre l'inclusion d'une disposition sur le congé parental, le Bureau avait décidé de supprimer complètement le paragraphe.

Vingt membres gouvernementaux de la commission ont voté pour que cette disposition soit réintroduite, 16 ont voté contre, 12 se sont abstenus et 59 étaient absents au moment du vote.

Cinquante-cinq pour cent des membres gouvernementaux inscrits à la commission étaient tout simplement absents à cette séance.

Ce fut un réconfort pour le groupe des employeurs d'entendre beaucoup de gouvernements parler des progrès réalisés dans leur pays dans le domaine de la protection de la maternité. Les employeurs les encouragent à poursuivre leurs efforts pour consolider ces progrès, en veillant à maintenir l'équilibre entre les droits et les responsabilités, les principes et les mesures prescriptives. Ils encouragent aussi les gouvernements qui ne sont peut-être pas allés aussi loin qu'ils le pourraient, à aller dans ce sens. La protection de la maternité au travail est une question trop importante pour être négligée.

Nous demandons également à tous les Etats Membres d'examiner avec attention s'ils souhaitent vraiment adopter une convention dont ils savent qu'ils ne pourront pas l'appliquer ou qu'ils n'ont pas l'intention de ratifier. Cela ne rendrait service ni aux femmes ni à l'OIT. Les femmes de notre Organisation méritent mieux!

En conclusion, j'aimerais remercier très sincèrement le Bureau de ses efforts. Je voudrais remercier également notre présidente, Mme Andersen, et notre rapporteur, Mme Samuel. Toutes deux ont travaillé très dur sans discontinuer pour notre commission. Je tiens enfin à dire à Mme Engelen-Kefer combien j'ai apprécié l'esprit dans lequel elle a abordé la discussion.

Original anglais: Mme ENGELEN-KEFER (déléguée des travailleurs, Allemagne; Vice-présidente travailleur de la Commission de la protection de la maternité) — Je m'exprime au nom du groupe des travailleurs de la Commission de la protection de la maternité. Tout d'abord, j'aimerais vous recommander à tous l'adoption du rapport à l'examen, tout particulièrement les nouveaux instruments: la convention révisée et la recommandation révisée sur la protection de la maternité.

Malgré les divergences de vues, y compris au sein de notre groupe, nous considérons le travail de la commission et les textes convenus pour ces normes révisées comme un résultat favorable. Si nous faisons le bilan de cette révision, on peut dire que les améliorations l'emportent et qu'il y a un meilleur équilibre entre les règles strictes et la liberté de choix, plus particulièrement pour les femmes concernées. Ces textes sont également plus facilement adaptables aux différentes cultures, aux différentes religions, ainsi qu'aux différents niveaux de développement des pays.

En résumé, il y a de meilleures chances d'avoir un plus grand nombre de ratifications et d'avoir des retombées pratiques dans les Etats Membres et, en même temps, le texte préserve la substance nécessaire qui en fait une norme internationale intéressante.

Je ne vais pas entrer dans le détail, mais j'aimerais néanmoins mettre en exergue certains des aspects saillants. L'éventail des femmes protégées est plus réaliste et plus vaste car ce texte couvre toutes les femmes au travail, y compris celles employées à des formes atypiques de travail dépendant.

Désormais, ne sont pas uniquement protégées les femmes ayant un contrat de travail écrit noir sur blanc, car ces femmes là ne représentent qu'un tout petit pourcentage des travailleuses, alors qu'une très vaste majorité de femmes au travail n'ont pas ce luxe. Désormais, toutes les femmes sont couvertes par cet instrument sur la protection de la maternité. De nombreuses femmes travaillent dans des conditions d'emploi déguisé. On leur dit qu'elles travaillent pour leur propre compte, mais en réalité, leur activité s'apparente totalement à un travail salarié. Ces femmes sont désormais également couvertes par ces nouvelles normes internationales. De nombreuses femmes travaillent dans un contexte où les lois du travail sont rarement respectées. Je citerai tout particulièrement les femmes travaillant dans les zones franches d'exportation. Désormais, elles aussi seront couvertes par cette convention.

De nombreuses salariées dans le monde entier travaillent dans ce que l'on appelle le «secteur informel». Elles sont regroupées dans des catégories où les relations professionnelles ne sont pas reconnues, comme par exemple le travail à domicile, le travail en sous-traitance, le travail occasionnel, le travail temporaire, et la catégorie des travailleurs migrants. La nouvelle convention s'appliquera à toutes ces formes de travail également. Je crois que c'est là une réussite importante car nous avons augmenté le nombre de femmes visées par la convention. C'est une nette amélioration par rapport à la convention n° 103.

Malheureusement, nous n'avons pas pu éviter entièrement que des groupes limités de femmes ne soient pas pris en compte dans cette convention, mais nous avons pu limiter ces cas d'exception bien davantage que ne le fait la convention n° 103. Il ne sera désormais plus possible, comme c'était le cas autrefois, de refuser la protection de la maternité aux femmes travaillant par exemple dans le secteur des transports ou celui de l'agriculture, à domicile, ou à titre d'employées de maison.

Pour des nombreuses femmes concernées par la maternité, il est de la plus haute importance que cette convention comporte des dispositions pour la protection de la santé de la mère et de l'enfant. Les travailleuses ne pourront notamment plus être contraintes d'effectuer des tâches dangereuses au cours de cette période fort importante de leur vie. Ceci ne figurait pas dans l'ancienne convention n° 103.

La période du congé maternité pourra être prolongée de douze à quatorze semaines, par rapport à l'ancienne convention. Le nouveau texte prévoit également six semaines de congés obligatoires après l'accouchement et cela ne pourra être modifié que suite à un accord entre les gouvernements, les employeurs et les syndicats. Je crois que ceci offre une protection nécessaire et adéquate aux millions de femmes en couches, à une période de leur vie où elles ont le plus besoin de soins et de protection. Par la même occasion, ce texte augmente les possibilités de ratification par des Etats qui voudraient accorder une plus grande liberté de choix pour mieux adapter la période de congé maternité aux besoins des femmes concernées.

Pour en venir maintenant à la question cruciale des prestations, bien évidemment, en tant que travailleurs, nous aurions préféré le versement de la totalité du salaire pendant la période du congé maternité. Nous saisissons cette occasion pour féliciter tous les pays et toutes les travailleuses qui ont cette possibilité, à savoir percevoir la totalité de leur salaire pendant la période du congé maternité.

Mais qu'en est-il réellement dans le monde? Il existe des millions de femmes au travail qui, pendant leur congé maternité, ne bénéficient d'aucune prestation en espèces suffisante. C'est pour elles que nous sommes ici, pour élaborer une nouvelle norme, et c'est pour elles qu'il sera de la plus haute importance d'aboutir au moins à ce qui figure dans la nouvelle norme, à savoir deux tiers du revenu précédent ou, s'il s'agit de pays moins avancés, ces femmes ne devraient pas toucher moins que ce que leur verserait une assurance maladie ou une assurance invalidité. C'est de la plus haute importance pour toutes les femmes qui n'ont pas la chance de vivre dans les pays les plus développés, les pays ayant les meilleurs règlements et les meilleures pratiques en matière de protection de la maternité.

Pour ces femmes-là, il sera de la plus haute importance de pouvoir toucher ne serait-ce que le plancher minimal que prévoit cette norme qui vous est soumise aujourd'hui pour adoption.

Ces textes n'interdisent à aucun pays d'adopter une norme plus élevée et nul ne songerait à contraindre les pays où ces prestations sont plus élevées que celles prévues par le nouveau texte à abaisser les prestations en espèces.

Il nous faut faire un choix entre, d'une part, une norme plus élevée sur papier qui ne pourra venir en aide qu'à un nombre réduit de femmes et, d'autre part, des objectifs et règlements plus réalistes qui pourront aider la majorité des femmes.

Personnellement, je choisirai cette dernière option afin de nous acquitter des obligations qui sont ici les nôtres, à savoir aider le plus grand nombre de femmes concernées et de les aider dans toute la mesure du possible. Je crois que nous y sommes parvenus avec ces normes qui vous sont aujourd'hui soumises pour adoption.

J'aimerais dire maintenant quelques mots sur un sujet fort délicat, à savoir la protection des femmes lors de la cessation de leur emploi. Le groupe des travailleurs aurait bien sûr aimé une interdiction totale du licenciement pendant toute la période de grossesse, du congé de maternité et de l'allaitement. Mais cela n'a pas été possible. Nous avons pu au moins veiller à ce que les femmes reçoivent une protection adéquate contre le licenciement, non seulement pendant la période du congé de maternité, comme le prévoyait l'ancienne convention n° 103, mais également pendant la période de la grossesse ainsi que pendant la période qui suit le retour au travail, y compris pendant la période d'allaitement.

Si nous considérons la réalité que vivent des millions de femmes dans le monde qui n'ont pas la moindre protection, cette disposition devrait s'avérer utile. Si une femme se plaint, à juste titre, d'avoir été licenciée par discrimination du fait de sa grossesse, de son congé de maternité ou de la période qui suit ce congé, y compris pendant l'allaitement, alors je pense que ce n'est que justice que l'employeur doive prouver qu'il ne s'agit pas d'un cas de discrimination. C'est ce que prévoit le texte qui vous est soumis aujourd'hui. Ce n'est pas un recul par rapport au texte précédent; c'est une protection adéquate et, dans une certaine mesure, c'est même une amélioration par rapport à la convention n° 103. En effet, regardons la réalité. La réalité est que les femmes victimes de discrimination sont licenciées lorsqu'elles sont enceintes ou lorsqu'il devient évident qu'elles le sont. En règle générale, il ne sert à rien de les licencier pendant leur congé de maternité puisqu'elles ne sont pas au travail de toute manière. Par ailleurs, aucune entreprise en faillite ne saurait être contrainte d'employer des travailleurs plus longtemps que ne le prévoient d'autres règlements en matière de sécurité sociale, par exemple.

Par conséquent, si l'on tient compte de tous ces éléments, on peut considérer qu'il s'agit là d'une protection adéquate et décente des femmes en cas de licenciement, ce qui est extrêmement important pour les travailleurs et les syndicats.

Je tiens à nouveau à féliciter tous les Etats qui interdisent totalement de licencier ou de mettre fin à l'emploi des femmes pendant toute la période allant de la grossesse à l'accouchement, au congé de maternité et à la période qui suit. Les femmes couvertes par ce genre de protection peuvent s'estimer très heureuses. Il n'est nullement question de réduire cette protection. Cela étant, nous devons faire quelque chose pour venir en aide à la majorité des femmes dans le monde qui n'ont pas cette chance et cette protection. Si le nouveau règlement pouvait être mis en pratique, leur situation serait nettement améliorée.

J'aimerais en venir maintenant à la période de l'allaitement. Il s'agit d'un sujet brûlant et très difficile. Nous avons entendu des orateurs de nombreuses ONG et organisations internationales qui nous ont exposé l'e

xtrême importance de l'allaitement. Je pense que pour être acceptable, le nouveau texte devrait prévoir que toutes les femmes puissent disposer du temps nécessaire pendant les heures de travail pour donner le sein à leur enfant, tout en étant rémunérées en conséquence. Le nouveau texte prévoit même la possibilité d'une réduction de la durée du temps de travail, qui n'était pas prévue dans la convention n° 103.

A cet égard, je crois que nous avons là un règlement très équitable et réaliste qui améliore la situation des nombreuses femmes concernées.

En conclusion, je dirais que tout bien considéré le texte à l'examen constitue une amélioration et un juste équilibre entre la nécessité d'apporter des adaptations, d'une part, et d'avoir une protection adéquate et une norme ayant un sens, d'autre part. En effet, il ne s'agit pas ici d'une norme technique, ni d'améliorer la protection des mères et des enfants. Il s'agit de l'avenir de nos sociétés qui, sans enfants, n'auront pas d'avenir. Une bonne protection de la maternité au travail est une condition préalable importante pour préparer un avenir juste et bon. C'est une tâche très importante au début de ce nouveau siècle, et nouveau millénaire.

Alors, acquittons-nous de nos obligations et adoptons ces nouveaux textes, même si certains d'entre vous ont  quelques doutes quant à certains aspects. J'ai moi aussi certains doutes quant à certains éléments de cet instrument, mais le fait est qu'on ne peut pas toujours réaliser son objectif maximum. Il faut faire des compromis pour trouver le juste équilibre et aboutir à quelque chose d'utile. Je sais que pour les employeurs les prestations de maternité impliquent des coûts. Mais ce ne sont pas seulement des coûts, ce sont des investissements dans le développement humain et dans notre avenir à tous, qui nous permettront de faire de la mondialisation un facteur de développement humain, de lui donner un visage humain et à cet égard nous sommes tous dans le même bateau, quel que soit le groupe auquel nous appartenons, quel que soit notre pays d'origine, notre stade de développement, notre race, notre religion, notre culture. C'est pourquoi je lance un appel à tous. Il faut que cet exercice aboutisse à un résultat utile. Je vous enjoins à adopter les textes révisés de la convention et de la recommandation.

J'allais oublier d'exprimer toute ma reconnaissance à l'adresse de ceux qui nous ont aidés à parvenir à ce résultat, à savoir le président de la commission, le rapporteur, le bureau, et plus particulièrement Jo-Jo et son équipe. J'aimerais remercier tout particulièrement le Conseiller juridique et Mme Knowles, Vice-présidente du groupe des employeurs. Nous avons fort bien coopéré malgré nos divergences de vues. Je remercie également les membres gouvernementaux. J'ai énormément appris et nous avons eu un échange d'expériences fort intéressant. J'espère que cela portera ses fruits.

Original anglais: Mme ANDERSEN (conseillère technique gouvernementale, Danemark; présidente de la Commission de la protection de la maternité) — Présider pour la deuxième fois la Commission de la protection de la maternité a été pour moi une expérience positive et un grand privilège. Au cours de ces deux années de discussion, le souci de la commission a été d'élaborer un instrument qui protégerait les femmes et leurs bébés pendant la grossesse, pendant leur congé et pendant une période suivant le retour de la femme au travail, notamment lorsqu'elle allaite son enfant.

Pareilles mesures de protection sont extrêmement importantes pour les femmes dans le monde entier parce que nous savons tous que la discrimination fondée sur la maternité place les femmes dans une position extrêmement vulnérable sur le marché du travail.

La nouvelle convention proposée sur la maternité reconnaît ce fait et contient des mesures pour y faire face. Il est important de se souvenir que la protection de la maternité est une partie intégrante de la lutte visant à prévenir la discrimination fondée sur le sexe. Pour la première fois, une convention sur la protection de la maternité contiendra une disposition précise concernant la discrimination.

Des mesures spéciales visant à protéger la maternité sont prévues dans la convention (nº 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, l'une des conventions fondamentales de l'OIT qui font l'objet de la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail. A la différence de nombreuses autres mesures qui ont pour objectif de protéger les femmes, la protection de la maternité est une mesure de protection essentielle qui se rattache au rôle biologique unique des femmes, une exception justifiée, universellement acceptée, par rapport à l'approche moderne centrée sur l'égalité des sexes plutôt que sur des mesures de protection pour les femmes.

Un autre élément nouveau dans la convention proposée, qui élargit la notion même de protection de la maternité telle qu'elle est inscrite dans l'ancienne convention n° 103, est la protection de la santé. La convention n° 103 était silencieuse sur cette question essentielle. La disposition sur la protection de la santé est une disposition progressiste qui, je suis heureuse de l'annoncer, a été acceptée et même souhaitée par les gouvernements, de même que par les employeurs et les travailleurs. Cette disposition qui définit les conditions de travail des femmes enceintes et allaitantes est également une contribution à l'ensemble des mesures visant à combattre la discrimination fondée sur le sexe. Nous devons assurer un niveau suffisant de protection de la maternité et l'accord à ce sujet semble avoir été général, ou presque général, à l'intérieur de notre commission.

Il est ressorti des discussions à la commission qu'en dépit de cet objectif commun les approches retenues pour promouvoir l'égalité varient d'une région à l'autre. Le processus de la mondialisation accentue ces différences mais il nous force, en même temps, à essayer de concilier les différentes approches. Dans certains pays, une protection détaillée, prescriptive, peut être jugée nécessaire pour garantir les droits des femmes, mais dans d'autres il peut s'avérer plus efficace et plus acceptable de définir ces droits et de mettre à la disposition des femmes des moyens de les appliquer. Aucune de ces approches n'est, en soi, bonne ou mauvaise, juste ou erronée. La question que nous devons tous nous poser concerne la manière dont les deux systèmes peuvent être conciliés dans un instrument international.

J'ai accordé une attention toute particulière ici aux questions d'égalité car elles n'ont pas toujours été au centre des discussions en commission. Mais je ne peux négliger de mentionner les améliorations importantes apportées à la nouvelle convention et qui sont, en fait, nombreuses. Tout d'abord, la nouvelle convention accorde, pour la première fois, la protection à un très grand nombre de femmes qui n'en bénéficiaient pas, notamment toutes celles employées dans le secteur informel, y compris sous des formes atypiques de travail et les fausses indépendantes. Deuxièmement, la protection de l'emploi pour les femmes enceintes et allaitantes a été élargie de façon à protéger les femmes tout au long de leur grossesse et jusqu'à une période déterminée après leur retour au travail après l'accouchement. La protection contre le licenciement n'est plus absolue comme elle l'était dans la convention n° 103; cette disposition marque toutefois une amélioration majeure de la protection de la maternité, en raison de l'allongement de la période de protection. Troisièmement, la durée du congé de maternité passe de douze à quatorze semaines. Et quatrièmement, cette convention ajoute de nouvelles dispositions concernant la protection de la santé de la mère et de l'enfant et contre la discrimination liée à la maternité.

J'aimerais ici remercier les Vice-présidentes employeur et travailleur, MmesKnowles et Engelen-Kefer, pour leur approche constructive et leur esprit de coopération tout au long du travail de la commission. Chacune, dans son rôle, a été très soucieuse de veiller à ce que la contribution croissante des femmes sur le marché du travail, et les conséquences de cette évolution pour le développement de la société, soient reconnues et comprises par notre commission.

Je voudrais aussi remercier le rapporteur, Mme L. Samuel, et les membres du Comité de rédaction de la commission qui ont travaillé bien au-delà de leurs obligations. Je voudrais également remercier les délégués gouvernementaux, si souvent disposés à essayer de comprendre le point de vue de ceux dont l'expérience s'appuie sur des réalités différentes et, par là même, d'aider à établir des ponts entre les régions.

Et pour terminer, je voudrais signaler l'aide considérable fournie par le secrétariat de la commission. Son rapport nous a aidés à comprendre les questions traitées et le cadre dans lequel se situe la protection de la maternité. Ce travail, qui tient compte des différents points de vue exprimés, a facilité la tâche de la commission dans sa recherche de solutions viables. Ainsi, le texte préparé par le Bureau à la lumière des réponses reçues nous a permis d'éviter un autre long débat cette année sur le congé complémentaire pour cause de maladie ou de complications liées à la maternité.

Je voudrais ainsi remercier Mme J. Dy Hammar, M. Salter, Mme Doumbia-Henry et tous les autres, y compris les interprètes et les techniciens, et tous ceux qui, par leur contribution, ont tant facilité nos débats.

Original espagnol: Le PRÉSIDENT —J'ouvre maintenant la discussion générale sur le rapport de la Commission de la protection de la maternité.

Original allemand: M. MUGGLIN (délégué des travailleurs, Suisse) —Il y a environ un an, la majorité des citoyens et des citoyennes de la Suisse ont rejeté un projet visant à instaurer une assurance maternité. Demain, en tant que délégués représentant les gouvernements, les travailleurs et les employeurs du monde entier, vous aurez la possibilité de fixer les nouvelles normes minimales en matière de protection de la maternité.

L'objectif de l'OIT est de faire en sorte que les Etats Membres contribuent à conférer prochainement à ces normes une validité internationale. Au sein de la délégation suisse, il n'y a que les travailleurs qui appuient ce projet; le gouvernement entend s'abstenir lors du vote de demain. Indépendamment de la version définitive du texte, il est évident que cette décision d'abstention a déjà été prise il y a un certain temps.

Selon la pratique en vigueur en Suisse, le gouvernement entend voter «oui» à une convention de l'OIT uniquement lorsque le droit national remplit déjà les conditions prévues par la convention ou, mais c'est l'exception, lorsqu'il ne requiert que des adaptations minimes. Lorsqu'il n'y aucune opposition à la convention, le gouvernement a pour coutume de s'abstenir, compromettant sciemment les chances de réunir le quorum nécessaire à l'adoption de la convention. Ce faisant, il ne fait aucune différence entre l'approbation d'une convention et sa ratification.

Pour le gouvernement suisse, le résultat du vote populaire d'il y a un an est une sorte de légitimation supplémentaire pour ne pas s'exprimer. Il oublie qu'il y a un an, le peuple a voté en faveur d'une révision de la Constitution suisse prévoyant notamment l'instauration par l'Etat d'une assurance maternité (Art. 116BV). L'objectif social de la Constitution prévoit également que la Confédération et les cantons doivent veiller à ce que nul ne soit mis dans une situation économique défavorable du fait d'une maternité (Art. 41 paragr. 2BV). Le gouvernement est ainsi investi d'une mission en vertu de la Constitution de notre pays.

De nombreux projets parlementaires font l'objet d'une discussion, et plusieurs cantons de la Suisse romande envisagent d'instaurer une assurance cantonale de maternité. Pour l'instant, cette exigence de protection de la maternité est loin d'être réalisée. A ce jour, il n'est pas automatiquement accordé des indemnités de salaire; cette prestation dépend souvent du nombre d'années de service ou des conventions collectives dans lesquelles elle est inscrite.

La loi prévoit que les femmes ne doivent pas travailler pendant les huit semaines suivant l'accouchement, sans compensation salariale. Dans l'un des pays les plus riches du monde, il n'y aura, dans l'avenir proche, aucun règlement en matière de protection de la maternité qui correspondra à la norme établie dans la convention n° 103, ni dans sa version actuelle ni dans sa version révisée.

En s'abstenant demain, le gouvernement suisse envoie un signal erroné. L'Union syndicale suisse dit qu'en vertu de la situation actuelle dans notre pays la convention ne pourra pas être ratifiée à court terme. Néanmoins, nous aimerions inviter notre gouvernement à revoir sa pratique d'approbation et de ratification, et à le faire dans l'esprit de l'OIT. Les conventions sont des objectifs que les Etats Membres doivent s'efforcer de transposer dans le droit national.

Nous critiquons l'attitude du gouvernement de la Suisse également, car il compromet les chances d'adoption de cette convention par la Conférence internationale du Travail; lors de ce vote, il faudrait tenir compte également des intérêts des autres.

Quant à savoir s'il convient ou non de ratifier cette convention, il sera toujours possible de s'inspirer des intérêts nationaux. Nous espérons qu'il y aura suffisamment de votes en faveur de cette nouvelle version de la convention pour que l'on puisse jeter les bases d'une protection de la maternité qui corresponde aux objectifs de l'OIT: c'est un aspect primordial de la lutte en faveur de l'égalité entre travailleurs et travailleuses.

La protection de la maternité est essentielle à la protection de la femme et de l'enfant, comme cela est souligné dans un récent bulletin d'information de l'OIT. J'aimerais rappeler les paroles de Mme Knowles, vice-présidente travailleur de la commission, qui a déclaré que la protection de la maternité est trop importante pour qu'on la néglige.

Original anglais: M. VAN DER HEIJDEN (délégué gouvernemental, Pays-Bas) — Le gouvernement des Pays-Bas appuie pleinement la révision de la convention (nº 103) sur la protection de la maternité (révisée), 1952, et ce pour deux raisons essentielles: premièrement, cette révision améliore une convention vieille de cinquanteans; deuxièmement, le nouveau texte introduirait une plus grande souplesse.

A la lecture du projet de convention, nous pouvons constater que plusieurs améliorations ont été apportées. J'en citerai quelques-unes. Il est très important que la nouvelle convention contienne des dispositions concernant la protection de la santé de la mère et de l'enfant. Le prolongement du congé maternité, dont la durée est passée de douze à quatorze semaines, constitue une autre amélioration. Ma délégation est très satisfaite de ce que la disposition concernant les pauses d'allaitement ait été conservée dans la convention au lieu d'être déplacée dans la recommandation. En ce qui concerne la flexibilité, des améliorations ont aussi été apportées. Les dispositions relatives au congé obligatoire sont formulées de manière moins rigide; le congé obligatoire ne s'applique pas s'il en est convenu ainsi à l'échelon national entre le gouvernement et les partenaires sociaux. De même, le texte du paragraphe concernant la responsabilité individuelle des employeurs est devenu plus souple; ce paragraphe constituait un grave obstacle à la ratification; le nouveau texte en tient compte et prévoit une clause plus souple sur ce sujet.

Le gouvernement néerlandais pense donc que nous avons atteint un nouvel équilibre, et sommes parvenus à une amélioration et à une plus grande souplesse. Cela fait pratiquement cinquanteans, un demi-siècle, que la convention (nº 103) sur la protection de la maternité (révisée), 1952, a été adoptée. Cinquante ans de progrès sociaux et d'évolution des sociétés, qui devraient être clairement reflétés dans la convention révisée sur la protection de la maternité. Ma délégation est d'avis que le texte proposé y est parvenu. Du point de vue politique, ce serait envoyer un message défavorable si cette session de la Conférence n'appuyait pas cette amélioration. Enfin, le gouvernement néerlandais tient à souligner que l'adoption d'un instrument et sa ratification sont deux processus distincts. On ne peut faire deux pas en même temps, mais un pas après l'autre. Demain, nous allons nous prononcer sur l'adoption du projet de convention. Sans convention, il n'y a pas de possibilité de ratification possible. N'oublions donc pas, au moment du vote, que l'adoption et la ratification sont deux étapes différentes.

En conclusion, le gouvernement néerlandais appuie la nouvelle convention. Je tiens à souligner, comme l'a fait il y a quelques instants avec beaucoup d'éloquence le membre travailleur de la commission, que cette convention ne concerne pas seulement la protection de la maternité; elle vise aussi à combattre la discrimination à l'encontre des femmes. Comme l'a souligné le Directeur général dans son allocution, la semaine dernière, c'est une convention qui concerne les carrières, la profession et la vie des femmes; c'est une convention qui concerne la moitié de la population mondiale. J'en appelle donc à toutes les délégations ici présentes, qu'elles représentent les gouvernements, les employeurs ou les travailleurs, pour qu'elles adoptent cette convention.

Original anglais: M. KUMAR (Ministre du Travail, gouvernement d'Orissa, Inde) — Je me félicite de prendre la parole devant cette auguste assemblée et je remercie le Président de me donner cette occasion. En tant que Membre fondateur de l'OIT et gardant présente à l'esprit la nécessité d'étendre les avantages de la protection de la maternité au plus grand nombre de travailleuses possible, l'Inde a toujours été, et continue à l'être, en faveur des mesures prises pour protéger les intérêts des travailleuses et de leurs enfants, y compris ceux relatifs à l'emploi pendant le congé de maternité et le paiement de prestations en espèces pendant cette période.

Nous avons adopté plusieurs lois en la matière dans notre pays, telles que la loi sur les prestations de maternité, 1961 et la loi sur l'assurance des travailleuses, 1948. La plupart des dispositions de ces lois sont déjà en conformité avec les dispositions de la convention (n° 103) sur la protection de la maternité (révisée), 1952. Par exemple, la période de congé de maternité dans notre législation est déjà de douze semaines. Les travailleuses ont droit à leurs salaires entiers pendant le congé de maternité et non aux deux tiers de leur gain antérieur comme prévu par la convention. Il y a également des dispositions qui permettent aux femmes d'avoir un congé supplémentaire en plus du congé de maternité en cas de grossesse pathologique, de fausse couche, etc. En outre, la législation interdit explicitement aux employeurs de renvoyer ou de licencier une femme pendant le congé de maternité ou pendant le congé suivant une grossesse pathologique. Après le congé de maternité, les travailleuses ont également droit à au moins deux pauses pour allaiter leur enfant, pendant une période de quinze mois. Il y a également d'autres dispositions dans la législation en Inde qui sont conformes aux dispositions de la convention n° 103.

La seule raison pour laquelle l'Inde, comme beaucoup d'autres pays, n'a pas pu ratifier la convention n° 103, c'est parce qu'il n'a pas été possible d'étendre les avantages prévus par les lois à toutes les femmes, en particulier celles qui travaillent dans le secteur non structuré ou informel. Et c'est peut-être la raison pour laquelle le Conseil d'administration du BIT a décidé de réviser la convention afin que la nouvelle convention révisée puisse attirer de plus en plus de ratifications, beaucoup plus, en tout cas, que les trente-huit actuelles.

Ce qui a été surprenant, c'est de voir que la Commission de la protection de la maternité, au lieu de fournir davantage de flexibilité à la convention existante, a pris des décisions qui rendront la ratification encore plus difficile. Par exemple, la commission a adopté une disposition stipulant que le congé de maternité doit être d'une durée de quatorze semaines au moins, au lieu de douze semaines, tel que le stipule la convention actuelle. La commission semble également avoir rendu la clause d'exclusion beaucoup plus restrictive qu'elle ne l'est à l'heure actuelle. De même, la commission a introduit le concept de congé parental dans la recommandation.

Alors que l'Inde soutient toutes les nouvelles initiatives prises par la commission, nous pensons qu'il aurait été mieux de garder la période minimum de congé de maternité à douze semaines et que ces clauses d'exclusion auraient pu être plus flexibles, en tenant compte de la situation particulière des pays en développement. Si cela avait été fait, il ne fait aucun doute que la voie aurait été ouverte à des pays comme l'Inde pour la ratification de la convention révisée. Cela aurait été également en accord avec l'idée du Conseil d'administration du BIT, qui avait proposé la révision de la convention actuelle afin d'attirer davantage de ratifications.

Original allemand: M. THÜSING (délégué des employeurs, Allemagne) — La vice-présidente employeur a donné en commission les raisons pour lesquelles les employeurs ne peuvent pas voter en faveur du projet de convention dont nous sommes saisis, et d'autres membres du groupe évoqueront ces raisons plus en détail par la suite. Je ne vais donc pas m'attarder davantage sur cette question.

J'aimerais cependant, et je m'exprime au nom du groupe des employeurs, attirer votre attention sur l'aspect essentiel du problème, ou plutôt vous le rappeler, car nous l'avons évoqué à plusieurs reprises.

Pour ce qui touche à l'activité normative de l'Organisation internationale du Travail, les employeurs ont appelé à la réforme du système présidant à l'élaboration des normes.

C'est une exigence que nous réitérons depuis de nombreuses années et nous avions l'impression que cette proposition était de mieux en mieux accueillie.

Aujourd'hui, nous sommes toujours plus nombreux à penser que, pour que l'OIT garde tout son sens dans le monde actuel, étant donné toutes les mutations que nous traversons, il faut qu'elle s'efforce d'élaborer des normes suffisamment souples pour être applicables partout dans le monde. Je dis bien dans le monde entier et pas uniquement dans certains pays développés. Les normes doivent pouvoir être ratifiées et, par conséquent, mises en œuvre dans le monde entier.

Une norme est d'abord adoptée, puis ratifiée, puis intégrée dans la législation nationale. Ces différentes étapes sont liées. Une norme peut être adoptée sans qu'il n'y ait aucune chance qu'elle soit ratifiée et, par conséquent, mise en application.

La première étape, à savoir l'adoption de la norme en cette enceinte, est l'étape décisive, car elle laisse présager du succès ou de l'échec des suivantes.

Nous avons l'impression que la réforme de la politique normative de l'OIT reçoit un appui de plus en plus vaste. Je me rappelle encore nos récents débats au Conseil d'administration, où des gouvernements de toutes les régions du monde avaient encore souligné cette nécessité.

Je me rappelle également les engagements pris en ce sens par le Directeur général à qui nous accordons notre confiance aujourd'hui comme hier.

Nous avons emprunté cette voie à la satisfaction de tous dans le cas de la convention (nº 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, qui sera ratifiée dans le monde entier. C'est donc avec enthousiasme que nous avons accueilli l'inscription, à l'ordre du jour de la Conférence, de la révision de la convention (n° 103) (révisée) sur la protection de la maternité, 1952. Nous pensons qu'il nous faut précisément obtenir des résultats dans ce domaine-là. La convention n° 103 a été ressortie d'un tiroir, couverte de poussière. Elle a été très peu ratifiée et de nouvelles ratifications sont peu probables. Nous voulions donc une norme qui ait des chances d'être ratifiée. Notre déception est donc profonde, d'autant plus que nous nous retrouvons dans une situation familière.

Après mûre réflexion, nous sommes parvenus à la conclusion que nous ne pouvions pas approuver ce projet de convention. On va certainement nous dire que nous sommes opposés à la protection de la maternité, mais ce reproche serait trop facile.

Dans de nombreux pays, les employeurs ne peuvent pas mettre en place de telles mesures. Dans d'autres pays, les employeurs renforcent la protection de la maternité en fonction de leurs possibilités. Ils souhaiteraient bien sûr voir une norme réaliste et ratifiable, qui permette de protéger les mères. Or nous ne pouvons escompter cela de la nouvelle norme, qui connaîtra le même sort que la convention n° 103.

Chaque gouvernement a la liberté, indépendamment de ce qui sera décidé ici, d'élargir la protection de la maternité selon ses moyens et de prévoir une protection aussi vaste, aussi généreuse, aussi raisonnable que possible. Personne ne s'en verra empêché. L'expérience accumulée au fil des ans nous a montré que les normes adoptées ne modifient pas la réalité. Celles qui sont inapplicables restent au fond d'un tiroir et le résultat est le même que si elles n'avaient jamais été élaborées.

Je voulais vous rappeler le principe que défendent les employeurs pour ce qui touche à l'élaboration des normes. Nous n'avons pas changé d'avis à ce sujet, malgré les nombreuses déceptions que nous avons connues.

Nous pensons que l'élaboration des normes est — et doit — rester un volet important de l'activité de l'OIT. Mais cette activité n'aura de sens que si nous retrouvons la voie du réalisme et élaborons des normes qui peuvent effectivement être ratifiées partout dans le monde, ce qui n'est pas le cas actuellement.

Original anglais: M. LAMBERT (délégué des employeurs, Royaume-Uni) — Pour un grand nombre de pays développés, la protection de la maternité au travail ne dépend pas d'instruments internationaux. Ces pays possèdent déjà des normes élevées de protection de la maternité, des normes qui peuvent égaler ou même aller au-delà des normes prévues dans la convention révisée proposée.

L'application de ces normes se fait en dépit plutôt qu'à cause de la convention n° 103. Cette convention a été soumise à révision à cause du niveau très bas de ratifications: seuls 38 sur les 175 Etats Membres l'ont ratifiée. Cette faible proportion est le résultat de l'approche extrêmement normative de la convention.

L'adoption de la convention révisée aggraverait cette erreur. Le monde moderne du travail a besoin de normes modernes réalisables dans un avenir proche, de normes qui puissent s'appliquer mondialement. Il est impératif que leur champ d'application et que leurs détails prennent en considération les réalités nationales, sociales et économiques de même que la diversité religieuse et culturelle. Ces normes doivent comporter suffisamment de flexibilité pour des pays ayant des systèmes de sécurité sociale et des systèmes juridiques très différents.

Or la révision est loin de réaliser ces objectifs. En dépit des efforts du groupe des employeurs et de plusieurs gouvernements, elle reprend largement les défauts de la convention n° 103. Si cette convention révisée était adoptée, elle ne fournirait pas une protection réelle aux femmes au travail et à leurs enfants dans les régions du monde où cette protection est la plus nécessaire.

Je me fais l'écho de l'appel lancé par Mme Anne Knowles aux Etats Membres pour qu'ils revoient leurs politiques dans un contexte national de façon à fournir une protection de la maternité réalisable et soutenue. De telles révisions devront établir minutieusement un équilibre entre les intérêts des travailleurs, des employeurs et des gouvernements.

Un grand nombre d'Etats Membres pourraient être tentés d'appuyer l'adoption de cette convention car ils voudraient voir une mise en œuvre sur le plan mondial des normes qu'elle contient, même si leur propre pays ne ratifiera très probablement pas la convention. D'autres Membres pourraient être tentés de le faire aussi parce que de telles normes s'appliquent déjà dans leur propre pays.

Ces considérations sont tout à fait compréhensibles. Mais l'adoption d'une convention essentiellement impossible à ratifier ne va pas améliorer la protection des femmes au travail ni de leurs bébés. L'adoption de cette convention renforcerait la position de ceux qui, de plus en plus nombreux, remettent en question l'efficacité, la validité et l'avenir de l'OIT, en tant qu'unique Organisation internationale tripartite.

Original anglais: M. HYDER (conseiller technique et délégué suppléant des employeurs, Bangladesh) — Le texte de la convention proposée sur la protection de la maternité est soumis à cette Conférence. Nous nous souvenons tous que l'objectif de la révision de la convention (nº 103) sur la protection de la maternité (révisée), 1952, était d'écarter les obstacles à la ratification responsables du très bas niveau de ratification de ces cinquante dernières années.

Malheureusement, le texte de la convention tel qu'il est rédigé n'a pas permis de lever les obstacles que rencontrent la plupart des pays en développement dans le monde. J'espérais que cette année, pendant cet exercice de révision, nous aboutirions à un niveau de protection de la maternité au travail qui pourrait être interprété et appliqué comme une norme significative tenant compte des réalités des pays qui ont le plus besoin d'une protection sociale.

Trop souvent, la protection n'est prévue que dans une législation qui n'est pas toujours appliquée. La protection de la maternité au travail est une question importante pour tous les employeurs et tous les travailleurs. Malheureusement, l'approche ainsi que les dispositions figurant dans le texte révisé ne reconnaissent pas que la protection, pour être réelle, doit être réalisable.

La disposition prévoyant 14 semaines de congés payés et les pauses d'allaitement payées — pour ne citer que quelques exemples — ne tient pas compte des réalités de notre monde. Cette protection peut sans doute être assurée dans les économies du monde développé, mais pas dans des pays comme le Bangladesh, d'où je viens, ou dans d'autres pays en développement ayant un niveau de développement similaire.

C'est la raison pour laquelle la norme qui nous est proposée dans le texte révisé ne pourra pas être atteinte car elle ne peut tout simplement pas être appuyée économiquement.

Trop souvent, les conventions ne tiennent pas compte de la véritable diversité et la réponse passe-partout utilisée est en fait une approche complètement faussée. Nous avons besoin de flexibilité pour assurer l'application, à l'échelon national, de normes qui assurent une véritable protection à un niveau réaliste.

Je suis également préoccupé par les attentes que suscite la révision d'une convention; la révision suppose un examen critique de toutes les dispositions afin de cerner les véritables obstacles à la ratification et de les lever; il ne s'agit pas seulement d'accroître les prestations d'une manière qui rende la ratification encore plus compliquée. Il est nécessaire d'être d'accord sur ce processus si l'on veut que la révision soit un moyen utile de moderniser les normes de l'OIT.

Si cela n'était pas fait, nous risquerions d'avoir, à nouveau, une norme que les pays en développement ne pourraient pas ratifier.

Original anglais: Mme IWATA: (Déléguée gouvernementale, Japon) — Je voudrais tout d'abord remercier la présidente et les deux vice-présidentes ainsi que le rapporteur et tous les membres de la Commission de la protection de la maternité pour les efforts déployés afin de terminer ce travail très difficile.

Aujourd'hui, de plus en plus de femmes, y compris de femmes mariées, jouent un rôle essentiel sur les lieux de travail. La protection de la maternité est donc une question très importante non seulement du point de vue de la protection de la santé des femmes, mais également du point de vue de la promotion de l'emploi des femmes et de l'égalité entre les sexes.

C'est la raison pour laquelle nous nous sommes tous félicités du débat sur la révision de la convention (n° 103) sur la protection de la maternité, qui a eu lieu lors de la Conférence internationale du travail de l'année dernière et de cette année. Cette révision, qui a lieu pratiquement cinquante ans après l'adoption de la première convention, a été faite à la lumière des politiques et mesures prises dans les différents Etats Membres et à la lumière des nouveaux problèmes apparus.

Nous apprécions certaines des décisions prises par la commission concernant la protection des femmes enceintes et des femmes qui allaitent et le renforcement des dispositions en matière de non-discrimination des femmes pour raison de maternité.

Néanmoins, j'ai quelques préoccupations en ce qui concerne le texte de la convention, et le débat qui a eu lieu pendant les réunions de la commission.

Il faut rappeler, en effet, que lorsque nous avons décidé de la révision de cette convention, nous avions l'intention de la rendre plus souple afin qu'elle puisse être ratifiée par le plus grand nombre possible d'Etats Membres. Il est donc regrettable que ce point de vue n'ait pas été partagé par tous les gouvernements, employeurs et travailleurs de la commission.

La commission a décidé dans certains cas de conserver les dispositions existantes au lieu d'approuver les dispositions révisées proposées par le Bureau sur la base des débats qui avaient eu lieu dans le bon sens l'année dernière.

En outre, la commission a également décidé d'adopter de nouvelles dispositions dont certaines sont trop techniques pour pouvoir être acceptées par une majorité des Etats Membres. Nous craignons fortement que le projet de convention ne puisse pas constituer une norme internationale minimum comme nous l'aurions souhaité.

L'activité normative de l'OIT risque donc de perdre de sa crédibilité parce que le projet de texte de la convention n'a aucune chance d'être ratifié par un grand nombre d'Etats Membres.

Nous allons commencer une révision générale des activités normatives de l'OIT lors du Conseil d'administration au mois de novembre.

Il serait tout à fait regrettable pour les débats du Conseil d'administration, et pour tous les travailleurs, y compris naturellement les femmes, les employeurs et les gouvernements, que la convention adoptée par cette Conférence n'atteigne pas le but fixé au début de nos travaux, à savoir être plus facilement ratifiable.

Original anglais: Mme OKUNGU (conseiller technique des employeurs, Kenya) — Je vous remercie de me permettre de représenter non pas les employeurs, mais les femmes d'Afrique. Tout d'abord, j'aimerais vous remercier pour cette occasion qui m'est donnée.

Nous avons passé deux bonnes semaines à la Commission de la protection de la maternité. Cette commission a pu fonctionner grâce à l'entregent de plusieurs personnes ici présentes, car les travaux ont été éprouvants.

Je suis moi-même une femme, une jeune femme en âge d'avoir des enfants et je pense que cette convention aurait pu être la meilleure du monde si seulement nous n'étions pas confrontés aux réalités sociales et économiques qui nous attendent chez nous.

En écoutant les débats de la Commission de la protection de la maternité, on pourrait avoir l'impression que l'Afrique dispose d'une protection de la maternité dont le niveau est comparable à celui du monde occidental. Ce n'est tout simplement pas vrai, et l'exemple du Kenya le montre amplement.

Cette année, les débats étaient l'occasion d'élaborer une convention qui aurait pu offrir aux travailleuses, dans notre région du monde, une protection véritable qui permette aux femmes d'avoir des enfants sans craindre de perdre leur emploi ou de subir une discrimination.

Le texte final du projet de convention rend cette aspiration aussi peu réaliste que l'objectif de la convention n° 103 pour la majeure partie de l'Afrique.

L'Afrique n'est pas constituée d'un seul pays. Sa diversité se manifeste non seulement quant aux langues et aux cultures, mais aussi sur le plan du développement économique et social. Si nous voulons que la protection de la maternité devienne une réalité, il faut que cette protection soit abordable quant aux coûts, qu'elle soit réaliste et qu'elle puisse être mise en œuvre et appliquée. Le projet devrait également obéir à la nécessité de permettre la création d'emplois et le développement des entreprises dans des économies largement non structurées.

A cet égard, j'aimerais rappeler qu'au Kenya, 63 pour cent des personnes employées, hommes et femmes, travaillent dans le secteur non structuré. Le secteur structuré ne représente que 37 pour cent de la population active. Les employeurs s'acquittent de leur tâche, mais ils ne peuvent assumer à eux seuls le coût de la protection sociale dans la mesure où, en Afrique, les régimes de sécurité sociale sont quasiment inexistants.

Le projet de révision ne tient pas compte de cette réalité. Certes, la protection doit dépasser le strict minimum, ou viser au-delà du plus petit dénominateur commun, mais elle doit être réalisable. Des dispositions qui ne reconnaissent pas, de façon équilibrée, les intérêts de toutes les personnes impliquées dans la relation d'emploi sont condamnées à l'échec et, à mon sens, c'est une profonde déception.

Original espagnol: M. DE REGIL (délégué des employeurs, Mexique) — A nouveau, nous nous trouvons à la fin de la Conférence internationale du Travail en train d'examiner l'adoption d'un texte qui n'a pas réussi à répondre aux objectifs fixés au moment où la révision de cette convention a été inscrite à l'ordre du jour.

La convention n° 103 a attiré uniquement 38 ratifications depuis sa dernière révision en 1952. Au lieu d'examiner d'un œil critique ce texte de façon à identifier et à surmonter les barrières à sa ratification qui gênent nombre d'Etats Membres, nous avons maintenant un texte qui, à maints égards, a relevé les prestations, mais qui ne tient pas compte des possibilités de ratification.

Un grand nombre de pays représentés ici n'ont probablement aucune difficulté avec le texte proposé, qui envisage des protections inférieures à celles qui existent déjà dans leurs législations respectives. Mais là n'est pas la question en cause. La protection de la maternité fait l'objet d'une convention trop importante pour être appliquée uniquement dans les pays qui n'ont pas besoin d'une convention internationale pour les orienter dans ce domaine.

Nous devrions nous préoccuper davantage de ceux qui n'ont pas pu réaliser les objectifs de la convention n° 103 et qui restent dans la même posture aujourd'hui vis-à-vis du texte proposé.

Je ne dis pas que les normes doivent être fixées à un niveau tel qu'elles n'auraient plus aucune signification. La protection qu'elles prévoient doit être réaliste. Cependant, elle doit aussi permettre de prendre en considération la réalité économique et sociale de chaque pays.

Sur l'essentiel, le nouveau texte ne va pas beaucoup plus loin que la convention no103. Et c'est dommage, car l'ancien a cinquante ans, et nous avons eu deux années de discussion sur le thème.

Dans le cas du Mexique et d'autres pays de l'Amérique latine, cela n'entraînerait qu'une charge supplémentaire pour la sécurité sociale, sans compter les dommages que cela entraînerait pour la création d'emplois.

Les nouvelles modalités de travail qui commencent à se faire jour et qui accélèrent le travail exigent une réponse moderne. Une réponse qui conserverait un équilibre entre les besoins des entreprises et une protection efficace. Nous ne voulons pas élever de barrières à l'emploi des femmes, mais nous ne voulons pas non plus saper la possibilité de créer des emplois ni porter atteinte au développement des entreprises.

C'est parfois un équilibre délicat et je crois que nous avons raté l'occasion de montrer au monde que l'OIT peut gérer ses intérêts, parfois en conflit, et créer un instrument qui permettrait aux femmes, actuellement au travail mais exclues de toute protection, d'être vraiment protégées sur des bases réelles et non point sur des bases artificielles et finalement inatteignables dans ces pays.

Original espagnol: Mme ANDERSON NEVARES (déléguée des travailleurs, Mexique) — Des hommes et des femmes de toutes les régions du monde sont venus à Genève pour travailler avec enthousiasme et sincérité au sein de la Commission de la protection de la maternité, un organe créé par l'OIT afin d'appuyer les femmes qui cumulent la fonction de mère et celle de travailleuse. Depuis plus d'une année, nous discutons de la révision de la convention n° 103 adoptée par cette Organisation il y a cinquante ans. Lors de la 87e session de la Conférence, nous avons adopté un certain nombre d'amendements qui ont été examinés à nouveau lors des discussions de la présente session. Tous les groupes de travailleurs venus des différents pays ainsi que les représentants gouvernementaux et les représentants des employeurs ont analysé les amendements, les ont commentés et ont fait des propositions pour apporter leurs contributions à cette réunion importante.

Certains pays, dans lesquels le niveau des prestations est plus élevé qu'ailleurs, craignent de le voir s'abaisser si la convention était adoptée.

Cependant, les pays dotés d'une législation prévoyant un niveau de prestation supérieur à celui que préconisent la convention no 103 et le nouveau texte devraient être rassurés par la Constitution de l'OIT. En effet, il y est dit que, dans ce cas de figure, les prestations de niveau supérieur ne sont pas remises en cause une fois la convention adoptée. La révision de cette convention me semble constituer un progrès. L'OIT consacre le droit des pays à ne pas perdre ce qui a déjà été acquis dans les législations nationales.

Je vous invite à adopter la convention révisée car c'est un texte qui marque un progrès. En effet, dans certaines régions du monde, aucune protection n'est accordée aux mères, et je pense que cette convention sera un exemple pour tous. Il nous faut aider les milliers de travailleuses et les enfants à naître qui espèrent beaucoup de nous, aujourd'hui réunis pour discuter de cette convention, des gouvernements, des employeurs et des travailleurs, ces travailleurs qui ont assumé une responsabilité particulière au sein de l'assemblée tripartite que constitue l'OIT.

Le monde a les yeux fixés sur l'OIT et sur nous autres qui avons participé à cette discussion sur la protection de la maternité.

Original anglais: M. POTTER (conseiller technique et délégué suppléant des employeurs, Etats-Unis) — Je présente ici les propos de Sandra Fiechtner, conseillère technique des employeurs, Etats-Unis, à la Commission de la protection de la maternité. Malheureusement, Mme Fiechtner n'a pas pu rester à Genève pour présenter ses remarques, qui sont celles d'une Américaine exerçant des responsabilités professionnelles en Europe.

Cela a été une expérience riche et mémorable que de participer à ma première Conférence de l'OIT. L'intensité de mes impressions tient autant au contenu du travail important que nous avons accompli au sujet de la protection de la maternité qu'à la manière dont nous avons travaillé. J'aimerais tout d'abord vous présenter quelques commentaires au sujet de cette convention.

Il y a deux semaines, nous sommes partis de l'idée d'une convention reposant sur des principes et n'imposant pas de prescriptions. Il est clair aujourd'hui que nous avons échoué. Notre produit final ressemble à une mission impossible, puisqu'il prescrit des mesures détaillées pour tous les pays (développés ou en développement) et toutes les entreprises (petites ou grandes). Souvent, ces prescriptions sont en contradiction directe avec les législations et les pratiques nationales existantes, s'agissant par exemple du fardeau de la preuve en cas de licenciement ou du droit à quatorze semaines de congé de maternité et de l'introduction du congé obligatoire.

Quel sera le résultat de notre travail? Si le passé permet de prédire l'avenir, on peut escompter un faible taux de ratification. Pire encore, on peut craindre un impact négatif sur les femmes au travail en raison des pratiques de recrutement et de promotion qu'appliqueraient, en toute bonne foi, des pays cherchant à imposer de force les dispositions de la convention.

Une approche du XXIe siècle pour sauvegarder la santé des femmes durant la maternité ne doit pas perdre de vue la nécessité de maintenir un équilibre entre toutes les parties prenantes afin de faire en sorte que les femmes et les hommes puissent travailler ensemble sur un pied d'égalité.

Voici maintenant quelques remarques sur la manière dont nous avons travaillé. Oui, nous avons travaillé dur et longtemps, mais pour un résultat étonnamment maigre. Le Directeur général a déclaré que l'OIT devrait à l'avenir être analytique et faire preuve d'esprit critique envers elle-même. A cet égard, je me permets de suggérer humblement que l'Organisation pose un regard nouveau sur trois domaines.

Tout d'abord, le recours aux nouvelles technologies dans les réunions. Si nous avons réussi à marcher sur la lune, nous pouvons certainement trouver des moyens d'accélérer les votes par appel nominal. L'investissement consenti pourrait être rapidement amorti grâce au temps et aux tensions épargnés à des centaines de participants. La lourde procédure d'amendement et de sous-amendement devrait bénéficier d'un meilleur contrôle parlementaire et d'une meilleure cohérence et pourrait être améliorée grâce à des ordinateurs portables et des écrans vidéo.

Ensuite, la procédure d'adoption des normes tripartites. Le meilleur moyen de négocier un accord est souvent de dialoguer et de partir de principes et d'intérêts plutôt que de camper chacun sur ses positions. Tenter de dégager un accord par le biais de votes ne laissant d'autre choix que «oui» ou «non» crée un fossé entre les gagnants et les perdants et tend à polariser les positions. Nous n'avons passé que très peu de temps à tenter une synthèse entre les idées des uns et des autres. Nous avons passé le plus clair de notre temps à «vendre» et à défendre des positions. Un meilleur recours à un travail réfléchi au sein de petits groupes serait plus efficace.

Enfin, l'efficacité des réunions. Nous comprenons fort bien la complexité de notre tâche et la nécessité de respecter la liberté de parole. Il semble cependant que les principes les plus élémentaires de la gestion du temps et de la participation ne soient pas pris en compte. Pour quelqu'un qui participe pour la première fois à cette assemblée, cela est assez choquant. Il faudrait en priorité améliorer les règles et le soutien nécessaires à une réunion aussi complexe.

Pour conclure, j'aimerais féliciter mes collègues employeurs de leur travail impressionnant. Ils ont fait preuve d'un degré élevé d'harmonie et de cohésion. Je remercie en particulier notre vice-présidente employeur pour sa compétence, son autorité et son dynamisme.

Original anglais: M. BRETT (délégué des travailleurs, Royaume-Uni) — Je n'avais pas l'intention de prendre la parole au cours de ce débat, mais j'ai été poussé à le faire par le flot d'arguments de nos collègues employeurs et de certains délégués gouvernementaux, et parce que la tendance de tous ces arguments va dans le sens d'une marée d'abstentions, et je voudrais m'élever contre cela.

Il y a tout d'abord, ceux qui s'efforcent d'obtenir un rejet de ces instruments parce qu'ils souhaitent une révision plus fondamentale de l'activité normative. MM. Thüsing et Potter ont dit quelque chose de similaire. Nos collègues latino-américains ont indiqué clairement en dehors de cette réunion, que les nouvelles dispositions leur semblaient être en deçà de celles qui avaient été adoptées il y a cinquante ans, et qu'ils pourraient bien s'abstenir. D'autres gouvernements ont dit que s'ils ne pouvaient pas ratifier immédiatement, ils ne soutiendraient pas la convention révisée et, donc, s'abstiendraient.

Voilà donc la recette de l'échec. Et nous devons nous demander ce qui nous reste. Ce ne sera pas une convention nº 103 dynamisée, à accepter comme norme. M. Thüsing a dit qu'elle restera lettre morte. Si nous voulons renforcer la protection, ce n'est pas ainsi qu'il faut procéder.

D'autres, comme mon gouvernement l'a fait, ont dit, voilà une convention pour laquelle on ne peut pas voter car on ne peut pas la ratifier. Moi, je leur dirai: ici, il s'agit d'aspirations, d'objectifs. Et je voudrais rappeler à mon propre gouvernement que lorsque la convention n° 103 a été débattue il y a de nombreuses années, il est probable qu'il se soit abstenu.

Mon gouvernement a ratifié la convention (nº 103) sur la protection de la maternité (révisée), 1952, la semaine passée, donc plusieurs années après sont adoption. Alors, je crois qu'il ne faut pas nous décourager, il faut nous fixer des objectifs, si nous n'avons pas d'objectifs élevés, comment allons-nous protéger les femmes dans le monde.

Ici, il ne s'agit pas d'une norme technique, ce n'est pas simplement une norme comme une autre, c'est une norme qui concerne la moitié de la population mondiale et engage l'avenir de l'ensemble de humanité. C'est une norme qui va permettre aux femmes de participer à la vie de la société. C'est une norme qui émancipe les femmes, elle n'a rien de commun avec une norme technique stérile. Je voudrais dire à mes collègues employeurs que je comprends bien qu'ils veuillent une révision du mécanisme normatif.

Je comprends qu'ils veuillent un processus de modernisation, et ce débat d'ailleurs est en cours au Conseil d'administration, mais ils ne doivent pas essayer dans ce débat de discuter du principe même de l'activité normative, mais juger ce que nous avons accompli en deux semaines. Je pense que nous devons nous interroger sur les méthodes, nous devons le faire en gardant présente à l'esprit la raison de notre présence ici, à savoir fixer des normes qui soient valables pour le monde entier, pas des normes pour le plus petit commun dénominateur.

Original anglais: M. KINLEY (délégué gouvernemental, Nouvelle-Zélande) — Je voudrais tout d'abord vous dire que le gouvernement de la Nouvelle-Zélande a l'intention de prôner l'adoption de la convention révisée et de la recommandation sur la protection de la maternité qui est le fruit du travail de la Commission de la protection de la maternité.

Cette position me semble le résultat naturel de notre engagement et de notre foi dans la révision de la convention (nº 103) (révisée) et de la recommandation sur la protection de la maternité, 1952.

Comme d'autres orateurs l'ont dit, les travaux ont parfois été difficiles au sein de la commission qui s'occupait de questions prêtant à controverse, dans un climat parfois conflictuel. Néanmoins, le travail de la commission a connu une évolution positive et il ne faut pas le sous-estimer.

Le projet d'instrument à réviser contient des améliorations dans un certains nombre de domaines, y compris l'extension de la protection fournie par les instruments de 1919 et 1952 sur la protection de la maternité.

Comme certains orateurs l'ont dit, des améliorations ont été enregistrées en ce qui concerne la prolongation de la durée du congé de maternité prévu dans la convention. Le champ d'application de la convention se trouve élargi. Les dispositions antidiscriminatoires contenues dans la convention ont été améliorées. Et des dispositions concernant la protection de la santé ont été introduites dans la convention.

La possibilité d'améliorer l'application et la ratification de la convention a été examinée pendant les débats de la commission, en comparaison avec les instruments de 1919 et de 1952.

Les dispositions concernant le congé obligatoire reconnaît maintenant la situation des pays où le congé est accordé selon des mécanismes différents.

Les dispositions relatives aux prestations en espèces et médicales sont plus souples et reflètent mieux les différents moyens de fournir ces prestations.

Les dispositions concernant les pauses d'allaitement répondent mieux aux différents besoins des mères et le mode d'application de la clause d'exclusion est maintenant plus logique.

Une question clé qui s'est faite jour est celle de savoir si l'exercice répond aux attentes de tous les participants. Il est clair qu'un certain nombre d'amendements n'ont pu être adoptés et qu'aucun des participants aux débats de la commission n'a réussi à voir passer tous les amendements proposés.

C'est pourquoi les conclusions de la commission peuvent être considérés comme un compromis raisonnable entre les participants tripartites à la commission.

Toutefois, les résultats obtenus et le long chemin parcouru ne reflètent peut-être pas pleinement l'esprit de réforme des activités normatives, tel qu'étudié dans le rapport sur le travail décent que le Directeur général avait présenté à la session de l'année dernière de la Conférence internationale du Travail.

On a vu dans cette commission que l'objectif de révision des normes, à un moment où l'OIT débat d'un certain nombre d'options sur la meilleure application de réformes proposées par le Directeur général, peut être interprété de façon fort différente par les uns et les autres.

Nous considérons donc qu'il est important que le dialogue social se déroule dans le cadre tripartite de l'OIT, afin qu'il y ait des attentes claires concernant les résultats vers lesquels tend la révision des instruments actuels.

Il importe de situer ces attentes dans une perspective plus générale et il faut que toutes les parties contribuent au projet du Directeur général concernant le renouvellement et le renforcement des normes de l'OIT.

Le gouvernement de la Nouvelle-Zélande voudrait exprimer sa reconnaissance au bureau de la commission qui a guidé des débats parfois difficiles. Nous voudrions également remercier les représentants du Secrétaire général et tout le secrétariat pour l'excellent travail préparatoire qu'ils ont accompli et pour les conseils qu'ils ont donnés pendant les débats de la commission.

Enfin, nous voudrions mentionner plus particulièrement les efforts des membres du groupe de travail de la commission, et notamment de son président, le délégué gouvernemental du Canada, qui a essayé d'aboutir à un consensus sur les questions délicates, qui étaient au centre de cette discussion. En cherchant un consensus, ils ont fait un effort louable et cela a permis manifestement d'accélérer les travaux de la commission.

Mme JOIN-LAMBERT (déléguée gouvernementale, France) — Le gouvernement français votera en faveur de la convention et de la recommandation sur la protection de la maternité, telle que révisée par la 88e session de la Conférence internationale du Travail. Ce vote positif n'est pas lié seulement — et je dirai, loin de là — au fait que la France pourra ratifier la convention au prix de quelques améliorations de sa législation, concernant notamment le renversement de la charge de la preuve en cas de licenciement.

En effet, et nous en sommes pleinement conscients, une convention de l'OIT n'est pas la convention de la France, ni celle des pays développés, elle est celle du monde entier, et nous avons, quant à nous, un effort très important à faire auprès de notre opinion publique pour faire comprendre que les normes sur lesquelles nous nous penchons aujourd'hui ont pour objet, non pas de limiter la protection, souvent plus importante, qui est accordée dans nos pays, et notamment en France, mais d'améliorer la situation des travailleuses dans tous les pays, notamment dans les pays en développement.

J'insiste par ailleurs sur le fait que nous ne lions pas cette question au débat qui est en cours dans l'Organisation sur la politique normative. Pour nous, ce débat n'a pas encore abouti, loin de là, et faire de cette convention un test de cette réforme de la politique normative nous paraît inapproprié.

Par notre vote, le gouvernement français veut donc reconnaître le travail important qui a été réalisé au sein de la commission par les représentants des travailleurs, des employeurs et des gouvernements pour améliorer les protections par rapport à la convention n° 103, tout en respectant les diversités culturelles des Etats Membres.

De plus, le gouvernement français estime qu'au stade où en sont parvenus les travaux aujourd'hui, un rejet de la convention révisée sur la maternité serait grave pour l'Organisation internationale du Travail, s'agissant d'un sujet majeur pour l'avenir de nos sociétés: la possibilité pour les travailleuses de mener à bien leurs grossesses et de donner naissance à leurs enfants en bénéficiant des protections indispensables à leur santé et à leur sécurité.

Original anglais: Mme BERESFORD (déléguée des travailleurs, Nouvelle-Zélande) — Le texte dont nous débattons est un texte destiné au XXIe siècle. Certains de ceux qui l'ont commenté ne l'ont manifestement pas lu ou, en tout cas, ne l'ont pas lu avec attention; de plus, ils ne l'ont pas comparé systématiquement avec la convention (nº 103) sur la protection de la maternité (révisée), 1952. Je les engage vivement à le faire.

Je voudrais également réfuter totalement les suggestions faites aux gouvernements, selon lesquelles si l'on vote en faveur de cette convention, on sera obligé de passer immédiatement à la ratification. Cela n'est tout simplement pas exact.

Comme l'a souligné le représentant gouvernemental des Pays-Bas, les choses se font l'une après l'autre. Il y a d'abord l'adoption de cette convention à la 88e session de la Conférence, puis un examen attentif de sa ratification éventuelle par les différents pays. J'invite instamment tous ceux ici présents à adopter la convention révisée sur la protection de la maternité, à laquelle tant d'entre nous — travailleurs, gouvernements, et employeurs — travaillent depuis si longtemps.

Pourquoi l'avons-nous fait? Pour assurer une protection minimale aux femmes, afin de leurs permettrent à toutes d'exercer un travail rémunéré sans discrimination, et de jouer dans la société leur rôle en tant que mères et de dispensatrices de soins aux enfants.

Je vous demande instamment de ne pas vous abstenir. Ce serait au mieux une fuite devant vos responsabilités, au pire, un acte incroyablement destructif.

Réfléchissons au préambule de cette convention, qui souligne la nécessité de réviser la convention de 1952, «… afin de promouvoir davantage l'égalité de toutes les femmes qui travaillent, ainsi que la santé et la sécurité de la mère et de l'enfant, et afin de reconnaître la diversité du développement économique et social des Membres, ainsi que de la diversité des entreprises et le développement de la protection de la maternité dans les législations et les pratiques nationales».

Ainsi la révision tient compte des besoins des mères, des enfants, des entreprises et des pays dont la culture et le niveau de développement économique diffèrent.

L'année dernière, nous avons été extrêmement fiers d'avoir adopté la convention sur les pires formes de travail des enfants. Depuis lors, de nombreux pays ont ratifié cette convention, ou envisagent de le faire. C'est ainsi que les choses devraient se passer.

Chers collègues, soyons fiers, cette année aussi, du travail accompli en faveur des femmes et des enfants, tout comme nous l'avons été l'an dernier de notre défense des membres les plus exploités de notre village mondial.

C'est pourquoi je vous demande instamment d'adopter cette convention.

Original anglais: Mme ROBINSON (déléguée gouvernementale, Canada) — Tout d'abord, j'aimerais confirmer l'appui du Canada, qui souhaite s'assurer que les femmes ne subissent pas de discrimination du fait de leur grossesse, de l'accouchement et de l'allaitement, et que la santé des femmes enceintes et de leurs enfants est protégée.

Il est important de rappeler que la décision de réviser la convention n° 103 se fondait non seulement sur la nécessité de mettre à jour cette norme compte tenu des changements intervenus sur le lieu de travail et dans les pratiques nationales, mais aussi sur la nécessité de modifier certaines des dispositions trop prescriptives de la convention, afin d'encourager les ratifications.

La commission a réussi à mettre à jour cette convention, et le Canada se félicite de l'adjonction de la protection de la santé, de l'interdiction des tests de grossesse, des dispositions plus fermes en matière de non-discrimination, ainsi que d'autres améliorations qui ont été fort bien présentées par le rapporteur.

Toutefois, à l'exception des dispositions sur les congés obligatoires et la responsabilité de l'employeur, qui s'adaptent davantage désormais à la situation des pays, des dispositions prescriptives, qui ont empêché de nombreux pays de ratifier la convention n° 103, sont toujours présentes dans la convention révisée.

Nous acceptons les mesures de protection de la nouvelle convention, mais nous reconnaissons que la nature prescriptive de ces dispositions continuera à représenter un obstacle à la ratification.

Les discussions en commission ont été difficiles, et il n'a pas été possible de dégager de consensus, étant donné que les positions étaient totalement opposées. Il est reconnu que la convention doit établir une norme élevée, et le fait d'en éliminer les dispositions prescriptives ne ferait que l'affaiblir. Certains ont estimé que la convention pourrait devenir moins prescriptive sans que son niveau de protection ne s'en trouve abaissé.

Ces difficultés montrent qu'il est nécessaire de s'attaquer à toute une série de questions dans le contexte de la révision de l'activité normative. Il faut s'entendre sur le concept même de ce que doit être une norme internationale: la norme idéale doit être plus élevée que les normes actuellement en vigueur dans la plupart des pays; elle doit être universelle et offrir une protection adéquate, qui puisse être ratifiée et mise en œuvre par un grand nombre d'Etats Membres.

Il conviendrait aussi d'étudier la manière de rédiger des conventions afin de garantir une protection adéquate sans intégrer au texte des dispositions trop prescriptives, de telles dispositions représentant, en fin de compte, des obstacles à la ratification.

Une meilleure préparation des points techniques, y compris les discussions préliminaires au Conseil d'administration, pourrait contribuer à élaborer des conventions plus faciles à ratifier et à mettre en œuvre; on améliorerait ainsi la protection offerte à un plus grand nombre de travailleurs.

Enfin, je remercie les membres du bureau de la commission, le rapporteur et tous ceux qui ont travaillé d'arrache-pied pour parvenir à une conclusion sur cette importante question.

Original arabe: Mme ABDEL HADI (conseillère technique et déléguée suppléante, Egypte) — Au nom de Dieu, Clément et Miséricordieux! Le Directeur général et le Conseil d'administration ont proposé la révision de la convention sur la protection de la maternité; cette question représente l'une des activités fondamentales de l'OIT et exige un soutien de la part de tous les partenaires sociaux.

La protection de la maternité constitue en définitive un investissement en matière de ressources humaines. La question de la révision de la convention n° 103, qui intervient pour la deuxième année consécutive, coïncide avec la Conférence des Nations Unies qui s'est tenue il y a quelques jours sur le suivi de la Conférence de Beijing, cette convention représente un minimum par rapport à ce que devrait être la protection des femmes et des mères. Dans les pays arabes la législation s'inspire de la religion et accorde beaucoup de droits aux femmes. C'est ainsi que la législation appliquée dans notre pays et notre pratique nationale ont accordé beaucoup d'intérêt et d'importance aux femmes travailleuses qui ont des enfants, en tant que piliers de la société.

Nous appuyons fortement cette convention.

Nous pensons que cet instrument est particulièrement important et j'en appelle à tous les partenaires sociaux afin qu'ils apportent leur soutien aux mères qui travaillent pour que celles-ci aient la protection nécessaire. Je les appelle donc à adopter cette convention, tout en sachant que la mère qui travaille peut être leur épouse, leur sœur, leur fille ou leur mère et qu'il s'agit d'une protection qui concerne la société dans son ensemble et dont nous avons donc tous besoin.

Je remercie le Président de la Conférence d'avoir appuyé le travail de notre Commission. Je remercie aussi le groupe des travailleurs de cette même Commission et en particulier la représentante des travailleurs dans cette Commission qui a fait son travail avec beaucoup de patience. Je remercie la Présidente de la Commission, qui a eu la capacité de rapprocher des points de vue parfois très divergents; je vous remercie tous d'avoir écouté la voix des travailleuses du monde entier qui s'exprime ici, ces femmes travailleuses qui sont confrontées à l'impact négatif de la mondialisation. La convention n° 103 de 1952 a permis de nombreux progrès pour la protection de la femme au travail et nous vous demandons une fois de plus à tous de soutenir cette nouvelle convention.

Original portugais: M. RIBEIRO LOPES (délégué gouvernemental, Portugal) — Le gouvernement portugais est dans l'ensemble favorable au projet de convention et de recommandation sur la protection de la maternité qui est présenté à la Conférence.

Pour ce qui est du projet de convention, qui est l'instrument le plus important, nous fondons notre appréciation sur deux ordres d'idées. En premier lieu, le projet de convention apporte des solutions satisfaisantes aux difficultés majeures qui ont empêché la ratification de la convention n° 103 par un grand nombre de pays. En outre, cette nouvelle convention améliore généralement la protection de la maternité. Comme vous le savez tous, la convention n° 103 comportait quatre éléments qui freinaient sa ratification. A cet égard, la nouvelle convention présente des solutions raisonnables qui, à notre avis,  pourront faciliter la ratification par des pays qui ont éprouvé des difficultés à ratifier la précédente convention. La nouvelle convention permet à tout État qui ratifiera l'instrument d'exclure totalement ou partiellement de son champ d'application des catégories limitées de travailleurs lorsque son application à ces catégories soulèverait des problèmes spéciaux. En outre, bien qu'on maintienne le principe en vertu duquel la femme doit jouir de six semaines de congé de maternité après l'accouchement, il peut en être convenu autrement par le gouvernement et les organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs au niveau national.

L'interdiction absolue de licenciement pendant un congé maternité qui figurait dans la précédente convention est remplacée par un régime de protection de l'emploi beaucoup plus équilibré. Je rappellerai que la convention n° 103 ne protège pas la travailleuse contre un éventuel licenciement pendant sa grossesse ni avant le début du congé de maternité ni après le congé de maternité. La convention n° 103, par exemple, ne protège pas la travailleuse si l'employeur la met à pied avant le début du congé de maternité à cause de sa grossesse ou s'il la licencie après le congé de maternité parce qu'elle allaite son enfant. Autrement dit, la convention actuelle ne protège pas la travailleuse dans les périodes où la protection est la plus nécessaire et n'empêche pas sa mise à pied pour des motifs directement rattachés à la maternité en dehors de la période du congé de maternité. En revanche, la nouvelle convention améliore en général la protection de l'emploi parce qu'elle allonge la période pendant laquelle la travailleuse bénéficie de la protection et, en même temps, elle interdit sa mise à pied pour des motifs directement liés à la maternité.

Le régime de financement des prestations pendant le congé de maternité permet aux employeurs d'être personnellement responsables du paiement de ces prestations dans trois types de situation, ce qui facilitera la ratification de la convention par les pays où la sécurité sociale obligatoire est peu développée.

La deuxième raison pour laquelle le gouvernement portugais est favorable à l'adoption de la nouvelle convention est l'amélioration générale de la protection de la maternité, tant pour la mère que l'enfant. Outre la protection de l'emploi que je viens d'évoquer, la convention améliore la protection de la maternité à différents égards, et j'en aborderai quatre.

Premièrement, le principe selon lequel la travailleuse enceinte ou qui allaite son enfant a le droit de travailler dans des conditions qui ne portent pas préjudice à sa santé ou à celle de son enfant.

La délégation portugaise estime qu'il s'agit d'un aspect essentiel de la protection de la mère et de l'enfant et remercie tous les gouvernements et les représentants des différents partenaires sociaux qui ont accepté que ce point figure dans la convention.

Comme vous le savez déjà, il est prévu que le congé de maternité passe de douze à quatorze semaines; et que les travailleuses qui allaitent leur enfant bénéficie d'une protection renforcée. En effet, elles auront droit à plusieurs pauses ou à une réduction journalière de la durée du travail qui devront être comptées comme temps de travail et rémunérées en conséquence.

Enfin, la maternité ne doit pas être une source de discrimination. Il est donc interdit d'exiger d'une femme candidate à un poste qu'elle se soumette à un test de grossesse ou qu'elle présente un certificat attestant qu'elle n'est pas enceinte, sauf dans les cas particuliers tout à fait justifiés prévus par la législation nationale.

Un grand nombre des prestations en espèces assurées pendant le congé de maternité sont maintenues. Une question essentielle et délicate pour les gouvernements et pour les travailleurs s'est présentée, qui touche au principe selon lequel le montant de ces prestations ne doit pas être inférieur aux deux tiers du gain antérieur de la femme. Ce point n'a pas satisfait certains délégués, qui auraient aimé que cette prestation soit supérieure ou inférieure selon le cas. La règle des deux tiers du gain antérieur est finalement une solution intermédiaire et raisonnable qui évite de revenir sur les acquis, facilitera sans doute l'adoption de la convention et se traduira par un nombre plus élevé de ratifications.

Il est vrai par ailleurs que, pour faciliter la ratification de la convention, une certaine souplesse est prévue dans le cas des pays dont l'économie ou le système de sécurité sociale est insuffisamment développé, qui sont autorisés à verser des prestations de maternité inférieures aux deux tiers du gain antérieur de la femme.

La nouvelle convention répond donc au souci qui avait déjà présidé à la précédente révision de la convention n° 103. Elle améliore la protection de la maternité tant pour la mère que pour l'enfant et prend en considération les progrès qui ont eu lieu dans un certain nombre de pays. En outre, elle permet une souplesse suffisante au niveau national de façon à rendre possible la ratification de cet instrument par un nombre aussi élevé que possible de pays.

Cependant, ce texte n'est pas un simple recueil de principes et de conseils, qui n'aurait aucune influence concrète sur la protection de la maternité au niveau national.

Le Portugal votera donc en faveur de l'adoption de la convention et de la recommandation et, avec les partenaires sociaux nationaux, il proposera la convention ainsi révisée au Parlement pour ratification.

Original allemand: M. WILLERS (conseiller technique et délégué gouvernemental suppléant, Allemagne) — En fait, je n'avais pas prévu de prendre la parole puisque l'Allemagne sera vraisemblablement en mesure de ratifier la nouvelle convention, même s'il reste encore certains points à clarifier à l'article 8.1.

Les interventions des orateurs précédents m'ont toutefois contraint de revenir sur mon intention initiale de ne pas prendre la parole, notamment les intervenants qui trouvent que cette convention est trop compliquée, qu'elle entre trop dans le détail et qu'elle irait, selon eux, à l'encontre des efforts en cours à l'OIT pour réformer la politique normative.

Peut-être n'ont-ils pas entièrement tort, mais ce serait envoyer un signal erroné que de choisir précisément la protection de la maternité sur le lieu de travail pour véhiculer un tel message. Ce sujet est trop important pour qu'on le tienne comme prétexte pour exprimer une position de principe concernant la politique normative. A cet égard, je ne peux qu'appuyer ce qu'ont dit les représentants de la Nouvelle-Zélande et de la France.

C'est la raison pour laquelle je lance un appel à tous les délégués. Participez au vote et votez en faveur de la convention. J'adresse cet appel — tout comme mon collègue néerlandais — tout particulièrement aux représentants des gouvernements qui hésitent peut-être quant à l'opportunité de ratifier cette convention. L'adoption d'une convention par la Conférence internationale du Travail ne saurait être interprétée comme entraînant l'obligation de procéder à une ratification aussi rapide que possible au niveau des Etats respectifs.

Les délégués qui craignent que leurs gouvernements se sentiraient mis sous pression et obligés de procéder à une ratification immédiate peuvent assortir leur vote ici à Genève d'une déclaration expliquant leur motivation. Saisissez l'occasion qui vous est offerte et votez demain en faveur de la convention,

M. PARROT (délégué des travailleurs, Canada) — J'aimerais féliciter la commission qui a réalisé un magnifique travail sur cette question très importante.

J'aimerais traiter de quelques points qui ont fait l'objet d'interventions précédentes. Le premier est extrêmement important. On a entendu l'argument selon lequel cette convention serait contraire aux lois et pratiques qui existent dans certains pays et que, par conséquent, elle deviendrait non ratifiable.

La question qui se pose est la suivante: à quoi servirait l'OIT si l'on ne devait adopter que des normes qui correspondent aux lois et pratiques en vigueur dans tous les pays? On ne ferait que maintenir le statu quo. Si certains pays n'avaient pas de normes, on n'adopterait aucun instrument de manière à ne pas aller à l'encontre de la pratique nationale de ces pays.

C'est un argument dangereux puisqu'il garantit que certains pays qui se disent développés n'adopteront jamais de convention parce qu'elle serait contraire à leurs lois qu'ils ne sont pas prêts à amender. Le but de l'adoption de nouvelles normes est que les pays examinent leur législation et fassent les amendements nécessaires afin de pouvoir ratifier les nouveaux instruments.

Le deuxième point que j'aimerais souligner concerne l'argument selon lequel nous sommes actuellement dans une révision du système normatif du Bureau international du Travail. Ce que j'aimerais dire ici est que nous n'avons pas encore réellement débuté cette révision puisque, lors du dernier Conseil d'administration, le groupe des travailleurs a clairement affirmé qu'avant de procéder réellement à cette révision, il fallait certaines garanties pour qu'il n'y ait pas de révision à la baisse, c'est-à-dire de révision ayant pour objectif de diminuer les normes.

Le troisième point que je veux soulever, c'est qu'il ne s'agit pas d'une convention technique. La convention que nous avons devant nous pour adoption est une convention qui reconnaît qu'il y a une différence entre les hommes et les femmes au travail. C'est une convention qui reconnaît que les femmes sont désavantagées par rapport aux hommes dans leur travail. Elles le sont pour une raison évidemment hors du contrôle des hommes. Ce n'est pas nous qui portons les enfants, ce sont les femmes. On devrait pouvoir donner aux femmes les mêmes avantages qu'aux hommes, avec une convention qui leur garantit la protection contre le licenciement.

C'est une convention qui garantit que les femmes ne perdront pas leurs avantages simplement parce qu'elles doivent s'absenter pendant une certaine période. Je pense que c'est important de la part d'une Organisation comme la nôtre qui tente d'encourager la participation des femmes non seulement au travail, mais aussi dans la société. Si les femmes n'ont plus leurs avantages, plus leurs salaires, ni leur protection, elles n'auront pas la même possibilité que les hommes de participer à la société.

Pour ces raisons, on ne doit pas réviser cette convention sur la base du système normatif. Malgré ce que disent certains, il ne suffit pas de la rendre simplement ratifiable. Il faut considérer cette ratification comme la reconnaissance qu'il faut accorder les mêmes avantages aux femmes qu'aux hommes au travail, sans leur enlever les bénéfices auxquels elles ont droit ni les avantages qui leur permettent de participer aux prises de décisions et de faire connaître leurs opinions. Si cela n'apparaît pas clairement, il est évident que nous allons régresser et, au lieu d'encourager les femmes à participer, on va retourner en arrière au temps où les femmes restaient à la maison. C'est dépassé.

La convention n° 103 a cinquante ans.  Les choses ont changé en cinquante ans. Les femmes, maintenant, sont au travail. Elles doivent participer économiquement de façon à pouvoir élever leur famille. On sait que de plus en plus fréquemment, l'homme et la femme doivent travailler. C'est pourquoi nous devons fournir d'autres services afin que les enfants puissent être éduqués et que les femmes aient les revenus pour pouvoir les élever.

La société a changé. Il faut que nous changions également. Nous avons l'occasion de voter pour une convention qui va permettre d'affirmer que nous reconnaissons le changement. A tous les gouvernements qui nous disent que la révision du système normatif est une révision nécessaire pour avoir des normes modernes, je demande: qu'y a-t-il de plus moderne que de s'assurer que les femmes d'aujourd'hui vont être reconnues comme des femmes d'aujourd'hui et non pas comme des femmes d'hier?

Original anglais: Mme NZOMO (conseillère technique gouvernementale, Kenya) — Je tiens à remercier le Président de m'avoir donné la possibilité de m'exprimer au nom des représentants des gouvernements africains qui appuient le projet de convention dont l'ensemble du texte nous a été présenté ce matin.

Il est très difficile de donner satisfaction aux divers intérêts représentés pendant cette plénière. Toutefois, je crois qu'il est nécessaire de parvenir à un compromis. L'une des questions qui a été soulevée concerne la prolongation du congé de maternité jusqu'à quatorze semaines au minimum. Une telle prolongation, de l'avis des gouvernements africains, était absolument nécessaire. Cette prolongation est bénéfique pour tous, y compris pour les employeurs. Une période de repos raisonnable pendant et après l'accouchement présente les avantages suivants: les femmes travaillent mieux si elles ont pu bien se reposer après l'accouchement et ont eu la possibilité d'allaiter leurs bébés. Cela est dû au fait que les enfants nourris au sein sont en bonne santé et les remboursements médicaux à la charge des employeurs sont moins importants si les enfants tombent moins souvent malades parce qu'ils ont été allaités correctement.

Une femme salariée a plus de chances de reprendre son travail sans difficulté si elle a eu la possibilité de bien se reposer au lieu de devoir fréquemment s'absenter pour s'occuper de ses enfants ou se soigner elle-même.

Nous estimons que le financement par les assurances sociales obligatoires constitue l'un des principaux obstacles à la ratification de la convention n° 103 pour la plupart des pays africains. Mais le nouvel instrument stipule qu'en plus des fonds de sécurité sociale prévus dans le projet de convention des fonds provenant des employeurs et des fonds publics pourront être utilisés pour financer les prestations de maternité. Je pense que cela milite en faveur des intérêts de la majorité des pays africains qui ne bénéficient pas d'un régime de sécurité sociale suffisamment étendu pour couvrir la protection de la maternité. Les gouvernements africains souscrivent donc pleinement au projet de convention sur la protection de la maternité. Pendant ce nouveau millénaire, d'autres sources de financement des prestations de maternité doivent être trouvées pour alléger le fardeau pesant sur les employeurs des pays africains. Nous pensons que la mise sur pied de fonds de sécurité sociale est un moyen. Nous espérons, d'autre part, que l'OIT mettra à notre disposition des services d'assistance technique.

Il a été suggéré que le projet de convention n'était pas favorable aux pays en développement, mais les normes de protection de la maternité dans certains de ces pays sont meilleures que celles proposées dans le projet de convention. Les pays africains, par conséquent, ne voient pas d'inconvénient à voter en faveur de la convention.

Les délibérations de la Commission de la protection de la maternité ont été franches et constructives. Nous avons pu adopter le projet d'instrument. Celui-ci prévoit une certaine souplesse d'application.

Je vous invite instamment à voter en faveur de ce projet de convention qui répond directement aux intérêts des pays et de l'humanité en général. La protection de la maternité est une nécessité. Ce n'est pas un luxe. Je crois que permettre aux femmes de bénéficier de deux semaines supplémentaires pour se remettre des difficultés de la grossesse, de l'accouchement ainsi que des problèmes postnataux ce n'est pas trop demander.

Je vous demanderai donc de voter en toute sagesse en tant que mère, en tant que père, en tant qu'individu en faveur de la dignité de la femme et de l'enfant au XXIe siècle.

Original arabe: Mme. ABOULNAGA (déléguée gouvernementale, Egypte) — La délégation égyptienne souhaite remercier tout d'abord la présidente de la Commission de la protection de la maternité, ainsi que les deux vice-présidentes pour les employeurs et les travailleurs, pour tous les efforts qu'elles ont déployés au cours du débat de cette commission et également pour la bonne gestion des travaux de cette commission. Elle souhaite également remercier tous les membres du bureau, ainsi que le rapporteur.

La délégation de l'Egypte se félicite de la nouvelle convention; elle en soutient les grands principes et le contenu. Le gouvernement de l'Egypte ainsi que les partenaires sociaux attachent une grande importance aux différentes dispositions qui ont pour objectif de promouvoir la protection des femmes au travail, en particulier celles portant sur la protection de la santé et la protection sociale des femmes, ainsi que sur les prestations économiques qui leur permettront d'assumer leurs responsabilités, à la fois vis-à-vis de leur famille, et vis-à-vis de la société.

Je voudrais affirmer, à ce propos, que la législation nationale égyptienne contient un certain nombre de dispositions qui accordent une protection plus grande encore que celle qui est contenue dans cette convention. Mais la législation nationale égyptienne actuelle stipule que le congé de maternité est de douze semaines; ainsi nous ne pouvons accepter le paragraphe, dans le projet de convention, qui prévoit que ce congé de maternité sera porté à quatorze semaines.

D'autre part, la délégation de l'Egypte souhaite souligner que le gouvernement égyptien prépare une nouvelle législation qui permettra de répondre aux différents changements sociaux et économiques et qui sera adaptée à l'évolution de l'économie égyptienne.

Original anglais: M. NGUYEN (délégué gouvernemental, Ambassadeur, Représentant permanent, Viet Nam) — Je n'avais pas prévu de prendre la parole mais, après avoir entendu les divers points de vue exposés ici ce matin, j'ai décidé de joindre ma voix à celles des orateurs qui se sont exprimés en faveur de la convention sur la protection de la maternité qui nous est proposée.

Les orateurs précédents ont déjà mis en lumière un certain nombre d'améliorations que contient ce texte. Par conséquent, je ne veux pas répéter ce qui a déjà été dit. Je me bornerai à insister sur deux éléments nouveaux, à savoir deux aspects de la protection de la maternité que l'on trouve dans le texte proposé, mais qui ne figuraient pas du tout dans l'ancienne convention no 103. Il s'agit de la protection de la santé et de la non-discrimination.

Je voudrais mettre ces deux éléments en exergue non seulement parce que ce sont des éléments nouveaux très importants, mais aussi parce que les trois groupes de la Commission s'y sont ralliés. Il était nécessaire, les gouvernements en étaient conscients ainsi que les partenaires sociaux, d'intégrer ces deux éléments indispensables de la protection de la maternité que sont la non-discrimination et la protection de la santé dans la nouvelle convention. Ces éléments étaient absents de l'ancien instrument.

Je voudrais également dire à la Conférence que des efforts considérables ont été faits par cette commission tout au long de ses travaux afin de concilier les points de vue opposés. L'année dernière encore, les points de vue des différents groupes étaient très divergents.

Beaucoup de questions délicates avaient été renvoyées à cette année.

Au cours de ces deux dernières semaines, aucun effort n'a été ménagé pour trouver une solution équilibrée qui tienne compte du point de vue de toutes les parties.
Il est évident que les dispositions contenues dans cet instrument ne recueilleront pas toutes l'assentiment des différentes délégations et que les pays ne seront pas tous en mesure de ratifier ledit instrument dans un proche avenir. Mais nous voudrions tout de même vous inciter et vous encourager à voter en faveur de son adoption.

Il faut faire en sorte que les améliorations qui ne soulèvent aucune objection ne soient pas perdues. Nous devons veiller à améliorer la protection de la maternité pour le plus grand nombre de femmes salariées afin qu'elles puissent bénéficier de la protection de la santé, des prestations, des congés, de la sécurité de l'emploi et du droit à travailler sans être victimes de discrimination. C'est pour ces raisons que ma délégation vous encourage à voter demain en faveur de ce texte.

Les travailleuses comptent sur vous.

Original espagnol: Le Président — Nous allons à présent procéder à l'adoption du rapport proprement dit, c'est-à-dire du résumé des discussions à la commission figurant aux paragraphes 1 à 704. S'il n'y a pas d'objections, puis-je considérer que le rapport de la Commission de la protection de la maternité est adopté?

(Le rapport, paragraphes 1 à 704, est adopté.)

Projet de convention concernant la révision de la convention (révisée) sur la protection de la maternité, 1952

Original espagnol: Le PRÉSIDENT — Nous allons maintenant passer à l'adoption concernant la révision de la convention (révisée) du projet de convention sur la protection de la maternité, 1952. Puis-je considérer que la convention est adoptée dans son ensemble?

(La convention est adoptée dans son ensemble.)

Conformément aux dispositions du paragraphe 7 de l'article 40 du Règlement de la Conférence, les dispositions du projet de convention concernant la révision de la convention (révisée) sur la protection de la maternité, 1952, seront soumises au Comité de rédaction de la Conférence pour la préparation d'un texte définitif.

Projet de recommandation concernant la révision de la recommandation sur la protection de la maternité, 1952

Original espagnol: Le PRÉSIDENT — Nous allons maintenant procéder à l'adoption du projet de recommandation concernant la révision de la recommandation sur la protection de la maternité, 1952.

Puis-je considérer que la recommandation est adoptée dans son ensemble?

(La recommandation est adoptée dans son ensemble )

Conformément aux dispositions du paragraphe 7 de l'article 40 du Règlement de la Conférence, les dispositions du projet de recommandation concernant la révision de la recommandation sur la protection de la maternité, 1952, seront soumises au Comité de rédaction de la Conférence pour la préparation d'un texte définitif.

Nous avons ainsi terminé l'examen du rapport de la Commission de la protection de la maternité ainsi que du projet de convention et du projet de recommandation que nous a présentés cette commission.

Il me reste à féliciter le bureau et les membres de la commission pour l'excellent travail qu'ils ont accompli.

Vote final par appel nominal sur la convention concernant la révision de la convention (révisée) sur la protection de la maternité, 1952.

Original espagnol: Le PRÉSIDENT — Nous allons à présent procéder au vote final par appel nominal sur la convention concernant la révision de la convention (révisée) sur la protection de la maternité, 1952, dont le texte figure dans le Compte rendu provisoire no 20A.

(Il est procédé à un vote par appel nominal.)     Vote par appel nominal

(Les résultats détaillés du vote sont présentés à la fin du présent Compte rendu provisoire.)

Original espagnol: Le PRÉSIDENT — M. Thüsing a soulevé une question d'ordre.

Original allemand: M. THÜSING (délégué des employeurs, Allemagne) — Me référant au Règlement, je souhaite appeler votre attention sur le fait que le vote dure depuis plus de huit minutes. J'aimerais donc que l'on procède maintenant à la clôture du vote. Tous les délégués ayant voté, je déclare le vote clos.

Le résultat du vote est le suivant: 304 voix pour, 22 voix contre, avec 116 abstentions. Le quorum étant de 267 et la majorité des deux tiers de 218, la convention concernant la révision de la convention (révisée) sur la protection de la maternité, 1952, est adoptée.

(La convention est adoptée.)

Certains délégués souhaitent présenter une explication de vote. Je donne la parole à MmeNiven, déléguée gouvernementale, Royaume-Uni.

Original anglais: Mme NIVEN (déléguée gouvernementale, Royaume-Uni) — Le Royaume-Uni aimerait fournir une explication concernant votre vote.

Hier, le rapporteur, le délégué gouvernemental de Chypre, a indiqué quelles étaient les prestations accrues conférées par cette convention révisée.

Le gouvernement du Royaume-Uni a pleinement souscrit à l'objectif consistant à assurer une protection adéquate et universelle de la maternité. Il ne s'agit pas uniquement de droits individuels, même si c'est quelque chose qui a une importance vitale. Si les mères ont des congés et des prestations de maternité décents, elles ont plus de chances de revenir au travail. C'est une bonne chose, pour les entreprises car elles peuvent alors conserver un personnel qualifié, et l'investissement dans leur formation n'est pas perdu.

Le gouvernement du Royaume-Uni a décidé de créer un fonds pour permettre aux employeurs de voir comment des politiques de l'emploi prenant en compte une vie professionnelle équilibrée aboutissant à des entreprises efficaces souples et rentables. La législation actuelle du Royaume-Uni, toutefois, n'est pas entièrement conforme aux dispositions de la convention. Le Royaume-Uni n'a donc pas pu, pour l'instant, ratifier cette convention.

Le 9 mai, mon gouvernement a annoncé qu'au niveau ministériel, nous allions réexaminer de près les questions de la maternité et du congé parental. Mon gouvernement attachera une grande importance aux dispositions de cette convention durant ce réexamen. Toutefois, mon gouvernement n'a pas voulu préjuger des résultats de cet examen en rapport avec une éventuelle ratification future de cette convention. C'est la raison pour laquelle j'ai eu pour instruction de m'abstenir lors du vote d'aujourd'hui.

Original anglais: M. DREVER (délégué gouvernemental, Australie) — L'Australie a voté en faveur de l'adoption de la convention révisée sur la protection de la maternité. Dans le même temps, elle tient à dire en des termes très fermes combien elle est déçue de la forme qu'a prise cet instrument révisé.

La Conférence avait reçu pour mandat de réviser la convention sur la protection de la maternité car en 48 ans seul un petit nombre d'Etats avaient pu ratifier l'instrument initial.

Pendant la discussion, on s'est rendu compte que la convention n° 103 était trop prescriptive et trop détaillée et qu'elle ne tenait pas compte des différents régimes nationaux ni des différences de développement économique et social. La nouvelle convention est tout aussi prescriptive que la précédente et certaines normes dans plusieurs domaines sont encore plus rigoureuses. Je pense que telle qu'elle est formulée la nouvelle convention ne suscitera pas un plus grand nombre de ratifications. Nous craignons que même plusieurs des pays qui avaient ratifié la convention n° 103 ne seront pas en mesure de ratifier la nouvelle convention.

D'autre part, il faut rappeler que cette convention risque de poser des problèmes de ratification aux pays dans lesquels la protection de la maternité est plus élevée que ce qui est prévu dans le nouvel instrument. Ce n'est pas un résultat positif pour les femmes. De l'avis de l'Australie, la Convention ne permettra pas le renforcement de la protection de la maternité qui était l'objectif premier de la révision. Ce n'est pas non plus un résultat positif pour l'OIT et les Etats Membres. Au cours des dix dernières années, les conventions adoptées par l'OIT n'ont pas recueilli beaucoup de ratifications à l'exception de la convention no 182 sur l'élimination des pires formes de travail des enfants, 1999.

De tels résultats ne font que conforter le point de vue déjà exprimé par l'Australie antérieurement, à savoir qu'il est nécessaire de refondre entièrement le système d'établissement des normes. Cela est urgent. L'Australie a voté en faveur de la convention car elle ne veut pas empêcher les pays qui sont à même de ratifier cet instrument de le faire. Elle regrette toutefois qu'une norme plus constructive et plus souple n'ait pas pu être adoptée.

Original espagnol: M. SAPPIA (délégué gouvernemental, Argentine) — Je fais cette intervention au nom des délégations gouvernementales suivantes: Chili, Nicaragua, République dominicaine, Uruguay, Guatemala, Salvador et Argentine.

Nous souhaitons expliquer notre vote contre la révision de la convention (nº 103) sur la protection de la maternité (révisée), 1952. Contrairement aux apparences, notre vote confirme notre position favorable au renforcement de la politique normative de l'OIT.

L'analyse du projet de révision de la convention n° 103 sur la protection de la maternité nous a convaincus que l'examen de celle-ci aurait dû tenir compte des législations nationales comme des institutions désignées par la convention n° 103 et par la convention no 3, adoptée 1919.

Nous sommes venus à la conclusion qu'en dépit de certains progrès, comme par exemple l'extension du congé maternité de douze à quatorze semaines, on constate un recul en ce qui concerne la possibilité de licencier des travailleuses se trouvant en période de grossesse ou en période postnatale. Plus que la durée du congé, c'est la sécurité quant à la protection qui importe vraiment, et nous estimons que c'est cette sécurité qui est affaiblie par le projet de convention.

De même, nous sommes préoccupés quant à la responsabilité sociale vis-à-vis de la détérioration du financement par les fonds publics, dans la mesure où l'augmentation du coût relatif de l'emploi des femmes, qui serait induite par le projet, risque de devenir une cause de discrimination, inexistante aujourd'hui, à l'encontre des femmes.

Tout ce qui précède est contraire à nos politiques publiques générales qui visent à faciliter l'accès et le maintien des femmes à des emplois décents. Nous défendons une position sans équivoque en faveur de la protection des mères qui travaillent, en particulier  en période de grossesse et d'allaitement, de la garantie d'une protection sociale de la maternité et de la promotion de l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. Telles sont les raisons qui justifient notre vote.

Original espagnol: M. PENROD (délégué gouvernemental, Costa Rica) — Je me permets de prendre la parole pour justifier la position prise par mon gouvernement sur ce sujet. Le Costa Rica a pris la décision de s'abstenir après avoir réalisé une analyse générale et comparée entre la protection prévue dans la convention n° 103 et celle de la convention révisée approuvée aujourd'hui.

Nous nous sommes aperçus que, dans un certain nombre de secteurs, la protection offerte par la nouvelle convention était en recul, Nous savons parfaitement que la Constitution de l'OIT nous permet d'adopter des instruments qui peuvent être en deçà de la législation nationale, sans entrave à leur application.

Le Costa Rica n'avait pas ratifié la convention n° 103 parce, même si nous sommes un pays en développement, notre législation nationale octroie une protection supérieure à celle qui est prévue dans la convention n° 103. La nouvelle convention ne changerait rien par rapport à notre législation nationale et, par conséquent, cet instrument ne constituerait pas vraiment une amélioration de fond pour notre société.

Nous comprenons que la négociation qui a eu lieu pour introduire davantage de souplesse et pour rationaliser l'application de cette convention révisée avait pour but de permettre une plus grande couverture de la protection de la maternité dans le monde entier. Mais nous considérons que, malheureusement, cet effort a abouti à un assouplissement qui va, à notre avis, bien au-delà de ce que nous souhaitons en matière de protection sociale, ce qui explique notre abstention.

M. BRUPBACHER (conseiller technique et délégué gouvernemental suppléant, Suisse) — La Suisse s'est abstenue lors du vote. Mon pays a pour tradition de ratifier les conventions internationales du travail sur lesquelles elle exprime un vote positif en plénière. La pratique suisse de ratification des conventions de l'OIT veut que le gouvernement propose la ratification des conventions lorsque celles-ci sont en accord avec le droit positif suisse.

La convention révisée ne correspond pas au droit positif suisse, puisque le peuple suisse a rejeté aux votations populaires du 13 juin 1999 le projet de loi fédérale sur l'assurance maternité. Depuis lors, le Conseil fédéral – le gouvernement suisse – a annoncé son intention de présenter au Parlement une solution en matière de protection de la maternité. Il pourra, le cas échéant, revoir sa position quant aux conventions internationales du travail pertinentes.

M. VANDAMME (délégué gouvernemental, Belgique) — La Belgique se réjouit de l'adoption de cette convention en faveur de laquelle elle a voté.

En effet, l'adoption de ce texte nous donne quelques enseignements pour l'élaboration, pour l'avenir, de la politique normative.

Pour la Belgique, en effet, il est important que l'Organisation procède périodiquement à des révisions d'anciennes normes sur des sujets importants pour le monde du travail. La protection de la maternité en était bien un et son importance a été soulignée par les travaux à l'ONU et dans notre commission qui disposait de très bonnes compétences.

L'objectif de la protection de la femme au travail n'est pas moins important aujourd'hui qu'hier. Nous étions unis sur cet objectif, mais nous l'étions peut-être moins sur la méthode. Plusieurs auraient voulu faire de ces travaux un test d'un débat abstrait sur l'avenir de la politique normative. Heureusement, la Conférence a pu adopter cette convention, ce qui prouve sa capacité.

La Belgique pourra ratifier la convention dans un certain temps moyennant des adaptations de sa législation. Mais elle ne voudra sans doute pas dépendre d'une directive européenne qui est d'un niveau inférieur sur certains points à la convention qui vient d'être adoptée.

En ce qui concerne les leçons à retenir pour l'avenir de l'activité normative, nous pensons qu'il y a plusieurs enseignements à tirer. Premièrement, la Conférence a montré son intérêt non pas pour des travaux abstraits, mais pour des propositions concrètes du Bureau sur des thèmes importants. Nous avions un thème important avec la protection de la maternité.

D'autre part, il est inévitable, dans un texte qui a une portée juridique, de proposer une solution à des problèmes réels. Enfin, nous pensons qu'une certaine flexibilité dans le texte permettra tout de même aux Etats hésitants d'améliorer la protection dans leur pays s'il y a une volonté politique. Il est important en effet qu'il y ait la volonté politique de ratifier. L'assistance technique du BIT et l'expérience des pays qui ont des législations en la matière devraient encourager ces efforts.

Pour l'avenir, je crois qu'il serait important pour le Bureau de continuer à choisir des sujets qui ont une importance concrète incontestable. Il faudra que le Bureau fasse des propositions de modification de texte et qu'il ne s'attarde pas dans des débats abstraits.

Il faudra également se soucier du nombre des ratifications. A ce sujet, je n'ose pas croire qu'il n'y aura pas plus de ratifications de cet instrument dans 50 ans qu'il n'y en avait pour la convention précédente, parce que nous ne croyons pas que le renvoi systématique à des clauses de flexibilité nationale soit aussi efficace, sur le plan politique, que des droits économiques et sociaux dont la garantie peut être assurée au fur et à mesure du développement des pays auquel certainement les femmes du monde entier contribuent grandement.

Original anglais: M. MELENDEZ (délégué des travailleurs, Belize) — Au nom de la délégation tripartite du Belize, nous avons voté en faveur de la protection de la maternité.

Le Belize a ratifié en mars dernier la convention (nº 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976. Nous estimons qu'il faut dorénavant viser la coexistence pacifique et adopter l'approche dite de «la voie la plus large» pour ce qui touche au développement économique.

Après avoir examiné la proposition de révision de la convention sur la protection de la maternité, nous avons acquis la certitude que le nouveau texte allait pouvoir être appliqué dans notre pays, notamment grâce à la souplesse introduite par les clauses faisant référence à la pratique ou à la législation en vigueur dans les Etats Membres.

Nous croyons au dialogue social. Le Belize a demandé à l'OIT de l'aider à appliquer les normes et à amener leur suivi de façon appropriée. Comme vous le savez, le Belize compte parmi les vingt-quatre pays qui ont ratifié les huit conventions fondamentales de l'OIT, et notamment la convention (nº 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999.

Nous sommes très fiers de participer à cette Conférence, certains que la convention sur la protection de la maternité révisée permettra aux femmes de notre pays de bénéficier d'un plus grand nombre de droits et d'avantages. Nous autres, qui sommes des partenaires au dialogue social et représentons un pays pacifique et démocratique situé au cœur de l'Amérique centrale et du bassin des Caraïbes, savons que nous pouvons être le pont qui fera le lien entre ces deux régions.

Soucieux de faire le bon choix, l'organe tripartite qui a voté aujourd'hui, s'exprimant pour la première fois en tant que tel, a mené toutes les consultations possibles avec le pays. En tant qu'organe tripartite, nous votons donc en faveur de cette convention sur la protection de la maternité.

Vote final par appel nominal sur la recommandation concernant la révision de la recommandation sur la protection de la maternité, 1952

Original espagnol: LE PRÉSIDENT — Nous passons maintenant au vote par appel nominal sur la recommandation concernant la révision de la recommandation sur la protection de la maternité, 1952, dont vous trouvez le texte dans le Compte rendu provisoire no 20 B.

(Il est procédé à un vote final par appel nominal.)     Vote par appel nominal

(Les résultats détaillés du vote sont présentés à la fin du présent Compte rendu provisoire.)

Original espagnol: Le PRESIDENT — Le résultat du vote est le suivant: 315 voix pour, 16 voix contre, avec 108 abstentions. Le quorum étant de 267 voix et la majorité des deux tiers de 221, la recommandation est adoptée.

(La recommandation est adoptée.)

Mise à jour par HK. Approuvée par NdW. Dernière modification: 13 June 2000.