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Orientations sur la législation du travail
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Introduction
Chapter I. Législation du travail dans le monde contemporain
Chapter II. Dispositions fondamentales de la législation du travail: La liberte syndicale
Chapter III. Dispositions fondamentales de la législation du travail: La reconnaissance effective du droit de négocier des conventions collectives
Chapter IV. Dispositions fondamentales de la législation du travail: Règlement des conflits collectifs du travail
Chapter V. Dispositions fondamentales de la législation du travail: Le droit de greve 
Chapter VI. Dispositions fondamentales de la législation du travail: Elimination de toutes les formes de travail forcé ou obligatoire
Chapter VII. Dispositions fondamentales de la législation du travail: L'elimination de la discrimination dans l'emploi et la profession
Chapter VIII. Dispositions fondamentales de la législation du travail: Abolition effective du travail des enfants
Chapter IX. Les methodes de redaction
Chapter X. Regles de redaction

Version avec cadres

CHAPITRE III
Dispositions fondamentales de la législation du travail:
La reconnaissance effective du droit de négocier des conventions collectives

Introduction

La négociation collective, c’est à dire la négociation et la conclusion de convention collective, donne aux travailleurs et aux employeurs la capacité et l’opportunité de déterminer leurs conditions de travail et d’emploi. La négociation collective permet, aux organisations de travailleurs et d’employeurs librement constituées, d’exercer pleinement leur liberté syndicale et de fonder un véritable système de relations professionnelles. La négociation collective a prouvé au fil du temps, sa valeur comme instrument démocratique pour régler les différends et éviter le recours à des formes plus dures d’action syndicale, comme les grèves. En favorisant le développement de la paix sociale et de la coopération au sein du marché du travail, elle le rend efficace et elle s’impose comme un pilier des économies développées et des sociétés démocratique avancées.

L’accent mis, dans les textes fondamentaux de l’OIT, sur la négociation collective mais aussi la place prépondérante qu’elle occupe dans la loi et dans la pratique de la majorité des Etats membres, témoignent de son importance dans le développement d’une économie moderne. La reconnaissance effective du principe donne ainsi aux organisations de travailleurs, la capacité de négocier avec les employeurs, au nom de leurs membres, de meilleures conditions de travail et d’emploi que celles qu’auraient pu négocier un travailleur seul.

La négociation collective permet de rétablir l’équilibre entre les pouvoirs de négociation du travailleur seul face à l’employeur, et la convention collective une fois négociée remplace les conditions de travail établies par les contrats de travail individuels. Les employeurs peuvent eux espérer améliorer la productivité, et compter sur une plus grande loyauté de la part de travailleurs plus motivés et plus compétents, bénéficiant de meilleures conditions de travail.

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La protection internationale et la promotion de la négociation collective

La promotion de la négociation collective est un objectif primordial pour l’OIT.1 Comme le reconnaît la Déclaration de Philadelphie, l’OIT a "l’obligation solennelle… de seconder la mise en œuvre, parmi les différentes nations du monde, de programmes propres à réaliser… la reconnaissance effective du droit de négociation collective et la coopération des employeurs et de la main d’œuvre pour l’amélioration continue de l’organisation de la production, ainsi que la collaboration des travailleurs et des employeurs à l’élaboration et à l’application de la politique sociale et économique …".2

L'importance de la négociation collective a d’ailleurs été récemment réaffirmée par la Déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail de1998, qui reconnaît aux Etats membres, qu'ils aient ou non ratifié les conventions concernées, l’obligation, du seul fait de leur appartenance à l’OIT

de respecter, promouvoir et réaliser, de bonne foi et conformément à la Constitution, les principes concernant les droits fondamentaux notamment la reconnaissance effective du droit de négociation collective (paragraphe 2 (a)).

Le droit de négocier des conventions collectives est reconnu et protégé par plusieurs conventions et recommandations de l’OIT, en particulier la convention (n° 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949,3 et la convention (n°154) sur la négociation collective, 1981.4

Le droit de s'engager dans la négociation de conventions collectives a également été reconnu par plusieurs textes internationaux importants n'émanant pas de l’OIT, comme la Charte Interaméricaine des garanties sociales (1948), la Charte sociale européenne (1961) et la Charte communautaire des droits sociaux des travailleurs (1989).

L'importance donnée à la négociation des conventions collectives dans ces documents internationaux officiels sur les droits de l'homme fondamentaux, mais aussi dans la loi et les usages d'un grand nombre d'Etats, montre bien l'accent mis par les politiques sociales nationales et internationales sur le principe suivant: les travailleurs, à travers leur droit collectif de se syndiquer pour défendre leurs intérêts, doivent avoir la possibilité d'user de leur pouvoir collectif de négocier avec leurs employeurs et au bénéfice de leurs membres, de meilleures conditions d'emploi, que ce qui résulterait d'une négociation individuelle, c'est-à-dire conduite par chaque ouvrier. C'est donc un moyen de chercher à surmonter la puissance de négociation inégale des ouvriers pris individuellement, face à leur employeur, dans la discussion des contrats de travail individuels, que d'accorder aux organisations ouvrières le droit de conclure des conventions collectives qui se substituent aux contrats individuels. En contrepartie, les employeurs peuvent espérer une amélioration de la productivité, puisqu'une main-d'œuvre accrue se voit accorder de meilleures conditions de travail, en ayant le sentiment de se voir reconnaître la capacité de contribuer à fixer ces conditions.

Les obligations établies dans ces textes doivent faire face au développement d’une négociation collective de plus en plus soumise aux pressions économiques et sociales.5

Le principal objectif d’une politique nationale dans ce domaine devrait être de promouvoir et d'encourager la négociation libre et volontaire de conventions collectives, qui laissent aux parties la plus grande autonomie possible, tout en établissant un cadre légal et administratif qui puisse faciliter la négociation et la conclusion des conventions, si les partenaires décident d’y avoir recours.6

La convention (n° 98) demande aux Etats qui l’ont ratifié de prendre :

Des mesures appropriées aux conditions nationales …[et] si nécessaire… pour encourager et promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d’employeurs, d’une part, et les organisations de travailleurs, d’autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d’emploi. (article 4).

La convention (n°154) prévoit elle très clairement :

Des mesures adaptées aux circonstances nationales devront être prises en vue de promouvoir la négociation collective. (article 5(1)).

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Le rôle des gouvernements dans la promotion et la garantie du droit de négocier des conventions collectives

Si la législation est l'un des principaux outils dont disposent les Etats membres pour mettre en œuvre ce droit, elle est souvent accompagnée par d’autres voies comme celle des conventions collectives, des sentences arbitrales, des règlements administratifs, des décisions gouvernementales.7 Elle prévoit également souvent la création d’institutions administratives chargées de contrôler le respect des obligations légales, et la mise en place de services de conciliation et de médiation pour venir en aide aux parties.

Evaluer l’opportunité d’avoir recours à la loi pour promouvoir et développer la négociation collective, et faire le choix d’une législation très détaillée ou non, dépend étroitement du contexte de chaque pays, et notamment de l’existence ou non d’une tradition de négociation collective.8 Par exemple, un Etat peut décider qu’une procédure détaillée est la solution la plus appropriée pour favoriser la négociation collective. Dans d'autres cas, la seule référence dans une disposition légale, au droit des employeurs, et à leurs organisations, de négocier, avec les organisations de travailleurs, des conventions collectives suffira. Adapter le niveau de réglementation pour correspondre au mieux au contexte national est important. L’absence d’un cadre législatif, 9 aussi bien qu’une réglementation très détaillée peuvent, selon les pays, être un obstacle à l’établissement d’une véritable négociation collective entre les partenaires sociaux.10

Il paraît largement admis que l'obligation "de promouvoir...des négociations sur une base ouverte et volontariste, en vue de réglementer les modalités d'emploi par le biais des conventions collectives" implique un engagement de garantir aux parties prenantes le droit de participer activement à la négociation collective et, là où le contexte national l'exige, de prévoir un certain nombre d'obligations légales annexes, pour que ce droit puisse effectivement s'exercer; ces obligations pourront comporter, dans certaines conditions, la reconnaissance de l'autre partie comme interlocuteur de la négociation des conventions collectives considérées, et un engagement de négocier de bonne foi avec le partenaire.

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Les parties qui doivent bénéficier du droit de négocier des conventions collectives et le niveau auquel les négociations peuvent se dérouler11

Les parties à la négociation collective

Selon les conventions de l’OIT concernées, le droit de participer à la négociation des conventions collectives doit être reconnu à toutes les organisations de travailleurs, à tous les employeurs et à toutes les organisations d'employeurs,12 sauf lorsque certaines exclusions spécifiques sont autorisées, et sous réserve de limitations éventuelles, liées à la représentativité d’une organisation.

La législation ou la pratique nationales peuvent déterminées, aux termes des conventions (n° 98), (n° 151) et (n° 154), dans quelle mesure ces textes s’appliquent aux forces armées et à la police.13 En d'autres termes, les législations peuvent prévoir que ces garanties s'appliquent totalement, partiellement ou pas du tout, aux membres des forces armées, à la police et à leurs organisations représentatives.

De plus, la convention (n° 98) prévoit expressément qu'elle ne traite pas de la situation des fonctionnaires publics. Cela implique que même si cette catégorie de travailleurs bénéficie du droit de s’organiser, en vertu de la convention (n° 87), le fait que les droits prévus par la convention (n° 98) ne leurs soient pas garantis ne doit pas être interprété comme portant préjudice à leurs droits ou à leur statut.14

Les organes de contrôle de l’OIT ont cependant décidé que ces exclusions doivent s’appliquer strictement. Dans le cas des fonctionnaires, la Commission d'experts a établi une distinction entre, d’un coté les fonctionnaires qui sont au service de l'administration d'Etat et qui peuvent être exclus du champ d'application de la convention (n° 98), et les autres agents publics, de l’autre, qu’ils travaillent pour les entreprises publiques ou pour toute institution à caractère public, et qui doivent bénéficier des garanties de la convention (n° 98).15

Les exclusions qui concernent la police et les forces armées doivent également être d’application stricte. Par exemple, le Comité de la liberté syndicale a décidé que des techniciens de l'aviation civile travaillant sous l'autorité des forces armées ne pouvaient pas être considérés, au regard de la nature de leurs fonctions, comme appartenant à ces forces armées, et à ce titre ne pas bénéficier des garanties prévues par la convention (n° 98).16

Le droit des organisations de travailleurs de négocier des conventions collectives est reconnu dans la très plupart des pays, avec souvent les exclusions mentionnées ci-dessus. Les législations nationales décrivent parfois clairement les parties habilitées à négocier une convention collective, et le niveau auquel se déroule la négociation. Les parties à la négociation sont en général définies comme des organisations de travailleurs (ou syndicats) d’une part et, d’autre part, un employeur à titre individuel, plusieurs employeurs négociant ensemble, ou des organisations d'employeurs.

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Les différents niveaux de négociation collective

Concernant les différents niveaux de négociation des conventions collectives (comme l’établissement, l’entreprise ou la branche industrielle), aucun n’est considéré comme le plus efficace pour la négociation collective bipartite. Pour apprécier quel est le meilleur niveau (ou quels sont les meilleurs niveaux) de négociation, de nombreux facteurs sont à prendre en compte comme le pouvoir, les intérêts, les objectifs et les priorités des parties concernées, ainsi que la structure du mouvement syndical, des organisations d'employeurs et du système traditionnel de relations professionnelles17.

Le paragraphe 4 de la recommandation (n° 163) dispose que :

Des mesures adaptées aux circonstances nationales devraient, si nécessaire, être prises, pour que la négociation collective soit possible à quelque niveau que ce soit, notamment ceux de l'établissement, de l'entreprise, de la branche d'activité, de l'industrie ou aux niveaux régional ou national.

Une législation restreignant le choix des parties à cet égard serait contraire à la convention (n° 98)18 et au principe qui donne aux organisations de travailleurs et d'employeurs le droit, en toute liberté, d'organiser leur activité et de formuler leur programme d’action.19 Mais, la législation peut établir un cadre pour la négociation collective, auquel les parties pourront recourir si elles le souhaitent.

> Exemple

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Les procédures de reconnaissance et la représentativité

Aucune négociation collective ne peut exister si les parties concernées ne reconnaissent pas leur capacité respective à négocier.20  Une telle reconnaissance peut être volontaire, comme c’est le cas dans certains pays, où elle est fondée sur des accords ou une pratique clairement établis. Cependant, pour faire face au refus de certains employeurs de négocier avec les organisations syndicales représentatives, de nombreux pays ont adopté une législation qui oblige les employeurs à reconnaître un syndicat pour la négociation collective, sous certaines conditions.21 Dans une telle situation, savoir si l'employeur est tenu ou non de reconnaître un syndicat pour négocier dépend en général de la définition des critères de représentativité des organisations.

Une des dispositions le plus simple est celle qui détermine qui à la capacité de mener une négociation collective, afin de faciliter la reconnaissance mutuelle à négocier de chacun des partenaires.

> Exemple

Déterminer la "représentativité" d’une organisation peut être difficile, surtout dans les pays où existent une multitude de syndicats et où la négociation collective se déroule principalement au niveau de l'entreprise, mais c’est aussi le cas lorsqu’elle se tient au niveau de la branche industrielle et au niveau national.22

De nombreux pays ont adopté des législations qui établissent des procédures permettant de déterminer la représentativité des parties à la négociation collective. Il faut relever à ce propos que le concept d’organisations "les plus représentatives" est utilisée, conformément à l’article 3(5) de la Constitution de l’OIT, pour la représentation au sein de ses institutions. La Commission d’experts a cependant considéré qu’afin d’éviter toute possibilité de partialité ou d’abus, lorsque de telles procédures existent, elles doivent être fondées sur des critères objectifs préétablis.23

> Exemple

Enfin, concernant la représentativité des organisations, si de nombreuses législations fixent des critères quantitatifs (pour être le plus objectif possible), certaines établissent également d'autres critères comme celui de l'authenticité, de l'indépendance et de la couverture territoriale.

> Exemple

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La reconnaissance d’un agent de négociation exclusif

Dans certains pays, des dispositions législatives reconnaissent qu'un syndicat peut être le négociateur exclusif au sein d'une unité de négociation. Cela donne au syndicat concerné la qualité pour représenter l'ensemble des salariés de l’unité pour la négociation collective, à l'exclusion des autres syndicats, même s’ils ont des membres dans cette unité. De telles législations sont communes dans les pays où la négociation collective se situe principalement au niveau de l'entreprise ou de l'établissement, et où la pluralité syndicale rend la négociation complexe ou difficile. Les organes de contrôle de l’OIT ont décidé que lorsque des dispositions prévoit d’accréditer ou de désigner un agent de négociation exclusif, un certain nombre de garanties doivent être prévues dont :

  • la décision d’accréditation est prise par une autorité indépendante ;
  • l'organisation représentative doit être désignée par un vote majoritaire des salariés de l'unité concernée ;
  • une organisation qui n’a pas obtenu un nombre suffisant de voix lors de précédentes élections doit avoir le droit, après un délai déterminé, de solliciter une nouvelle élection ; et
  • le droit pour toute nouvelle organisation, autre que l'organisation déjà accréditée, de demander la tenue de nouvelles élections après un délai raisonnable.25

Pour respecter de telles garanties, les législations qui établissent la reconnaissance des agents de négociation exclusifs sont en général détaillées et contiennent des dispositions concernant :

  • les conditions requises pour l’accréditation d'une organisation comme agent négociateur exclusif ;
  • les critères et la procédure pour définir une unité de négociation ;
  • les critères et la procédure pour déterminer si une organisation est suffisamment représentative des travailleurs de l'unité de négociation pour être accréditée comme agent négociateur exclusif ;
  • les effets juridiques de l'accréditation ;
  • les conditions requises pour contester et demander la révocation du statut de négociateur exclusif d’une organisation (elles établissent en général une période d'au moins douze mois durant laquelle aucune contestation n’est possible, afin de garantir une certaine stabilité aux négociations), et la procédure à suivre dans ce cas ;
  • l'autorité responsable de la mise en œuvre de ces procédures (le plus souvent un organe administratif indépendant ou le ministre du travail) ;
  • l’obligation pour l’agent de négociation dûment accrédité de représenter tous les travailleurs de l'unité, qu'ils soient ou non des membres reconnus de l’organisation accréditée ;
  • le droit de faire appel de toutes les décisions, et pour toutes les violations des obligations légales établies.

> Exemple

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L’obligation pour l’agent de négociation exclusif de représenter équitablement et également tous les travailleurs

La législation qui établit une procédure d’accréditation d’une organisation comme agent de négociation exclusif pour une unité prévoit, en général, l’obligation pour cet agent de représenter équitablement et également tous les salariés de l’unité, qu’ils soient ou non membres de l’organisation syndicale.

> Exemple

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Les structures de négociation collective au niveau de la branche industrielle

Lorsque les pays souhaitent notamment promouvoir la négociation collective au niveau des branches industrielles, ils adoptent des dispositions législatives qui établissent des structures de négociation adaptées à ce niveau. Ces structures peuvent s'appuyer sur des procédures de reconnaissance déjà existantes, ou être mises à disposition des parties qui souhaitent négocier à ce niveau.

> Exemple

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L'obligation légale de négocier de bonne foi

Pour qu’existe une véritable négociation collective, le dialogue et le consensus doivent être encouragés.26 Un certain nombre de pays s'y attachent, en prévoyant des dispositions législatives qui obligent les parties à s’engager dans des négociations éclairées. L'application la plus aboutie de ce type d'obligation est celle qui permet de garantir que les parties bénéficient de toutes les possibilités pour parvenir à un accord. Dans certains cas, cette obligation se limite à une obligation de négocier, alors que dans d'autres, elle s'exprime sous la forme d'une obligation de négocier de bonne foi.

Il faut noter à ce sujet que le Comité de la liberté syndicale a souvent rappelé l'importance qu'il attache au principe selon lequel les employeurs et les syndicats doivent négocier de bonne foi et s'efforcer de parvenir à un accord, en particulier dans le cas où, comme dans les services essentiels, les syndicats ne bénéficient pas du droit de grève.27

> Exemple

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L'obligation d'information pour la négociation collective

Une des principales obligations légales qui accompagne l'engagement de négocier de bonne foi est le devoir, pour l'employeur, de fournir au syndicat les informations nécessaires pour s’engager dans des négociations constructives (la recommandation (n° 163), article 7(1)).28

> Exemple

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Contenu de la négociation collective

Les normes internationales du travail donnent une définition large de ce qu’est une négociation collective et de son contenu, afin de promouvoir une négociation volontaire et libre entre les parties. L'article 2 de la convention (n° 154) définit la négociation collective comme s'appliquant à :

toutes les négociations qui ont lieu entre un employeur, un groupe d'employeurs ou une ou plusieurs organisations d'employeurs, d'une part, et une ou plusieurs organisations ouvrières, d'autre part,et une ou plusieurs organisations de travailleurs, d’autre part, en vue de (a) fixer les conditions de travail et d'emploi, et/ou (b) régler les relations entre les employeurs et les travailleurs, et/ou (c) régler les relations entre les employeurs ou leurs organisations et une ou plusieurs organisations de travailleurs.

S’il est décidé de définir dans la loi l'étendue du droit de négociation collective, ce devra être sur la base d’une définition large. Dans certains pays, la jurisprudence distingue les sujets sur lesquels les parties ont obligation de négocier si l'une d'entre elles le demande, et, les sujets sur lesquels les parties peuvent décider, librement et d’un commun accord, de négocier. Parfois, la législation impose que les conventions collectives contiennent des dispositions sur des sujets spécifiques comme le règlement des différends portant sur l'interprétation et l'application de la convention.

> Exemple

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Conventions collectives

La législation sur la négociation collective contient souvent des dispositions concernant la convention collective elle-même. Ces dispositions portent notamment sur des sujets tels que :

  • la forme et le contenu des conventions collectives;
  • la portée légale des conventions collectives et les parties à qui elles sont opposables;
  • l’enregistrement des conventions collectives auprès d’un organisme public;
  • la notification de l’existence des conventions collectives auprès des travailleurs concernés ;
  • l'extension de certaines catégories de conventions collectives.

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Forme et contenu des conventions collectives

En général, les dispositions législatives sur ces sujets exigent que les conventions soient écrites, qu’elles indiquent les parties à l'accord, et soient signées des représentants des parties, en précisant la date d'entrée en vigueur de la convention. Elles requièrent aussi parfois que les parties prévoient des mesures sur des questions importantes comme les procédures de règlement des différends nés de la convention.

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L’application obligatoire des conventions collectives

Selon la recommandation (n° 91), paragraphe 3(1),

Toute convention collective devrait lier ses signataires ainsi que les personnes au nom desquelles la convention est conclue. Les employeurs et les travailleurs liés par une convention collective ne devraient pas pouvoir convenir, par le moyen de contrats de travail, de dispositions contraires à celles de la convention collective.29

Les dispositions législatives en la matière prévoient en général que les conventions collectives sont opposables aux parties signataires et aux membres de toute organisation partie à l’accord. Des dispositions prévoient souvent que la convention est incorporée ou modifie les termes de tous les contrats ou accord en vigueur ou conclus postérieurement entre les parties couvertes par la convention.

Il peut être décidé que les parties soumettent préalablement la convention collective aux autorités publique pour approbation avant l'entrée en vigueur. De telles dispositions sont compatibles avec la convention (n° 98), si elles mentionnent clairement que cette approbation ne peut être refusée que si la convention collective est entachée d’un vice de forme ou si elle ne respecte pas les normes minima prévues dans la législation générale du travail.30 Cependant, le risque de priver les parties du droit de négocier librement des conventions collectives existe si l'autorité publique à tout pouvoir pour refuser l’approbation d’une convention. Une telle possibilité est une violation du principe de la négociation volontaire et de l’autonomie des parties.

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L’enregistrement des conventions collectives auprès d'une autorité publique

La législation prévoit souvent ce type d’enregistrement. L'autorité publique peut ainsi suivre l’évolution des négociations collectives et s’assurer que les conventions sont exemptes de tout vice de forme, pour en informer les parties le cas échéant. Cela permet également aux autorités d’être mieux préparées pour aider les parties confrontées à des différends nés de la convention, ou de négociations ultérieures menées entre les mêmes parties.

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Information des travailleurs sur les conventions collectives qui les concernent

Les législations nationales peuvent exiger des employeurs qu’ils s’assurent que les travailleurs soient informés des conventions collectives applicables à leur entreprise (voir la recommandation (n° 91), paragraphe 8 (a)).

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Extension des conventions collectives

La pratique de l'extension des conventions collectives à d'autres employeurs et à d'autres travailleurs que ceux auxquels elles s'appliquent de façon directe existe principalement dans les pays où la négociation collective au niveau des branches industrielles est la plus développée. La législation qui organise cette pratique prévoit en général un certain nombre de conditions concernant la représentativité des parties à la convention vis à vis de ceux pour lesquels elle sera applicable, la nécessité d’une demande préalable de l'une ou des deux parties à la convention, et la consultation des représentants de ceux à qui va s’étendre la convention. La recommandation (n° 91), paragraphe 5(2) prévoit que:

La législation nationale pourrait subordonner l'extension d'une convention collective notamment aux conditions suivantes :

  1. la convention collective devrait déjà viser un nombre d'employeurs et de travailleurs intéressés suffisamment représentatifs du point du vue de l’autorité compétente ;
  2. la demande d’extension de la convention collective devrait, en règle générale, être faite par une ou plusieurs organisations de travailleurs ou d’employeurs qui sont parties à la convention collective;
  3. les employeurs et les travailleurs auxquels la convention collective serait rendue applicable devraient être invités à présenter au préalable leurs observations.

Certain des exemples ci-dessous illustrent des sujets évoqués auparavant. Des exemples de dispositions concernant un seul sujet sont proposés s’il a été effectivement possible de les traiters éparément.

> Exemple s'appliquant à un certain nombre de problèmes

> Exemple de dispositions relatives à des problèmes spécifiques


1. Voir par exemple: "promotion de la négociation des conventions collectives", Conférence Internationale du Travail, 66e session, 1980, p. 62.

2. Déclaration de Philadelphie 1944, article III.

3. Cette convention fondamentale est ratifiée par 153 membres (11.09.2003) ; elle est la deuxième convention fondamentale de l’OIT la plus a ratifiée.

4. Les autres instruments de l’OIT sur le sujet sont la convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndicale, 1948; la recommandation (n° 91) sur les conventions collectives, 1951; la recommandation (n°113) sur la consultation aux échelons industriel et national, 1960; la convention (n° 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971 ; la recommandation (n° 143) concernant les représentants des travailleurs, 1971; la convention (n°141) sur les organisations de travailleurs ruraux, 1975 ; la recommandation (n° 149) sur les organisations de travailleurs ruraux, 1975; la convention (n° 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978 ; la recommandation (n° 159) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978 et la recommandation (n° 163) sur la négociation collective, 1981 (qui complète par la convention (n° 154). Pour aborder les autres conventions et recommandations en rapport avec la négociation collective, voir "La négociation collective: un principe fondamental, un droit, une convention" Education ouvrière, n° 114 -115, p .124 (Genève, BIT,1999).

5. Voir Gernigon, B. op. cit., p. 29.

6. Etude d’ensemble des rapports concernant la convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (n° 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, CIT, 81e session,1994, Rapport III (Partie 4B), paragr. 247. Citée ci-après comme "Etude d’ensemble de 1994".

7. Voir par exemple les références citées dans la convention (n° 154), article 4.

8. Pour une approche récente sur la façon dont différents pays utilise la législation pour promouvoir la négociation collective, voir Casale, G, "Collective bargaining and the law in central and Eastern Europe : some comparative issues" (Document de travail n° 20, BIT-CEET, 1997).

9. Voir Bronstein, A. "La négociation collective : une analyse comparative" dans "La négociation collective: un principe fondamental, un droit, une convention", op. cit. p. 28.

10. Voir Rueda-Catry, M., Sepùlda Malbràn, J.M., Vega Ruiz, M.L., "Nombreux sont aujourd’hui les secteurs sociaux exigeant de la part des syndicats l’élaboration d’une position commune dans le cadre du dialogue social" dans "La négociation collective: un principe fondamental,un droit, une convention", op. cit. p. 47.

11. Le droit de négocier des conventions collectives est lié au droit syndical et au droit de grève (Voir chapitre II et V).

12. Les négociations peuvent être conduites avec les représentants des travailleurs, qui peuvent être des représentants syndicaux ou des représentants élus voir la convention (n°135) et la recommandation (n°14) concernant les représentants des travailleurs, 1971.

13. Voir la convention (n° 98), article 5(1); la convention (n°151), article 1(3) et la convention (n°154), article 1(2).

14. Voir Chapitre II.

15. Etude d’ensemble de 1994, paragr. 200.

16. Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, 4ème édition révisée, (Genève, BIT, 1996)., paragr. 805. Cité ci-après comme "Recueil" Dans certains pays, les membres de la police et des forces armées peuvent participer à des négociations collectives. Voir la discussion sur le cas de la République Tchèque dans Casale, G. op. cit. p. 14.

17. Comme le souligne Bamber, les négociations centralisées et décentralisées ont chacune des avantages et des inconvénients, selon le contexte. Voir Bamber, op. cit. p. 434.

18. Etude d’ensemble de 1994, paragr. 249.

19. Recueil, paragr. 782.

20. "La promotion de la négociation des conventions collectives", op. cit. p. 15.

21. Etude d’ensemble de 1994, paragr. 240; "La promotion de la négociation des conventions collectives", op. cit. p. 16.

22. Un sujet aussi complexe ne peut être étudié de manière exhaustive dans ces Directives, mais les questions les plus importantes y sont néanmoins abordées. Pour une étude plus approfondie sur ces sujets voir par exemple Bamber, G., et autres, “Collective bargaining ”, dans "Comparative labour law and industrial relations in indutrialised market economies" 6e édition révisée, (Kluwer, La Haye, 1998) p. 414; Casale, G. "Union representativeness in a comparative perspective" (Rapport n°18,BIT-CEET, 1996).

23. Etude d’ensemble de 1994, paragr. 240. Voir aussi l’article 3(b) de la recommandation (n° 163).

24. Voir Gérard Lyon-Caen et Jean Pélissier, "Droit du travail", 16ème édition, (Dalloz, Paris, 1992), pp. 557-58 (paragr. 623).

25. Etude d’ensemble de 1994, paragr. 240.

26. Bronstein, A. op. cit. p. 34.

27. Recueil, paragr. 243.

28. Il existe des obligations similaires dans d'autres textes internationaux comme les Principes directeurs de l'OCDE pour les entreprises multinationales de 1976, et la directive européenne de 1994 sur le comités d'entreprise européen.

29. Voir aussi Recueil, paragr. 818.

30. Etude d’ensemble de 1994, paragr. 251.