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Orientations sur la législation du travail
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Introduction
Chapter I. Législation du travail dans le monde contemporain
Chapter II. Dispositions fondamentales de la législation du travail: La liberte syndicale
Chapter III. Dispositions fondamentales de la législation du travail: La reconnaissance effective du droit de négocier des conventions collectives
Chapter IV. Dispositions fondamentales de la législation du travail: Règlement des conflits collectifs du travail
Chapter V. Dispositions fondamentales de la législation du travail: Le droit de greve 
Chapter VI. Dispositions fondamentales de la législation du travail: Elimination de toutes les formes de travail forcé ou obligatoire
Chapter VII. Dispositions fondamentales de la législation du travail: L'elimination de la discrimination dans l'emploi et la profession
Chapter VIII. Dispositions fondamentales de la législation du travail: Abolition effective du travail des enfants
Chapter IX. Les methodes de redaction
Chapter X. Regles de redaction

Version avec cadres

CHAPITRE VIII
Dispositions de fond du droit du travail
Abolition effective du travail des enfants

Introduction

Le travail des enfants existe depuis toujours et reste très présent dans certaines régions. Un consensus a émergé au cours des deux derniers siècles pour reconnaître quasi universellement que le travail des enfants est nocif pour les enfants, pour les familles, et est défavorable au développement et à l’économie d’un pays. Les enfants qui travaillent durant toute leur jeunesse ne bénéficient, pour la grande majorité d’entre eux, d’aucun accès à l’éducation ou à une quelconque opportunité de développement personnel. Le droit fondamental d’égalité des chances, essentiel dans toute société démocratique, ne leur est pas reconnu. L’éradication du travail des enfants fait partie intégrante du processus de développement d’un pays, et de la lutte contre la pauvreté. Plus récemment, l’élimination des pires formes de travail des enfants est devenu une nécessité pour toute la communauté internationale, comme le prouve la ratification rapide et large de la convention de l’OIT qui s’attaque à ce fléau.
En vertu de la Déclaration de l'OIT sur les principes et droits fondamentaux au travail, tous les Etats membres ont l’obligation de promouvoir, respecter et appliquer le principe de l'abolition effective du travail des enfants. La Déclaration requiert de l'OIT qu’elle d'aide ses Membres à atteindre cet objectif, et qu’elle encourage d’autres organisations internationales à soutenir leurs efforts. La convention (n° 138) de l'OIT sur l'âge minimum, et la recommandation (n° 146), 1973, ainsi que la convention (n° 182) concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, et la recommandation (n° 190), 1989, sont les principaux instruments de l’OIT ; ils visent à l'élimination progressive du travail des enfants, en donnant la priorité à l’éradication de ses pires formes.

La convention (n° 138) institue un ensemble de normes relatives à l'âge minimum pour l'admission à l’emploi ou au travail, qui doivent être au centre des politiques menées pour éliminer le travail des enfants, même si l'efficacité d'une telle politique repose, pour une large part, sur la mise en œuvre de mesures complémentaires dans le domaine de l'éducation, de l'emploi et de la santé, comme le souligne la recommandation (n° 190). Les pays qui ratifient la convention (n° 138) doivent préciser, dans une déclaration associée, un âge minimum d’admission à l’emploi ou au travail, lequel ne doit pas être inférieur à l'âge auquel cesse la scolarité obligatoire, ni en tout cas, inférieur à 15 ans. Les Etats membres dont l'économie et les institutions scolaires ne sont pas suffisamment développées peuvent, lors d’une première étape, fixer l'âge minimum à 14 ans.

Un grand nombre de pays ont, conformément aux exigences de la convention (n °138), fixés des normes dans ce domaine, mais, pour beaucoup, l'abolition effective du travail des enfants dans toutes les branches de l'économie demeure un objectif à long terme dont la réalisation complète nécessite des progrès économiques importants. Certaines formes de travail des enfants, en revanche, ne peuvent être admises plus longtemps. Pour cette raison, l'OIT a adopté la convention (n° 182) en vertu de laquelle les Etats qui la ratifie s’engagent à "prendre des mesures immédiates et efficaces pour assurer l'interdiction et l'élimination des pires formes de travail des enfants et ce, de toute urgence".

Un certain nombre de conseil seront donnés dans ce chapitre pour mettre en œuvre les principes contenus dans ces deux conventions, à savoir l’interdiction légale du travail des enfants, et l’élimination des pires formes de travail des enfants.

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L’interdiction légale du travail des enfants

Une législation qui a pour objectif l'élimination effective du travail des enfants dans tous les secteurs d’activité économique doit :

  • établir une séries d’âges minima pour l’admission à l’emploi ;
  • prendre des mesures pour une mise en œuvre effective de l’interdiction ;
  • adopter des mesures sociales et économiques pour prévenir le travail des enfants, et pour protéger et réadapter les enfants qui sont déjà sur le marché du travail.

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La législation sur l'âge minimum d’admission à l’emploi

1) la législation sur l’âge minimum d'admission à l’emploi ou au travail doit :

  • établir un âge minimum général pour toutes les catégories d’emploi ou de travail, qui ne doit pas être inférieur à l'âge de fin de scolarité obligatoire ni, en tout cas, à 15 ans ;1
  • considérer, par exemple, que font partie de "toutes les catégories d’emploi ou de travail", le travail domestique, le travail dans les entreprises familiales, le travail pour son propre compte, et le travail maritime, sauf si l'Etat qui a ratifié la convention a décidé (conformément aux dispositions de la convention) de ne pas appliquer la convention à des catégories limitées d’emploi ou de travail.

Les pays peuvent déclaré que l’âge de 14 ans sera l’âge minimum général applicable, lors d’une première étape en tout cas, s’ils considèrent que leur économie et leurs institutions scolaires sont insuffisamment développées (les pays en développement).2

2) la législation sur l'âge minimum d'admission à l’emploi ou au travail doit aussi :

  • fixer à 18 ans l'âge minimum d'admission à tout type de travail ou d’emploi susceptible de compromettre la santé, la sécurité ou la moralité des adolescents (travail dangereux) ;
  • déterminer les types d’emploi ou de travail dangereux soit en :
    • les répertoriant dans la législation ; ou en
    • délégant cette responsabilité a une autorité compétente ; ou en
    • établissant une procédure pour établir cette liste, qui impliquera, par exemple, un comité qui consultera les partenaires sociaux et requerra l'avis d'experts en matière de sécurité et de santé au travail.

3) Toute législation concernant l'âge minimum d'admission à l’emploi peut également prévoir un âge minimum inférieur pour les travaux légers. Pour respecter la convention, elle doit :

  • établir un âge minimum compris entre 13 et 15 ans (ou entre 12 et 14 ans dans les pays en développement) ;
  • désigner une autorité compétente pour définir les activités qui constituent des travaux légers, c'est-à-dire des travaux qui ne soient pas susceptibles de nuire à la santé ou au développement de l'enfant, et qui ne porteront pas préjudice à son assiduité scolaire ou à son aptitude à bénéficier de l'instruction reçue ;3
  • demander à ladite autorité de déterminer le nombre d'heures pendant lesquelles l'enfant pourra travailler, et les conditions de l’emploi ou du travail.

Dans les cas où les enfants n’ont pas terminé leur scolarité obligatoire, la législation peut fixer l’age minimum à 15 ans pour les travaux légers.4

La législation peut prévoir des dérogations à l'âge minimum général :

  • pour la participation à des activités telles que les spectacles artistiques (spectacles publics donnés dans l’intérêt de l’art, de la science ou de l’enseignement, la publicité commerciale ou non commerciale, le mannequinat, etc.). Pour être respectueuse de la convention, une telle législation doit :
    • désigner une autorité compétente pour délivrer une autorisation individuelle ;
    • donner à ladite autorité la responsabilité de limiter la durée du travail et de déterminer les conditions de travail ou de l’emploi autorisé ;
  • pour le travail effectué dans des établissements d’enseignement général ou de formation, dans le cadre d’un programme autorisé d’éducation ou de formation ;
  • pour le travail effectué dans une entreprise dans le cadre d'un programme d’apprentissage ou de formation autorisé, à condition que la législation fixe l'âge minimum à 14 ans.

Tableau

AGE MINIMUM D’ADMISSION A L’EMPLOI

Convention n° 138 de l'OIT sur l'âge minimum (1973)

Application générale

Pays dont l'économie et les institutions scolaires ne sont insuffisamment développées

Age minimum général d'admission à l’emploi

pas inférieur à l'âge auquel cesse la scolarité obligatoire, et en aucun cas inférieur à 15 ans

14

Travaux dangereux et ceux considérés comme les pires formes de travail des enfants

18

18

Travaux légers

De 13 à 15

De 12 à 14

> Exemple

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L’application de la législation sur l'âge minimum pour l'admission à l’emploi

Pour garantir une mise en œuvre et une application effective de la loi qui sur l'âge minimum, il faut prévoir des sanctions en cas de non respect, mais il faut aussi développer des moyens d’enquête qui permettent de mettre à jour l’existence d’un travail des enfants, et établir une inspection effective des lieux de travail.

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Les sanctions

L'application de la loi sur l'âge minimum doit s’accompagner de la mise en œuvre de sanctions. La législation doit :

  • prévoir des sanctions et toutes les autres mesures nécessaires en cas de violation des dispositions relatives au travail des enfants ;5
  • prévoir des sanctions pour toutes les personnes responsables de l'emploi illégal de mineurs (employeurs, parents, tuteurs, etc.) ;
  • s’assurer que les sanctions prévues soient suffisamment dissuasives ;
  • faire la distinction entre les sanctions de droit pénal, civil et administratif ;
  • prévoir des sanctions variées, fondées sur le droit pénal, le droit civil et le droit administratif ;
  • prévoir des sanctions différentes en fonction de la gravité de l’infraction (les sanctions doivent être plus lourdes, par exemple, lorsque des enfants sont employés à des travaux dangereux, ou lorsqu'il y a récidive) ;
  • faciliter l'accès des enfants à des voies de recours légales, en leur permettant, par exemple, d'adhérer à un syndicat dès qu'ils commencent à travailler, ou en donnant aux syndicats (ou autres organisations de la société civile concernées par le travail des enfants) la capacité de représenter ces enfants ;
  • garantir que les enfants qui travaillent sans avoir l’age requis, même si c’est dans une activité illégale, n’encourent aucune peine.

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Le recueil d’informations, l’inspection du travail et les autres mesures de contrôle

Recueil d’informations. Pour appliquer correctement les lois sur le travail des enfants et créer des programmes efficaces d'élimination du travail des enfants, il est important de repérer les cas de travail des enfants et les circonstances qui le favorisent. La législation peut faciliter ce recueil d’informations sur l’existence du travail des enfants en :

  • prévoyant une évaluation systématique de la situation de travail des enfants au sein du pays6, y compris le recueil d’ informations détaillées et de statistiques sur la nature et l'étendue du travail des enfants, et notamment des informations sur : 7
    • le sexe des jeunes travailleurs, l’âge, la profession, la branche d'activité économique, la situation dans la profession, la fréquentation scolaire et la localisation géographique ;8
    • les violations des dispositions nationales visant l’interdiction et l’élimination des pires formes de travail des enfants ;9
  • permettant aux ONG, aux syndicats, aux institutions religieuses, aux organisations caritatives et aux autres groupes concernés, de jouer un rôle dans le recueil d’informations et de données sur le travail des enfants.10

L’inspection. Une fois qu’est établie l'existence de travail des enfants, il faut veiller à ce que la législation sur l'âge minimum soit respectée. Les services de l’inspection du travail en sont en général chargés, et ils doivent, pour avoir l’autorité nécessaire et exercer équitablement leurs fonctions, bénéficier du soutien des pouvoirs publics. Pour leur donner ce pouvoir la législation peut :

  • établir un cadre pour le fonctionnement de l’inspection du travail qui prévoit un certain nombre de mesures, comme la formation des inspecteurs pour déceler les abus en matière d’emploi des enfants et des adolescents et pour y remédier, comme la fourniture de moyens de transport adéquats pour inspecter les zones rurales, et notamment les plus isolées etc. ; 11
  • donner aux services d'inspection du travail le pouvoir de faire respecter les dispositions légales concernant l'emploi des enfants et des adolescents ;
  • garantir que les attributions des services d'inspection du travail s'étendent à tous le lieux où existent actuellement le travail des enfants ;
  • définir le rôle des inspecteurs, quant à la fourniture d’ informations et de conseils sur les meilleurs moyens d’appliquer effectivement les dispositions de la loi relative au travail des enfants, et pour en assurer l'exécution ;12
  • exiger une répartition équilibrée entre les hommes et les femmes au sein des services d'inspection du travail ;
  • prévoir que les services d'administration du travail (y compris les services d'inspection du travail) travaillent en étroite collaboration avec les services chargés de l’éducation, de la formation, du bien-être et de l’orientation des enfants et des adolescents ;13
  • donner aux services d'inspection du travail la responsabilité de répondre aux présumées violations transmises par les syndicats ou par toute autre organisation publique ou privée, ce qui requièrent d’eux qu’ils obtiennent des informations essentielles sur les infractions à la législation sur le travail des enfants ;

> Exemple

  • donner aux services d'inspection du travail ou aux services administratifs le pouvoir de prendre des sanctions administratives (amendes, suspension de l’autorisation d'exploitation, etc.) ;

> Exemple

  • exiger la tenue de registres des violations, et faire connaître les meilleures pratiques relatives à l’élimination du travail des enfants ;14
  • prévoir des sanctions contre toute personne qui fait obstruction au travail d'inspection ;

> Exemple

Les autres mesures de contrôle. En instituant des moyens complémentaires pour favoriser la mise en œuvre et l'application des dispositions relatives au travail des enfants, la législation peut :

  • instaurer un contrôle de l'âge :
    • en établissant un système efficace d’enregistrement des naissances ;15
    • en exigeant que les employeurs tiennent à disposition et conservent des documents qui indiquent le nom et l'âge de tous les travailleurs de moins de 18 ans ;16
    • en renversant la charge de la preuve et en donnant à l’employeur la responsabilité de prouver que les personnes occupées par lui ou travaillant pour lui ont l’âge légal requis pour le faire ;
    • en instaurant une procédure alternative pour déterminer l'âge d’un jeune travailleur ;
  • obliger les employeurs à tenir des registres actualisés de tous les enfants et adolescents qui sont occupés ou qui travaillent pour eux.

> Exemple

Pour garantir que les droits seront respectés, y compris en ayant recours aux institutions judiciaires, la loi peut également :

  • garantir aux enfants victimes ou à leurs représentants l'accès aux tribunaux compétents ;
  • prévoir des procédures spéciales de plaintes et des dispositions visant à protéger contre toutes les discriminations et représailles ceux qui font légitimement état de violation de l’interdiction des pires formes du travail des enfants ;17
  • charger les institutions nationales responsables de la de promotion des droits humains d’examiner et de contrôler les actions menées en matière de lutte contre le travail des enfants, et notamment en cas d’exploitation d’enfants ;

> Exemple

  • faire une publicité défavorable à ceux qui violent la loi et sont condamnés ;18
  • garantir une aide juridique gratuite aux enfants victimes ;19
  • prévoir des procédures et des mesures favorables à l'enfant :
    • informer les enfants sur leur rôle et sur sa portée, sur le déroulement et l’avancement de la procédure ainsi que sur l’évolution de la situation ;
    • leur permettre de présenter et de faire entendre leur points de vue et leurs préoccupations à un stade approprié de la procédure ;
    • fournir aux victimes une assistance adaptée tout au long de la procédure ;
    • prendre des mesures pour limiter les difficultés rencontrées pas les victimes lors de la procédure ;
    • protéger leur vie privée ;
    • leur garantir la sécurité (ainsi qu’à leur famille et qu’aux témoins) et les protéger des intimidations et des représailles ;
    • limiter au maximum les délais lors du déroulement de la procédure et pour l’exécution des décisions qui accordent des dommages et intérêts aux victimes.

> Exemple

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Les mesures sociales et économiques pour éliminer le travail des enfants

Les mesures de prévention et de protection

L'élimination effective du travail des enfants nécessite que soient mis en oeuvre des programmes sociaux et économiques spécifiques pour éviter que le travail des enfants ne se développe, mais aussi pour protéger les enfants qui en sont déjà victimes.20 Pour que ces programmes soient efficaces, les mesures économiques et sociales adoptées doivent être élaborées avec tous les acteurs concernés, à savoir les associations de parents, les organismes de protection de l'enfance, les organisations d'employeurs et de travailleurs, les ONG.

La prévention. La législation a un rôle à jouer en matière de prévention, en donnant une base légale à l’adoption de mesures et de programmes conçus pour s’attaquer aux causes économiques et sociales qui sont à l’origine du travail des enfants.21 Cette législation peut :

  • promouvoir un développement axé sur l’emploi,22 en établissant des programmes qui ont pour objectif de développer la croissance économique, afin que soient créés suffisamment d’opportunités d'emplois pour les adultes, et que le travail des enfants devienne superflu ;23
  • instituer des mesures sociales et économiques pour réduire la pauvreté et permettre, par exemple, un accès plus équitable aux biens (par exemple à la terre, à l’héritage) et établir des salaires minima ;24
  • prévoir l’adoption de mesures de sécurité sociale et de bien être familial pour garantir l'entretien des enfants,25 y compris :
    • des mesures qui fixent un niveau minimum pour le revenu des familles ;26
    • développer des services peu coûteux en faveur de la santé et l’éducation, qui aident les enfants à se développer et à rester en bonne santé ;27
  • garantir que le principe de non discrimination sera respecté en exigeant un salaire égal pour un travail d’égale valeur, pour les adolescents et les adultes, afin d’éliminer certaines des raisons économiques qui motivent le recours au travail des enfants ;
  • prévoir une formation préalable, sans danger, pour les catégories d'emplois pour lesquelles l'âge minimum requis pour y accéder est supérieur à l'âge de fin de scolarité obligatoire ;
  • prévoir des formations professionnelles pour les enfants qui n'ont pas de famille, ou qui ne vivent pas avec leur famille, et pour les enfants migrants ou ceux qui vivent et se déplacent avec leur famille.

Les mesures de protection. Les adolescents peuvent légalement travailler lorsqu’ils ont atteint l'âge minimum d’admission à l’emploi. Pour ceux qui n'ont pas atteint cet âge minimum, la loi, dans certains pays, n’interdit pas (encore) leur admission à l’emploi, conformément à la convention (n° 138) qui permet une application progressive de ses dispositions sous certaines conditions. Dans les deux cas, il importe d'accorder une protection juridique spécifique aux enfants, afin de garantir qu'ils travaillent dans des conditions qui ne soient pas préjudiciables à leur bien-être. La législation peut :

  • comporter une disposition générale selon laquelle, en toutes circonstances, il est interdit à un adolescent de moins de 18 ans d'effectuer un travail qui présente un danger pour sa santé, sa sécurité ou sa moralité et, en ce sens, quiconque emploie un adolescent a le devoir de veiller à ce que le travail qui lui est confié n'est pas dangereux, ou que tout élément dangereux à été banni du cadre de travail ;

> Exemple

  • garantir que, dans la législation du travail, les adolescents ont les mêmes droits que les adultes, et qu'ils connaissent ces droits ;
  • limiter la durée du travail des adolescents, afin qu'ils puissent se reposer, avoir des loisirs, aller à l'école et faire leurs devoirs à domicile ;28

> Exemple

  • garantir un repos nocturne d’au moins douze heures consécutives, et des jours de repos hebdomadaire ;29
  • prévoir un congé annuel payé d’au moins quatre semaines ;30
  • garantir une rémunération équitable, fondée sur le principe d'un salaire égal pour un travail de valeur égale l ;31
  • garantir que tous les adolescents qui travaillent sont protégés par les régimes de sécurité sociale, y compris les régimes de prestations en cas d’accidents du travail, pour les soins médicaux et les indemnités de maladie ;32
  • prévoir de réaliser régulièrement des examens médicaux pour évaluer l'état de santé des jeunes travailleurs, et leur capacité à effectuer le travail pour lequel ils sont ont été recrutés ;33
  • prévoir, pour les enfants qui travaillent, des cours en soirée et le week-end pour leur permettre d’accéder à une scolarité normale.34

> Exemple

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L’éducation

L'éducation permet aux jeunes d’accéder à un emploi productif une fois atteint l’age minimum exigé, mais elle est aussi le principal atout pour prévenir le travail des enfants et réinsérer les enfants sortis du marché du travail. A cet égard, il importe :

  • de garantir que l'âge minimum d’admission à l’emploi ne doit pas être inférieur à l'âge auquel cesse la scolarité obligatoire ;35
  • de relever l'âge de fin de scolarité obligatoire ;
  • d’assurer l’accès à l’éducation de base gratuite, notamment aux enfants soustraits du marché du travail. 36

> Exemple

La législation peut aussi :

  • rendre obligatoire la fréquentation à plein temps d’une école, ou la participation à plein temps à des programme d'orientation ou de formation professionnelles, jusqu'à un âge au moins égal à l'âge d’admission à l’emploi ;37
  • garantir que le travail n'entrave pas la scolarité de l'enfant ou de l’adolescent ;
  • prévoir la création et le développement de structures d'éducation, d’orientation et de formation professionnelles adaptées aux besoins des enfants et des adolescents ;38
  • prévoir d’organiser une scolarité souple, adaptée aux élèves et aux étudiants qui ne peuvent être immédiatement soustraits du marché du travail (cours du soir ou le week-end, par exemple) ;39
  • s’assurer que l’école apprenne aux élèves quels sont les dangers du travail des enfants et les informe des droits des jeunes travailleurs ;40
  • prévoir des mesures pour améliorer la formation que doivent recevoir les enseignants pour répondre aux besoins des enfants et des adolescents ;41
  • prévoir un renforcement de la protection des familles, par des actions d'éducation informelles menées dans les communautés où le travail des enfants existe.42

> Exemple

La législation doit garantir que les enfants et leurs familles, les communautés et collectivités locales, organisations à but non lucratif, les organisations d'employeurs et de travailleurs, et les organismes s'occupant de la protection des enfants, participent à l'élaboration des mesures de prévention et de protection destinées à lutter contre le travail des enfants.43

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L’élimination des pires formes de travail des enfants

La politique d'un pays doit avoir pour objectif final d'éliminer toutes les formes de travail des enfants, et sa priorité doit être d'interdire et d'éliminer les pires formes de travail des enfants.44 Dans les deux cas, la législation constitue un moyen déterminant pour consolider cette politique nationale. La convention (n° 182) exige des Etats membres qu’ils prennent des mesures immédiates et efficaces pour interdire et éliminer les pires formes de travail des enfants, qui sont définies comme :

a) toutes les formes d'esclavage ou pratiques analogues, telles que la vente et la traite des enfants, la servitude pour dettes et le servage ainsi que le travail forcé ou obligatoire, y compris le recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés ;

b) l'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant à des fins de prostitution, de production de matériel pornographique ou de spectacles pornographiques ;

c) l'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant aux fins d'activités illicites, notamment pour la production et le trafic de stupéfiants, tels que les définissent les conventions internationales pertinentes ;

d) les travaux qui, par leur nature ou les conditions dans lesquelles ils s'exercent, sont susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité de l'enfant.45

La législation doit, dans tous les cas :

  • interdire les pires formes de travail des enfants ;46
  • prévoir de déterminer et revoir périodiquement les types d’emploi ou de travail considérés comme dangereux pour les enfants (c'est-à-dire un emploi ou un travail qui, par sa nature ou les conditions dans lesquelles il s’exerce est susceptible de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité des enfants et des adolescents de moins de 18 ans), soit directement, soit en désignant une autorité compétente pour le faire ;
  • prendre des mesures pour éliminer les pires formes de travail des enfants ;47
  • appliquer les mesures concernant les pires formes de travail des enfants à l’ensemble des personnes de moins de 18 ans ;48
  • identifier les besoins des enfants particulièrement exposés ;49
  • établir des mesures efficaces de mise en œuvre et d'application.

La législation peut aussi :

  • établir un cadre qui permette de repérer et d’éliminer les pires formes du travail des enfants, ou prévoir des contrôles dans les cas particuliers ;

> Exemple

  • organiser une procédure pour créer et mettre en œuvre des programmes d'action pour éliminer les pires formes de travail des enfants (qui définit par exemple les éléments à prendre en compte, les participants, la question des différences de situation entre les garçons et les filles, les échéances et le calendrier, etc.) ;
  • autoriser l’assistance juridique ;
  • favoriser une coopération internationale ;
  • exiger une coopération entre les autorités compétentes pour interdire et éliminer les pires formes du travail des enfants ;

> Exemple

Lorsque les mesures adoptées pour éliminer les pires formes de travail des enfants recoupent les dispositions concernant le travail forcé, la législation doit garantir que les enfants bénéficieront de la protection apportée par ces dispositions, ainsi que des protections complémentaires recommandées ci-après.

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L’esclavage ou les pratiques analogues à l'esclavage

La législation sur l'interdiction et l'élimination des pires formes de travail des enfants doit comporter des dispositions qui permettent de lutter contre toutes les formes d'esclavage ou les pratiques analogues à l'esclavage, telles que :

  • la vente et la traite des enfants ;
  • la servitude pour dettes et le servage ;
  • le travail forcé ou obligatoire, y compris le recrutement forcé ou obligatoire des enfants dans les conflits armés ;
  • d'autres formes ou pratiques analogues à l'esclavage ou au travail forcé ou obligatoire.50

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La vente et la traite des enfants

La convention (n° 182) ne définit pas la vente et la traite des enfants, et ne donne aucun détaille sur ce qu’elles recouvrent. Les Etats membres bénéficient donc d’une relative liberté pour déterminer si une situation particulière peut être considérée comme une "pratique analogue à l'esclavage". Cette liberté est toutefois limitée par les définitions détaillées qui sont développées dans d'autres instruments internationaux. Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, définit la vente d’enfants comme tout acte ou toute transaction en vertu desquels un enfant est remis par toute personne ou par tout groupe de personnes à une autre personne ou un autre groupe contre rémunération ou tout autre avantage. Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, donne cette définition de la traite des personnes :

Article 3. Terminologie
Aux fins du présent Protocole :
(a) L’expression "traite des personnes"désigne le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil de personnes, par la menace de recours ou le recours à la force ou à d’autres formes de contrainte, par enlèvement, fraude, tromperie, abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité, ou par l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins d’exploitation. L’exploitation comprend, au minimum, l’exploitation de la prostitution d’autrui ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, le travail ou les services forcés, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage, la servitude ou le prélèvement d’organes ;
(b) Le consentement d’une victime de la traite des personnes à l’exploitation envisagée, telle qu’énoncée à l’alinéa a) du présent article est indifférent lorsque l’un quelconque des moyens énoncés à l’alinéa a) a été utilisé ;
(c) Le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement et l’accueil d’un enfant aux fins d’exploitation sont considérés comme une "traite des personnes" même s’ils ne font appel à aucun des moyens énoncés à l’alinéa a) du présent article
(d) Le terme "enfant" désigne toute personne âgée de moins de 18 ans.

La législation qui vise à interdire et à éliminer la traite des enfants doit, par conséquent :

  • considérer le trafic des garçons et des filles comme un crime dont la victime est l’enfant et pas seulement l'Etat. La loi doit prévoir des sanctions pour tous les intermédiaires impliqués, notamment pour l’exploitation sexuelle des enfants et l’exploitation au travail. La loi doit prévoir des sanctions pénales pour les trafiquants ;

> Exemple

  • adapter les peines en fonction de la gravité de l'infraction ;

> Exemple

  • prévoir que tous les moyens de contraintes utilisés contre des enfants et des adolescents de moins de 18 ans seront spécifiquement sanctionnés (tels que la violence physique, la violence psychologique, la tromperie, etc.) ;

> Exemple

  • prévoir des sanctions pour la privation illégale de liberté, la servitude pour dettes, le servage et l'exploitation des êtres humains (voir l'exemple de la Hongrie) ;

> Exemple

  • sanctionner la privation illégale des documents d'identité ;

> Exemple

  • garantir que les enfants qui sont victimes de trafic ne sont pas considérés comme des étrangers en situation illégale, et qu’ils sont protégés contre toute risque d’expulsion fondée sur l’illégalité de leur situation, y compris en leur accordant un titre de séjour provisoire ;

> Exemple

  • prévoir une protection des témoins ;

> Exemple

  • prévoir aussi des sanctions civiles et administratives (notamment l’attribution de dommages et intérêts) ;

> Exemple

  • prévoir des mesures pour venir en aide aux victimes de trafic ;

> Exemple

La législation peut aussi :

  • favoriser le développement de la coopération transnationale, en autorisant l’assistance mutuelle et l’extradition ;

> Exemple

  • aider les autres pays à respecter les normes internationales relatives à la traite des êtres humains ;

> Exemple

  • garantir une application de la loi contre l'exploitation des enfants (à des fins sexuelles ou au travail) en dehors du territoire, dans les pays qui n’ont pas encore adopté de telle loi. Cette mesure est couramment employée pour combattre le tourisme sexuel impliquant des enfants, et elle peut également s'appliquer à toutes les situations dans lesquelles un citoyen contribue à l'exploitation d'enfants à l'étranger.

> Exemple

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La servitude pour dettes et le servage

La servitude pour dettes est la situation dans laquelle un individu donne, en garantie d'une dette détenue envers un employeur, ces services ou les services d'une personne se trouvant sous son autorité.51 Cette situation se transforme en travail forcé lorsque les services fournis ne servent pas d'une manière raisonnable au remboursement de la dette. Dans ce cas, l'individu est contraint de continuer à travailler pour s'acquitter d'une dette qui ne diminue pas, et qui augmente même parfois lorsqu'il est nécessaire de contracter de nouveaux emprunts. (Voir Chapitre VI) Le servage est la situation dans laquelle un individu est contraint de fournir des services et de travailler sur une terre appartenant à une autre personne, sans être libre de changer de condition.52 Les enfants sont particulièrement exposés à ces formes de travail forcé. Ils héritent souvent de la dette de leurs parents, ou naissent dans une situation de servage. Dans certains cas, les familles vendent leurs enfants qui entrent ainsi dans le travail forcé contre un peu d’argent.

La législation concernant les enfants victimes de servitude pour dettes ou de servage doit :

  • adopter les mesures détaillées dans le Chapitre VI pour l’élimination de la servitude pour dettes dans le contexte du travail forcé, notamment les mesures qui interdisent ou limitent les avances sur salaires ou les prêts faits par l'employeur ;
  • garantir que les mesures adoptées pour lutter contre le travail forcé s’appliquent aux enfants victimes de travail forcé ou de servage ;
  • interdire à un tiers, quel qu’il soit, de conclure un contrat de travail pour le compte d’un adolescent, qui doit être le seul à pouvoir s’engager en son nom ;
  • interdire à un tiers de percevoir le salaire gagné par un adolescent ;
  • organiser une protection spéciale, en complément de celle prévue par la loi sur le travail forcé (voir ci-dessous voir ci-dessous Les autres mesures d’application et de mise en œuvre des dispositions concernant les pires formes de travail des enfants).

> Exemple

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Le travail forcé ou obligatoire

La convention sur le travail forcé (n° 29), 1930, et la convention sur l'abolition du travail forcé (n° 105), 1957, sont les principaux instruments de l'OIT concernant le travail forcé ou obligatoire (Voir Chapitre VI), et ils sont pertinent pour les enfants comme pour les adultes. La protection des enfants nécessite qu’existe à la fois une législation sur le travail forcé en général et des dispositions spécifiques pour les enfants. Il faut également prévoir des dispositions pour lutter contre le recrutement forcé ou obligatoire d’enfants dans les conflits armés.

La législation qui concernent les enfants en situation de travail forcé ou obligatoire doit :

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Le recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de leur utilisation dans les conflits armés

Pour prévenir et éliminer le recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de les utiliser dans les conflits armés la législation doit:

  • garantir que seuls les adultes d’au moins 18 ans pourront être désignés pour participer à un conflit ou pourront être recrutés dans des forces ou des groupes armés ;
  • considérer que l’enfant soldat n’est pas seulement celui qui porte une arme. Est un enfant soldat tout adolescent de moins de 18 ans qui fait partie d'une force ou d'un groupe armé régulier ou irrégulier quelconque, y compris les cuisiniers, les porteurs, les messagers et ceux qui accompagnent de tels groupes autrement qu'en tant que membre de la famille. Cela concerne aussi les filles recrutées pour des raisons sexuelles ou pour des mariages forcés ;
  • établir des procédures de recrutement appropriées et les moyens pour les appliquer, et mener les personnes coupables d'avoir recruté illégalement des enfants devant la justice. Ces procédures de recrutement doivent inclure :
    • l'obligation d'apporter la preuve de l'âge ;
    • des mesures de protection ;
    • la sensibilisation et l’information des militaires, et notamment des recruteurs sur les lois existantes ;
    • la sensibilisation et l’information, concernant les lois et les mesures de protection existantes, de la population civile, en particulier des enfants susceptibles d'être recrutés, de leurs familles et des organisations intéressées;
    • une réglementation du recrutement dans les milices et autres groupes paramilitaires, y compris les forces de sécurité privées, créés, tolérés ou armés par le gouvernement.54

> Exemple

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Les autres formes d'esclavage et les pratiques analogues à l'esclavage et au travail forcé ou obligatoire

La législation concernant les pires formes de travail des enfants doit prendre en compte toute les autres formes de travail forcé ou obligatoire et les pratiques analogues à l'esclavage, notamment :

  • les enfants qui travaillent comme domestique, qui sont souvent maltraités et humiliés, et les autres travaux ou activités qui soumettent entièrement l’enfant à l’employeur (voir Chapitre VI) ;55
  • l'exploitation sexuelle commerciale (voir La prostitution des enfants et la pornographie) ;
  • toutes les autres formes d'esclavage et de pratiques analogues l'esclavage.

La législation doit, là aussi, garantir que les lois sur le travail forcé ou obligatoire et les pratiques analogues à l'esclavage s'appliquent aux enfants comme aux adultes. La législation doit prévoir que toutes les formes d'esclavage et les pratiques analogues à l'esclavage concernant les enfants sont des infractions pénales (voir Les autres mesures d’application et de mise en œuvre des dispositions concernant les pires formes de travail des enfants).

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La prostitution et la pornographie infantiles

La convention (n° 182) ne donne pas de définition de la prostitution et de la pornographie, mais, avec les mêmes réserves mentionnées à propos de la vente et la traite des enfants, il est utile de se reporter au Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. Selon le Protocole, la prostitution des enfants se définit comme le fait d’utiliser un enfant aux fins d’activités sexuelles contre rémunération ou toute autre forme d’avantage, et la pornographie mettant en scène des enfants comme toute représentation, par quelque moyen que ce soit, d’un enfant s’adonnant à des activités sexuelles explicites, réelles ou simulées, ou toute représentation des organes sexuels d’un enfant, à des fins principalement sexuelles.

La législation portant sur la prostitution et la pornographie infantiles doit :

  • interdire l'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant à des fins de prostitution, de production de matériel pornographique ou pour des spectacles pornographiques;56
  • garantir que les mesures d'application mises en œuvre par la loi sur le travail forcé concernant notamment, le trafic et l'exploitation sexuelle commerciale (voir Chapitre VI), s'appliquent aux enfants ;
  • prévoir des mesures de protection spéciales pour les enfants, associées à celles établies par la loi sur le travail forcé, y compris des sanctions pénales et autres (voir Les autres mesures d’application et de mise en œuvre des dispositions concernant les pires formes de travail des enfants).

> Exemple

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L’utilisation des enfants pour d'autres activités illicites

La législation doit aborder, non seulement la situation des enfants victimes de trafic, de prostitution, d’autres formes dangereuses de travail, mais aussi elle doit explicitement interdire l’utilisation des enfants dans d’autres activités illicites comme :

  • la production et le trafic de stupéfiants ;
  • le trafic d'autres biens ;
  • les jeux de hasard ;
  • la mendicité ;
  • le vol ;
  • d'autres activités criminelles organisées ;57
  • les activités qui impliquent le port ou l’utilisation illégaux d'armes à feu ou d'autres armes.58

La législation qui vise le travail des enfants dans ces types d’activités doit :

  • interdire la participation des enfants à des activités illicites ;
  • prévoir des mesures d’application adaptées, y compris prévoir des sanctions pénales et autres pour ceux qui utilisent, recrutent ou offrent des enfants pour de telles activités.

> Exemple

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Les travaux susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité de l’enfant

Tout travail qui, par sa nature ou les conditions dans lesquelles il s’exerce, est susceptible de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité de l’enfant, doit être interdit et éradiqué. Cette disposition, inscrite dans la convention (n° 182), s’ ajoute à celle déjà en vigueur (et toujours valable) et inscrite dans la convention (n° 138), qui prévoit que les adolescents de moins de 18 ans ne peuvent exercer un travail susceptible de compromettre leur santé, leur sécurité ou leur moralité. Les travaux dangereux, tels qu’envisagés par la convention (n° 182), sont des travaux qui affectent directement la santé, la sécurité ou la moralité de l’enfant, et qui sont identifiés dans la pratique nationale, et doivent faire l’objet d’un programme d’action qui mette en oeuvre des mesures efficaces et immédiates pour l’éliminer .

Il peut donc être établie une liste des principaux travaux dangereux, conformément aux dispositions de la convention (n° 182), élaborée en respectant la convention (n° 138). Cette liste peut être reprise en l’état, ou il peut être déterminée une autre liste, en fonction de l’évaluation des besoins qui aura été réalisée par le gouvernement, en consultation avec les partenaires sociaux.

Pour éliminer et interdire les travaux susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité de l’enfant, la législation peut :

  • interdire l'admission, à tout type d’emploi ou de travail dangereux, des garçons et des filles de moins de 18 ans ;
  • prévoir que les travaux dangereux soient déterminés à l’issue de consultations tripartites, en considérant tout d’abord :
    • les travaux qui exposent les enfants à des sévices physiques, psychologiques ou sexuels ;
    • les travaux qui s’effectuent sous terre, sous l'eau, à des hauteurs dangereuses ou dans des espaces confinés ;
    • les travaux qui s’effectuent avec des machines, du matériel ou des outils dangereux, ou qui impliquent de manipuler ou de porter de lourdes charges ;
    • des travaux qui s’effectuent dans un milieu malsain pouvant, par exemple, exposer des enfants à des substances, des agents ou des procédés dangereux, ou à des conditions de température, de bruit ou de vibrations préjudiciables à leur santé ;
    • les travaux qui s’effectuent dans des conditions particulièrement difficiles, par exemple pendant de longues heures, ou la nuit, ou pour lesquels l'enfant est retenu de manière injustifiée dans les locaux de l'employeur ; 59
  • s’intéresser aux travaux dangereux par nature, et aux travaux qui sont dangereux dans les conditions dans lesquelles ils s’exercent (qui peuvent devenir convenables si ces conditions sont modifiées), en prenant en compte que :
    • les filles et les garçons peuvent être exposés à des dangers différents ;
    • aucune catégorie de travaux ni aucun secteur économique ne sont a priori exclus ;
  • s’assurer que la liste sera régulièrement révisée et mise à jour, à cette fin la législation peut :
    • confier à une autorité compétente précise le soin déterminer les types de travaux dangereux (plutôt que de définitivement arrêter une liste inscrite dans la loi même) ;
    • organiser une procédure pour déterminer les types de travaux dangereux, en déléguant par exemple auprès du gouvernement un comité consultatif qui garantira une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes représentants les partenaires sociaux, et la participation des autres organisations concernées, des experts en matière de sécurité et d’hygiène au travail, des pédiatres, etc.
  • prévoir des sanctions pénales, civiles et administratives pour ceux qui violent ces dispositions.

Des exemples des types de travaux que les Etats ont considérés comme dangereux pour les enfants et les adolescents sont cités dans, Le travail des enfants : l'intolérable en point de mire, p.49, annexe 5.60

> Exemple

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La situation particulière de certains enfants et le travail caché

La législation peut établir des mesures destinées aux enfants particulièrement exposés,61 à savoir :

  • les filles ;62
  • les plus jeunes enfants ;63
  • les enfants spécialement vulnérables ou ayant des besoins particuliers64 (comme les enfants handicapés ou les enfants des rues 65);

> Exemple

  • les enfants appartenant à des groupes minoritaires ;66

> Exemple

  • les enfants qui exécutent des travaux dans des situations qui échappent aux regards extérieurs,67 comme par exemple les enfants qui travaillent comme domestiques.68

Les mesures prises à cet effet doivent avoir pour objectif :

  • d'identifier les communautés dans lesquelles les enfants sont particulièrement exposés, et de travailler avec elles ;69
  • de s’intéresser particulièrement aux enfants exposés à un risque spécial, lorsque seront recensées les situations de travail des enfants et à établis les programmes d’action pour lutter contre le travail des enfants.70

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L’application et la mise en oeuvre

Pour que les dispositions relatives aux pires formes de travail des enfants puissent être appliquées et mises en œuvre, la législation doit prévoir des sanctions pénales et d’autres types de sanctions, et doit favoriser le développement d'autres mesures, comme par exemple, celles qui visent à soustraire les enfants qui sont victimes de ces formes de travail, et celles qui instaurent des programmes pour leur réadaptation, en s’attachant aux enfants particulièrement exposés.

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Les autres mesures d'application et de mise en œuvre des dispositions concernant les pires formes de travail des enfants

La législation doit favoriser les mesures qui visent à :

  • identifier et dénoncer les pires formes de travail des enfants ;71 (voir Le recueil d’informations, l’inspection du travail et les autres mesures de contrôle)
  • empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants ;72 (voir Les mesures de prévention et de protection)
  • soustraire les enfants des pires formes de travail des enfants, et les protéger des représailles ;73
  • assurer la réadaptation et l'intégration sociale des enfants soustraits des pires formes de travail des enfants, par des mesures qui répondent à leurs besoins, tant en matière d’éducation que sur le plan physique et psychologique ;74
  • assurer l’accès à l’éducation de base gratuite et, lorsque c'est possible et approprié, à la formation professionnelle pour tous les enfants soustraits des pires formes de travail des enfants ;75
  • prendre spécifiquement en compte les enfants particulièrement exposés et vulnérables ;76
  • garantir que tous les programmes d’action sont élaborés et mis en œuvre en consultation avec les institutions publiques compétentes, ainsi que les organisations d'employeurs et de travailleurs, et le cas échéant, en prenant en considération les vues d'autres groupes intéressés77 (tels que les associations d'enfants, de parents, les organisations communautaires, etc.78) ;
  • établir une procédure de recours efficace et
  • améliorer la coopération et /ou l'assistance au niveau international notamment par :
    • l’adoption de mesures de soutien au développement économique et social, aux programmes d’éradication de la pauvreté et à l’ éducation universelle ;79
    • la création de mécanismes permettant de rassembler et d'échanger avec les autres Etats des informations sur les infractions pénales relatives au travail des enfants, y compris celles impliquant des réseaux internationaux.80

Les autres mesures essentielles à l'application et à la mise en œuvre des dispositions relatives aux pires formes de travail des enfants comprennent, évidemment, l’établissement de systèmes d'inspection du travail efficaces et l'adoption de programmes sociaux et économiques destinés à prévenir le travail des enfants et à protéger les enfants qui travaillent. Ces mesures sont abordées plus haut, en relation avec les mesures qui visent à éliminer toutes les formes de travail des enfants.

> Exemple


1. Convention (n° 138), art. 2(3).

2. Ibid (n° 138), art. 2(4).

3. Ibid (n° 138), art. 7(1).

4. Ibid (n° 138), art. 7(2).

5. Ibid (n° 138), art. 9(1).

6. Bequele, p. 23-27.

7. Recommandation (n° 190), para. 5(1).

8. Recommandation (n° 190), para. 5(2).

9. Recommandation (n° 190), para. 5(3).

10. Bequele, p. 24, 43-57.

11. Recommandation (n° 146), para. 14(1)(a).

12. Recommandation (n° 146), para. 14(2).

13. Recommandation (n° 146), para. 14(3).

14. Recommandation (n° 190), para. 15(g).

15. Recommandation (n° 146), para. 16.

16. Convention (n° 138), art. 9(3).

17. Recommandation (n° 190), para. 15(i).

18. Recommandations sur l'application des lois contre la servitude pour dettes des enfants, OIT, 1992, p. 7-8.

19. Ibid, p. 7-8.

20. Voir Bequele, p. 31.

21. Bequele, p. 29-41.

22. Recommandation (n° 146), para. 2(a).

23. Bequele, p. 33.

24. Recommandation (n° 146), para. 2(b).

25. Recommandation (n° 146), para. 2(c).

26. Bequele, p. 34.

27. Bequele, p. 34-35.

28. Recommandation (n° 146), para. 13(1)(b).

29. Recommandation (n° 146), para. 13(1)(c).

30. Recommandation (n° 146), para. 13(1)(d).

31. Recommandation (n° 146), para. 13(1)(a).

32. Recommandation (n° 146), para. 13(1)(e).

33. Bequele, p. 38.

34. Bequele, p. 38.

35. Convention (n° 138), art. 2(3).

36. Convention (n° 182), art. 7(2)(c) et Bequele, p. 130-133.

37. Recommandation (n° 146), para. 4.

38. Recommandation (n° 146), para. 2(d).

39. Bequele, p. 38.

40. Bequele, p. 141.

41. Recommandation (n° 190), para. 15(j).

42. Bequele, p. 40.

43. Convention (n° 182), art. 6(2), Recommandation (n° 190), para. 2, et Bequele, p. 43-54.

44. Pour avoir un aperçu de l'ampleur du problème des enfants victimes des formes de travail les plus extrêmes, voir le document "Le travail des enfants : l'intolérable en point de mire", Rapport VI(1), CIT, 86e session, Genève, 1998, p. 3-22.

45. Convention (n° 182), art. 3.

46. Convention (n° 182), art. 1.

47. Convention (n° 182), art. 1.

48. Convention (n° 182), art. 2.

49. Convention (n° 182), art. 7(d).

50. Convention (n° 182), art. 3(a).

51. Convention supplémentaire des Nations Unies relative à l'abolition de l'esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l'esclavage, art. 1(a).

52. Ibid, art. 1(b).

53. Convention (n° 29), art. 11(1).

54. Document intitulé "Principes du Cap concernant la prévention du recrutement d’enfants dans les forces armées, la démobilisation et la réinsertion sociale des enfants soldats en Afrique", qui a été adopté le 30 avril 1997, dans le cadre du suivi de l’étude des Nations Unies concernant les conflits armés sur les enfants, qui a donné lieu à l’organisation par l’UNICEF, en coopération avec le Sous-Groupe des ONG sur les enfants réfugiés et les enfants dans les conflits armés, d’un atelier et d’un colloque sur les enfants soldats en Afrique du 23 au 30 avril 1997 au Cap (Afrique du Sud).

55. La Commission du travail des enfants de l'OIT a convenu d’inclure dans la catégorie des "pratiques analogues à l'esclavage" les activités ou les travaux exécutés dans des conditions où les enfants pouvaient faire l’objet de mauvais traitements ou de vexations" et "tout les types de travail ou d’activité dans le cadre desquels l’enfant est livré à l’employeur et en est totalement dépendant". Rapport de la Commission du travail des enfants, CIT, 86e session, Genève, 1998, para. 130.

56. Convention (n° 182), art. 3(b).

57. Voir le Rapport de la Commission du travail des enfants, CIT, 86e session, Genève, 1998, para. 134.

58. Recommandation (n° 190), para. 12(c).

59. Recommandation (n° 190), paras. 3 and 4.

60. Rapport VI(1), Conférence internationale du Travail, 86e session, Genève, 1998.

61. Convention (n° 182), art. 7(d).

62. Convention (n° 182), art. 7(2)(e).

63. Recommandation (n° 190), para. 2(i).

64. Recommandation (n° 190), para. 2(iv).

65. Rapport de la Commission du travail des enfants, CIT, 87e session, Genève, 1999, para. 228, et Rapport du Comité du travail des enfants, CIT, 86e session, Genève, 1998, para. 256.

66. Ibid, para. 228.

67. Recommandation (n° 190), para. 2(iii).

68. Rapport de la Commission du travail des enfants, CIT, 87e session, Genève, 1999, para. 222, et CIT, 86e session, Genève, 1998, para. 130.

69. Recommandation (n° 190), para. 2(d).

70. Bequele, p. 23-25.

71. Recommandation (n° 190), para. 2.

72. Convention (n° 182), art. 7(2)(a).

73. Convention (n° 182), art. 7(2)(b).

74. Convention (n° 182), art. 7(2)(b), et Convention des Nations Unies relatives au droit de l'enfant, art. 39.

75. Convention (n° 182), art. 7(2)(c).

76. Convention (n° 182), art. 7(2)(d).

77. Convention (n° 182), art. 6.

78. Recommandation (n° 190), para. 2.

79. Convention (n° 182), art. 8.

80. Recommandation (n° 190), para. 11 et 16. La Convention des Nations Unies relatives au droit de l'enfant demande également les Etats membres de prendre toutes les mesures bilatérales et multilatérales appropriées pour prévenir l'enlèvement, la vente ou le trafic d'enfants ; art. 35.

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